Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 avril 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2202037 du 3 juin 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Rivière, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 juin 2022 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 avril 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer son droit au séjour sur le fondement des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien dès la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- sa requête est recevable et il dispose d'un intérêt à agir ;
- le magistrat désigné par la présidente du tribunal a entaché son jugement d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle ;
- ce magistrat a omis de répondre au moyen tiré de ce que son éloignement vers l'Algérie, pays dans lequel il est établi qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié, l'expose à un risque de traitements inhumains et dégradants au sens des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en méconnaissance de l'article R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire méconnaît l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français méconnaît l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme El Gani-Laclautre a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien, né le 19 novembre 1983, déclare être entré irrégulièrement en France au cours de l'année 2018. Par une décision du 31 janvier 2019, devenue définitive, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile. Le 11 février 2019, l'intéressé a sollicité son admission au séjour sur le fondement des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. M. A... ne s'étant pas présenté à son rendez-vous en préfecture fixé le 25 juin 2019 en vue du dépôt de sa demande de titre de séjour pour raisons de santé, le préfet de la Haute-Garonne lui a, par un arrêté du 23 septembre 2019, fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. L'intéressé n'a, toutefois, pas retiré la lettre recommandée avec accusé de réception destinée à lui notifier cet arrêté dans le délai imparti. Par un nouvel arrêté du 29 juin 2020, consécutif à l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 21 octobre 2019, le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
2. À la suite d'une audition par les services de police dans le cadre d'une procédure de retenue aux fins de vérification du droit au séjour intervenue le 6 avril 2022, le préfet de la Haute-Garonne a, par un arrêté du même jour, fait obligation à M. A... de quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. M. A... relève appel du jugement du 3 juin 2022 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. En premier lieu, le moyen tiré de ce que le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à la situation personnelle de l'appelant ne se rapporte pas à la régularité du jugement attaqué mais à son bien-fondé et est, dès lors, inopérant.
4. En second lieu, il ressort des motifs mêmes du jugement attaqué que le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments soulevés par la demande, a suffisamment répondu, au point 10 de son jugement, au moyen tiré de la méconnaissance, par la décision fixant le pays de renvoi, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité sur ce point.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. D'une part, aux termes du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
6. D'autre part, aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article R. 611-2 de ce code : " L'avis mentionné à l'article R. 611-1 est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu : / 1° D'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier ; / 2° Des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
7. Enfin, aux termes de l'article 9 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui, dans le cadre de la procédure prévue aux titres I et II du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sollicite le bénéfice des protections prévues au 10° de l'article L. 511-4 (...) [désormais 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile] est tenu de faire établir le certificat médical mentionné au deuxième alinéa de l'article 1er. (...) / Dans tous les cas, l'étranger est tenu d'accomplir toutes les formalités nécessaires à l'établissement du certificat médical pour bénéficier de la protection qu'il sollicite ". Sur renvoi de son article 11, l'article 6 du même arrêté dispose que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) ".
8. L'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale (...) sont appréciées sur la base des trois critères suivants : degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences. / Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante. / Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine ".
9. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage d'éloigner un étranger du territoire national, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences exceptionnelles sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait une éventuelle interruption des traitements suivis en France. Dans ce cadre, et dès lors qu'elle dispose d'éléments d'informations suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie qu'elle prévoit des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, l'autorité préfectorale doit, lorsqu'elle envisage de prendre une telle mesure à son égard, saisir le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et l'intégration ou le médecin de l'Office pour avis dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été victime, en mars 2005, d'une électrocution en Algérie ayant causé une brûlure au troisième degré de sa main droite et pour laquelle il indique avoir bénéficié de cinq chirurgies de reconstruction depuis son entrée en France au sein du département de chirurgie orthopédique, traumatologique et reconstructrice du centre hospitalier universitaire de Purpan afin de l'aider à améliorer sa préhension. Il ressort également des pièces du dossier, en particulier d'un certificat médical du 25 novembre 2021 émanant de ce service, qu'en raison d'une raideur majeure des articulations métacarpo-phalangiennes en extension et d'une rétraction commissurale du premier espace, l'intéressé devait subir une nouvelle intervention chirurgicale le 10 février 2022, finalement reportée au 13 avril suivant, consistant à réaliser un geste d'arthrolyse des articulations métacarpo-phalangiennes afin d'améliorer la fonction de préhension de gros objets, le prochain geste chirurgical à planifier consistant en une arthrodèse trapézo-métacarpienne afin de positionner le pouce en position de fonction.
