Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 2 mai 2022, 25 avril 2023, 15 avril 2024 et 5 septembre 2024, la société par actions simplifiée Malgec - Intermarché, représentée par la SELARL Maillot Avocats et Associés, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de constater l'illégalité de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial du 10 novembre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er mars 2022 par lequel le maire de La Calmette a délivré à la société civile immobilière Immocalm un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la construction d'un bâtiment destiné à recevoir une surface commerciale à l'enseigne Super U ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Calmette une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable, dès lors qu'elle justifie d'un intérêt pour agir contre la décision contestée ;
-l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial et le permis de construire sont insuffisamment motivés en ce qui concerne la localisation du projet et l'animation de la vie urbaine et rurale ;
- le projet de création d'un nouveau commerce alimentaire dans le secteur concerné s'inscrit dans un ensemble commercial au sens de l'article L. 752-3 du code de commerce qui n'a pas été pris en compte par la Commission nationale d'aménagement commercial ; la demande d'autorisation d'exploitation commerciale ne comporte pas les éléments requis pour les projets de création d'un ensemble commercial au sens de l'article R. 752-6 du même code ;
- au regard des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce, le projet autorisé est contraire à l'objectif d'aménagement du territoire dès lors qu'il renforce une offre en matière de vente de produits alimentaires déjà importante dans la zone d'aménagement concerté du Petit Verger sans apporter de diversification commerciale alors qu'il existe une évasion élevée pour l'offre non alimentaire ;
- ce projet entraîne un gaspillage d'équipements commerciaux de nature à nuire à l'animation de la vie urbaine et rurale et ne répond pas au besoin identifié par le schéma de cohérence territoriale Sud Gard ;
- il est de nature à engendrer un impact visuel négatif en raison d'un volet architectural et paysager ne s'insérant pas dans son environnement ;
- les parcs de stationnement de plain-pied ne permettent pas une consommation économe de l'espace et aucune mesure n'est propre à mutualiser les aires de stationnement entre les projets de l'ensemble commercial malgré leur proximité immédiate ;
- le projet, qui engendre une artificialisation des sols, ne pouvait être autorisé au regard des dispositions de l'article 215 de la loi n° 2021-104 du 22 août 2021 modifiant l'article L. 752-6 du code de commerce, lequel est applicable au présent litige.
Par un mémoire en intervention volontaire, enregistré le 18 mai 2022, la société par actions simplifiée Limadis, représentée par Me Jourdan, demande à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 1er mars 2022 par lequel le maire de La Calmette a accordé à la société Immocalm un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la construction d'un bâtiment destiné à recevoir une surface commerciale à l'enseigne Super U ;
2°) de mettre à la charge de la commune de La Calmette la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- son intervention volontaire est recevable dès lors que la délimitation de la zone de chalandise du projet est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, qu'il existe un chevauchement des zones de chalandise du magasin projeté et du magasin qu'elle exploite à Nîmes et que le projet aura une incidence significative sur son activité commerciale ;
- le projet ne répond pas au critère de l'aménagement du territoire prévu à l'article L. 752-6 du code de commerce dès lors qu'il n'est pas nécessaire au regard de la population dans la zone de chalandise et qu'il porte atteinte à l'animation de la vie locale de la commune de La Calmette en accentuant également une dévitalisation commerciale du centre-ville de Nîmes ;
-le projet litigieux n'est pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale Sud Gard approuvé en décembre 2019 en ce qu'il ne correspond pas à un complément par une activité alimentaire en supermarché et en supérette de 300 m² à 1 500 m² de surface de vente ; qu'il prévoit la création d'une galerie marchande de deux boutiques d'une surface de vente de 139 m² et 61 m² et que la commune de La Calmette ne saurait développer une offre commerciale en périphérie ou entrée de ville ou village en format supérieur à 300 m² ;
