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13/12/2024 | FRANCE | N°23PA02147

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 13 décembre 2024, 23PA02147


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société anonyme sportive professionnelle (SASP) Paris Saint-Germain Football (PSG) a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 1er février 2021, par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France lui a infligé une sanction de 700 000 euros en raison de manquements à l'article L. 441-6 du code du commerce et a ordonné la publication de cette décision sur le

site internet de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme sportive professionnelle (SASP) Paris Saint-Germain Football (PSG) a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 1er février 2021, par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France lui a infligé une sanction de 700 000 euros en raison de manquements à l'article L. 441-6 du code du commerce et a ordonné la publication de cette décision sur le site internet de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pour une durée de neuf mois et sur la page d'accueil du site de la société PSG pour une durée d'un mois, ensemble les décisions rejetant ses recours gracieux et hiérarchique.

Par un jugement n° 2111029 du 14 mars 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 mai 2023 et 31 janvier 2024, la SASP Paris Saint-Germain Football, représentée par Mes Lorieul et Carenzi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 14 mars 2023 ;

2°) à titre principal, d'annuler la décision de la DIRECCTE d'Ile-de-France du 1er février 2021 ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'amende prononcée et la durée de la publication du communiqué sur le site de la DGCCRF ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens.

Elle soutient que :

- le jugement contesté méconnaît le principe de proportionnalité des peines ;

- la décision attaquée du 1er février 2021 est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreurs de droit dès lors que l'administration a pris en compte des factures échues postérieurement à la période de contrôle, ainsi que des factures non conformes, la privant du bénéfice d'une loi nouvelle plus favorable, et des factures reçues tardivement ;

- la sanction prononcée est disproportionnée ;

- la sanction pécuniaire infligée était imprévisible ;

- elle méconnaît les principes d'égalité des armes, de la contradiction et d'équilibre des droits des parties, garantis par les stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

- les erreurs de droit commises par l'administration ont eu des conséquences sur la proportionnalité de la sanction prononcée ;

- les facteurs conjoncturels propres à la société au cours du premier semestre de l'année 2018 et le contexte sanitaire lié au Covid-19 devaient être pris en considération dans l'appréciation de la proportionnalité de la sanction ;

- cette décision méconnaît le principe d'égalité devant les charges publiques ;

- les mesures de publication ordonnées sont entachées d'erreur de droit ;

- elles portent atteinte au droit au recours effectif prévu à l'article 13 de la convention européenne des droits de l'homme et du citoyen ;

- elles sont disproportionnées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société PSG ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la direction régionale interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DRIEETS) qui n'a pas produit d'observation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son préambule et la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de commerce ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Carrère,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

- et les observations de Me Lorieul, représentant la SASP PSG et les observations de Mme B... et de Mme A..., représentant le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d'une enquête diligentée par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), la société anonyme sportive professionnelle (SASP) Paris Saint-Germain Football (PSG) a fait l'objet le 7 mars 2019 d'un contrôle visant à vérifier le respect des dispositions du code de commerce relatives aux délais de paiement interentreprises. Par une décision du 1er février 2021, le directeur de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France lui a infligé une amende de 700 000 euros pour manquement à l'alinéa 9 du I de l'article L. 441-6 du code de commerce et a ordonné, outre la publication d'un communiqué sur le site du service de la DGCCRF pendant une durée de neuf mois, sa diffusion sur la page d'accueil du site internet de la société pendant une durée d'un mois. Par la présente requête, la société PSG relève régulièrement appel du jugement du 14 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et doit être regardée comme demandant également l'annulation par voie de conséquence des décisions rejetant ses recours gracieux et hiérarchique.

