Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault en date du 21 janvier 2022, portant refus de séjour avec obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2201442 du 1er juillet 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2022, et des pièces, enregistrées le 26 juin 2023, ces dernières n'ayant p as été communiquées, Mme B..., représentée par Me Mazas, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 1er juillet 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault en date du 21 janvier 2022, portant refus de séjour avec obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiante ou en qualité de salariée ; subsidiairement de réexaminer sa demande et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours ;
4°) de mettre à la charge de l'État le paiement à Me Mazas d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en tant qu'il écarte le moyen tiré du défaut de motivation en droit de l'arrêté litigieux et en ce qu'il indique, à tort, qu'elle était en situation irrégulière lors de la présentation de sa demande de titre de séjour portant la mention " étudiant " ;
- la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet s'est borné à examiner une demande de renouvellement de titre de séjour portant la mention " étudiant " alors qu'elle disposait d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et sollicitait un changement de statut, en remplissant les conditions pour obtenir un premier titre de séjour portant la mention " étudiant " ;
- à titre subsidiaire elle avait demandé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", demande qui n'a pas été examinée par le préfet, lequel a donc entaché sa décision d'un défaut d'examen réel et complet de la demande dont il était saisi ;
- elle est également entachée d'une erreur d'appréciation tant en ce qu'elle concerne la demande de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " que s'agissant de la demande de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Toulouse du 23 novembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur.
- et les observations de Me Lambert, représentant Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante marocaine née le 21 février 1992, est entrée sur le territoire français le 17 mai 2017 munie d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité de conjointe de Français, renouvelé jusqu'au 3 mai 2020. Elle a sollicité, le 10 août 2020, le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 4 décembre 2020, le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, mais, par un jugement n° 2100703 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté. Par un nouvel arrêté du 21 janvier 2022, le préfet de l'Hérault a pris à son encontre un arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
2. Mme B... relève appel du jugement du 1er juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 janvier 2022 précité.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Si l'appelante soutient que le jugement attaqué a écarté à tort le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de l'arrêté litigieux et a indiqué, à tort, qu'elle était en situation irrégulière lors de la présentation de sa demande de titre de séjour portant la mention " étudiant ", cette argumentation, qui concerne le bien-fondé de ce jugement est sans influence sur la régularité de celui-ci.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté litigieux :
4. La circonstance que le refus de délivrance d'un titre de séjour ne vise pas les dispositions de l'article L. 433-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, régissant le changement de statut de " vie privée et familiale " à " salarié " n'est pas à elle seule de nature à entacher ce refus d'irrégularité. Au demeurant, l'intéressée à la date de sa demande de titre de séjour, soit en décembre 2021, ne détenait pas un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", mais une autorisation provisoire de séjour délivrée à la suite de l'annulation, citée au point 1, d'une précédente décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, assortie d'une injonction de réexamen de la demande de l'intéressée. Le moyen tiré de ce que cette décision n'est pas motivée en droit ne peut donc qu'être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté litigieux :
5. En premier lieu et ainsi qu'exposé précédemment, le refus de titre de séjour opposé à l'appelante et ici en cause fait suite au réexamen de la demande de titre de séjour prescrit par le tribunal administratif de Montpellier dans son jugement précité du 8 avril 2021. Si le préfet a, conformément aux motifs retenus par ce jugement, prioritairement examiné la demande de l'intéressée de délivrance d'un titre en qualité d'étudiante, alors qu'il ressortait, du reste de la demande adressée au préfet par le 20 décembre 2021, que cela correspondait à ce qu'elle sollicitait à titre principal, il ressort des termes de sa décision que cette autorité a par ailleurs examiné sa demande de délivrance de titre de séjour en qualité de salariée en relevant qu'elle n'en remplissait pas les conditions au regard des dispositions combinées des articles L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles R. 5221-2, R. 5221-20 et suivants du code du travail. Par suite et comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, alors que, par ailleurs et en tout état de cause, le préfet avait, par deux courriels des 18 octobre et 20 décembre 2021, renseigné l'intéressée sur la procédure à suivre pour obtenir un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, le moyen tiré du défaut d'examen réel et complet de sa demande doit être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an ".
7. Ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, la demande de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " de Mme B... devait être regardée comme une première demande. Cependant, le préfet était en droit, eu égard à la circonstance que l'intéressée n'est pas entrée en France sous couvert d'un visa de long séjour pour effectuer des études, d'examiner cette demande au regard du sérieux et de la cohérence des études concernées. Par ailleurs, l'intéressée a suivi une formation d'assistance maternelle dispensée par le Greta de Montpellier, de septembre 2020 à février 2021, avant de s'inscrire au titre de l'année universitaire 2021-2022 à une formation universitaire " didactique de français langue étrangère ", alors qu'elle est titulaire d'une licence " sciences de la terre et de l'univers " obtenue dans son pays d'origine en 2015. Il s'ensuit, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, que le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur de droit et d'appréciation en estimant qu'au regard de son cursus et des changements d'orientation ainsi opérés, son projet d'études supérieures ne présentait pas, à la date de sa décision, de corrélation entre ces différentes formations et que son parcours professionnel ne pouvait être regardé comme cohérent.
8. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) ". Par ailleurs, l'article 9 du même accord stipule : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". En outre, l'article R. 5221-20 du code du travail prévoit que : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : (...) / 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; (...)/ 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 (...) " .
9. Ainsi qu'il a déjà été dit précédemment, à la date à laquelle Mme B... a sollicité, à titre subsidiaire, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", elle ne disposait que d'une autorisation provisoire de séjour. Elle n'est donc pas fondée à invoquer, en tout état de cause, la méconnaissance des dispositions de l'article L. 433-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. De surcroît, il ressort des pièces du dossier qu'elle ne justifiait pas satisfaire aux conditions posées par les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain et notamment avoir présenté un contrat de travail visé par les autorités compétentes. Enfin, il ressort des pièces du dossier que le salaire versé par son employeur est inférieur à la rémunération minimale prévue par les dispositions du 6° de l'article R. 5221-20 du code du travail. En conséquence, le moyen tiré de l'erreur de droit et d'appréciation qui entacherait la décision du préfet refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salariée ne peut qu'être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 ne peuvent également qu'être rejetées.
DÉCIDE:
Article 1 : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2023, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2023.
Le président-assesseur,
P. Bentolila
Le président-rapporteur,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL22626