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17/04/2025 | FRANCE | N°23TL00738

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 17 avril 2025, 23TL00738


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le titre exécutoire notifié à son encontre le 4 mars 2020 par l'Agence nationale de l'habitat afin d'obtenir le remboursement d'une subvention d'un montant de 7 000 euros, à tout le moins d'en suspendre le recouvrement.



Par une ordonnance n° 462171 en date du 4 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué au tribunal administratif de Nîmes le jugem

ent de la requête de M. A....



Par un jugement n° 2021825 du 7 février 2023, le tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le titre exécutoire notifié à son encontre le 4 mars 2020 par l'Agence nationale de l'habitat afin d'obtenir le remboursement d'une subvention d'un montant de 7 000 euros, à tout le moins d'en suspendre le recouvrement.

Par une ordonnance n° 462171 en date du 4 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué au tribunal administratif de Nîmes le jugement de la requête de M. A....

Par un jugement n° 2021825 du 7 février 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 mars 2023 et 9 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Hiault-Spitzer, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 19 décembre 2019 par laquelle l'Agence nationale de l'habitat a retiré l'avance de 7 000 euros qu'elle lui avait versée pour la rénovation de sa maison d'habitation, les titres exécutoires émis les 25 et 27 février 2020 pour les montants respectifs de 2 450 euros et 4 550 euros ainsi que la décision du 23 juillet 2020 de rejet de son recours gracieux ;

3°) subsidiairement, d'enjoindre à l'Agence nationale de l'habitat, sur le fondement de l'article 22 du règlement général de l'agence, de calculer une quote-part de subvention à reverser en tenant compte de la durée pendant laquelle les dispositions réglementaires et les engagements souscrits ont été respectés ;

4°) de mettre à la charge de l'Agence nationale de l'habitat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les titres exécutoires contestés ne comportent pas, en méconnaissance de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 modifié, les bases de la liquidation, ni ne précisent les éléments de calcul ayant servi à déterminer le montant des reversements ;

- le retrait de la subvention de 6 500 euros correspondant au remplacement et à la pose des menuiseries doit être annulé comme le titre exécutoire correspondant au remboursement de l'avance de 4 550 euros, en raison du caractère disproportionné de ce retrait, dès lors que ces travaux ont été achevés dès le mois de décembre 2014 pour une délai de réalisation expirant le 29 octobre 2019 et que les pièces justificatives ont été adressées le 5 décembre 2019 soit avec un faible retard d'un peu plus d'un mois ; aucune disposition n'interdit de justifier de la réalisation des travaux après la vente du bien immobilier qui en a fait l'objet et il a respecté l'engagement d'occupation du logement pendant plusieurs années après l'achèvement de ces travaux de menuiserie ;

- les décisions contestées méconnaissent l'article 15 D du règlement général de l'Agence nationale de l'habitat ; à compter de l'année 2017, il n'a eu de cesse d'expliquer les difficultés familiales dues au décès de sa mère et financières auxquelles il était confronté ainsi que les soucis de santé qui l'ont conduit à devoir envisager un déménagement vers une région moins humide ; il remplit ainsi les conditions prévues à l'article 15 D précité et il aurait dû, de ce fait, être autorisé par l'agence à quitter le logement subventionné pour motifs d'ordre médical et familial ; le bénéfice de ces dispositions n'est pas subordonné à une demande et l'agence aurait dû lui en faire application ; les circonstances sus-évoquées constituent un cas de force majeure lui permettant de se soustraire à l'obligation de reversement ;

- la décision du 19 décembre 2019 et les titres exécutoires méconnaissent également l'article 22 de ce règlement général ; il devait bénéficier d'une évaluation du montant à reverser prorata temporis dès lors qu'il justifie avoir commencé à respecter ses engagements ; il ne saurait devoir restituer l'intégralité de l'avance ; l'agence devait prendre en compte la période durant laquelle il avait la propriété de la maison subventionnée.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 4 décembre 2023 et 12 janvier 2024, l'Agence nationale de l'habitat, représentée par Me Pouilhe, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le moyen tiré du vice de forme des titres exécutoires n'est pas recevable et il est, en tout état de cause, infondé ;

- le moyen tiré du caractère disproportionné du retrait n'est pas fondé ;

- les articles 15 D et 22 du règlement général ne concernent pas la situation du requérant.

