Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 21 août 2019 par laquelle la présidence de la République a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de son indemnité pour sujétions particulières et d'enjoindre à la présidence de la République de lui verser le complément de l'indemnité pour sujétion spéciale due pour la période du mois de mai 2013 au mois de février 2018, soit la somme de 17 442 euros, assortie des intérêts au taux légal.
Par un jugement n° 1922601 du 20 mai 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision attaquée du 21 août 2019, enjoint aux services de la présidence de la République de lui verser une somme de 5 508 euros, assortie des intérêts au taux légal et rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 28 septembre 2021, 4 janvier 2022 et 2 février 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Andrieux, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 20 mai 2021 en tant qu'il a limité l'indemnisation qui lui a été allouée à la somme de 5 508 euros et rejeté le surplus de sa demande ;
2°) de condamner la présidence de la République à lui verser le complément de l'indemnité pour sujétion spéciale due pour la période du mois de mai 2013 au mois de février 2018, soit la somme de 17 442 euros et d'assortir cette somme des intérêts au taux légal à compter de sa demande initiale ;
3°) de mettre à la charge de la présidence de la République la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que l'administration entend lui opposer l'irrecevabilité de sa requête en raison de sa tardiveté ;
- les juges de première instance se sont mépris sur la matérialité des faits et par suite sur le montant de l'indemnité à laquelle il pouvait prétendre ;
- il a occupé effectivement les fonctions d'officier de permanence entre les mois de mai 2013 à octobre 2013 et a cumulé deux postes sans compensation financière ;
- le critère lié à l'exercice ponctuel des fonctions qui lui est opposé pour lui refuser le bénéfice de l'intégralité de l'indemnité en litige, ne ressort d'aucune disposition réglementaire, l'administration ayant par suite ajouté une condition non prévue par les dispositions applicables ;
- le refus de revalorisation du régime indemnitaire qui lui a été alloué au-delà du mois de mai 2015, contraire aux usages mis en place au sein du service de la présidence, est constitutif d'une discrimination illégale entre agents, alors au demeurant qu'il continuait à assurer des missions d'encadrement ;
- il est fondé à solliciter le versement de l'indemnité litigieuse pour la période comprise entre les mois de mai 2013 et février 2018, soit la somme de 17 442 euros.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 décembre 2021 et 21 janvier 2022, la présidence de la République, représentée par Me Magnaval, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête est tardive et par suite irrecevable ;
- le moyen tiré de l'erreur de droit, pris dans ses deux branches, n'est pas fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 juillet 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général de la fonction publique ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2001-1147 du 5 décembre 2001 ;
- le décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,
- et les observations de Me Safatian, représentant la présidence de la République.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., adjoint administratif du ministère de l'éducation nationale, a été mis à disposition des services de la présidence de la République à compter du 1er mai 2012. Initialement affecté en qualité de veilleur presse au sein du commandement militaire au service de la permanence de l'information (SPI), il a occupé les fonctions d'officier de permanence au sein du SPI entre les mois de mai 2013 et mai 2015. Par un jugement n° 1803849 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 8 janvier 2018 par laquelle la présidence de la République avait refusé de faire droit à sa demande de revalorisation d'indemnité pour sujétions particulières et enjoint au réexamen de sa situation. Par une décision du 21 août 2019 prise à la suite de ce réexamen, sa demande de revalorisation a de nouveau été rejetée. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement n° 1922601 du 20 mai 2021 du tribunal administratif de Paris visé ci-dessus en tant qu'il a limité l'indemnité qui lui a été allouée à la somme de 5 508 euros.
Sur la régularité du jugement :
2. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient fait une inexacte appréciation des faits de l'espèce, à le supposer soulevé par M. B... pour contester la régularité du jugement attaquée, ne peut utilement être invoqué pour en demander l'annulation.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. D'une part, aux termes de l'article 1er du décret du 5 décembre 2001 instituant une indemnité pour sujétions particulières des personnels en service à la présidence de la République : " Il peut être attribué aux personnels, titulaires ou non titulaires, en service à la présidence de la République une indemnité forfaitaire destinée à rémunérer les sujétions particulières qu'ils supportent dans l'exercice de leurs fonctions ". L'article 2 de ce décret dispose que : " L'indemnité mentionnée au précédent article fait l'objet d'un versement mensuel. Le montant des attributions individuelles est déterminé en fonction de l'importance des sujétions auxquelles est astreint le bénéficiaire ".
4. D'autre part, en application des articles 1er, 2 et 7 du décret du 14 janvier 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires, les travaux supplémentaires ne faisant pas l'objet d'un repos compensatoire peuvent donner lieu à une indemnisation financière. En application de l'article 5 de ce décret : " Les indemnités horaires pour travaux supplémentaires, prévues au titre du présent décret, sont exclusives des indemnités perçues par les personnels enseignants soumis à un régime spécifique d'indemnisation des heures supplémentaires et de toute autre indemnité de même nature ".
