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07/05/2025 | FRANCE | N°25TL00228

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, Juge des référés, 07 mai 2025, 25TL00228


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse suivante :



Mme A... B..., représentée par Me Betrom, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de prescrire, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, une mesure d'expertise médicale aux fins de déterminer l'étendue des préjudices qu'elle subit en raison de la maladie professionnelle qu'elle a déclarée le 1er octobre 2020 dans le cadre de ses fonctions d'agent des services hospitaliers au centre hospitalier de

Béziers (Hérault).

Par une ordonnance n° 2406602 du 20 janvier 2025, le jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse suivante :

Mme A... B..., représentée par Me Betrom, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de prescrire, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, une mesure d'expertise médicale aux fins de déterminer l'étendue des préjudices qu'elle subit en raison de la maladie professionnelle qu'elle a déclarée le 1er octobre 2020 dans le cadre de ses fonctions d'agent des services hospitaliers au centre hospitalier de Béziers (Hérault).

Par une ordonnance n° 2406602 du 20 janvier 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2025 sous le n°25TL00228, Mme B..., représentée par Me Betrom, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance en date du 20 janvier 2025 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de désigner un expert sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative chargé de :

- recueillir les renseignements nécessaires sur sa situation, les conditions de son activité professionnelle, son mode de vie antérieur à la maladie et sa situation actuelle ;

- à partir de ses déclarations, au besoin de ses proches et de tout sachant, et des documents médicaux fournis, décrire en détail la maladie et les modalités de traitement ;

- recueillir ses doléances et au besoin de ses proches et les transcrire fidèlement, l'interroger sur les conditions d'apparition de la maladie, l'importance, la répétition et la durée des douleurs, la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences ;

- décrire au besoin un état antérieur en ne retenant que les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence directe sur la maladie ou leurs séquelles ;

- se prononcer sur son état de santé actuel ;

- procéder contradictoirement à un examen clinique détaillé en fonction de la maladie et des doléances exprimées ;

- à l'issue de cet examen et, au besoin après avoir recueilli l'avis d'un sapiteur d'une autre spécialité, analyser dans un exposé précis et synthétique : la réalité de la maladie, la réalité de l'état séquellaire et l'imputabilité certaine des séquelles à la maladie en précisant au besoin l'incidence d'un état antérieur.

- indiquer les périodes pendant lesquelles elle a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l'incapacité d'exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle ;

- indiquer les périodes pendant lesquelles elle a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l'incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités personnelles habituelles ;

- en cas d'incapacité partielle, préciser le taux et la durée ;

- fixer la date de consolidation et, en l'absence de consolidation, dire à quelle date il conviendra de la revoir ; préciser dans ce cas les dommages prévisibles pour l'évaluation d'une éventuelle provision ;

- indiquer si, après la consolidation, elle subit un déficit fonctionnel permanent ; évaluer l'altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles mentales ou psychiques en en chiffrant le taux ;

- dire si des douleurs permanentes existent et comment elles ont été prises en compte dans le taux retenu ; au cas où elles ne l'auraient pas été compte tenu du barème médico-légal utilisé, majorer ledit taux en considération de l'impact de ces douleurs sur les fonctions physiologiques, sensorielles, mentales et psychiques de la victime ;

- décrire les conséquences de ces altérations permanentes et de ces douleurs sur la qualité de vie ;

- dans l'hypothèse d'un état antérieur préciser en quoi la maladie a eu une incidence sur cet état antérieur et décrire les conséquences ;

- décrire les soins futurs et les aides techniques compensatoires en précisant la fréquence de leur renouvellement ;

- indiquer si le déficit fonctionnel permanent entraîne l'obligation de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle, d'adapter celle-ci ou de changer d'activité professionnelle ;

- indiquer si le déficit fonctionnel permanent entraîne d'autres répercussions sur son activité professionnelle actuelle ou future (obligation de formation pour un reclassement professionnel, pénibilité accrue dans son activité, dévalorisation sur le marché du travail, etc...) ;

- décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales découlant de la maladie (avant consolidation) ; les évaluer distinctement sur une échelle de 1 à 7 ;

- indiquer s'il a existé ou s'il existera un préjudice sexuel (perte ou diminution de la libido, impuissance ou frigidité, perte de fertilité) ;

- indiquer si elle est empêchée en tout ou partie de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisir ;

- dire si son état est susceptible de modifications en aggravation ; établir un état récapitulatif de l'ensemble des postes énumérés dans la mission.

