Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 mars 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2108035/6-3 du 14 octobre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 10 novembre 2021, M. C..., représenté par Me Lefort, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2108035/6-3 du 14 octobre 2021 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 mars 2021 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée et entachée de défaut d'examen de sa situation individuelle ;
- elle méconnaît l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale à raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de refus de délai de départ volontaire supérieur à trente jours est illégale à raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ;
- elle est entaché d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation ;
Par une ordonnance du 26 juillet 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er septembre 2022 à 12h.
Un mémoire en défense, présenté par le préfet de police, a été enregistré le 2 septembre 2022, soit postérieurement à la clôture de l'instruction, et n'a pas été communiqué.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 14 janvier 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant soudanais, né le 15 juin 1989 est entré irrégulièrement en France le 15 août 2016, selon ses déclarations. Il a présenté une demande d'asile le 20 septembre 2018, qui a été rejetée par une décision du 28 septembre 2020 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Son recours contre cette décision a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 5 mars 2021. Tirant les conséquences de l'ensemble de ces décisions, le préfet de police a, par un arrêté du 5 mars 2021, fait obligation à M. C... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 14 octobre 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté son recours tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 mars 2021.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Le premier juge a, au point 10 de son jugement, répondu au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, en relevant que le requérant ne produisait aucune pièce pour établir la réalité des risques qu'il invoque, dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile n'ont, au demeurant, pas retenu l'existence, a suffisamment motivé le jugement attaqué. Ainsi le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué ne peut qu'être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
4. En premier lieu, la décision contestée vise les textes dont elle fait application, notamment les dispositions et stipulations applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle comporte également les considérations de fait qui en constituent le fondement. Par suite, cette décision est suffisamment motivée. Cette motivation révèle, par ailleurs, qu'il a été procédé à un examen de sa situation personnelle.
5. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, désormais repris à l'article L. 611-3 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
6. D'une part, si M. C... fait valoir qu'il a déposé une demande de titre de séjour en raison de son état de santé, cet élément est postérieur à l'arrêté attaqué. D'autre part, M. C... soutient que son poumon gauche est détruit à raison de lésions de dilatations des bronches d'allure kystiques et qu'il est dyspnéique à l'effort. Toutefois les éléments médicaux s'ils rappellent l'état de santé du requérant et indiquent qu'un suivi médical est nécessaire ne donnent aucune indication quant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité que la mesure d'éloignement pourrait avoir sur l'état de santé de M. C... ou quant à la possibilité pour lui de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions mentionnées au point précédent doit être écarté. Pour les mêmes raisons le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur la décision fixant le pays de destination :
7. En premier lieu, l'obligation de quitter le territoire n'étant pas, ainsi qu'il a été dit précédemment, entachée d'excès de pouvoir, le moyen par lequel il est excipé de son illégalité, à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté.
8. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, désormais repris à l'article L. 721-4 du même code : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; (...) / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Ce dernier texte stipule que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
9. Si M. C... soutient qu'il encourt des risques pour sa vie en cas de retour au Soudan, les éléments produits ne permettent pas d'établir le caractère personnel, réel et effectif des risques encourus alors, au demeurant, que sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée tant par l'office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté.
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
10. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. ".
11. Si M. C... se prévaut de son état de santé, il n'établit pas, par ses allégations, l'existence de circonstances exceptionnelles qui justifieraient que lui soit accordé par le préfet de police un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais liés à l'instance ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministère de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- Mme Jurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 novembre 2022
La rapporteure,
E. B...Le président,
C. JARDIN
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA05765 2