- le terrain d'assiette ne correspond pas aux caractéristiques d'une dent creuse et son urbanisation contribuera à l'étalement urbain ;
- les enseignes des deux boutiques de la galerie marchande ne sont pas connues ;
- le critère tiré du développement durable prévu à l'article L. 752-6 du code de commerce n'est pas respecté compte tenu de l'imperméabilisation des sols ;
- le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale Sud Gard maintient la nécessité de rationaliser et mutualiser les aires de stationnement ;
- ce projet constitue une artificialisation des sols au sens de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 ;
- le projet n'est pas suffisamment réfléchi en matière de gestion rationnelle des eaux pluviales au regard du document d'orientations générales du schéma de cohérence territoriale Sud Gard ; les projets immobiliers doivent être soumis aux prescriptions posées par le document d'orientation et d'objectifs de ce même schéma ;
- le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhône Méditerranée recommande de limiter l'imperméabilisation nouvelle des sols, de réduire les impacts des nouveaux aménagements et de désimperméabiliser l'existant ;
- le projet ne vise nullement à la transparence hydraulique de son aménagement vis-à-vis du ruissellement des eaux pluviales ; il n'est prévu aucun traitement paysager, aucune infiltration ou rétention pour le site dans le cadre de la récupération des eaux pluviales en méconnaissance du schéma de cohérence territoriale Sud Gard et du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée ;
- le projet va contribuer à dénaturer l'aspect paysager du site naturel actuel, ne s'inscrivant pas dans son environnement urbain et paysager de qualité ; aucune étude paysagère n'a été fournie par le pétitionnaire ; le projet ne fait pas appel aux matériaux caractéristiques des filières de production locale.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 août 2022, 11 mai 2023 et 30 mai 2024, la société Immocalm, représentée par la SCP CGCB et Associés, conclut au rejet de la requête de la société Malgec - Intermarché, à ce que ne soit pas admise l'intervention de la société Limadis et à ce que soit mise à la charge de la société Malgec - Intermarché la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à ce que soit mise à la charge de la société Limadis la même somme sur le même fondement.
Elle fait valoir que :
- la requête n'est pas recevable au regard des articles L. 600-1-2 et R. 600-4 du code de l'urbanisme dès lors que la société Malgec - Intermarché ne démontre pas à quel titre elle sollicite l'annulation du permis de construire en litige et n'apporte pas la preuve de sa propriété ;
- la société Limadis ne dispose pas de la qualité de concurrent du projet lui donnant intérêt pour intervenir ;
- aucun des moyens invoqués par la société requérante et la société intervenante n'est fondé.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 mai 2023 et 6 juin 2023, la commune de La Calmette, représentée par la SELARL Favre de Thierrens-Barnouin-Vrignaud-Mazars-Drimaracci, conclut, dans le dernier état de ses écritures au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de de la société Malgec - Intermarché la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la société requérante ne justifie pas d'un intérêt à agir contre le permis de construire en litige et n'a pas joint à sa requête la preuve de sa propriété ou de la jouissance du bien qu'elle exploite ; sa requête est irrecevable au regard des articles L. 600-1-2 et R. 600-4 du code de l'urbanisme ;
- l'intervention volontaire de la société Limadis est irrecevable ;
- aucun des moyens de la requête et de l'intervention n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 ;
- le décret n° 2022-1312 du 13 octobre 2022 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chabert, président ;
- les conclusions de M. Diard, rapporteur public ;
- les observations de Me Coëlo, représentant la société Malgec - Intermarché ;
- les observations de Me Vrignaud, représentant la commune de La Calmette.
- et les observations de Me Senanedesch, représentant la société Immocalm.
