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05/08/2024 | FRANCE | N°22PA04890

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 3ème chambre, 05 août 2024, 22PA04890


Vu la procédure suivante :



M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du

15 octobre 2019 par lequel le maire de Chailly-en-Brie a délivré à M. D... et à Mme B... un permis de construire pour la réalisation d'une maison d'habitation avec garage sur un terrain sis

21 rue Saint-Médard sur le territoire de cette commune, et de mettre à la charge de celle-ci une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement avant dire-droit n° 200

5165 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Melun a sursis à statuer sur la demande...

Vu la procédure suivante :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du

15 octobre 2019 par lequel le maire de Chailly-en-Brie a délivré à M. D... et à Mme B... un permis de construire pour la réalisation d'une maison d'habitation avec garage sur un terrain sis

21 rue Saint-Médard sur le territoire de cette commune, et de mettre à la charge de celle-ci une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement avant dire-droit n° 2005165 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Melun a sursis à statuer sur la demande jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois dans l'attente de la notification au tribunal d'un permis de construire régularisant le vice tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UA7 du règlement du plan local d'urbanisme.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2022 M. C... D..., représenté par Me Clavier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement avant-dire-droit n° 2005165 du 16 septembre 2022 du tribunal administratif de Melun ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... comme irrecevable ou à défaut comme mal fondée ;

3°) de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a à tort rejeté la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de première instance, alors que le permis litigieux avait été affiché en mairie à compter du 17 octobre 2019 et sur le terrain à compter du 22 octobre suivant ;

- le tribunal a à tort également rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt pour agir de M. A... compte tenu de la configuration des lieux, leurs parcelles étant séparées par une impasse ;

- le requérant, après le rejet de sa demande en référé, contre laquelle il n'a pas formé de pourvoi en cassation, n'a pas confirmé le maintien de sa requête à fins d'annulation dans le délai d'un mois, et il devait donc être regardé comme s'étant désisté de son recours en application de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative ;

- la demande de première instance ne pouvait qu'être rejetée dès lors notamment que le signataire de la décision attaquée justifiait d'une délégation régulière de signature ;

- les moyens tirés de la méconnaissance des articles UA3, UA6 et UA7 du PLU sont infondés dès lors notamment que la voie de desserte a bien le caractère d'une voie publique et non d'une impasse privée.

Par des mémoires, enregistrés les 23 janvier 2023, 14 avril 2023 et 6 juin 2023 la commune de Chailly-en-Brie, représentée par Me Grau, s'associe aux conclusions de la requête et demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement avant-dire-droit n° 2005165 du 16 septembre 2022 du tribunal administratif de Melun ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... ;

3°) de rejeter l'appel incident de M. A..., à titre principal comme irrecevable ou à défaut comme mal fondé ;

4°) de rejeter toutes conclusions dirigées tant contre le permis de construire du

27 novembre 2020 que contre le permis modificatif du 4 avril 2023 ;

5°) de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a à tort rejeté la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de première instance ;

- le tribunal a à tort également rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt pour agir de M. A... compte tenu de la configuration des lieux, leurs parcelles étant séparées par une impasse ;

- le tribunal a à tort retenu une méconnaissance de l'article UA7 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors notamment que les règles d'implantation en limite séparative fixées par cet article ne constituent qu'une faculté et non une obligation, que le projet n'était pas soumis aux dispositions de cet article mais seulement à celles du permis d'aménager, et que l'option retenue était conforme à ce permis, outre qu'aucune des constructions avoisinantes ne respecte la règle de l'article UA7 prévoyant l'implantation en limite latérale de propriété ;

- les moyens soulevés à l'appui de l'appel incident de M. A... ne sont pas fondés ;

- la Cour administrative d'appel est compétente pour connaitre des conclusions dirigées contre le permis modificatif.

Par des mémoires en défense enregistrés les 16 février 2023 et 11 mai 2023 M. A..., représenté par Me Ramdenie, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de confirmer le jugement en ce qu'il a sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois dans l'attente de la notification au tribunal d'un permis de construire régularisant le vice tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UA7 du règlement du plan local d'urbanisme.