3°) de mettre à la charge de la commune de Montpellier la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le juge des référés de première instance a rejeté sa demande d'expertise dès lors que l'expertise interviendrait en amont du jugement au fond et lui permettrait d'obtenir une provision sur les dommages et intérêts à venir ;

- la mesure sollicitée est utile pour fixer le taux d'invalidité permanente partielle dès lors que les avis médicaux sur ce point sont différents et que les préjudices extra-patrimoniaux n'ont pas été évalués.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 février 2025, le centre hospitalier de Béziers, représenté par Me Constans, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande d'expertise de Mme B... est dépourvue d'utilité dès lors que le centre hospitalier de Béziers a refusé de faire droit à sa demande indemnitaire préalable le 11 septembre 2024 et que l'appelante n'est plus recevable à demander l'indemnisation d'autres préjudices rattachés à sa maladie professionnelle puisque le délai contentieux a expiré ;

- elle est également dépourvue d'utilité dès lors que diverses mesures ont d'ores et déjà été prescrites concernant Mme B... ;

- le juge du fond pourra décider lui-même de désigner un expert.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., agent des services hospitaliers exerçant au centre hospitalier de Béziers, a été victime d'un accident de service survenu le 13 décembre 2016, à la suite duquel elle a bénéficié d'un reclassement sur un poste d'adjoint administratif à l'accueil des consultations du service de pédiatrie. Le 1er octobre 2020, elle a déclaré une sciatique par hernies discales lombaires reconnue imputable au service. Cette maladie professionnelle a été consolidée le 12 septembre 2023. Le 4 juillet 2024, Mme B... a présenté une demande préalable au centre hospitalier de Béziers tendant à l'indemniser des préjudices qu'elle a subis en raison de cette maladie. En l'absence de réponse de l'administration, Mme B... a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une requête tendant à la condamnation du centre hospitalier de Béziers à lui verser la somme de 21 000 euros au titre de sa maladie professionnelle et a, en outre, demandé au juge des référés de ce même tribunal de prononcer la même condamnation à titre provisionnel. Enfin elle a également présenté une demande tendant à ce que soit ordonnée une expertise sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative.

2. Mme B... relève appel de l'ordonnance du 20 janvier 2025 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette dernière demande.

3. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. Il peut notamment charger un expert de procéder, lors de l'exécution de travaux publics, à toutes constatations relatives à l'état des immeubles susceptibles d'être affectés par des dommages ainsi qu'aux causes et à l'étendue des dommages qui surviendraient effectivement pendant la durée de sa mission (...) ".

4. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. S'il résulte de l'article R. 626-1 du code de justice administrative qu'il peut être fait application des dispositions de l'article R. 532-1, alors même qu'une requête au fond est en cours d'instruction, il appartient au juge des référés d'apprécier l'utilité de la mesure demandée sur ce fondement.

5. La requérante soutient d'abord qu'une expertise judiciaire est rendue nécessaire par le caractère contradictoire des différentes expertises auxquelles elle a été soumise s'agissant de l'évaluation de son taux d'incapacité permanente partielle et de son aptitude à la reprise de ses fonctions. Toutefois, d'une part, la requérante a déjà saisi le tribunal administratif d'une requête indemnitaire et d'une requête en référé provision tendant à la condamnation du centre hospitalier de Béziers à lui verser la somme de 21 000 euros. D'autre part, il existe déjà trois rapports d'expertise médicale établis le 12 septembre 2023, le 26 décembre 2023 et le 12 juillet 2024 portant sur la sciatique sur hernies discales lombaires et la spondylodiscite infectieuse qu'elle contractée par la suite. Si les deux rapports des 12 septembre 2023 et 12 juillet 2024 évaluent respectivement le taux d'incapacité permanente partielle à hauteur de 15% et de 8%, les médecins experts s'accordent toutefois sur l'aptitude de Mme B... à exercer ses fonctions sur son poste actuel. Même si ces expertises ne font pas suite à une décision juridictionnelle, elles donnent au tribunal administratif saisi de la demande indemnitaire et au juge des référés saisi de la demande de provision des éléments pour statuer alors que la requérante pourra éventuellement critiquer les taux d'invalidité permanente partielle retenus ainsi que l'évaluation, par les médecins experts, de son aptitude à exercer ses fonctions. En outre, la juridiction saisie du litige au fond, s'il en était besoin, pourra user de ses pouvoirs d'instruction en vue d'ordonner une expertise.

6. La requérante soutient ensuite qu'une expertise permettra de déterminer les préjudices extrapatrimoniaux dont elle peut demander réparation dans le cadre, d'une part, de l'action indemnitaire fondée sur la responsabilité du centre hospitalier de Béziers, et, d'autre part, du référé tendant à la condamnation de celui-ci à la somme de 21 000 euros à titre provisionnel. Toutefois, Mme B... n'apporte dans la présente instance aucune précision ni aucun élément sur ces préjudices.

7. Il résulte de ce qui précède qu'aucune circonstance particulière ne conférerait à la mesure qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner un caractère d'utilité différent de celui de la mesure que le juge du fond, pourra décider, le cas échéant, dans l'exercice de ses pouvoirs de direction de l'instruction. La demande d'expertise étant dépourvue du caractère d'utilité exigé par l'article R. 532-1 du code de justice administrative, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée du 20 janvier 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a refusé d'ordonner cette mesure d'instruction.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Montpellier, qui n'est pas partie dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le centre hospitalier de Béziers au titre de ces mêmes dispositions.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Béziers tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... B... et au centre hospitalier de Béziers.

Fait à Toulouse, le 7 mai 2025.

Le président,

signé

J-F. MOUTTE

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

N°25TL00228 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 25TL00228
Date de la décision : 07/05/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP VPNG AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-07;25tl00228 ?
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