Considérant ce qui suit :
1. La société Immocalm a déposé le 6 novembre 2018 auprès des services de la commune de La Calmette (Gard) une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la construction d'un hypermarché à l'enseigne Super U sur un terrain situé Les Codes Nord dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté du Petit Verger. L'avis favorable rendu sur ce projet le 30 janvier 2019 par la commission départementale d'aménagement commercial a fait l'objet d'un recours devant la commission nationale par la société Malgec - Intermarché qui exploite un magasin Intermarché sur la commune de Saint-Geniès-de-Malgoirès. La Commission nationale d'aménagement commercial a émis, le 27 juin 2019, un avis défavorable à ce projet. Le maire de La Calmette, par un arrêté du 10 septembre suivant, a refusé la délivrance du permis de construire sollicité par la société Immocalm. Par un arrêt n° 19MA04716 du 23 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie par la société pétitionnaire, a annulé l'arrêté de refus de permis de construire du 10 septembre 2019 et enjoint au maire de La Calmette de statuer à nouveau sur la demande après un nouvel examen par la Commission nationale d'aménagement commercial. Après un avis favorable émis par la commission nationale le 10 novembre 2021, le maire de La Calmette a délivré le 1er mars 2022 à la société Immocalm le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale qu'elle avait sollicité le 6 novembre 2018. Par la présente requête, la société Malgec - Intermarché demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures, après avoir constaté l'illégalité de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial du 10 novembre 2021, d'annuler ce permis de construire en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.
Sur les fins de non-recevoir opposées à l'intervention volontaire en demande de la société Limadis :
2. Il ressort des pièces du dossier que la socité Limadis exploite sur le territoire de la commune de Nîmes un magasin Carrefour qui se trouve à environ 17 kilomètres du projet en litige correspondant à un temps de trajet en voiture approximatif de 20 minutes. Si ce magasin Carrefour est en dehors de la zone de chalandise de l'hypermarché Super U autorisé par le permis de construire en litige, la société Limadis soutient que sa propre zone de chalandise chevauche celle du projet et que la commune de La Calmette est comprise dans sa zone de chalandise secondaire. Elle fait également valoir, sans être sérieusement contredite, que le taux de pénétration de sa clientèle sur le territoire de La Calmette était de 41,8 % en 2019 et que les actifs de sa zone de chalandise entrant à la Calmette pour y travailler proviennent en partie de la commune de Nîmes. Dans ces conditions, la société Limadis doit être regardée comme justifiant d'un intérêt à intervenir au soutien de la requête tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 1er mars 2022 par le maire de La Calmette à la société Immocalm en tant que ce permis vaut autorisation d'exploitation commerciale. Par suite, contrairement à que font valoir les parties en défense, son intervention doit être admise.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés ". L'article L. 752-6 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / (...) e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; (...) ".
En ce qui concerne la motivation de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial et du permis de construire :
4. Si, en vertu de l'article R. 752-16 du code de commerce, l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial doit être motivé, cette obligation n'implique pas que celle-ci soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect, par le projet qui lui est soumis, de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par les dispositions législatives applicables, ni de répondre expressément aux arguments invoqués devant elle lors de l'instruction de la demande.
5. L'avis favorable du 10 novembre 2021 émis par la Commission nationale d'aménagement commercial cite les textes dont il a été fait application, l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Marseille le 23 décembre 2020 mentionné au point 1 du présent arrêt ainsi que la transmission par la société pétitionnaire d'un dossier de demande mis à jour et d'une étude d'impact. Pour statuer en faveur du projet de la société Immocalm, la commission nationale a pris en compte sa compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale Sud Gard applicable ainsi que le complément qu'il va apporter à l'offre commerciale des magasins de proximité de la commune de La Calmette en analysant notamment la croissance de sa population. La commission a également pris en compte le taux de vacance commerciale dans l'environnement proche, les conditions d'accessibilité et de desserte du projet et la superficie des espaces verts et des stationnements perméables. S'il est reproché à cet avis de ne pas s'être prononcé sur la localisation du projet et l'animation de la vie urbaine et rurale, il résulte de ce qui vient d'être exposé que la Commission nationale d'aménagement commercial, qui n'est pas tenue de prendre parti sur l'ensemble des critères et objectifs prévus à l'article L. 752-6 du code de commerce cité au point 3, a suffisamment motivé son avis favorable au projet présenté par la société Immocalm. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au maire de La Calmette de motiver l'arrêté par lequel il a accordé à cette société le permis de construire en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale pour le projet en litige. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'avis de la commission nationale et de l'arrêté attaqué ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne l'existence d'un ensemble commercial :
6. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de commerce, dans la rédaction applicable à l'espèce : " Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : / 1° La création d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 1 000 mètres carrés, résultant soit d'une construction nouvelle, soit de la transformation d'un immeuble existant ; (...) ". L'article L. 752-3 du même code dispose que : " I. Sont regardés comme faisant partie d'un même ensemble commercial, qu'ils soient ou non situés dans des bâtiments distincts et qu'une même personne en soit ou non le propriétaire ou l'exploitant, les magasins qui sont réunis sur un même site et qui : / 1° soit ont été conçus dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier, que celle-ci soit réalisée en une ou plusieurs tranches ; / 2° soit bénéficient d'aménagements conçus pour permettre à une même clientèle l'accès des divers établissements ; / 3° soit font l'objet d'une gestion commune de certains éléments de leur exploitation (...) ; / 4° soit sont réunis par une structure juridique commune, contrôlée directement ou indirectement par au moins un associé. / II. - Toutefois, les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux zones d'aménagement concerté créées dans un centre urbain, en vertu de l'article L. 311-1 du code de l'urbanisme ". Enfin aux termes de l'article R. 752-6 du même code : " I.- La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments mentionnés ci-après ainsi que, en annexe, l'analyse d'impact définie au III de l'article L. 752-6. / 1° Informations relatives au projet : / (...) b) Pour les projets de création d'un ensemble commercial : / - la surface de vente globale ; / - la surface de vente et le secteur d'activité de chacun des magasins de plus de 300 mètres carrés de surface de vente ; / - l'estimation du nombre de magasins de moins de 300 mètres carrés de surface de vente et de la surface de vente totale de ces magasins ; (...) ".
7. Si un ensemble commercial doit en principe, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, faire l'objet d'une demande d'autorisation unique, comportant l'analyse de l'impact global du projet sur la clientèle et les équipements existant dans la zone d'attraction délimitée au vu de cet ensemble, il est toutefois loisible à la Commission nationale d'aménagement commercial d'examiner de façon distincte chacune des demandes se rapportant à ce même ensemble et de prendre des décisions séparées, dès lors que, ayant analysé ces demandes lors d'une même séance, elle a été en mesure, sur la base des éléments fournis par les services instructeurs, de porter une appréciation globale sur l'ensemble formé par les demandes fractionnées.
8. Le projet de la société Immocalm porte sur la création d'un ensemble commercial composé d'un hypermarché à l'enseigne Super U d'une surface de vente de 3 482 m², de deux boutiques de 139 m² et 61 m², soit un total de 3 682 m², et d'un " drive " de cinq pistes représentant 364 m² d'emprise au sol. Il ressort des pièces du dossier que cet ensemble commercial doit s'implanter dans la zone d'aménagement concerté du Petit Verger au sein de laquelle un supermarché Lidl sera également installé pour une surface de vente de 1 429,63 m² après transfert et extension d'un magasin déjà existant à proximité. Par ailleurs, il existe dans la zone commerciale de la Carbonière, située à proximité de la zone d'aménagement concerté du Petit Verger, un magasin existant exploité sous l'enseigne Casino d'une surface de vente de 2 310 m².
9. D'une part, contrairement à ce que soutient la société requérante, le magasin Casino existant implanté dans la zone d'activité de la Carbonière ne peut être regardé comme formant avec le projet en litige un ensemble commercial dès lors qu'il n'a pas été réalisé initialement dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier et ne bénéficie pas d'aménagements conçus pour permettre à une même clientèle l'accès des divers établissements.
10. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la zone d'aménagement concerté du Petit Verger comprend la délimitation de trois zones commerciales distinctes dont les deux premières ont vocation à accueillir respectivement le futur magasin Lidl et l'hypermarché Super U autorisé par le permis de construire en litige. Il ressort également des pièces du dossier que la Commission nationale d'aménagement commercial s'est prononcée le 21 mars 2019 en faveur du projet de déplacement et d'extension du magasin Lidl, pour une surface de vente passant de 729,63 m² à 1 429,63 m², avant de rendre le 27 juin 2019 un avis défavorable au projet de la société Immocalm, lequel prend en compte le magasin alimentaire Lidl situé à proximité. Il ressort également des pièces du dossier, en particulier de la demande d'autorisation d'exploitation commerciale, que la société pétitionnaire a mentionné le projet de création par transfert et extension du magasin Lidl en faisant apparaître la localisation du magasin existant ainsi que son prochain lieu d'implantation à proximité du projet en litige. En outre, le rapport d'instruction devant la commission nationale, lors du réexamen de la demande de la société Immocalm à la suite de l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Marseille, rappelle notamment l'avis de synthèse favorable émis par la direction départementale des territoires et de la mer du Gard confirmé en 2021 mentionnant la surface de vente de 1 437 m² du magasin Lidl située à proximité. Dans ces conditions, alors que la commission nationale s'était déjà prononcée en faveur du projet porté par l'enseigne Lidl et que le magasin Casino existant ne relève pas de la même opération d'aménagement et ne bénéficie pas d'aménagement permettant à la clientèle un accès aux différents établissements, le moyen tiré de la nécessité pour la société Immocalm de déposer une demande au titre d'un ensemble commercial composé des trois magasins Casino, Lidl et Super U en application des articles L. 752-6 et R. 752-6 du code de commerce ne peut être accueilli.
En ce qui concerne la compatibilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale Sud Gard approuvé le 10 décembre 2019 :
11. L'article L. 600-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsqu'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol ou l'opposition à une déclaration de travaux régies par le présent code a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation ou la déclaration confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à la date d'intervention de la décision annulée sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire. ". Aux termes de l'article L. 600-13 du même code : " Les dispositions du présent livre sont applicables aux recours pour excès de pouvoir formés contre les permis de construire qui tiennent lieu d'autorisation au titre d'une autre législation, sauf disposition contraire de cette dernière. ".
12. Ainsi qu'il a été exposé au point 1 du présent arrêt, le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré le 1er mars 2022 par le maire de La Calmette à la société Immocalm fait suite à l'annulation, par l'arrêt du 23 décembre 2020 de la cour administrative d'appel de Marseille, du refus opposé initialement à cette demande le 10 septembre 2019 après avis défavorable de la Commission nationale d'aménagement commercial du 27 juin 2019. Il ressort des mentions figurant dans l'avis favorable émis par la commission nationale le 10 novembre 2021, dans le cadre du réexamen de la demande, que la société Immocalm a confirmé sa demande de permis de construire le 6 janvier 2022. Dans ces conditions, en application des dispositions précitées des articles L. 600-2 et L. 600-13 du code de l'urbanisme, sa demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale a été examinée sur le fondement des dispositions d'urbanisme qui étaient en vigueur à la date du refus illégalement opposé, soit le 10 septembre 2019. Par suite, les moyens invoqués par la société Limadis, intervenante en demande, tirés de l'incompatibilité du projet en litige avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale Sud Gard dans sa version révisée approuvée par délibération du syndicat mixte du 10 décembre 2019 ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.
En ce qui concerne les critères et objectifs prévus par l'article L. 752-6 du code de commerce :
13. Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce citées au point 3 du présent arrêt que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.