11. S'il est constant que M. A... s'est engagé dans un lourd processus chirurgical de reconstruction de la main droite depuis son entrée en France en 2018, les certificats médicaux qu'il produit, qui sont, pour la plupart, rédigés en des termes généraux, ne permettent pas d'objectiver de manière précise et circonstanciée un tableau clinique de troubles de la main droite d'une particulière intensité et nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité pas plus qu'il ne permettent d'établir que l'intéressé ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en cas de renvoi dans son pays d'origine. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intimé aurait, lors de son audition par les services de police le 6 avril 2022, fait part d'éléments relatifs à son état de santé de manière suffisamment précise pour alerter de manière utile les services préfectoraux quant à la gravité de sa pathologie ni fait état d'une aggravation de son état de santé depuis l'avis émis, de manière récente, par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 21 octobre 2019. À l'inverse, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que l'accident dont a été victime M. A... est survenu en Algérie au cours de l'année 2005 et, d'autre part, que, dans le cadre de l'instruction de la demande de titre de séjour pour raisons de santé présentée le 11 février 2019, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine tandis que par un arrêté du 29 juin 2020, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté la demande de titre de séjour pour raisons de santé présentée par l'intéressé 11 février 2019 et lui a fait obligation de quitter le territoire français sans que ce dernier conteste la légalité de ces mesures.
12. Dès lors, en faisant à nouveau obligation de quitter le territoire français à M. A... à la suite de sa retenue pour vérification du droit au séjour le 6 avril 2022, le préfet de la Haute-Garonne, qui n'était pas tenu de saisir le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, n'a ni fait une inexacte application des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni, par voie de conséquence, entaché sa décision d'un vice de procédure au regard de celles de l'article R. 611-1 du même code ni davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle de l'intéressé.
En ce qui concerne la décision refusant un délai de départ volontaire :
13. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / 2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ; / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". L'article L. 612-3 du même code précise que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 ".
14. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas sérieusement contesté que M. A... a fait l'objet d'une première mesure d'éloignement, édictée par un arrêté préfectoral du 23 septembre 2019 adressé par une lettre recommandée avec accusé de réception qu'il s'est abstenu de retirer dans le délai imparti et qu'il a, à la suite du rejet de sa demande de titre de séjour pour raisons de santé, fait l'objet d'une nouvelle mesure d'éloignement édictée par un arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 29 juin 2020, notifié le 1er juillet suivant. Dès lors que l'intéressé s'est soustrait, a minima, à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement, et qu'il n'a pas été mesure de justifier de la possession d'un titre de voyage dans le cadre de son audition par les services de police, l'autorité préfectorale pouvait, pour ces seuls motifs, refuser de lui accorder un délai de départ volontaire. Si M. A... soutient qu'il justifiait de circonstances particulières faisant obstacle à la mesure en litige, la simple circonstance qu'il devait subir une nouvelle opération de chirurgie reconstructrice n'est, pas, à elle-seule, de nature à justifier l'octroi d'un délai de départ volontaire tandis que l'intéressé n'établit ni même n'allègue avoir demandé qu'un délai de départ volontaire lui soit accordé. Par suite, le préfet de la Haute-Garonne n'a ni fait une inexacte application de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle de l'intéressé en refusant d'accorder un délai de départ volontaire à M. A....
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
15. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Si M. A... soutient qu'il sera exposé à des conséquences psychologiques graves liées à la perte définitive de l'espoir de bénéficier d'un traitement pour son lourd handicap, l'intéressé ne se prévaut d'aucune autre circonstance, autre que celles dont il a déjà fait part aux autorités en charge d'examiner sa situation médicale, de nature à établir qu'il était, à la date de la décision en litige, personnellement exposé, en cas de retour dans son pays d'origine, à des traitements contraires à ces stipulations tandis que, ainsi qu'il a été dit, sa demande d'asile a été rejetée de manière définitive. Par suite, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en fixant le pays à destination duquel l'appelant est susceptible d'être éloigné.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
16. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". L'article L. 612-10 du même code dispose que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
17. En application de ces dispositions, l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace.
18. Si M. A... se prévaut de la circonstance qu'il n'a pas eu connaissance de l'une des deux mesures d'éloignement édictées à son endroit et indique qu'il est en situation de handicap et présente un état affaibli, ces éléments ne permettent toutefois pas de regarder l'intéressé comme justifiant de circonstances humanitaires faisant obstacle au prononcé d'une interdiction de retour alors qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui se déclare célibataire, vit en France de manière précaire et isolée et a, ainsi qu'il a été dit, fait l'objet d'une mesure d'éloignement sans délai de départ tandis que sa prise en charge médicale consiste en des gestes de reconstruction et qu'il a déclaré aux services de police que son épouse réside en Algérie ainsi que trois de leurs enfants. La situation de M. A... ne faisant pas apparaître de motifs humanitaires particuliers, le préfet de la Haute-Garonne n'a, dès lors, pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en édictant une interdiction de retour d'une durée de deux ans à son endroit. Pour les mêmes motifs, l'autorité préfectorale n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle de l'intéressé.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 6 avril 2022. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE:
Article 1 : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2023, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2023.
La rapporteure,
N. El Gani-LaclautreLe président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL21564