Par une ordonnance du 9 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été reportée au 25 janvier 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- l'arrêté du 1er août 2014 portant approbation du règlement général de l'Agence nationale de l'habitat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Teulière, président assesseur,

- et les conclusions de M. Diard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d'un projet de travaux de rénovation énergétique comprenant la pose de nouvelles menuiseries extérieures et l'installation d'une chaudière à granulés dans l'immeuble dont il était propriétaire, situé au lieu-dit La Souquette à Castelnau-Durban (Ariège), M. A... a bénéficié, le 29 octobre 2014, d'une subvention de l'Agence nationale de l'habitat d'un montant prévisionnel de 6 500 euros et d'une aide complémentaire de 3 500 euros au titre du fonds d'aide à la rénovation énergétique. Une avance de 7 000 euros lui a été versée le 19 novembre 2014. Le délégué de l'Agence nationale de l'habitat dans le département de l'Ariège a procédé, par décision du 19 décembre 2019, au retrait de ces subventions et a ordonné le reversement de la somme de 7 000 euros. M. A... a formé un recours administratif à l'encontre de cette décision par lettre du 27 janvier 2020. Par lettre du 4 mars 2020, l'agent comptable de l'Agence nationale de l'habitat lui a rappelé que le recours gracieux n'était pas suspensif de paiement et lui a notifié un titre exécutoire émis le 27 février 2020 d'un montant de 4 550 euros ainsi qu'un titre exécutoire émis le 25 février 2020 pour un montant de 2 450 euros. Le recours administratif de M. A... a été expressément rejeté par une décision de la directrice générale de l'Agence nationale de l'habitat en date du 23 juillet 2020.

2. M. A... relève appel du jugement n° 2021825 du 7 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2019 et des titres exécutoires précités émis à son encontre.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité en la forme des titres exécutoires :

3. En vertu de l'article 24 du décret susvisé du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation.

4. En l'espèce, il n'est pas contesté que la lettre de l'agent comptable de l'Agence nationale de l'habitat du 4 mars 2020 par laquelle M. A... a reçu notification des titres exécutoires litigieux était accompagnée d'une copie de la décision de reversement, laquelle mentionnait les deux sommes de 4 550 euros pour l'Agence nationale de l'habitat et de 2 450 euros pour le fonds d'aide à la rénovation énergétique, perçues par M. A... à titre d'avance et l'obligation de les reverser ainsi que des fiches de calcul du montant du remboursement de ces subventions faisant apparaître des montants à rembourser respectifs de 4 550 euros et 2 450 euros. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa recevabilité, le moyen tiré de l'irrégularité en la forme des titres exécutoires émis faute d'indication des bases de liquidation et de précisions sur les éléments de calcul ayant servi à déterminer les montants à reverser doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé de la décision de retrait de subvention et des titres exécutoires émis à l'encontre de M. A... :

