Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse :
- d'annuler l'arrêté du 22 mars 2017 par lequel le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Saint-Gaudens l'a mis à la retraite d'office pour invalidité à compter du 1er juillet 2015 ;
- d'enjoindre au SIVOM de Saint-Gaudens de procéder à sa réintégration sur un poste compatible avec son état de santé ou, à défaut, de lui verser la somme de 169 931,52 euros ;
- de condamner le SIVOM de Saint-Gaudens à lui verser la somme de 97 450,25 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des fautes commises par son administration.
Par un jugement n° 1703654 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le SIVOM de Saint-Gaudens à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral du fait de son maintien illégal en position de disponibilité d'office sans traitement, a renvoyé devant le SIVOM pour qu'il soit procédé à la liquidation de la créance correspondant à la différence entre la rémunération qu'il avait une chance sérieuse de percevoir s'il avait été placé en congé de longue maladie à compter du 9 octobre 2007 et celle qu'il a effectivement perçue, a mis à la charge du SIVOM de Saint-Gaudens une somme de 1200 euros à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 février 2020, M. B... A..., représenté par Me Marin, demande à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 22 mars 2017 par lequel le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Saint-Gaudens l'a mis à la retraite d'office pour invalidité à compter du 1er juillet 2015 ;
2°) de condamner le SIVOM de Saint-Gaudens à lui verser la somme de 97 450,25 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des fautes commises par son administration ;
3°) d'enjoindre au SIVOM de Saint-Gaudens de procéder à sa réintégration sur un poste compatible avec son état de santé ou, à défaut, de lui verser la somme de 169 931,52 euros ;
4°) de mettre à la charge du SIVOM de Saint-Gaudens une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté portant mise à la retraite pour invalidité lui a été irrégulièrement notifié deux ans après sa prise d'effet ;
- il se fonde sur un avis favorable de la caisse des retraites des agents des collectivités locales qui ne lui a pas été communiqué ;
- il est entaché d'une erreur d'appréciation ; le SIVOM n'a pas apprécié son état de santé à sa juste valeur et ne s'est pas conformé aux préconisations médicales ;
- le SIVOM a commis une faute en refusant de lui octroyer un congé de longue maladie alors qu'il remplissait les conditions pour en bénéficier, comme l'attestent les différents avis médicaux qu'il verse aux débats ;
- le SIVOM a également commis une faute en renouvelant sa disponibilité d'office pour raison de santé au-delà de la durée maximale prévue par les textes ;
- il a subi des agissements fautifs de harcèlement moral de la part de son administration qui a sciemment adopté les décisions le concernant dans un délai anormalement long, l'a systématiquement mis à l'écart de tous les dossiers concernant sa situation administrative et n'a pas mené sérieusement les recherches de reclassement sur un poste adapté ;
- il a subi un préjudice financier constitué par la perte des revenus qu'il aurait perçus s'il avait été placé en congé de longue maladie dès lors qu'en situation de disponibilité d'office, il n'a perçu aucun traitement et également du fait de l'absence de reclassement entre la date à laquelle il a introduit une demande de reclassement et celle à laquelle il s'est vu notifier l'arrêté de mise à la retraite d'office ; le SIVOM devra lui verser en réparation de ce préjudice la somme totale de 62 450,25 euros ;
- son préjudice moral est établi notamment du fait de l'incertitude quant à sa situation professionnelle dans laquelle il a été maintenu pendant dix années et de la circonstance que son état de santé n'a jamais été réellement pris en compte par son administration ; ce chef de préjudice sera réparé par l'octroi d'une somme de 35 000 euros.
Une mise en demeure a été adressée le 25 mai 2021 au SIVOM de Saint-Gaudens.
Par ordonnance du 23 septembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 23 novembre 2021.
Par une ordonnance en date du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Sylvie Cherrier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Marin, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. Fonctionnaire titulaire au syndicat intercommunal à vocations multiples (SIVOM) de Saint-Gaudens exerçant les fonctions de conducteur spécialisé de 1er niveau, M. A... a été placé en congé de maladie ordinaire à compter du 13 octobre 2005. Il a ensuite été mis en disponibilité d'office pour raison de santé à compter du 30 novembre 2007. Par un arrêté en date du 22 mars 2017, il a été mis à la retraite d'office pour invalidité à compter du 1er juillet 2015. M. A... a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tenant à l'annulation de l'arrêté du 22 mars 2017, à ce qu'il soit enjoint au SIVOM de le réintégrer sur un poste compatible avec son état de santé ou, à défaut, à la condamnation du SIVOM à lui verser la somme de 169 931,52 euros, ainsi qu'à la condamnation du SIVOM à lui verser la somme totale de 97 450,25 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des fautes de son employeur. Il relève appel du jugement rendu le 19 décembre 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande formée à l'encontre de l'arrêté du 22 mars 2017 et a limité la condamnation du SIVOM de Saint-Gaudens à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral et l'a renvoyé devant le SIVOM pour la liquidation de la créance relative à la perte de revenus résultant des refus de lui octroyer un congé de longue maladie.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, M. A... reprend en appel, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer la réponse qui lui a été apportée par les premiers juges, les moyens tirés de la notification tardive de l'arrêté du 22 mars 2017 et du défaut de communication de l'avis favorable de la caisse des retraites des agents des collectivités locales. Dès lors, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
3. En second lieu, aux termes de l'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emplois, emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Selon l'article 1er du décret du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial ne lui permet plus d'exercer normalement ses fonctions et que les nécessités du service ne permettent pas d'aménager ses conditions de travail, le fonctionnaire peut être affecté dans un autre emploi de son grade après avis de la commission administrative paritaire. (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondantes aux emplois de son grade, l'autorité territoriale..., après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84 53 du 26 janvier 1984 ". Aux termes de l'article 36 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'un fonctionnaire est reconnu, par suite de l'altération de son état physique, inapte à l'exercice de ses fonctions, il incombe à l'administration de rechercher si le poste occupé par ce fonctionnaire ne peut être adapté à son état physique ou, à défaut, de lui proposer une affectation dans un autre emploi de son grade compatible avec son état de santé. Si le poste ne peut être adapté ou si l'agent ne peut être affecté dans un autre emploi de son grade, il incombe à l'administration de l'inviter à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps. Il n'en va autrement que si, en raison de l'altération de son état de santé, cet agent ne peut plus exercer d'activité et ne peut ainsi faire l'objet d'aucune mesure de reclassement. Il peut alors être mis à la retraite pour invalidité.
