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14/12/2022 | FRANCE | N°22PA00851

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 14 décembre 2022, 22PA00851


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 10 mars 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2012299 du 20 janvier 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par un

e requête, enregistrée le 23 février 2022, M. B..., représenté par

Me Perdereau, demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 10 mars 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2012299 du 20 janvier 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 février 2022, M. B..., représenté par

Me Perdereau, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 janvier 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 10 mars 2020 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Seine Saint Denis de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Seine Saint Denis de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière, dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été saisie de sa situation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'il réside en France depuis plus de dix ans ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et professionnelle au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est, par voie d'exception, illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien, né en 1975, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour le 23 janvier 2019. Par un arrêté du 10 mars 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. B... fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission [du titre de séjour] mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans / (...) ".

3. En premier lieu, si M. B... soutient qu'il réside en France depuis plus de dix ans, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé est entré sur le sol national le 27 mars 2010, soit depuis moins de dix ans à la date de l'arrêté attaqué. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis était tenu, en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande.

4. En deuxième lieu, en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14 précité, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

5. S'il ressort des pièces du dossier que M. B... justifie d'une activité salariée de manœuvre intérimaire pour le compte de la société " Tom Assistance " entre août 2015 et septembre 2018 sous une fausse identité, puis de la même activité professionnelle sous sa propre identité pour le compte de la même société en février 2019 et pour le compte de la société " Menco Paris " entre mars 2019 et septembre 2020, l'exercice, même pendant près de cinq ans, de fonctions telles que celles qui ont été exercées par le requérant, dont il n'est pas établi qu'elles impliqueraient une spécialisation ou une technicité particulières, non plus que la circonstance que l'intéressé est titulaire de deux promesses d'embauche émanant de ces sociétés, ne sont suffisants pour tenir lieu de motifs exceptionnels au sens et pour l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait tissé des liens, personnels ou affectifs, importants sur le sol national, alors qu'il est constant qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident notamment son épouse et leurs deux enfants mineurs. Ainsi, cette circonstance, de même que l'insertion professionnelle de

M. B..., et alors même que les pièces produites par l'intéressé seraient suffisantes pour corroborer sa résidence alléguée sur le territoire français depuis près de dix ans de manière continue ou habituelle, ne constituent pas des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens du même article L. 313-14. Dans ces conditions, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de faire droit à la demande d'admission exceptionnelle au séjour de M. B..., prévue à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, ce moyen doit être écarté.

6. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier ni de ce qui a été dit au point précédent que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui a examiné la situation de M. B... au regard tant de son activité professionnelle que des circonstances de sa vie privée et familiale, aurait entaché la décision attaquée d'un défaut d'examen de sa situation. Ce moyen doit, dès lors, être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 6 que le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. B..., ainsi que celui tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

8. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger / (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français / (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français / (...) ".

9. Il ressort des termes mêmes des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux.

10. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

11. M. B... soutient que, pour prononcer à son encontre l'interdiction de retour sur le territoire français, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas pris en compte la durée de sa présence en France, ni la réalité et la stabilité de son insertion professionnelle, ni encore la nature et l'ancienneté de ses liens sur le sol national. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'après avoir considéré que le requérant ne peut se prévaloir d'une longue présence habituelle et continue sur le territoire national depuis son arrivée le 27 mars 2010 et qu'il ne justifie pas d'une insertion professionnelle effective et suffisamment stable depuis 2019 ni d'une perspective réelle d'embauche, le préfet de la Seine-Saint-Denis a prononcé l'interdiction de retour en litige en relevant également que l'intéressé s'est soustrait à l'exécution d'une mesure d'éloignement prononcée à son encontre le 21 juillet 2010 par le préfet des Hauts-de-Seine et qu'il ne justifie pas de liens personnels et familiaux anciens et stables en France alors que, par ailleurs, son épouse, leurs deux enfants mineurs, ses parents et sa fratrie vivent au Mali où il a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans. Dans ces conditions, et alors même que M. B... attesterait de sa présence en France depuis près de dix ans ainsi que d'une activité salariée pendant près de cinq ans, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne peut être regardé comme ayant entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. Par suite, ce moyen doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles relatives aux frais d'instance doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repuseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2022.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,

C. JARDIN

La greffière,

L. CHANA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00851


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00851
Date de la décision : 14/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme BREILLON
Avocat(s) : PERDEREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-12-14;22pa00851 ?
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