S'agissant de l'aménagement du territoire :
14. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est compris dans la zone commerciale 2 de la zone d'aménagement concerté du Petit Verger qui se situe en continuité de la trame urbaine à 650 mètres du centre-ville de la commune de La Calmette. Cette commune a été identifiée par le document d'aménagement artisanal et commercial du schéma de cohérence territoriale Sud Gard, dans sa version approuvée le 6 septembre 2007, comme un secteur disposant d'une faible armature commerciale avec quarante établissements de détail où existe une évasion commerciale élevée, certes plus importante dans les commerces non-alimentaires, mais qui reste conséquente à hauteur de 40 % en matière alimentaire vers la commune de Nîmes. Il ressort également des pièces du dossier que l'hypermarché Super U a vocation à compléter l'offre commerciale des magasins de proximité de la commune, évitant ainsi aux habitants de la zone de chalandise des temps de parcours plus importants vers les communes de Nîmes, Uzès ou encore Alès dans le cadre d'achats courants, sans que la densité de l'offre commerciale ne puisse être prise en compte dans les critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce. Par ailleurs, dans son avis favorable émis à l'occasion du réexamen de la demande de la société Immocalm, le ministre du commerce a relevé que la commune de La Calmette a vu sa population croître de 17,8 % sur une période de dix ans entre 2008 et 2018 alors que la population de la zone de chalandise a connu une croissance démographique de l'ordre de 15 % pour une moyenne départementale dans le Gard de 7,4 % sur la même période. En outre, le projet a vocation à participer à la mixité fonctionnelle de la zone d'aménagement concerté du Petit Verger déjà composée de plusieurs commerces, notamment une banque, une épicerie-primeur, une pharmacie, deux boulangeries, un opticien-vendeur de matériel auditif, un magasin d'alimentation bio et plusieurs services notamment un cabinet médical, un laboratoire d'analyses et une auto-école. Enfin, la seule circonstance que les enseignes des cellules commerciales du projet n'étaient pas définitives lors de la demande d'autorisation d'exploitation commerciale ne suffit pas à caractériser une atteinte à l'animation de la vie locale, alors en outre que le dossier précise l'affectation des surfaces de vente pour la galerie marchande composée de deux boutiques, seule mention exigée par les textes applicables, notamment l'article R. 752-6 du code de commerce. Dans ces conditions, alors qu'il n'est pas démontré que la création de cet établissement commercial entraînera de nouvelles friches commerciales ou accentuera la dévitalisation du centre-ville de Nîmes comme le soutient la société intervenante, le projet n'est pas de nature à compromettre la réalisation des objectifs d'animation de la vie urbaine et rurale et d'intégration urbaine prévus au titre de l'aménagement du territoire.
15. S'il est vrai que le projet s'implante sur 51 087 m² d'espaces non artificialisés et que la construction ainsi que les espaces de stationnement se révèlent consommateurs de foncier ou d'espaces supplémentaires ainsi que le relèvent le ministre en charge de l'urbanisme dans son avis défavorable du 9 novembre 2021 et la direction départementale des territoires et de la mer du Gard dans son rapport d'instruction du 10 novembre 2021, il ressort toutefois des pièces du dossier que le terrain d'assiette est compris dans le périmètre d'extension de la zone d'aménagement concerté du Petit Verger en périphérie de la commune de La Calmette ainsi qu'il a été exposé au point précédent. Le plan local d'urbanisme de la commune classe ce secteur en zone à urbaniser 2AUE destinée à accueillir à titre principal des activités commerciales et artisanales dans un compartiment de terrain nettement délimité, à l'est, par la partie déjà urbanisée de la commune de La Calmette et, à l'ouest, par la route départementale 936 longeant la voie rapide reliant Nîmes à Alès. L'hypermarché Super U devant s'implanter au sein de la zone commerciale 2, laquelle est séparée par une voie de la zone commerciale 1 où se situe le nouveau magasin Lidl évoqué au point 10 du présent arrêt, l'absence de mutualisation des aires de stationnement entre les établissements de la zone ne suffit pas, à elle seule, à caractériser une consommation excessive de l'espace. Enfin, les sociétés requérante et intervenante ne peuvent utilement se prévaloir de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, en particulier s'agissant des critères énoncés au I de l'article L. 752-6 du code de commerce, alors que les dispositions du V de cet article issues de cette loi, du fait de l'application de l'article 9 du décret du 13 octobre 2022 relatif aux modalités d'octroi de l'autorisation d'exploitation commerciale pour les projets qui engendrent une artificialisation des sols, ne sont susceptibles d'être entrées en vigueur que dans le cadre de dossiers de demandes déposés à compter du 15 octobre 2022. Dans ces conditions, l'avis favorable émis le 10 novembre 2021 par la Commission nationale d'aménagement commercial sur le projet de création d'un hypermarché Super U dans la zone d'aménagement concerté du Petit Verger à La Calmette ne peut être regardé, en l'espèce, comme ayant été délivré en méconnaissance du critère relatif à la consommation économe de l'espace prévu au titre de l'aménagement du territoire.