5. Pour faire droit partiellement à la demande de M. B..., les juges de première instance ont annulé la décision attaquée en relevant qu'il ne résultait pas des dispositions précitées du décret du 5 décembre 2001 que l'indemnité pour sujétions particulières serait exclusive d'une indemnisation des heures supplémentaires et qu'elles ne faisaient pas davantage obstacle au cumul de ces deux indemnités et ont enjoint à l'administration de lui verser la somme de 5 508 euros correspondant à la différence entre l'indemnité versée à l'intéressé et celle à laquelle il était en droit de prétendre au cours de la période non contestée comprise entre les mois de novembre 2013 et mai 2015 au titre de laquelle il avait occupé les fonctions d'officier de permanence de manière pérenne.
6. En premier lieu, M. B... soutient qu'il a exercé ses missions d'officier de permanence dans les mêmes conditions entre les mois de mai 2013 et octobre 2013 et cumulait deux postes de travail sans compensation financière. Toutefois, il résulte des termes mêmes d'un courrier adressé le 25 janvier 2016 à son administration que l'intéressé a précisé avoir occupé les fonctions d'officier de permanence de manière ponctuelle à partir du mois de juin 2013 pour pallier des carences en personnel puis définitivement à compter du mois de novembre suivant. L'importance effective des sujétions auxquelles il a été soumis dans l'exercice de ses fonctions d'officier de permanence, avant d'occuper ce poste de manière exclusive et continue à partir du 1er novembre 2013, ne ressort ni du planning de travail des officiers de permanence établi au titre du seul mois de mai 2013 sur lequel apparaissent dix vacations mensuelles accomplies, dont seulement deux de vingt-quatre heures continues, en l'absence de toute autre pièce justificative, ni du compte rendu d'entretien professionnel réalisé au titre de l'année 2013 qui ne mentionne précisément ni la période d'activité, ni la quotité de travail de l'intéressé dans le cadre de ses fonctions d'officier de permanence. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que M. B... aurait occupé ce poste au cours des mois de mai à octobre 2013 dans des conditions de nature à lui ouvrir droit au versement de l'indemnité pour sujétions particulières revendiquée, alors qu'il est constant que les sujétions particulières auxquelles il était soumis en qualité de veilleur presse au cours de cette période lui ont ouvert droit au versement de la même indemnité pour un montant forfaitaire réduit.
7. En deuxième lieu, M. B... soutient que l'administration a ajouté une condition supplémentaire aux dispositions précitées de l'article 2 du décret du 5 décembre 2001 en lui opposant le critère lié à l'exercice ponctuel de ses fonctions pour déterminer le montant de l'indemnité pour sujétions particulières qui lui a été allouée. Toutefois, dès lors qu'il résulte de ces dispositions que le montant des attributions est déterminé en considération de l'importance des sujétions auxquelles le bénéficiaire est astreint, l'administration a pu, sans ajouter au texte une condition supplémentaire, retenir que le critère de la durée des services accomplis constituait un critère objectif susceptible de justifier la modulation de la prime allouée au regard de l'importance des sujétions devant être compensées.
8. En troisième lieu, M. B... soutient que les usages mis en place au sein du service de la présidence lui ouvraient droit au versement de l'indemnité litigieuse, y compris après la cessation des fonctions au titre desquelles l'indemnité lui a été versée et que le refus de revalorisation qui lui a été opposé, est constitutif d'une discrimination illégale entre agents, alors au demeurant qu'il a continué à assurer des missions d'encadrement après le mois de mai 2015. Toutefois, il ne démontre aucunement l'usage dont il entend se prévaloir qui ne résulte d'aucun texte. Par suite, il ne saurait utilement faire valoir une rupture d'égalité entre agents, susceptible de justifier la poursuite du versement d'une indemnité à laquelle il ne pouvait plus prétendre compte tenu de la nature de ses fonctions de veilleur de presse qu'il avait reprises. Par ailleurs, s'il ressort des comptes rendus d'entretiens professionnels réalisés au titre des années 2015 et 2016, au cours desquelles il occupait les fonctions de veilleur de presse, qu'il a fait preuve de qualités professionnelles et d'un investissement marqués, les seules circonstances qu'il aurait fait bénéficier certains collègues de son expérience d'officier de permanence et se serait imposé comme un " meneur naturel " au sein de son service compte tenu de son expérience passée ne permettent pas en revanche de démontrer qu'il aurait occupé des fonctions d'encadrement de nature à lui ouvrir droit au versement de l'indemnité en litige.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif de Paris, après avoir fait droit partiellement à sa requête en enjoignant à la présidence de la République de lui verser la somme de 5 508 euros due au titre de la période comprise entre les mois de novembre 2013 et mai 2015, a rejeté le surplus de sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la présidence de la République, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. B... la somme demandée au même titre par la présidence de la République.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la présidence de la République au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la présidence de la République.
Délibéré après l'audience du 24 mars 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président,
- M. Soyez, président assesseur,
- Mme Lorin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 7 avril 2023.
La rapporteure,
C. A...
Le président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au Président de la République en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA05253