Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2023 par lequel la préfète du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2307939 du 24 novembre 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2023, M. B..., représenté par Me Doucerain, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Val-de-Marne de réexaminer sa situation et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué, qui est fondé sur un moyen relevé d'office, sans information préalable des parties conformément à l'article R. 611-7 du code de justice administrative, est entaché d'irrégularité ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle méconnaît les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant refus de délai de départ volontaire a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de celle de la décision portant refus de délai de départ volontaire ;
- elle a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 42 du règlement (CE) n° 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête de M. B... a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant égyptien, né le 25 mai 1996 et entré en France, selon ses déclarations, en 2016 ou 2017, a été interpellé, le 20 juillet 2023, par les services de police et placé en garde à vue pour des faits de port d'arme de catégorie D et de blanchiment d'argent. Par un arrêté du 21 juillet 2023, la préfète du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans. M. B... fait appel du jugement du 24 novembre 2023 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué (...) ". Aux termes de l'article R. 776-25 du même code, applicable notamment, en vertu de l'article R. 776-13-2 de ce code, en cas d'obligation de quitter le territoire français pris sur le fondement du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'information des parties prévue aux articles R. 611-7 et R. 612-1 peut être accomplie au cours de l'audience ". Dans l'hypothèse où la question de la recevabilité de la requête au regard du délai de recours contentieux a été expressément évoquée par son auteur, qui conteste la régularité de la notification qui lui avait été faite de la décision qu'il conteste, et a ainsi pu être débattue par les parties, la requête peut être rejetée comme tardive sans information préalable des parties au titre de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.
3. Il ressort du dossier de première instance qu'à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté contesté du 21 juillet 2023, M. B... a expressément soulevé la question de la recevabilité de sa demande au regard du délai de recours contentieux et a, en particulier, contesté la régularité de la notification qui lui avait été faite de cet arrêté. En outre, cette demande a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne qui, à la suite d'une mesure d'instruction diligentée par le premier juge, a produit les éléments susceptibles d'établir la régularité de cette notification, qui ont été communiqués à M. B... et sur lesquels celui-ci a présenté des observations. Ainsi, cette question de recevabilité a pu être débattue par les parties. Par suite, alors même que l'administration n'a opposé aucune fin de non-recevoir, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative et le caractère contradictoire de la procédure contentieuse, rejeter la demande présentée par M. B..., comme tardive, sans information préalable des parties. Dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait, faute de cette information, entaché d'irrégularité, doit être écarté.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
4. D'une part, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Aux termes de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure (...) ". Aux termes du II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " Conformément aux dispositions de de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément (...) ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 613-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel est notifiée une décision portant obligation de quitter le territoire français est également informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments, traduits dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, des décisions qui lui sont notifiées en application des chapitres I et II ".
6. Il ressort des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté que l'arrêté du 21 juillet 2023 de la préfète du Val-de-Marne obligeant M. B... à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français a été notifié à celui-ci, par voie administrative et avec l'assistance d'un interprète en langue arabe, le même jour, à 11h45 et que cette notification mentionnait les voies et délais de recours contre ces décisions et, notamment, le délai de recours de quarante-huit heures. Dans ces conditions, la demande de M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté, qui n'a été enregistré au greffe du tribunal administratif de Melun que le 26 juillet 2023 à 16h38, soit après l'expiration du délai de recours de quarante-huit heures, était tardive et donc irrecevable.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande comme irrecevable. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celle présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 20 février 2024, à laquelle siégeaient :
- M. d'Haëm, président,
- M. Pagès, premier conseiller,
- Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 février 2024.
Le président-rapporteur,
R. d'HAËML'assesseur le plus ancien,
D. PAGES
La greffière,
Z. SAADAOUI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA05384