Sur la régularité du jugement :

2. Si la société PSG soutient que le jugement entrepris méconnaît le principe de proportionnalité des peines, ce moyen qui tient au bien-fondé de la décision des juges de première instance, est inopérant en cause de régularité du jugement, à supposer que la société ait entendu la contester.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 441-6 du code de commerce dans sa version applicable au litige : " I. (...) Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser soixante jours à compter de la date d'émission de la facture. Par dérogation, un délai maximal de quarante-cinq jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture peut être convenu entre les parties, sous réserve que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu'il ne constitue pas un abus manifeste à l'égard du créancier. En cas de facture périodique, au sens du 3 du I de l'article 289 du code général des impôts, le délai convenu entre les parties ne peut dépasser quarante-cinq jours à compter de la date d'émission de la facture (...) VI. - Sont passibles d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder (...) deux millions d'euros pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième, onzième et dernier alinéas du I du présent article (...) ainsi que le fait de ne pas respecter les modalités de computation des délais de paiement convenues entre les parties conformément au neuvième alinéa dudit I. L'amende est prononcée dans les conditions prévues à l'article L. 470-2. Le montant de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive ". Aux termes de l'article L. 470-2 de ce code dans sa version alors en vigueur : " I. - L'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation est l'autorité compétente pour prononcer les amendes administratives sanctionnant les manquements mentionnés au titre IV du présent livre ainsi que l'inexécution des mesures d'injonction prévues à l'article L. 470-1. (...) ".

4. En premier lieu, d'une part, aux termes du IV de l'article L. 470-2 du code de commerce en vigueur à la date de la décision attaquée, une amende prise en application du VI de l'article L. 441-6 du même code doit être motivée. D'autre part, il résulte de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration que la motivation des décisions qui infligent une sanction doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

5. La décision du 1er février 2021 mentionne les dispositions légales dont il est fait application, notamment les articles L. 470-2 et L. 441-6 paragraphe I, 9ème alinéa du code de commerce. Elle rappelle le déroulement de la procédure en se référant au procès-verbal du 12 février 2020 adressé à la société et détaillant les manquements reprochés, à la lettre du 10 juillet 2020 par laquelle l'administration l'a informée de la sanction envisagée ainsi qu'aux observations écrites et orales présentées par la société auxquelles il est apporté une réponse. Elle précise le périmètre du contrôle qui a porté sur les factures émises entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2018, la méthodologie utilisée, le nombre de factures contrôlées, à savoir 4 617 correspondant à un montant de 44 649 582,29 euros, le nombre de factures retenues comme ayant été payées avec un retard moyen pondéré de 35,10 jours représentant un volume de 52,76 % pour un montant de 16 641 101,95 euros, soit 37,27 % du montant total des factures et la conséquence qui en a résulté, à savoir une rétention de trésorerie de 3 245 014,88 euros. L'administration qui n'avait pas à justifier spécifiquement le quantum de l'amende notamment au regard de sanctions prononcées à l'encontre d'autres sociétés et qui a exposé les motifs qui ont conduit à consentir une réduction du montant de la sanction financière initialement envisagée, a énoncé avec suffisamment de précisions les éléments caractérisant les manquements et la sanction qu'elle avait retenue pour que puisse être utilement appréciées la nature et la proportionnalité de la sanction. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige doit être écarté.

6. En deuxième lieu, si la société PSG soutient que près d'un tiers des factures contrôlées n'entraient pas dans le périmètre du contrôle qui devait être circonscrit aux retards de paiement constatés entre le 1er janvier au 30 juin 2018, ainsi qu'il ressort d'un courrier électronique de l'administration du 26 avril 2019 lui transmettant le procès-verbal dressé à l'issue des vérifications, il résulte de l'instruction que le courrier du 10 janvier 2019 l'informant de ce contrôle lui précisait qu'il porterait sur les factures émises et non échues au cours de cette période. Par suite, alors que la date d'émission d'une facture renvoie à une notion bien établie, claire, juridiquement définie et intelligible pour les professionnels auxquels elle s'adresse, et que le quantum de l'amende en litige n'est pas déterminé par référence à un nombre de retards de paiement, ou à un délai de dépassement par rapport à la date normale de paiement, la société n'est pas fondée à soutenir que le périmètre du contrôle n'aurait pas été respecté.

7. En troisième lieu, la société PSG soutient, d'une part, que l'administration devait exclure du champ de son contrôle les factures qui ne comportaient pas de numéro de bon de commande, cette mention ayant été rendue obligatoire par l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 désormais codifié à l'article L. 441-9 du code de commerce et en déduit, d'autre part, qu'elle a été privée de l'application d'une loi pénale plus douce.