Par la voie de l'appel incident :

3°) d'annuler le jugement n° 2005165 du tribunal administratif de Melun en ce qu'il a rejeté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA3 du plan local d'urbanisme et à titre subsidiaire en ce qu'il a rejeté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA6 du plan local d'urbanisme ;

4°) d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2019 par lequel le maire de Chailly-en-Brie a délivré à M. D... et à Mme B... le permis de construire en litige ;

5°) en tout état de cause de mettre à la charge de M. D... et de la commune de Chailly-en-Brie le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. D... et la commune de Chailly-en-Brie ne sont pas fondés ;

- le permis en litige méconnait les dispositions de l'article UA3 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors notamment que la voie desservant le terrain d'assiette du projet a une largeur inférieure à 5 mètres, ne comporte pas d'aire de retournement et plus généralement ne satisfait pas aux exigences requises en matière de sécurité et d'accès ;

- ce permis méconnait aussi les dispositions de l'article UA6 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que le terrain d'assiette du projet est seulement desservi par une impasse privée qui ne peut être regardée comme une voie de desserte ouverte à la circulation du public pour l'application de l'article UA6 du plan local d'urbanisme et ne peut donc générer une bande de constructibilité de 30 mètres ;

- la circonstance qu'un permis modificatif ait été ensuite sollicité et obtenu, d'ailleurs après l'expiration du délai de quatre mois imparti par le tribunal, est sans incidence dans l'instance dirigée contre le jugement prononçant le sursis à exécution ;

- la Cour administrative d'appel n'est pas compétente pour connaitre directement de la légalité du permis de construire modificatif qui ne peut être contestée que devant le tribunal administratif ;

- en tout état de cause le permis modificatif accordé le 4 avril 2023 n'a pas régularisé le vice tiré de la méconnaissance de l'article UA7 du plan local d'urbanisme dès lors qu'il y a lieu de distinguer la construction principale des constructions annexes et que la construction principale n'est toujours pas implantée sur l'une des limites séparatives latérales, en méconnaissance de ces dispositions.

Par une lettre du 19 avril 2024, la Cour a informé les parties qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la commune de Chailly-en-Brie ayant la qualité de partie devant le tribunal, ses écritures présentées au soutien de la requête d'appel n'ont pas le caractère d'une intervention mais d'un appel principal. Or, dirigé contre un jugement du

16 septembre 2022, cet appel a été enregistré le 23 janvier suivant, donc après l'expiration du délai de recours contentieux ; il est donc irrecevable.

La commune de Chailly-en-Brie a présenté ses observations en réponse à cette communication les 23 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les conclusions de Mme Degardin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Garnier, représentant la commune de Chailly-en-Brie.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 15 octobre 2019 le maire de la commune de Chailly-en-Brie a délivré à

M. D... et Mme B... un permis de construire une maison d'habitation avec un garage accolé sur une parcelle située 21 rue de Saint-Médard sur le territoire de cette commune. Le 13 juillet suivant un voisin, M. A..., a saisi le tribunal administratif de Melun d'une demande d'annulation de cet arrêté, dont il a par ailleurs demandé la suspension par requête en référé introduite le

26 novembre 2020. Par ordonnance n° 2009678 du 28 décembre 2020, le juge des référés a rejeté comme irrecevable la demande en référé suspension. Par ailleurs par jugement avant-dire-droit

n° 2005165 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Melun a, en application de l'article

L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur la demande aux fins d'annulation, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, dans l'attente de la notification au tribunal d'un permis de construire modificatif régularisant le vice tiré de la méconnaissance de l'article UA7 du règlement du plan local d'urbanisme. M. D... et Mme B... ont dès lors sollicité un permis de construire modificatif qui leur a été délivré par arrêté du 4 avril 2023, en conséquence de quoi, par un nouveau jugement du 7 juillet 2023, le tribunal administratif de Melun a jugé que le permis modificatif ainsi accordé régularisait le permis initial et il a dès lors rejeté la demande de M. A.... Entretemps

M. D... avait, par la présente requête, enregistrée le 18 novembre 2022, relevé appel du jugement avant-dire-droit du tribunal administratif de Melun du 16 septembre 2022 prononçant un sursis à statuer sur la demande de M. A..., et, dans le cadre de cette même instance, celui-ci a également formé un appel incident contre ledit jugement en tant qu'il avait rejeté les autres moyens soulevés à l'encontre du permis de construire litigieux, et n'avait pas annulé cette autorisation d'urbanisme.

