Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2020 par lequel le maire de Robion l'a radié des cadres pour abandon de poste, ensemble l'arrêté du même jour par lequel la même autorité territoriale a décidé qu'en l'absence de service fait, il ne percevrait aucune rémunération du 1er au 7 septembre 2020, d'enjoindre à cette autorité territoriale de le réintégrer dans les effectifs de la commune sur un poste adapté conformément aux préconisations de la médecine préventive du 20 août 2020, d'enjoindre à la commune de lui verser l'intégralité de son traitement à compter du 1er septembre 2020 et jusqu'au jour de sa réintégration dans les effectifs de la commune, et de condamner la commune de Robion à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice complémentaire résultant du maintien de son état dépressif.
Par un jugement n° 2003378 du 10 juin 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 août 2022, M. A..., représenté par Me Imbert-Gargiulo, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 10 juin 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2020 par lequel le maire de Robion a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste, ensemble l'arrêté du même jour du maire portant suppression de sa rémunération du 1er au 7 septembre 2020 en l'absence de service fait ;
3°) d'enjoindre au maire de Robion de le réintégrer dans les effectifs de la commune sur un poste adapté conformément aux préconisations de la médecine préventive du 20 août 2020, et de lui verser l'intégralité de son traitement du 1er septembre 2020 jusqu'à la date de sa réintégration dans les effectifs ;
4°) de condamner la commune de Robion à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice complémentaire résultant du maintien de son état dépressif ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Robion la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a commis une erreur d'appréciation en rejetant ses demandes d'annulation ; il a commis une erreur d'appréciation et une erreur de droit en jugeant irrecevables ses conclusions indemnitaires, alors qu'il a fait valoir ses préjudices par la lettre du 12 octobre 2020 ;
- son absence n'est pas fautive dès lors qu'elle n'est que la conséquence de la méconnaissance, par la commune, de son obligation de proposer un poste aménagé conforme aux prescriptions de la médecine du travail ; la commune n'établit pas lui avoir proposé un nouveau poste tenant compte des restrictions et préconisations du médecin de prévention et ne lui a fait aucune proposition de modification de ses tâches pour se conformer à celles-ci ; en réalité, la commune n'a jamais envisagé d'aménager ses fonctions, la mise en demeure ne lui enjoignant pas de reprendre son travail sur un poste aménagé mais simplement de reprendre son poste de travail ; la fiche de poste n'a pas été cosignée ;
- subsidiairement, la commune ne pouvait ignorer son état dépressif puisqu'elle était destinataire de la copie des avis d'arrêts de travail établis par son médecin psychiatre traitant qui précisaient son état dépressif et d'épuisement ; elle a agi avec précipitation, sans tenir compte de son état de santé ;
- par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté de radiation, la commune, du fait de son refus de le réintégrer, sera débitrice de la totalité des salaires dus à compter du 1er septembre 2020 et, subsidiairement, du 8 septembre 2020.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2023, la commune de Robion, représentée par Me Ladouari, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le jugement attaqué est fondé ;
- la demande indemnitaire présentée par M. A... devant le tribunal était irrecevable ;
- les arrêtés contestés ne sont pas entachés d'illégalité et les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 4 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 4 mai 2023.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 septembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Teulière, président assesseur
- et les conclusions de M. Frédéric Diard, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., agent de salubrité titulaire de la commune de Robion (Vaucluse), a été placé en congé pour maladie professionnelle du 17 octobre 2018 au 31 août 2019 puis en congé de maladie ordinaire à compter du 1er septembre 2019. Par un avis du 22 octobre 2019, la commission de réforme a estimé que son état était consolidé au 31 août 2019 et qu'il pouvait reprendre ses fonctions dès le 1er septembre 2019 selon les modalités préconisées par le médecin de prévention. Le comité médical départemental a rendu, le 28 juillet 2020, un avis défavorable au placement de l'intéressé en congé de longue maladie et favorable à la prolongation de son congé de maladie ordinaire au-delà de six mois consécutifs à compter du 1er mars 2020 et à sa réintégration à temps complet à compter du 1er septembre 2020. Par une lettre du 31 juillet 2020, le maire de Robion a informé M. A... de cet avis et de sa décision de le réintégrer dans ses fonctions à compter du 1er septembre 2020. M. A... a alors été convoqué devant le médecin de prévention qui a émis, le 20 août 2020, un avis favorable à la reprise de l'intéressé sur un poste d'agent polyvalent des services techniques avec restrictions et préconisations. M. A... ne s'est pas présenté à son poste le 1er septembre 2020. Par une lettre du 3 septembre 2020, le maire de Robion l'a mis en demeure de réintégrer ses fonctions au plus tard le 7 septembre 2020. Par un arrêté du 8 septembre 2020, le maire de Robion l'a radié des cadres pour abandon de poste. Par un arrêté du même jour, le maire a décidé la suppression de sa rémunération du 1er au 7 septembre 2020, en l'absence de service fait. Par un jugement n° 2003378 du 10 juin 2022, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a notamment rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés ainsi que sa demande indemnitaire.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. ".
3. En l'espèce, la lettre du conseil du requérant du 12 octobre 2020, si elle informait le maire de Robion que ce conseil avait reçu mandat de saisir le tribunal administratif aux fins d'obtenir l'annulation de la décision de radiation des cadres, la réintégration et le règlement des traitements et primes jusqu'à réintégration, outre l'indemnisation des différents préjudices et règlement des frais de procédure, se bornait à solliciter, par voie amiable, la réintégration du requérant, aux motifs du caractère hâtif de la décision de radiation des cadres et de l'absence de prise en compte de l'avis de la médecine du travail. Cette lettre ne peut donc être regardée comme ayant le caractère d'une réclamation préalable tendant à obtenir de la part de la commune le versement d'une indemnité au titre des préjudices subis par M. A.... Par suite, la réponse apportée à ce courrier par le maire de Robion le 23 octobre 2020 n'a pas lié le contentieux préalablement à la saisine des premiers juges. Aucun autre élément n'est produit de nature à établir une liaison du contentieux en cours de première instance. Par suite, le contentieux indemnitaire n'a pas été lié avant le terme de la première instance et les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité en rejetant les conclusions à fin d'indemnisation de M. A... comme irrecevables pour ce motif.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu'il appartient à l'administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il court d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable. Lorsque l'agent ne s'est pas présenté et n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé.