8. En matière d'édiction de sanctions administratives sont seuls punissables les faits constitutifs d'un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis et les sanctions susceptibles d'être infligées sont celles définies par les textes en vigueur à cette même date, sous réserve de l'intervention ultérieure de dispositions répressives plus douces.

9. D'une part, l'article L. 441-3 du code de commerce en vigueur au moment des faits n'exigeait pas des fournisseurs la mention du numéro de bon de commande sur les factures et aucune autre disposition ne permettait d'exclure du contrôle les factures ne comportant pas une telle référence. Par suite, la société PSG ne peut utilement se prévaloir de ce que cette mention a été rendue obligatoire postérieurement à la période de contrôle par l'ordonnance n° 2019-356 du 24 avril 2019. D'autre part, ces nouvelles dispositions qui n'ont modifié ni les délais de paiement, ni les sanctions susceptibles d'être prononcées, n'ont eu ni pour objet, ni pour effet, d'introduire une loi pénale plus douce. Par suite, le société PSG ne peut utilement soutenir avoir été privée de la garantie tenant à l'application immédiate d'une loi répressive plus douce.

10. En quatrième lieu, il résulte des termes mêmes du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce précité, que le délai de paiement court " à compter de la date d'émission de la facture ", celle-ci correspondant à la date apposée sur la facture en application du 6° du I de l'article 242 nonies A de l'annexe II au code général des impôts, et non à compter de la date de réception de la facture par le débiteur qui en est destinataire. Le 3 du I de l'article 289 de ce code prévoit en outre que " La facture est, en principe, émise dès la réalisation de la livraison ou de la prestation de services " et l'article L. 441-3 du code de commerce dispose que le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation du service et qu'à défaut, l'acheteur doit la réclamer. La société PSG à laquelle il appartenait de solliciter ses fournisseurs afin d'obtenir les informations ou validations nécessaires au règlement de ses factures dans le respect des délais de paiement impartis par le code de commerce, ne peut ainsi utilement se prévaloir, pour justifier certains retards de paiement, de l'envoi tardif des factures par certains fournisseurs, ou de ce que des factures n'auraient pas été adressées à son service de comptabilité, le circuit interne du courrier dans une entreprise ne pouvant en principe avoir d'incidence sur la computation des délais.

11. Il résulte des énonciations des point 5 à 9 que le moyen tiré des erreurs de droit qui entacheraient la décision en litige, doit être écarté.

12. En cinquième lieu, les dispositions du code de commerce dont il a été fait application énoncent clairement les obligations relatives aux délais de paiement auxquels sont astreintes les entreprises et les sanctions afférentes. En l'espèce, l'administration a dûment informé la société PSG des manquements constatés comme des sanctions envisagées et l'a régulièrement mise en mesure de présenter ses observations dans le cadre d'une procédure contradictoire. Aucune atteinte à une " prévisibilité " de la sanction en litige ne peut donc être invoquée.

13. En sixième lieu, si les poursuites engagées par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi en vue d'infliger des sanctions financières sur le fondement de l'article L. 441-6 du code de commerce constituent des accusations en matière pénale, au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'en résulte pas que la procédure administrative doive respecter les stipulations du paragraphe 1 de cet article, dès lors, d'une part, que ni la DIRECCTE, ni son directeur, compétents pour prendre les mesures de sanction, ne peuvent être regardés comme un tribunal, au sens des stipulations de cet article, et, d'autre part, que la décision de sanction peut faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant la juridiction administrative, conformément aux exigences de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, la société PSG ne peut utilement soutenir que la circonstance que l'administration aurait, contrairement à elle, accès à l'ensemble des jugements des tribunaux administratifs relatifs aux recours portés contre les décisions en matière de délais de paiement, méconnaît les principes du contradictoire et de l'équilibre des droits des parties garantis par l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui n'impliquent pas que les entreprises aient accès à l'ensemble des informations détenues par l'administration pour contester la proportionnalité d'une sanction.

14. En septième lieu, le principe de proportionnalité d'une sanction s'apprécie au regard de données propres à une société et non par comparaison à d'autres sociétés et prend en considération la gravité des manquements commis, la durée de ces manquements, le comportement de la société et sa situation financière. Il en résulte que la société PSG ne peut utilement invoquer le montant des amendes infligées à d'autres sociétés dans la mesure où aucun élément ne permet d'établir que ces amendes seraient venues sanctionner des situations strictement comparables à la sienne.