5. Aux termes de l'article L. 321-4 du code de la construction et de l'habitation : " Une aide particulière peut être accordée au propriétaire qui s'engage à respecter des obligations définies par voie de convention. La convention, conforme à des conventions types prévues par décret, détermine notamment : / (...) c) Les conditions d'occupation du logement et, le cas échéant, ses modalités d'attribution ; / d) Sa durée, qui ne peut être inférieure à neuf ans si le propriétaire reçoit une aide pour réaliser des travaux d'amélioration, et à six ans dans le cas contraire ; / e) Les conditions de sa révision et de sa résiliation ; / f) Les pénalités encourues en cas de méconnaissance des engagements conventionnels. / Le contrôle du respect de la convention est assuré par l'Agence nationale de l'habitat. / (...) ". L'article R. 321-12 du même code dispose que : " I.- L'agence peut accorder des subventions : / (...) 2° Aux propriétaires ou à tout autre titulaire d'un droit réel conférant l'usage des locaux pour les logements qu'ils occupent eux-mêmes dans les conditions prévues à l'article R. 321-20 ; / (...) ". En vertu du sixième alinéa de l'article R. 321-18 de ce code : " La subvention est versée, sur déclaration d'achèvement de l'opération, après vérification de la conformité des opérations réalisées avec les caractéristiques du projet sur lesquelles la décision d'attribution a été fondée. La subvention est versée sur présentation des justificatifs précisés par le règlement général de l'agence, en particulier des factures des entreprises, sauf cas exceptionnels dus, notamment, à la défaillance de l'entreprise chargée des travaux. ". Aux termes de l'article R. 321-19 du même code : " Le règlement général de l'agence détermine, pour les différentes catégories de bénéficiaires et d'opérations mentionnés à l'article R. 321-12, les conditions et modalités dans lesquelles le bénéficiaire d'une subvention justifie du commencement, de la réalisation et de l'achèvement de l'opération. Il fixe le délai dans lequel doit intervenir le commencement de l'opération ainsi que la liste des pièces que le bénéficiaire d'une subvention doit produire pour obtenir son versement et les délais dans lesquels ces pièces doivent être transmises à l'agence. Il fixe également les critères, conditions et limites dans lesquels ces délais peuvent être prolongés par l'autorité qui a octroyé l'aide, sur demande motivée du bénéficiaire de la subvention, notamment lorsque des circonstances extérieures à la volonté de l'intéressé ont fait obstacle à la réalisation de l'opération. En cas de non-respect de ces délais, éventuellement prolongés, la décision d'octroi de la subvention devient caduque et le bénéficiaire est tenu de rembourser les sommes déjà perçues. ". En vertu de l'article R. 321-20 de ce code : " I.- Pour les opérations et bénéficiaires mentionnés aux I et II de l'article R. 321-12, les locaux pour lesquels la subvention est accordée doivent être occupés pendant une durée et selon des critères déterminés par le règlement général de l'agence. Le logement (...) doit être occupé à titre de résidence principale, au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé affectant un ou plusieurs occupants du logement, ou cas de force majeure./ Tout changement d'occupation ou d'utilisation ou toute mutation de propriété des logements (...) intervenant pendant la période mentionnée au premier alinéa doit être déclaré par le bénéficiaire de la subvention au délégué de l'agence dans le département dans un délai de deux mois suivant l'évènement. (...) III.- Le règlement général de l'agence précise les modalités selon lesquelles les bénéficiaires de la subvention justifient que les locaux sont occupés ou utilisés conformément aux dispositions de la présente section. / (...) ". Enfin, en application de l'article R. 321-21 dudit code : " I.- En ce qui concerne les aides versées par l'agence :/ (...) Le retrait et le reversement total ou partiel peuvent également être prononcés en cas de non-respect des prescriptions de la présente section ou des conventions conclues en application des articles L. 321-4 et L. 321-8, ou de toute autre convention liée au bénéfice des aides de l'agence, selon les modalités fixées par le règlement général de l'agence. Ce règlement prévoit une procédure de communication préalable et des éléments de calcul sur le montant du reversement (...) ".