5. M. A... reprend également en appel le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont serait entaché l'arrêté du 22 mars 2017 l'admettant à la retraite d'office pour invalidité à compter du 1er juillet 2015, sans développer son argumentation ni critiquer la réponse qui lui a été apportée par les premiers juges. Or, tant le comité médical que la commission de réforme qui se sont prononcés les 26 août 2011 et 21 novembre 2013 respectivement, ont conclu à l'inaptitude définitive et absolue de M. A... à continuer d'exercer ses fonctions d'agent technique, mais à la possibilité pour lui de bénéficier d'un poste de travail à caractère sédentaire dans le cadre d'un reclassement professionnel. A la suite de la demande présentée par M. A... le 25 avril 2014, le SIVOM de Saint-Gaudens lui a fait part, par courrier du 13 mars 2015, de l'absence de poste compatible avec son état de santé tant dans ses services qu'auprès d'autres collectivités sollicitées. Alors que le SIVOM a justifié de ses recherches d'un poste permettant à M. A... de continuer son activité dans des conditions compatibles avec son état de santé, auprès de la commune de Saint-Gaudens, de la communauté de communes de Saint-Gaudens et du syndicat des eaux de la Barousse et du Comminges, le requérant ne conteste pas sérieusement le caractère effectif des recherches menées par l'établissement public. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 22 mars 2017, lequel n'est entaché d'aucune erreur d'appréciation. Par suite, ses conclusions tendant à enjoindre au SIVOM de Saint-Gaudens de procéder à sa réintégration sur un poste compatible avec son état de santé ou, à défaut, de lui verser la somme de 169 931,52 euros, doivent être également rejetées.
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
6. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 : " aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ". Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement alors qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
7. Si le SIVOM de Saint-Gaudens a entaché d'illégalité les décisions refusant d'accorder à M. A... un congé de longue maladie puis en le plaçant en disponibilité d'office pour raisons de santé pendant une durée excédant celle prévue par les textes, ainsi que l'ont estimé les premiers juges et qu'il n'est contesté par aucune partie, toutefois, ni l'illégalité de ces décisions, ni la circonstance que le SIVOM ait traité ses demandes dans des délais particulièrement longs, ne saurait révéler des agissements constitutifs de harcèlement moral ou des faits de discrimination en raison de son état de santé à son encontre. Aucune faute du SIVOM ne peut dès lors être retenue sur ce fondement.
8. Ainsi qu'il vient d'être rappelé, les décisions refusant de placer M. A... en congé de longue maladie sont entachées d'une illégalité qui constitue une faute de nature à engager la responsabilité du SIVOM de Saint-Gaudens à son égard. Le premier refus lui ayant été opposé le 9 octobre 2007, M. A... a droit à l'indemnisation du préjudice financier résultant de la perte de revenus subie pendant trois ans, correspondant la première année à l'intégralité de son traitement outre le supplément familial de traitement et les indemnités présentant un caractère forfaitaire, les deux suivantes à un demi traitement. L'état du dossier ne permettant pas de déterminer le montant des sommes dues à M. A... au titre de son préjudice financier, déduction faite des sommes qu'il a effectivement perçues au cours de cette période, le tribunal a à juste titre renvoyé l'intéressé devant le SIVOM de Saint-Gaudens pour qu'il soit procédé à la liquidation de sa créance. Si M. A... réitère ses demandes de première instance, il n'établit pas que les sommes versées en exécution du jugement par le SIVOM de Saint-Gaudens seraient insuffisantes.
9. Le SIVOM a également commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité en renouvelant la disponibilité d'office de M. A... au-delà de la durée maximale prévue par les textes. Il ne résulte cependant pas des pièces produites que le requérant était susceptible de bénéficier d'un reclassement sur un poste adapté à son état de santé dès la fin de l'année 2011, à l'issue de la durée légale maximale de la disponibilité d'office. C'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont estimé que le caractère certain du préjudice financier allégué par M. A... n'était pas établi.
10. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard au délai anormalement long de la procédure suivie par le SIVOM ayant abouti à la mise à la retraite pour invalidité de M. A... à compter du 1er juillet 2015 par un arrêté du 22 mars 2017 et de son maintien illégal en position de disponibilité d'office sans traitement au-delà du 29 novembre 2011, il a été fait une juste appréciation du préjudice moral subi par M. A... évalué par les premiers juges à la somme de 5 000 euros.
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander que l'indemnisation mise à la charge du SIVOM de Saint-Gaudens par le jugement attaqué soit portée à une somme supérieure. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au SIVOM de Saint-Gaudens Montréjeau - Aspet - Magnoac.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
M. Teulière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2022.
La rapporteure,
A. Blin
La présidente,
A. Geslan-Demaret
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.
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N° 20TL20611