5. Il ressort des pièces du dossier que, dans sa séance du 28 juillet 2020, le comité médical départemental a rendu un avis favorable à la réintégration à temps complet de M. A... à compter du 1er septembre 2020, date à laquelle il aurait épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire. Par une lettre du 31 juillet 2020, le maire de Robion a informé M. A... de sa décision de le réintégrer dans ses fonctions à temps complet et lui a demandé de se présenter à son poste de travail le 1er septembre 2020. Le médecin de prévention, après avoir examiné l'agent le 20 août 2020, a émis un avis favorable à sa reprise sur un poste d'agent polyvalent des services techniques, avec cependant des restrictions et préconisations. M. A... ne s'est pas présenté sur son lieu de travail le 1er septembre et n'a averti ni sa hiérarchie, ni le service des ressources humaines de son absence. Par une lettre du 3 septembre 2020, réceptionnée le lendemain, le maire de Robion l'a mis en demeure de réintégrer ses fonctions ou de justifier d'un motif légitime d'absence au plus tard le 7 septembre 2020. L'intéressé, qui ne s'est pas présenté à la mairie, n'a pas informé la commune de ses intentions et n'a pas motivé son absence, n'a pas déféré à cette mise en demeure. Le maire de Robion l'a alors regardé comme ayant abandonné son poste sans raison légitime et comme ayant rompu le lien avec son administration de sa propre initiative et l'a en conséquence radié des cadres. Il a également pris un arrêté portant service non fait de l'agent du 1er au 7 septembre 2020.
6. D'une part, pour contester les arrêtés en litige, M. A... soutient que son absence n'est pas fautive dès lors que le poste de travail qu'il devait rejoindre n'était pas un poste réaménagé conforme aux prescriptions de la médecine du travail. Toutefois, il ne conteste pas avoir été reçu en mairie le 27 août 2020 par le premier adjoint et la responsable des ressources humaines afin de préparer son retour au travail, ni qu'à cette occasion lui a été présentée une fiche de poste adaptée à son état, comprenant divers aménagements ainsi que des missions supprimées dès lors qu'elles se révélaient incompatibles avec les préconisations du médecin de prévention. Dans ces circonstances, qui sont de nature à révéler la prise en compte par l'administration des restrictions et préconisations du médecin de prévention, l'agent n'apporte aucune justification d'ordre matériel de nature à expliquer son retard à manifester un lien avec le service. La circonstance, à la supposer même avérée, que l'intéressé n'aurait pu avoir tous les détails et précisions sur les taches que comportait son emploi ne l'a pas mis dans l'impossibilité de se rendre sur son lieu de travail. La mise en demeure qu'il a reçue ne peut, à cet égard, être regardée comme irrégulière du seul fait qu'elle n'aurait pas comporté de telles précisions sur les taches attendues que comportait son emploi ou sur les caractéristiques de ce dernier. Au surplus et à supposer que M. A... ait entendu exciper de l'illégalité de son affectation sur le poste qu'il a été mis en demeure de rejoindre en ce que ce dernier ne respectait pas les restrictions et préconisations du médecin du travail, la décision d'affectation ne constitue pas la base légale des arrêtés litigieux, qui n'en sont pas davantage des mesures d'application. De même, l'appelant, dont la situation statutaire n'est pas régie par un contrat, ne saurait utilement invoquer l'impossibilité pour sa collectivité de modifier un contrat de travail sans son consentement.
7. D'autre part, M. A... se borne à produire des arrêts de travail mentionnant un état dépressif et d'épuisement, portant sur des périodes antérieures à la date du 1er septembre 2020 à compter de laquelle il était estimé apte à reprendre son service, sans apporter de justification d'ordre médical de son absence à compter du 1er septembre 2020 ni même au 7 septembre 2020, date limite impartie par la mise en demeure pour sa reprise du travail, ni au demeurant aucun élément nouveau par rapport aux constatations de l'avis du comité médical départemental du 28 juillet 2020 qu'il n'a d'ailleurs pas contesté devant le comité médical supérieur. Il résulte des éléments précités que le moyen tiré de ce que les arrêtés du maire de Robion du 8 septembre 2020 portant radiation des cadres pour abandon de poste et portant suppression de rémunération pour service non fait, seraient entachés d'erreur d'appréciation ne peut qu'être écarté.
8. Enfin, si l'appelant soutient à titre subsidiaire que sa collectivité d'emploi ne pouvait ignorer son état de santé en produisant notamment un dernier arrêt de travail daté du 11 août 2020 mentionnant un état dépressif d'épuisement, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que l'agent aurait transmis un nouvel arrêt après la mise en demeure de rejoindre son poste.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes à fin d'annulation, d'injonction et indemnitaires. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent également qu'être rejetées de même que les conclusions indemnitaires présentées en appel, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Robion, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement d'une somme à la commune de Robion au titre des frais d'instance exposés par elle et non compris dans les dépens
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Robion au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Imbert-Gargiulo et à la commune de Robion.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Teulière, président assesseur,
M. Jazeron, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2024.
Le rapporteur,
T. Teulière
Le président,
D. Chabert
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22TL21788