6. Le règlement général de l'Agence nationale de l'habitat susvisé dispose dans son article 20 que : " La réception de la demande de paiement par le délégué de l'agence dans le département ou le délégataire en cas de délégation de compétence vaut déclaration d'achèvement de l'opération. Le délégué de l'agence dans le département, après avoir examiné et vérifié les pièces et documents produits, liquide le montant de la subvention à payer et établit au profit du bénéficiaire un ordre de paiement à transmettre à l'agent comptable, déduction faite, le cas échéant, de l'avance déjà versée et des acomptes déjà réglés. Le délégué de l'agence dans le département atteste et certifie l'exactitude des éléments retenus pour cette liquidation : -l'identité et la qualité du bénéficiaire ; -la régularité et la conformité des factures produites ou autres documents produits prévus à l'annexe 1 avec le projet, objet de la décision attributive de subvention ; -la nature et le montant des travaux retenus au regard de ces factures ;

-la présentation des documents justifiant l'occupation des logements et, éventuellement, ceux relatifs aux engagements spécifiques d'occupation, et, le cas échéant, la validité du mandat présenté par le mandataire désigné pour percevoir les fonds. Si la convention de gestion prévoit que l'instruction et le paiement incombent au délégataire, les opérations correspondantes sont effectuées sous sa responsabilité et le paiement par le comptable accrédité. ". Aux termes de l'article 14 de ce règlement : " I.- Les travaux doivent commencer dans les conditions et délais suivants : / 1° Si une avance mentionnée à l'article R. 321-18 a été versée au bénéficiaire de la subvention, les travaux doivent débuter dans le délai de six mois à compter de la date de la notification de la décision attributive de la subvention. En cas de non-respect de ce délai, l'avance versée doit être remboursée dans les conditions fixées à l'article 21 bis du présent règlement. Toutefois, sur demande motivée du bénéficiaire, un délai supplémentaire de six mois maximum peut être accordé par le délégué de l'agence dans le département ou le délégataire, notamment lorsque des circonstances extérieures à la volonté du demandeur ont fait obstacle au commencement des travaux, telles que : -un motif d'ordre familial ou de santé ; -l'indisponibilité ou la défaillance de l'entreprise attestée par l'entreprise elle-même, un maître d'œuvre ou un organisme chargé de l'assistance à maîtrise d'ouvrage ; / 2° Dans tous les cas : la décision d'octroi de la subvention devient caduque si les travaux ne sont pas commencés dans le délai d'un an à compter de la notification de la décision attributive de subvention. Le report de ce délai peut être accordé, sur demande motivée du bénéficiaire, par le délégué de l'agence dans le département ou le délégataire pour les mêmes motifs qu'au 1° du présent article. Cette prorogation ne pourra pas dépasser un an. / II.- L'achèvement des travaux doit être justifié par le bénéficiaire de la subvention sous peine de retrait de la décision d'octroi de la subvention et du remboursement des sommes déjà perçues, dans un délai de trois ans, ou de cinq ans lorsque les travaux portent sur les immeubles faisant l'objet d'un Plan de sauvegarde des copropriétés en difficulté, à compter de la notification de la décision attributive de la subvention. Sur demande motivée du bénéficiaire de la subvention, une prorogation de ces délais, de deux ans maximum, peut être accordée par le délégué de l'agence dans le département ou le délégataire, notamment lorsque des circonstances extérieures à la volonté du demandeur ont fait obstacle à la réalisation des travaux, telles que : -un motif d'ordre familial ou de santé ; -une défaillance d'entreprise ; -des difficultés importantes d'exécution. ". En outre, en application de l'article 16 de ce règlement : " (...) Conformément aux dispositions de l'article R. 321-20 du CCH, le bénéficiaire de la subvention ou, le cas échéant, ses ayants droit doivent déclarer, dans un délai de deux mois suivant l'évènement, au délégué de l'agence dans le département ou au délégataire, tout changement d'occupation, d'utilisation des logements ou toute mutation de propriété intervenant pendant la période mentionnée à l'article 15 du présent règlement. ". Enfin, aux termes de l'article 21 dudit règlement : " En cas de non-respect des prescriptions relatives aux aides de l'ANAH (...), la décision de subvention sera retirée et tout ou partie des sommes perçues devra être reversé, en application du I de l'article R. 321-21 du CCH et dans les conditions précisées au présent article./ (...) 2° Lorsqu'elles sont prononcées après le versement du solde de la subvention, les décisions de retrait et de reversement sont prises par le directeur général de l'agence ;/ 3° Les décisions de retrait et de reversement sont prises après avis (...) de la CLAH [commission locale de l'habitat] (...)/ Préalablement à toute décision de retrait ou de reversement, un courrier est adressé à la personne intéressée pour l'informer de la mise en œuvre de la procédure et l'inviter à présenter ses observations dans un délai qu'il fixe mais qui ne saurait excéder deux mois (...)/ Il y a exonération de reversement en cas de mutation dans les cas suivants :/ (...) d) Concernant les bénéficiaires et propriétaires occupants mentionnés au I (2° et 3°) de l'article R. 321-12 du CCH :/ (...) - en cas de décès du bénéficiaire de la subvention, une décision de reversement ne peut pas être prononcée à l'encontre des héritiers (...) ".