Sur l'appel principal de M. D... :

2. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ". L'appel formé par le requérant de première instance à l'encontre d'un premier jugement prononçant un sursis à statuer en vue de la régularisation d'une autorisation d'urbanisme, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, devient sans objet lorsque le second jugement qui clôt l'instance n'a pas fait l'objet d'un recours et devient ainsi définitif.

3. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés les autres moyens de la requête, a retenu l'existence d'un ou plusieurs vices entachant la légalité du permis de construire, de démolir ou d'aménager dont l'annulation lui était demandée et, après avoir estimé que ce ou ces vices étaient régularisables par un permis modificatif, a décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour inviter l'administration à régulariser ce vice, l'auteur du recours formé contre le permis est recevable à faire appel de ce jugement avant-dire-droit en tant qu'il a écarté comme non fondés les moyens dirigés contre l'autorisation d'urbanisme initiale et également en tant qu'il a fait application de ces dispositions de l'article L. 600-5-1. Toutefois, à compter de l'intervention de la mesure de régularisation dans le cadre du sursis à statuer prononcé par le jugement avant-dire-droit, les conclusions dirigées contre ce jugement en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet. Il en va de même si l'auteur de la requête d'appel n'est pas l'auteur du recours de la demande de première instance mais le bénéficiaire du permis en litige et par ailleurs si la mesure de régularisation est intervenue après l'expiration du délai imparti à cette fin par le tribunal, cette circonstance n'étant pas susceptible de la priver de ses effets.

4. Il s'ensuit qu'en l'espèce, à compter de la délivrance, le 4 avril 2023, du permis de construire modificatif visant à régulariser le vice relevé par le tribunal administratif dans son jugement avant-dire-droit du 16 septembre 2022, les conclusions dirigées contre ce jugement en tant qu'il a mis en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme étaient privées d'objet. Dès lors la requête de M. D..., qui tend à l'annulation du jugement du

16 septembre 2022 en tant qu'il a mis en œuvre les dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et au rejet de la demande de première instance de M. A..., laquelle a déjà été rejetée par le jugement du tribunal administratif de Melun du 7 juillet 2023 faisant suite à l'intervention du permis modificatif du 4 avril 2023, est désormais privée d'objet, de même que l'intervention de la commune, sans qu'il soit dès lors besoin de statuer sur la recevabilité de celle-ci. Il n'y a dès lors plus lieu de statuer sur cette requête et cette intervention.

Sur l'appel incident de M. A... :

5. Il résulte de ce qui précède que par un jugement du 7 juillet 2023 devenu définitif le tribunal administratif de Melun a jugé que le permis modificatif accordé régularisait le permis initial et il a dès lors rejeté la demande de M. A.... Par suite les conclusions à fins d'appel incident, présentées par celui-ci à l'encontre du jugement avant-dire-droit du 16 septembre 2022, sont elles aussi dépourvues d'objet. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer.

6. Il résulte de tout ce qui précède qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la requête de

M. D... ni sur l'intervention de la commune et l'appel incident de M. A....

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. A... les sommes que demandent M. D... et la commune de Chailly-en-Brie au titre des frais liés à l'instance ; il n'y a pas lieu non plus de mettre à la charge de M. D... et de la commune de Chailly-en-Brie les sommes demandées sur le même fondement par M. A....

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête de M. D... ni sur l'intervention de la commune de Chailly-en-Brie.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur l'appel incident de M. A....

Article 3 : Les conclusions présentées par M. D..., la commune de Chailly-en-Brie et M. A..., tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à la commune de Chailly-en-Brie et à M. E... A....

Délibéré après l'audience du 25 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 août 2024.

La rapporteure,

M-I. F...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULINLa République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04890


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04890
Date de la décision : 05/08/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : SELARL GMR AVOCATS - GRANGE-MARTIN-RAMDENIE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/08/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-08-05;22pa04890 ?
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