Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2003223 du 10 février 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juin 2022, M. B..., représenté par Me Tercero, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 10 février 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et, en tout état de cause, de de lui remettre sans délai à compter de la notification de l'arrêt à intervenir une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au profit de son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative combinées avec celles du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour méconnait les dispositions des articles L. 313-11 11°, R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence de caractère collégial de la délibération du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ; à cet égard, la délibération collégiale à distance n'a pas respecté les règles posées par l'ordonnance n° 2014-1329 du 6 novembre 2014 ;
- cette décision méconnaît l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de justification de la qualité de médecin nommé au collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration de M. C... ;
- cette décision est entachée d'une erreur de droit au regard des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le suivi régulier de sa maladie n'est pas pris en charge par le système de soins en Algérie ;
- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale, en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2022, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Toulouse du 6 mai 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2014-1329 du 6 novembre 2014 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur.
- et les observations de Me Tercero, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien, a déclaré être entré en France le 1er octobre 2017. Le 24 octobre 2018, il a sollicité auprès des services du préfet de la Haute-Garonne la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par arrêté du 27 novembre 2019, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer le titre demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé son pays de renvoi.
2. M. B... relève appel du jugement du 10 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral précité.
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...) ". L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, applicable aux ressortissants algériens pour la mise en œuvre des stipulations précitées ; dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Et l'article R. 313-23 du même code, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...). Il transmet son rapport médical au collège de médecins. Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) ". L'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport ". Et son article 6 dispose : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté (...) "
4. D'une part, lorsque l'avis porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émet l'avis suivant ", cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve du contraire. En l'espèce, l'avis du collège de médecins précité porte cette mention et a été signé par les trois médecins le composant. Pour contester la régularité de cet avis, l'appelant se borne à produire des captures d'écran anonymisées de l'application " Thémis " faisant état des dates et heures auxquelles des médecins ont renseigné et authentifié dans cette application le sens de leur avis, qui, au demeurant, sont relatives aux dossiers médicaux d'autres ressortissants étrangers. En tout état de cause, si le caractère collégial de la délibération du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration exige que ces médecins se concertent sur les dossiers médicaux soumis à leur appréciation, en présentiel, ou au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle, cette garantie n'implique pas la validation concomitante de leur avis dans le logiciel Thémis. Enfin, la circonstance que les trois médecins composant le collège ne relèvent pas du même secteur géographique, n'est pas de nature à mettre en doute le caractère collégial de cette délibération. Aucun élément du dossier n'est donc de nature à remettre en cause la mention figurant dans l'avis de son caractère collégial.
5. D'autre part, et à supposer que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration serait une autorité administrative au sens de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, il ne ressort, en tout état de cause, pas des pièces du dossier que la méconnaissance, à la supposer établie, des conditions de l'article 4 de l'ordonnance du 6 novembre 2014, relative aux délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial, aurait privé M. B... d'une garantie, ni qu'elle aurait été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision en litige.
6. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a écarté le moyen tiré de ce qu'il n'est pas établi que les médecins du collège de l'Office français de l'immigration et de l'intégration auraient collégialement délibéré.
7. Par ailleurs, et ainsi que l'établit en appel le préfet, M. C... figure sur la liste des médecins désignés pour participer au collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, telle que fixée par la décision du 14 février 2019 modifiant la décision du 17 janvier 2017 portant désignation au collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dès lors, le moyen tiré de ce que ce médecin n'aurait pas été régulièrement désigné pour participer à ce collège ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.
8. M. B... reprend en appel les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En l'absence de critique utile du jugement attaqué sur ce point ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
9. Enfin, s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi, d'une part, il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que cette décision serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet et, d'autre part, M. B... ne fait état d'aucune menace précise à son encontre et n'établit pas être personnellement exposé à des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Algérie.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023.
Le président-assesseur,
P. Bentolila
Le président-rapporteur,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL21300