Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er et 16 juillet 2024, la société par actions simplifiée unipersonnelle Abis security, représentée par Me Maamouri, demande au juge des référés de la cour :
1°) de suspendre l'exécution de la décision du 1er décembre 2022 par laquelle la commission de discipline du Conseil national des activités privées de sécurité a prononcé à son encontre une interdiction d'exercer toute activité de sécurité privée pour une durée de quatre mois, assortie d'une pénalité financière de 10 000 euros ;
2°) de mettre à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la condition relative à l'urgence est satisfaite dès lors que l'exécution de la décision litigieuse aurait des conséquences graves et irrémédiables, en ce qu'elle conduirait à la perte de ses clients, au licenciement de ses salariés et à la cessation de son activité ;
- par ailleurs, si des erreurs de saisie ont été commises dans le registre unique du personnel et les déclarations sociales nominatives adressées aux services de l'URSSAF s'agissant des fonctions exercées par trois agents, elles doivent être rapportées au nombre total de salariés de l'entreprise, soit 150 au moment des faits ;
- de plus, elle n'a jamais embauché trois salariés sans carte professionnelle pour les affecter à des tâches d'agent de sécurité ;
- en outre, la sanction infligée est disproportionnée au regard des faits reprochés ;
- par ailleurs, elle n'a jamais été sanctionnée auparavant pour avoir employé des agents de sécurité non titulaires de la carte professionnelle.
Par un mémoire, enregistré le 15 juillet 2024, le Conseil national des activités privées de sécurité, représenté par Me Claisse, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelante la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative.
Il soutient que :
- la condition d'urgence n'est pas satisfaite, en ce que l'appelante n'établit pas que l'exécution de la décision litigieuse entraînerait sa liquidation judiciaire et eu égard à l'intérêt public qui s'attache à cette exécution, s'agissant de la troisième procédure disciplinaire engagée à l'encontre de cette société ;
- les trois manquements concernés dans le cadre de la présente instance sont établis et de nature à justifier la sanction en litige ;
- ainsi, les trois agents en cause ont bien été recrutés en qualité d'agents de sécurité, alors que les déclarations du dirigeant de l'entreprise et les contrats de travail de ces agents ne l'indiquaient pas, ce qui révèle une absence de loyauté et de transparence envers les autorités publiques, et ils n'étaient pas titulaires de la carte professionnelle pour ce faire ; par ailleurs, le registre unique du personnel n'était pas correctement tenu ;
- de plus, la société a déjà été sanctionnée auparavant pour avoir commis d'autres manquements.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu la requête n° 24TL01669 par laquelle la société Abis security demande l'annulation du jugement du 13 juin 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du Conseil national des activités privées de sécurité du 1er décembre 2022.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Vu la décision du 1er septembre 2022 par laquelle le président de la cour a désigné M. Éric Rey-Bèthbéder, président de la 3ème chambre, pour statuer sur les demandes en référé en application des dispositions de l'article L. 555-1 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 16 juillet 2024, en présence de Mme Lanoux, greffière d'audience :
-le rapport de M. Rey-Bèthbeder, président,
-et les observations de Me Maamouri, représentant la société Abis security ainsi que celles de Me Ricci substituant Me Claisse, représentant le Conseil national des activités privées de sécurité.
Considérant ce qui suit :
1. À la suite d'un contrôle réalisé le 30 décembre 2021 et sur le fondement d'un compte rendu final de contrôle daté du 25 février 2022, le directeur du Conseil national des activités privées de sécurité a, en application des dispositions des articles L. 634-11 et R. 634-8 du code de la sécurité intérieure, saisi la commission de discipline, en raison de la méconnaissance par la société Abis security du devoir de loyauté et de transparence vis-à-vis des autorités publiques et donc la violation des dispositions de l'article R. 631-13 du code de la sécurité intérieure, l'emploi par cette société de trois personnes non titulaires d'une carte professionnelle en qualité d'agents privés de sécurité, le défaut de vérification par l'employeur de leur capacité à exercer, en méconnaissance des dispositions des articles L. 612-20 et R. 631-15 du code de la sécurité intérieure, et, enfin, la méconnaissance de la législation du travail et notamment de la mauvaise tenue du registre unique du personnel, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 631-4 du code de la sécurité intérieure et des articles L. 1221-13 et D. 1221-23 du code du travail. La commission de discipline a, par décision du 1er décembre 2022, infligé à l'encontre de la société précitée la sanction d'interdiction temporaire d'exercer toute activité de sécurité privée pour une durée de quatre mois assortie d'une pénalité financière de 10 000 euros. Dans la présente instance, la société Abis security demande au juge des référés de la présente cour, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de cette décision.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure : " Nul ne peut être employé ou affecté pour participer à une activité mentionnée à l'article L. 611-1 : (...) Le respect de ces conditions est attesté par la détention d'une carte professionnelle délivrée selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat. " Aux termes de l'article R. 631-15 de ce code : " Vérification de la capacité d'exercer. / Les personnes morales et services internes de sécurité et leurs dirigeants s'interdisent d'employer ou de commander, même pour une courte durée, des personnels ne satisfaisant pas aux conditions de qualification professionnelle ou ne possédant pas les autorisations valides requises pour exercer leurs missions. (...) ".
4. Il résulte de l'instruction et notamment des pièces produites par le Conseil national des activités privées de sécurité afin d'établir la matérialité des trois manquements reprochés à la société appelante ainsi que de la circonstance que celle-ci a déjà été sanctionnée à deux reprises avant l'infliction de la sanction ici en cause, qu'aucun des moyens de la requête n'est susceptible, en l'état de l'instruction, de créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse.
5. Il résulte de ce qui précède que la société Abis security n'est pas fondée à demander la suspension de l'exécution de la décision du 1er décembre 2022 de la commission de discipline du Conseil national des activités privées de sécurité.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité, qui n'est pas, dans la présente instance de référé, la partie perdante, la somme demandée par la société Abis security au titre des dispositions de l'article L. 761 du code de justice administrative.
7. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la société Abis security la somme demandée par le Conseil national des activités privées de sécurité sur le fondement des mêmes dispositions.
ORDONNE :
Article 1er : La requête n° 24TL01670 de la société Abis security est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du Conseil national des activités privées de sécurité relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société par actions simplifiée unipersonnelle Abis security et au Conseil national des activités privées de sécurité.
Fait à Toulouse, le 16 juillet 2024.
Le juge d'appel des référés,
Éric Rey-Bèthbéder
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
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No 24TL01670