7. L'attribution d'une subvention par une personne publique crée des droits au profit de son bénéficiaire. Toutefois, de tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu'elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d'octroi, qu'elles aient fait l'objet d'une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu'elles découlent implicitement mais nécessairement de l'objet même de la subvention. Ainsi, les subventions conditionnelles accordées par l'Agence nationale de l'habitat ne créent de droits au profit de leurs bénéficiaires que pour autant que ceux-ci justifient, après l'achèvement des travaux, que les conditions imposées lors de l'attribution de l'aide se trouvent effectivement réalisées.

8. Il ressort des pièces du dossier que le délai de réalisation des travaux arrivant à expiration le 29 octobre 2017, M. A... a bénéficié, à sa demande et au regard de raisons financières et familiales, de deux reports dudit délai, lequel expirait ainsi en dernier lieu le 29 octobre 2019. Cependant, M. A... n'a pas, avant le terme de ce délai, justifié de l'exécution et de l'achèvement des travaux en cause. Ainsi, aucune facture n'a été produite s'agissant de l'installation d'une chaudière à granulés constituant la majeure partie des travaux éligibles ou d'un poêle à granulés et M. A... a reconnu lui-même dans ses écritures de première instance l'abandon de ce projet. Il n'est pas contesté en appel que l'Agence nationale de l'habitat n'a été destinataire de la facture émise le 22 décembre 2014 par la société à responsabilité limitée Aluminium création, concernant la fourniture et la pose de menuiseries extérieures pour un montant de 6 132,72 euros que le 5 décembre 2019, soit après l'expiration du délai imparti pour justifier de la réalisation et de l'achèvement des travaux. Il en résulte que l'intéressé, qui n'est pas fondé à soutenir que la subvention de l'agence qui lui a été accordée pour un montant prévisionnel de 6 500 euros couvrait exclusivement la fourniture de menuiseries et qui ne peut utilement se prévaloir de la réalisation de ces travaux de menuiserie dès le mois de décembre 2014 dès lors que celle-ci n'a été portée à la connaissance de l'agence que postérieurement à l'expiration du délai imparti pour justifier de leur exécution et achèvement, n'a ainsi pas respecté les engagements et conditions attachés à l'attribution de la subvention prévus par les dispositions de l'article 14 du règlement général citées précédemment. Par suite, le délégué de l'Agence nationale de l'habitat dans le département a pu légalement décider de retirer à M. A... les subventions accordées et lui ordonner de reverser les sommes perçues à titre d'avances. Il suit de là que le moyen du requérant tiré du caractère disproportionné de la décision de retrait de subvention dont il a fait l'objet et, par voie de conséquence, celui tiré du caractère infondé du titre exécutoire émis à son encontre le 27 février 2020 pour un montant de 4 550 euros, doivent être écartés.

