Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2024 par lequel le préfet de l'Aude a rejeté sa demande de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait éloignée à l'expiration de ce délai, et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer le titre de séjour sollicité.
Par un jugement n° 2400344 du 19 mars 2024, le tribunal administratif de Montpellier, après l'avoir admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, a rejeté le surplus de ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 avril 2024, Mme B..., représentée par Me Bégué, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier n°2400344 du 19 mars 2024;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2024 par lequel le préfet de l'Aude a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
3°) d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer le titre de séjour sollicité.
Elle soutient que :
- le jugement contesté ne répond pas à l'ensemble des critiques sur la motivation de l'arrêté contesté ;
- l'arrêté attaqué est erroné, contradictoire et insuffisamment motivé ;
- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 6 -5 de l'accord franco-algérien et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Une mise en demeure a été adressée le 20 août 2024 au préfet de l'Aude.
Par ordonnance du 28 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 6 janvier 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Armelle Geslan-Demaret, présidente rapporteure,
- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante algérienne née le 16 septembre 1965 à Mascara (Algérie) est entrée en France le 18 octobre 2022 munie d'un visa court séjour à entrées multiples, valable du 12 octobre 2022 jusqu'au 9 avril 2023. Mme B... a sollicité, le 5 janvier 2023, du préfet de l'Aude la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", " travailleur temporaire " ainsi qu'un titre de séjour portant la mention " salarié ". Par arrêté du 8 janvier 2024, le préfet de l'Aude lui a refusé son admission au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme B... relève appel du jugement du 19 mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le tribunal administratif de Montpellier, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments de la requérante, a suffisamment répondu au point 4 de son jugement au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté alors que la critique du caractère erroné de sa motivation relevait du bien-fondé de l'arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ". Et l'article L. 211-5 du même code précise que : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
4. D'une part, l'appelante fait valoir que la motivation de l'arrêté du 8 janvier 2024 serait erronée en ce qu'il lui est reproché à tort un maintien irrégulier sur le territoire. Elle soutient également que la motivation de la décision est contradictoire, dans la mesure où il lui est fait grief d'avoir fondé sa demande de titre de séjour sur les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans avoir invoqué les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, alors même que cet arrêté s'y réfère expressément pour justifier la décision. Toutefois, ces seules circonstances ne suffisent pas pour considérer que le préfet de l'Aude, qui s'est, en outre, livré à un examen particulier de la situation de l'intéressée, aurait insuffisamment motivé la décision relative à l'obligation de quitter le territoire français au regard des autres circonstances de l'espèce. Par ailleurs, l'erreur de fait commise par le préfet sur le caractère irrégulier de sa situation à la date de sa demande de titre de séjour, alors que son visa n'était pas expiré est, en tout état de cause, sans incidence sur l'appréciation portée sur sa demande.
5. D'autre part, il ressort de l'arrêté contesté qu'il est assorti de considérations de droit et de fait précises et circonstanciées, mentionnant notamment les stipulations pertinentes de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la présence en France de la mère de l'appelante, ainsi que son état de santé. Il est également indiqué que l'intéressée est veuve et sans charge de famille, et qu'il n'est pas établi qu'elle serait la seule personne à pouvoir assister sa mère au quotidien ou que celle-ci ne pourrait retourner en Algérie pour y rejoindre le reste de sa famille. Dans ces conditions, l'arrêté litigieux présente une motivation suffisante au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
6. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus : (...) ".
7. En l'espèce, Mme B... se prévaut d'être entrée en France afin de prendre en charge sa mère, dont l'état de santé nécessiterait une surveillance et une assistance régulières. Elle invoque également l'existence de liens personnels en France, en ce qu'un mariage avec un ressortissant français était prévu le 20 avril 2024 à Narbonne, ainsi qu'il ressort du dossier de mariage versé au dossier. Toutefois, si l'appelante, veuve et sans enfant, justifie de la présence de liens affectifs en France et de l'état de santé fragile de sa mère, elle n'apporte pas d'éléments de nature à établir que sa présence auprès de celle-ci serait indispensable au quotidien. Elle ne démontre notamment pas que sa mère ne pourrait être prise en charge par les dispositifs médico-sociaux existants, en dépit des circonstances familiales invoquées. Par ailleurs, si Mme B... se prévaut de son insertion en France, en soulignant l'absence de mention à son casier judiciaire, son affiliation à la sécurité sociale, sa régularité fiscale ainsi que sa maîtrise de la langue française, ces éléments, bien qu'établis, ne suffisent pas à caractériser une intégration particulière en France. Dans ces conditions, le préfet de l'Aude, en lui refusant le titre de séjour sollicité et en obligeant Mme B... à quitter le territoire français, n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale tel qu'il est garanti par l'article 6-5) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. De plus, pour les mêmes motifs, l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme B.... Par suite, ces deux moyens doivent être écartés.
8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de l'Aude.
Délibéré après l'audience du 3 juin 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,
Mme Bentolila, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2025.
La présidente rapporteure,
A. Geslan-Demaret
La première conseillère la plus ancienne,
V. Dumez-Fauchille
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°24TL00815