Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Les associations Radio Cactus et Radio Nord Isère ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions du 18 décembre 2018 par lesquelles le ministre de la culture a rejeté leur demande de subvention au titre de l'année 2018, ainsi que les décisions du 18 avril 2019 rejetant leur recours gracieux.
Par un jugement nos 1912854/5-1-1912855/5-1 du 21 janvier 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 mars 2021 et 30 septembre 2021 sous le n° 21PA01261, l'association Radio Cactus, représentée par Me Rambaud-Groleas, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 par laquelle le ministre de la culture a rejeté sa demande de subvention au titre de l'année 2018 ainsi que la décision du 18 avril 2019 rejetant son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 18 décembre 2018 a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que l'administration ne lui a pas permis de régulariser sa demande de subvention après avoir constaté que son dossier était incomplet ;
- cette décision est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle mentionne une demande de subvention d'exploitation ainsi qu'une demande de subvention sélective à l'action radiophonique, alors qu'elle n'a sollicité que la première ;
- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que la communication des documents financiers (bilan, compte d'exploitation) est seule indispensable pour assurer la recevabilité de sa demande de subvention d'exploitation ; elle méconnaît ainsi l'esprit de la loi du 30 septembre 1986 en la privant de moyens financiers ;
- elle a transmis en temps utile les documents nécessaires à l'instruction de sa demande.
Par un mémoire enregistré le 18 juin 2021, la ministre de la culture conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'association requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
La clôture de l'instruction a été fixée au 29 octobre 2021.
II. Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 mars 2021 et 30 septembre 2021 sous le n° 21PA01262, l'association Radio Nord Isère, représentée par Me Rambaud-Groleas, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 par laquelle le ministre de la culture a rejeté sa demande de subvention au titre de l'année 2018 ainsi que la décision du 18 avril 2019 rejetant son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 18 décembre 2018 a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que l'administration ne lui a pas permis de régulariser sa demande de subvention après avoir constaté que son dossier était incomplet ;
- cette décision est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle mentionne une demande de subvention d'exploitation ainsi qu'une demande de subvention sélective à l'action radiophonique, alors qu'elle n'a sollicité que la première ;
- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que la communication des documents financiers (bilan, compte d'exploitation) est seule indispensable pour assurer la recevabilité de sa demande de subvention d'exploitation ; elle méconnaît ainsi l'esprit de la loi du 30 septembre 1986 en la privant de moyens financiers ;
- elle a transmis en temps utile les documents nécessaires à l'instruction de sa demande.
Par un mémoire enregistré le 18 juin 2021, la ministre de la culture conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'association requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
La clôture de l'instruction a été fixée au 3 décembre 2021.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
- le décret n° 2006-1067 du 25 août 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Les associations Radio Cactus et Radio Nord Isère exploitent des radios locales en Isère et ont sollicité auprès du ministre de la culture l'octroi d'une subvention d'exploitation au titre de l'année 2018, versée par le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER), sur le fondement de l'article 2 du décret du 25 août 2006 pris pour l'application de l'article 80 de la loi du 30 septembre 1986. Par deux décisions du 18 décembre 2018, le ministre de la culture a rejeté les demandes de subvention. Les deux associations ont formé des recours gracieux le 19 février 2019, qui ont été rejetés le 18 avril 2019. Elles demandent à la cour d'annuler le jugement numéro 1912854-1912855/5-1 du 21 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 18 décembre 2018 et du 18 avril 2019.
Sur la jonction :
2. Les requêtes enregistrées sous les numéros 21PA01261 et 21PA01262, présentées par les associations Radio Cactus et Radio Nord Isère, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu par suite de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. D'une part, aux termes de l'article 80 de la loi du 30 septembre 1986 : " Les services de radio par voie hertzienne mentionnés au quinzième alinéa de l'article 29, lorsque leurs ressources commerciales provenant de messages diffusés à l'antenne et présentant le caractère de publicité de marque ou de parrainage sont inférieures à 20 % de leur chiffre d'affaires total bénéficient d'une aide selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes du quinzième alinéa de l'article 29 de la même loi : " Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille, sur l'ensemble du territoire, à ce qu'une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association et accomplissant une mission de communication sociale de proximité, entendue comme le fait de favoriser les échanges entre les groupes sociaux et culturels, l'expression des différents courants socioculturels, le soutien au développement local, la protection de l'environnement ou la lutte contre l'exclusion. ". Par ailleurs, aux termes de l'article 2 du décret du 25 août 2006 pris pour l'application de l'article 80 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 : " L'aide financière, prévue à l'article 80 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée, aux services de radio par voie hertzienne mentionnés au même article comprend les subventions d'installation, d'équipement, d'exploitation et la subvention sélective à l'action radiophonique. La subvention d'exploitation et la subvention sélective à l'action radiophonique ont le caractère de subvention de fonctionnement. (...) ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " (...) / La subvention d'exploitation est attribuée aux services de radio par voie hertzienne qui en font la demande au plus tard le 15 avril de l'année suivant celle de la clôture de l'exercice et qui remplissent les deux conditions suivantes : / 1° Proposer une programmation d'intérêt local, spécifique à la zone géographique de diffusion, d'une durée quotidienne d'au moins quatre heures entre 6 heures et minuit hors programmes musicaux dépourvus d'animation ou fournis par un tiers ; / 2° Justifier que cette programmation est réalisée, pour la durée minimale et dans les conditions mentionnées au 1°, par des personnels d'antenne et dans des locaux situés dans cette zone de diffusion. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 9 dudit décret : " Les modalités de présentation des demandes d'aide et la liste des pièces justificatives sont établies par le ministre chargé de la communication, après avis de la commission prévue à l'article 15 du présent décret. / Les demandeurs justifient de la régularité de leur situation au regard des administrations fiscales et des organismes de sécurité sociale ainsi que des autres organismes sociaux dont relèvent les personnels employés. / Les demandes de subvention d'exploitation, d'équipement et sélective sont accompagnées du compte de résultat et du bilan de l'année précédente de l'association qui édite le service de radio par voie hertzienne, établis conformément au plan comptable général adapté aux associations. La régularité du compte de résultat et du bilan et leur sincérité sont attestées par un expert-comptable. / Les documents fournis à l'appui d'une demande de subvention précisent la répartition du chiffre d'affaires par service de radio exploité et distinguent l'activité radiophonique par voie hertzienne de toute autre activité. Tout complément paraissant nécessaire à l'instruction de la demande peut être sollicité. (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration : " Lorsqu'une demande adressée à l'administration est incomplète, celle-ci indique au demandeur les pièces et informations manquantes exigées par les textes législatifs et réglementaires en vigueur. Elle fixe un délai pour la réception de ces pièces et informations. (...) ". Ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à l'application de dispositions réglementaires fixant, comme en l'espèce, une date butoir après laquelle une demande peut être rejetée du fait de son caractère incomplet. Elles imposent en revanche à l'administration, à peine d'illégalité d'une décision de rejet motivée par l'absence des pièces qui devaient accompagner la demande, d'inviter son auteur à fournir les pièces manquantes avant la date limite, si cette demande lui est parvenue en temps utile pour qu'il puisse raisonnablement être procédé à l'examen du caractère complet du dossier et à ladite régularisation avant la date limite de dépôt des demandes complètes.
5. En premier lieu, les demandes de subvention formées par les associations requérantes, datées du 12 avril 2018, n'ont été adressées aux services du ministère de la culture que le samedi 14 avril 2018, soit la veille du dernier jour imparti pour le dépôt des demandes, fixé au 15 avril par les dispositions précitées de l'article 5 du décret du 25 août 2006. L'administration soutient que ces demandes n'étaient pas accompagnées de l'ensemble des pièces justificatives dont la liste avait été fixée conformément aux dispositions de l'article 9 dudit décret. Un aussi bref délai ne permettant pas qu'une procédure de régularisation pût être mise en œuvre avant le 15 avril 2018, le ministre de la culture a pu, sans entacher ses décisions d'un vice de procédure, rejeter les demandes sans avoir à inviter les associations pétitionnaires à les régulariser.
6. En deuxième lieu, la circonstance que les décisions du 18 décembre 2018 mentionnent de manière surabondante que les associations requérantes ont sollicité, outre le versement de la subvention d'exploitation prévue à l'article 2 du décret précité, une subvention sélective à l'action radiophonique, est sans incidence sur la légalité de ces décisions, alors au demeurant qu'il n'est pas contesté, comme le fait valoir la ministre en défense, que les dossiers comprenaient une note d'activité, pièce à fournir à l'appui d'une demande de subvention sélective à l'action radiophonique.
7. En troisième lieu, il résulte des dispositions combinées des articles 5 et 9 du décret du 25 août 2006 que le ministre de la culture établit la liste des pièces à fournir pour démontrer le respect des conditions posées à l'article 5 du même décret. Les modalités de présentation des demandes d'aide et la liste des pièces justificatives sont établies chaque année par le ministre chargé de la communication, après avis de la commission du FSER. Il ressort des pièces du dossier que, pour l'année 2018, la commission du FSER a été consultée le 15 février 2018, avant que les éléments sollicités ne soient rendus publics sur la section du site internet du ministère de la culture dédiée au FSER. Contrairement à ce que soutiennent les associations requérantes, le dossier ainsi demandé ne devait pas être constitué des seuls documents financiers, lesquels ne suffisent pas à établir le respect des conditions d'octroi de la subvention d'exploitation. Le ministre n'a donc pas commis d'erreur de droit en exigeant, outre des éléments financiers, l'ensemble des pièces justificatives dont la liste avait été publiée.
8. En dernier lieu, si les associations requérantes soutiennent qu'il ne peut leur être reproché de ne pas avoir produit d'attestation sur l'honneur dès lors qu'elles établiraient leur respect d'une programmation d'intérêt local par la production de leur grille de programmation, il est constant que le dossier de demande de subvention d'exploitation qu'elles ont transmis au titre de l'année 2018 ne comprenait pas la " fiche 1 page 4 ", dont la production était obligatoire. Les associations ne justifient pas, par les pièces qu'elles produisent, qu'elles auraient transmis en temps utile l'ensemble des documents demandés, alors que la ministre de la culture produit en défense les dossiers reçus, dans lesquels ne figure pas, notamment, la " fiche 1 page 4 " dûment remplie, comportant l'attestation sur l'honneur relative à la programmation d'intérêt local. Par suite, le ministre de la culture n'a pas méconnu les dispositions précitées de la loi du 30 septembre 1986 et du décret du 25 août 2006 en rejetant les demandes de subventions d'exploitation présentées par les associations requérantes.
9. Il résulte de tout ce qui précède que les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 18 décembre 2018 et du 18 avril 2019 du ministre de la culture.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par les associations requérantes et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Les requêtes des associations Radio Cactus et Radio Nord Isère sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Radio Cactus, à l'association Radio Nord Isère et à la ministre de la culture.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère,
- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.
La rapporteure,
G. A...Le président,
I. LUBEN
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne à la ministre de la culture, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 21PA01261, 21PA01262