Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 13 septembre 2021 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé d'enregistrer sa demande de titre de séjour.
Par une ordonnance n° 2117086 du 8 juillet 2022, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Lasfargeas, demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 8 juillet 2022 ;
2°) d'annuler la décision du 13 septembre 2021 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un récépissé de sa demande de renouvellement de titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un récépissé de demande de renouvellement de titre de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la régularité de l'ordonnance attaquée :
- le Tribunal administratif de Montreuil n'a pas statué sur les conclusions à fin d'annulation dont il était réellement saisi ;
S'agissant de la décision attaquée :
- elle est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., ressortissant malien, né en 1964, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " salarié ", lequel venait à expiration le 1er septembre 2021. Par un courrier du 14 août 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a invité M. A... à se rendre, le 13 septembre 2021, dans les locaux de la préfecture en vue de déposer le dossier complet de sa demande de renouvellement de titre de séjour. S'étant présenté au rendez-vous du 13 septembre 2021, il est constant que l'intéressé s'est vu opposer le même jour un refus verbal de lui délivrer un récépissé de sa demande. M. A... fait appel de l'ordonnance du 8 juillet 2022 par laquelle le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté une demande tendant à l'annulation d'une décision verbale du 13 septembre 2021 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait refusé d'enregistrer la demande de renouvellement de son titre de séjour.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. La demande de M. A... devant le Tribunal administratif de Montreuil tendait uniquement à l'annulation de la décision verbale du 13 septembre 2021 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un récépissé de sa demande de renouvellement de titre de séjour. Par suite, c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a regardé la demande de M. A... comme tendant à l'annulation d'une décision verbale du 13 septembre 2021 par laquelle le même préfet aurait refusé d'enregistrer la demande de renouvellement de son titre de séjour. Le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil s'est ainsi mépris sur la nature de la décision contestée et son ordonnance doit, dès lors, être annulée.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Montreuil.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. L'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois doit être titulaire d'un visa de long séjour ou d'un titre de séjour. Aux termes de l'article L. 431-3 de ce code : " La détention d'un document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour (...) autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour. Sous réserve des exceptions prévues par la loi ou les règlements, ces documents n'autorisent pas leurs titulaires à exercer une activité professionnelle ".
5. En vertu des articles R. 431-2 et R. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la demande de titre de séjour s'effectue au moyen d'un téléservice pour les catégories de titres de séjour désignées à l'annexe 9 à ce code, au nombre desquelles ne figurent pas les demandes de titres de séjour portant la mention " salarié ". La demande de titre de séjour, qui ne figure pas dans cette annexe, doit être déposée, soit en préfecture, soit par voie postale dans l'hypothèse où l'autorité administrative l'aurait autorisée pour des catégories de titre déterminées. Selon les articles R. 431-4 à R. 431-8 de ce code, elle est présentée par l'intéressé " dans les deux mois de son entrée en France " ou, s'il séjournait déjà en France, dans des délais que ces articles définissent. S'agissant de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sans recours au téléservice mentionné à l'article R. 431-2 du même code, l'article R. 431-12 dudit code prévoit que " L'étranger admis à souscrire une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour se voit remettre un récépissé qui autorise sa présence sur le territoire pour la durée qu'il précise (...) ". Enfin, en vertu des dispositions combinées des articles R. 431-14 et R. 431-15 du même code, le récépissé d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour portant la mention " salarié " autorise son titulaire à exercer une activité professionnelle.
6. En dehors du cas d'une demande à caractère abusif ou dilatoire, l'autorité administrative chargée d'instruire une demande de titre de séjour ne peut refuser de l'enregistrer, et de délivrer le récépissé y afférent, que si le dossier présenté à l'appui de cette demande est incomplet.
En ce qui concerne l'exception de non-lieu opposée en première instance :
7. Le préfet de la Seine-Saint-Denis soutient, à l'appui de son mémoire en défense présenté en première instance, que la décision attaquée est devenue sans objet dès lors que M. A... a été invité à se présenter le 14 février 2022, soit postérieurement à l'introduction de sa requête de première instance, dans les locaux de la préfecture afin d'y déposer sa demande de renouvellement de titre de séjour. Toutefois, la convocation de l'étranger par l'autorité administrative à la préfecture afin qu'il y dépose sa demande de titre de séjour, n'a d'autre objet que de fixer la date à laquelle il sera, en principe, procédé à l'enregistrement de sa demande dans le cadre de la procédure devant conduire à une décision sur son droit au séjour. Dans ces conditions, la convocation du 14 février 2022, qui n'a pas pour objet ni n'a eu pour effet la remise à M. A... d'un récépissé de sa demande de renouvellement de titre de séjour, ne peut être regardée comme ayant implicitement retiré ou abrogé la décision attaquée. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas fondé à soutenir qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande d'annulation de M. A....
En ce qui concerne la légalité de la décision attaquée :
8. M. A... soutient que, lors du refus verbal qui lui a été opposé le 13 septembre 2021, il ne lui a pas été indiqué que son dossier aurait été incomplet. Le préfet de la Seine-Saint-Denis ne le conteste pas sérieusement à l'appui de son mémoire en défense présenté en première instance. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, le refus verbal de délivrer un récépissé de demande de renouvellement de titre de séjour à M. A..., qui est réputé avoir déposé un dossier complet le 13 septembre 2021, est entaché d'illégalité. Par suite, M. A... est fondé à demander l'annulation de la décision contestée.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution / (...) ". Aux termes de l'article L. 911-3 de ce code : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ".
10. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'annulation de la décision attaquée implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans la situation de droit ou de fait de M. A..., qu'un récépissé l'autorisant à séjourner et à travailler sur le territoire français lui soit délivré. Il y a lieu, à cet effet, d'impartir au préfet de la Seine-Saint-Denis un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par M. A....
Sur les frais liés au litige :
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 2117086 du président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil du 8 juillet 2022 et la décision du 13 septembre 2021 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de délivrer à M. A... un récépissé de sa demande de renouvellement de titre de séjour, sont annulées.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. A... un récépissé l'autorisant à séjourner et à travailler sur le territoire français dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. B... A..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Segrétain, premier conseiller,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 février 2023.
Le rapporteur,
M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,
C. JARDIN
La greffière,
L. CHANA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA03373