9. Aux termes de l'article 15-D du règlement général de l'Agence nationale de l'habitat susvisé : " Les logements doivent être occupés dans le délai maximum d'un an qui suit la date de déclaration d'achèvement des travaux. Les logements pour lesquels la subvention est accordée doivent être occupés pendant une durée de six ans. Le délégué de l'agence dans le département ou le délégataire peut autoriser, avec maintien de la subvention, que le logement ne soit pas occupé lorsque les bénéficiaires de la subvention invoquent des motifs d'ordre médical, familial ou professionnel. L'autorisation peut être conditionnée à l'obligation de louer le logement à titre de résidence principale avec, le cas échéant, des engagements de location spécifique. ".

10. Si les bénéficiaires des subventions conditionnelles accordées par l'Agence nationale de l'habitat sont placés vis-à-vis de cet établissement public dans une situation réglementaire et non contractuelle, cette situation ne fait pas obstacle à ce que ces usagers puissent, le cas échéant, invoquer un cas de force majeure ayant rendu impossible l'exécution des engagements auxquels était subordonné le versement de l'aide financière de l'agence.

11. D'une part, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. A... aurait sollicité, sur le fondement de l'article 15-D précité du règlement général, une dispense d'occupation du logement pour lequel la subvention lui a été accordée, en invoquant des motifs d'ordre familial ou médical alors qu'il a expliqué, notamment par un courriel du 1er septembre 2019, avoir dû vendre ce bien parce qu'il ne pouvait plus en assurer la charge financière. Ainsi, ayant entendu céder sa maison, et pas seulement ne plus l'occuper, l'intéressé ne peut utilement solliciter le bénéfice des dispositions précitées de l'article 15-D qui ne s'appliquent pas à sa situation. D'autre part, si M. A... fait état à nouveau en appel du décès de sa mère qui vivait à son domicile, ainsi que de ses difficultés financières ou de ses problèmes de santé qui l'auraient contraint à procéder à la vente de son bien immobilier, de telles circonstances ne présentent toutefois pas un caractère irrésistible, imprévisible et extérieur de nature à pouvoir les regarder comme un cas de force majeure.

12. Enfin, aux termes de l'article 22 du règlement général de l'Agence nationale de l'habitat : " En cas de reversement de la subvention, en application de l'article R. 321-21 du CCH, la quote-part de subvention à reverser est calculée en tenant compte de la durée pendant laquelle les dispositions réglementaires et, le cas échéant, les engagements souscrits ont été respectés ; cette disposition n'est pas applicable en cas de reversement des avances mentionnées à l'article R. 321-18 du code de la construction et de l'habitation. Le montant des sommes à reverser est établi prorata temporis sur la durée des engagements restant à courir à compter de la date de leur rupture. (...) ".

13. Par la décision du 19 décembre 2019, le délégué de l'agence dans le département de l'Ariège a informé M. A... de son obligation de reverser les sommes qu'il avait reçues à titre d'avances. Il résulte des termes mêmes des dispositions citées au point précédent que le reversement dégressif qu'elles prévoient n'est pas applicable à des avances sur subventions. Au surplus, M. A... n'ayant pas justifié en temps utile de l'achèvement des travaux, la subvention qui pouvait lui être accordée n'a pu être liquidée. Par suite, il ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 22 du règlement général qui s'appliquent en cas de reversement d'une subvention, ce qui suppose que cette dernière ait été préalablement liquidée et non en cas de reversement d'avances sur subventions.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2019 et des titres exécutoires précités qui ont été émis à son encontre. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'annulation de la décision de rejet de son recours administratif, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction, présentées à titre subsidiaire, ne peuvent également qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Agence nationale de l'habitat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

16. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement à l'Agence nationale de l'habitat d'une quelconque somme au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'Agence nationale de l'habitat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'Agence nationale de l'habitat.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2025 à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Teulière, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.

Le rapporteur,

T. Teulière

Le président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne à la ministre du logement et de la rénovation urbaine en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23TL00738


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00738
Date de la décision : 17/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Thierry Teulière
Rapporteur public ?: M. Diard
Avocat(s) : JURIS EXCELL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-17;23tl00738 ?
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