Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Par un jugement n° 2205717 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2023, Mme B... épouse C..., représentée par Me Bautès, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2022 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de la décision à intervenir, si besoin sous astreinte, ou, subsidiairement, d'enjoindre au préfet de procéder au réexamen de sa situation administrative dans le délai de quinze jours et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur la décision portant refus de séjour :
- elle est entachée d'une erreur de droit concernant l'obligation d'un visa court séjour mention " ascendant à charge " ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de l'article 7 bis b) de l'accord franco-algérien ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de l'article 6-5 du même accord ;
- elle porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'il entend reprendre les moyens de défense exposés en première instance.
Par ordonnance du 31 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 21 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chabert, président.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... épouse C..., née le 18 novembre 1953, de nationalité algérienne, a sollicité le 17 janvier 2022 la délivrance d'un premier certificat de résidence algérien d'une durée de dix ans en tant qu'" ascendant à charge de français ". Par un arrêté du 6 octobre 2022, le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande et l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Par la présente requête, Mme B... épouse C... relève appel du jugement du 30 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant refus de séjour :
2. Aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : / (...) b) À l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi qu'aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge (...) ". L'autorité administrative, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à la délivrance d'un certificat de résidence au bénéfice d'un ressortissant algérien qui fait état de sa qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français, peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que l'intéressé ne saurait être regardé comme étant à la charge de son descendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son descendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins, ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.
3. L'appelante soutient que le préfet de l'Hérault aurait méconnu les stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien susmentionnées dès lors qu'elle est entrée régulièrement sur le territoire français. S'il est mentionné un courrier électronique du 12 avril 2022 du consulat de France à Alger indiquant que l'intéressée n'a jamais fait part de son intention de s'installer en France et que le visa C mention " ascendant non à charge " délivré à l'intéressée ne lui permettait pas de solliciter un certificat de résidence algérien de 10 ans, il ne ressort pas de ces mentions que le préfet, aurait entendu opposer à la demande la mention de son visa ou l'absence de visa long séjour. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
4. Mme B... épouse C..., veuve depuis le 9 avril 2019 et mère de cinq enfants majeurs, dont quatre résident en France, soutient qu'elle ne dispose d'aucune ressource propre et qu'elle était à la charge de son fils ressortissant français, avant son entrée sur le territoire français le 7 janvier 2022. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la requérante est entrée en France avec un visa mention " ascendant non à charge ", qu'elle effectue des allers-retours entre la France et l'Algérie et qu'elle perçoit en Algérie une pension de réversion de 16 570 dinars, équivalant à 109 euros environ par mois, alors qu'il n'est versé, en comparaison de ses ressources, aucun élément justificatif de ses dépenses mensuelles moyennes en Algérie. La circonstance qu'elle aurait bénéficié de virements de 200 euros de la part de son fils, notamment au cours de la période de janvier à décembre 2020, puis 200 à 400 euros, durant la période de janvier à octobre 2021, quelques mois avant son arrivée en France, ne suffit pas à établir que Mme B... épouse C... aurait fait l'objet d'une prise en charge régulière par son fils avant son entrée sur le territoire français. Par suite et dans ces conditions, l'appelante n'apportant pas d'éléments suffisants de nature à établir que sa pension de retraite serait insuffisante dans son pays d'origine, et quand bien même elle résiderait chez son fils et serait prise en charge par ce dernier depuis son entrée en France, le préfet de l'Hérault n'a pas fait une inexacte application des stipulations précitées de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié en prenant la décision attaquée.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien modifié : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; / (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... épouse C... est entrée en France le 7 janvier 2022 sous couvert d'un visa de court séjour portant la mention " ascendant non à charge " et que, si elle fait valoir qu'une aide financière de ses enfants résidant en France lui est désormais nécessaire, elle n'établit ni même n'allègue qu'elle ne pourrait pas percevoir cette aide en cas de retour dans son pays d'origine, notamment par le biais de virements internationaux. Par ailleurs, l'appelante est entrée en France à une date récente après avoir vécu jusqu'à l'âge de 69 ans dans son pays d'origine, l'Algérie, dans lequel elle a constitué l'essentiel de sa vie personnelle et familiale et où résident notamment une de ses filles et ses petits-enfants. Dans ces conditions, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, la décision refusant son admission au séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Compte-tenu de ce qui a été dit précédemment, l'appelante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour au soutien de ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.
8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt, et même en tenant compte des conséquences spécifiques à la mesure d'éloignement, le préfet de l'Hérault n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant la mesure d'éloignement à l'encontre de la requérante.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... épouse C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... épouse C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... épouse C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.
Le président-rapporteur,
D. Chabert
L'assesseur le plus ancien,
F. Jazeon
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 23TL00280