15. En huitième lieu, la société PSG ne peut davantage se prévaloir des lignes directrices relatives à la détermination des sanctions pour dépassement des délais de paiement interprofessionnel publiées par la DRIEETS au mois de décembre 2021 dont, en tout état de cause, il n'est pas établi que les critères aient été différents de ceux retenus par la DIRECCTE pour décider de la sanction litigieuse.

16. En neuvième lieu, si la société soutient que certaines entreprises ont pu bénéficier, contrairement à elle, d'une " franchise " de l'administration lorsque des retards de paiements n'excédaient pas sept jours, elle ne peut utilement se prévaloir de pratiques qui ne sont prévues par aucun texte et ne sont au demeurant pas démontrées, faute d'établir qu'elle aurait été dans une situation comparable à celle d'une autre société qui aurait pu bénéficier d'un tel avantage. Par ailleurs, si elle fait valoir qu'il convient de relativiser les manquements constatés en proportion de la durée de ses retards de paiement non significatifs, il résulte de l'instruction que l'administration a pris en compte le délai de paiement le plus favorable pour la société et a prorogé les échéances lorsque les dates de paiement correspondaient à un week-end ou à un jour férié. Elle a également écarté les factures intragroupes et pris en compte un décompte de retard moyen pondéré de 35,10 jours, impliquant nécessairement que des retards étaient plus conséquents. Par suite, aucune disproportion de la sanction ne peut résulter de la méthode retenue par le service et le moyen tiré du défaut d'égalité devant les charges publiques doit être écarté.

17. En dixième lieu, en l'absence d'erreur de droit commise par l'administration ainsi qu'il a été énoncé aux points 5 à 9 du présent arrêt, la société PSG n'est pas fondée à soutenir que la sanction litigieuse serait pour ce motif disproportionnée.

18. En onzième lieu, la société PSG fait valoir des facteurs conjoncturels qui ont pu avoir une incidence sur le processus de paiement des factures mises à sa charge, en particulier la mobilisation de ses équipes à l'occasion d'une enquête de l'Union européenne des associations de football (UEFA) au cours du premier semestre de l'année 2018 et les changements de personnels dirigeants intervenus au sein de la direction financière du PSG ou au sein du département comptable, au cours de cette période. Cependant, il lui appartenait de prendre des mesures d'organisation interne lui permettant de régler ses fournisseurs dans le respect des délais de paiement fixés par l'article L. 441-6 du code de commerce. Par suite, ces circonstances ne sont pas de nature à atténuer la gravité des manquements relevés à l'encontre de la société.

19. En douzième lieu, si la crise sanitaire du Covid-19 a eu un impact financier sur la situation financière de la société sans qu'elle n'ait pu bénéficier du plan d'urgence économique mis en place, il résulte de ses propres écritures que la survie du club n'a pas été en jeu à cette période. L'examen de sa situation financière par la direction nationale du contrôle de gestion de la Ligue professionnelle de football réalisé en décembre 2021 a permis de retenir que sa structure financière était saine et solide et lui permettait de traverser cette crise, que ses comptes restaient maîtrisés et qu'aucun élément ne permettait de remettre en cause la continuité de l'exploitation, la masse salariale ayant d'ailleurs augmenté de 16 points en 2021. Par ailleurs, il résulte de la décision attaquée que l'administration a expressément tenu compte " des pertes liées à l'interruption du championnat et aux difficultés [rencontrées par la requérante] en ce qui concerne les droits de diffusion " en lui accordant une réduction de 10 % sur le montant de l'amende envisagée. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le montant de l'amende prononcée à hauteur de 700 000 euros serait disproportionné.