S'agissant du développement durable :
16. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du tableau récapitulatif des caractéristiques du projet joint à l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial, que si la superficie totale du lieu d'implantation du projet est de 51 087 m², la superficie du terrain consacrée aux espaces verts représente 28 965 m² et que les espaces de stationnement seront réalisés en pavés drainants perméables à hauteur de 3 632 m² à l'exception des places aménagées pour les personnes à mobilité réduite. Il en résulte que près de 62 % de l'assiette foncière prévue pour le projet en litige demeurera perméable et que ces aménagements seront complétés par la réalisation de deux bassins de rétention des eaux pluviales destinés à compenser l'imperméabilisation des surfaces dans le cadre de l'extension du périmètre de la zone d'aménagement concerté du Petit Verger. Si la société intervenante se prévaut des orientations du schéma directeur d'aménagement et de gestion de eaux Rhône-Méditerranée 2016-2021 afin de limiter l'imperméabilisation nouvelle des sols, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le projet en litige serait, en tout état de cause, incompatible avec ces orientations compte tenu des mesures destinées à conserver un caractère perméable des surfaces. Par ailleurs, le moyen tiré de l'insuffisante prise en compte de la rareté de la ressource en eau, notamment en période estivale, n'est assorti d'aucune précision ou justification permettant d'en apprécier le bien-fondé.
17. Si l'avis défavorable du ministre en charge de l'urbanisme relève que l'ensemble du projet sera disproportionné par rapport à son environnement proche constitué de maisons et de surfaces agricoles et que l'architecture du bâtiment de type " boite à chaussure " et les matériaux ne permettent pas de créer une zone commerciale moderne, il ressort des pièces du dossier que les matériaux et les couleurs utilisés, notamment des pierres locales, du bardage métallique horizontal de teinte grise et du bardage de type panneaux composites de teinte gris foncé aspect acier oxydé, ont vocation à atténuer la visibilité du bâtiment depuis la route départementale n° 936. Les aménagements extérieurs laisseront une large place aux espaces végétalisés et les espaces libres seront engazonnés et plantés de quatre-vingt-dix arbres de haute-tige. Par ailleurs, s'agissant des habitations situées à proximité du projet, la demande d'autorisation d'exploitation commerciale prévoit la mise en place d'une haie paysagère plantée en limite de propriété afin de former un écran végétal permettant de limiter l'impact visuel depuis les habitations et contribuer à l'harmonisation de l'environnement architectural. Dans ces conditions, alors que la demande d'autorisation de la société Immocalm comprend notamment des photomontages permettant d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement, ces éléments seront de nature à réduire l'impact visuel de la construction dans son environnement et à adapter le projet au paysage existant. Par suite, en délivrant un avis favorable au projet de création de l'hypermarché Super U, la Commission nationale d'aménagement commercial n'a pas méconnu l'objectif de développement durable au regard des critères de la qualité environnementale du projet et de son insertion paysagère et architecturale.
18. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées à la requête, que la société Malgec - Intermarché n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 1er mars 2022 par lequel le maire de La Calmette a délivré à la société Immocalm un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la réalisation d'un hypermarché Super U.
Sur les frais liés au litige :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de La Calmette, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par la société Malgec - Intermarché et non compris dans les dépens. Ces mêmes dispositions s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur ce fondement par la société intervenante Limadis, laquelle n'a pas la qualité de partie à l'instance ainsi que soient accueillies les conclusions présentées contre elle par la société pétitionnaire. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Malgec - Intermarché une somme de 2 000 euros à verser respectivement à la commune de La Calmette et à la société Immocalm sur le même fondement.
D E C I D E :
Article 1er : L'intervention de la société Limadis est admise.
Article 2 : La requête de la société Malgec - Intermarché est rejetée.
Article 3 : La société Malgec - Intermarché versera une somme de 2 000 euros respectivement à la commune de La Calmette et à la société Immocalm en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la société Limadis sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles présentées contre elle sur le même fondement par la société Immocalm sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Malgec - Intermarché, à la commune de La Calmette, à la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, à la société civile immobilière Immocalm et à la société par actions simplifiée Limadis.
Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Jazeron, premier conseiller.
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
Le président,
D. ChabertL'assesseur le plus ancien,
F. Jazeron
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne à la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL21079