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17/03/2023 | FRANCE | N°22PA03222

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 17 mars 2023, 22PA03222


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2102733 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.


Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2102733 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 13 juillet 2022 et 21 juillet 2022, M. A... D..., représenté par Me Boy, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 7 juin 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné, a assorti ces décisions d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et a procédé à son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il justifie remplir les conditions ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observation en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 27 janvier 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. A... D..., ressortissant tunisien né le 28 avril 1977, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et a assorti ces décisions d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. A... D... relève régulièrement appel du jugement du 7 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, la situation des ressortissants tunisiens souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est régie par les stipulations de l'accord franco-tunisien, notamment son article 3, lesquelles font obstacle, dans cette mesure, à l'application à ces mêmes ressortissants de celles des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui portent sur le même objet. L'article L. 313-14 de ce code relatif à la régularisation exceptionnelle au titre d'une activité salariée ne trouve ainsi pas à s'appliquer. Il ressort en l'espèce des termes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Seine-Saint-Denis a examiné la demande de titre de séjour présentée par M. A... D... en qualité de salarié sur le fondement des seules stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien en lui opposant le défaut de présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes et de certificat médical délivré par le médecin agrée, conditions requises par ces stipulations. Par ailleurs, le préfet n'a pas fait usage du pouvoir discrétionnaire de régularisation dont il dispose pour apprécier l'opportunité de délivrer à M. A... D... un titre de séjour à raison de l'activité salariée dont il se prévalait. Par suite, il ne peut utilement soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé serait entaché d'une d'erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions alors en vigueur de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au titre desquelles sa demande n'a pas été examinée.

3. En deuxième lieu, si M. A... D... soutient qu'il séjourne en France de manière ininterrompue depuis le mois de mars 2011, il ne justifie pas l'ancienneté de sa résidence habituelle sur le territoire avant 2016, notamment au titre de l'année 2014, ainsi qu'il a été relevé au point 3 du jugement attaqué, compte tenu du nombre très limité et de la faible valeur probante des pièces qu'il présente pour justifier de sa présence en France au cours de cette période et qui sont constituées d'une facture d'achat et d'un courrier bancaire. Il ne conteste pas que sa femme et ses deux enfants mineurs résident en Tunisie où il a lui-même vécu au moins jusqu'à l'âge de trente-quatre ans. Par ailleurs, s'il se prévaut de son intégration professionnelle, la circonstance qu'il a exercé une activité salariée dans la restauration depuis 2015, pour de courtes périodes ou de manière continue au cours de l'année 2016 et depuis le mois de septembre 2019, ne permet pas de retenir que le préfet, dans le cadre du pouvoir de régularisation dont il dispose, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle en refusant de lui délivrer un titre de séjour. Ce moyen doit par suite être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

5. Ainsi qu'il a été énoncé au point 3 du présent arrêt, M. A... D... ne justifie ni de l'ancienneté de son séjour en France, ni qu'il serait dépourvu d'attaches familiales en Tunisie et ne démontre aucunement que le centre de ses intérêts privés et familiaux aurait été établi sur le territoire français, en l'absence de toute précision sur les liens dont il entend se prévaloir. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en l'obligeant à quitter le territoire français sans délai. Ce moyen doit ainsi être écarté.

6. En dernier lieu aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à la date de l'arrêté attaqué : " (...) III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que, lorsque le préfet prend, à l'encontre d'un étranger, une décision portant obligation de quitter le territoire français ne comportant aucun délai de départ, ou lorsque l'étranger n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour satisfaire à cette obligation, il appartient au préfet d'assortir sa décision d'une interdiction de retour sur le territoire français, sauf dans le cas où des circonstances humanitaires y feraient obstacle.

8. En l'espèce, eu égard à l'ensemble des circonstances ci-dessus exposées aux points 3 et 5 et dans la mesure où M. A... D..., qui a fait l'objet les 9 mai 2012 et 7 janvier 2015 de deux précédentes mesures d'éloignement du territoire français qui n'ont pas été exécutées, ne fait valoir aucune circonstance humanitaire, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune erreur d'appréciation en lui interdisant de revenir sur le territoire français et en fixant la durée de cette interdiction à deux ans. Par suite, ce moyen doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés à l'instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 17 février 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Soyez, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 17 mars 2023.

La rapporteure,

C. C...

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03222
Date de la décision : 17/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : BOY

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-17;22pa03222 ?
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