20. En treizième lieu, aux termes de l'article L. 470-2 du code de commerce dans sa version alors en vigueur : " (...) V. - La décision prononcée par l'autorité administrative peut être publiée aux frais de la personne sanctionnée. La décision est toujours publiée lorsqu'elle est prononcée en application du VI de l'article L. 441-6 ou du dernier alinéa de l'article L. 443-1. Toutefois, l'administration doit préalablement avoir informé la personne sanctionnée, lors de la procédure contradictoire fixée au IV, de la nature et des modalités de la publicité envisagée (...) ". Aux termes de l'article R. 470-2 du même code : " (...) III. - La publication prévue au V de l'article L. 470-2 peut être effectuée par voie de presse, par voie électronique, ou par voie d'affichage. / La publication peut porter sur tout ou partie de la décision, ou prendre la forme d'un communiqué informant le public des motifs et du dispositif de cette décision ". Aux termes des dispositions du III de l'article R. 470-2 du code de commerce : " (...) La diffusion de la décision est faite au Journal officiel de la République française, par une ou plusieurs autres publications de presse, ou par un ou plusieurs services de communication au public par voie électronique. Les publications ou les services de communication au public par voie électronique chargés de cette diffusion sont désignés dans la décision. Ils ne peuvent s'opposer à cette diffusion (...) ".

21. Compte tenu des manquements constatés, notamment de leur impact sur la trésorerie des fournisseurs, du nombre et de l'ampleur des retards de paiement, la DIRECCTE a décidé d'assortir la sanction pécuniaire infligée de la publication, d'une part, sur le site internet du service et pendant une durée de neuf mois, d'autre part, sur le site internet de la société requérante pour une durée d'un mois, d'un communiqué énonçant les motifs et le dispositif de sa décision. Outre sa portée punitive, l'objet de cette publication est de porter à la connaissance de toutes les personnes intéressées, en particulier les fournisseurs du PSG et les autres entreprises soumises aux dispositions du code de commerce dont il est fait application, tant les irrégularités qui ont été commises que les sanctions que celles-ci ont appelées, afin de satisfaire aux exigences d'intérêt général relatives à la fluidité et à la régularité des relations commerciales.

22. Contrairement à ce que soutient la société PSG, les termes mêmes de ces dispositions n'excluent aucunement que la publicité faite à une amende prononcée par l'administration en application des dispositions précitées du code de commerce se fasse sur un double support. Le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision attaquée doit par suite être écarté.

23. En quatorzième lieu, la société fait valoir le caractère irréversible de la publication de la sanction sur son site Internet principalement visité par des fans du club du PSG et non par ses fournisseurs, compte tenu de son caractère infamant et de l'atteinte portée à sa réputation. Toutefois, elle n'établit pas avoir subi un préjudice excessif, alors même que la publication de cette décision est avant tout justifiée par le nombre et l'ampleur des manquements commis par la société dans le cadre de ses relations commerciales et présentait un caractère à la fois informatif vis-à-vis des tiers et dissuasif pour la société de réitération de tels manquements. Par suite, compte tenu de la forme du communiqué litigieux et de sa durée limitée de publication, elle n'est pas fondée à soutenir que cette mesure serait disproportionnée.

24. En dernier lieu, la société n'est pas fondée à soutenir que cette publication intervenue le 22 février 2021 sur le site de la DGCCRF aurait eu pour conséquence de la priver d'un droit à un recours effectif en méconnaissance de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il est constant qu'elle avait la possibilité d'introduire une requête en référé suspension à l'encontre de cette décision, si elle estimait cette publication prématurée et infondée, ce qu'elle s'est abstenue de faire. Au demeurant, le droit à un recours effectif n'implique pas qu'une décision administrative ne puisse pas être exécutée avant qu'un recours juridictionnel ait abouti et la société est demeurée libre de former à l'encontre de cette décision un recours de plein contentieux à l'issue duquel le juge administratif peut le cas échéant annuler cette publication et ordonner toutes les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences préjudiciables qui en auraient résulté.

25. Il résulte de tout ce qui précède que la SASP PSG n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la DIRECCTE d'Ile-de-France du 1er février 2021. Il suit de là que sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tenant aux frais liés à l'instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SASP PSG est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme sportive professionnelle Paris Saint-Germain Football et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera adressée à la direction régionale interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Lemaire, président assesseur,

- Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 13 décembre 2024.

Le président-rapporteur,

S. CARRERE

Le président-assesseur,

O. LEMAIRE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA02147


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02147
Date de la décision : 13/12/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Stéphane CARRERE
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-13;23pa02147 ?
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