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25/04/2006 | FRANCE | N°04VE01136

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4eme chambre, 25 avril 2006, 04VE01136


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SARL CIFI, dont le siège est situé 201 Route nationale 10 à Coignères (78310

), par Me X..., avocat au barreau de Paris ;

Vu la requête, e...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SARL CIFI, dont le siège est situé 201 Route nationale 10 à Coignères (78310), par Me X..., avocat au barreau de Paris ;

Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle la SARL CIFI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0102923 en date du 27 février 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles n'a fait que partiellement droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 juin 1999 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de condamner l'Etat au paiement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que, par courrier du 14 avril 2000, elle a demandé à l'administration de rencontrer l'interlocuteur départemental et a indiqué que, en cas de persistance du désaccord, elle entendait bénéficier de la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, bien que son rendez-vous avec l'interlocuteur départemental n'ait pas permis de régler le litige, la commission départementale n'a pas été saisie ; qu'elle a ainsi été privée d'une garantie essentielle ; qu'il résulte de la doctrine de l'administration contenue dans la documentation administrative 13 M-341 que l'administration devait donner suite à sa demande, alors même qu'elle estimait que le litige ne relevait pas de la compétence de la commission ; qu'elle a sorti de ses stocks, à compter de l'exercice 1995-1996, les frais financiers relatifs aux achats d'immeubles et les a comptabilisés en charges ; que l'administration a fait une application erronée des dispositions de l'article 38 nonies de l'annexe III au code général des impôts en excluant les frais financiers du coût de revient des stocks ; qu'elle a également, à compter de l'exercice 1995-1996, exclu les frais financiers de ses immobilisations, estimant qu'il s'agissait d'une charge déductible ; que le vérificateur a remis en cause la comptabilisation de cette charge et s'est livré, ainsi, à une application erronée de l'article 38 quinquies de l'annexe III au code général des impôts ; que c'est également à tort que l'administration a remis en cause les frais de réception comptabilisés en charges au motif que les notes de restaurant correspondaient à des dimanches ; que l'entreprise a produit les factures et indiqué le nom des personnes reçues, démontrant ainsi l'intérêt de ces réceptions pour l'activité sociale ; que la société a constitué, à la clôture de l'exercice 1998/1999, une provision pour impôt en vue de faire face à la charge de droits de mutation ; que l'administration a toutefois estimé que le fait générateur de l'imposition n'interviendrait qu'en juillet 1999 et que la provision ne pouvait, par suite, être comptabilisée qu'au cours de l'exercice suivant ; que la doctrine contenue dans la documentation administrative de base 4E-322 du 1er juin 1990 et la jurisprudence permettent la déduction d'un impôt qui deviendra exigible au cours d'un exercice postérieur lorsque les circonstances de fait rendent probable cette charge fiscale ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le nouveau code de procédure civile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2006 :

- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires par l'administration à la demande du contribuable n'est obligatoire, en application de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, que si le désaccord qui persiste concerne une question sur laquelle la commission est compétente pour donner son avis ; que les questions de droit échappent à la compétence de la commission départementale susmentionnée ;

Considérant, d'une part, que le vérificateur n'ayant pas admis la déduction d'une provision pour impôt que la SARL CIFI a constituée au titre de l'exercice clos le 30 juin 1999, le litige portait sur la détermination du fait générateur des droits de mutation dus par la société requérante en application des dispositions combinées des articles 1115 et 1840 G quinquies du code général des impôts ; que, s'agissant d'une question de droit, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'était pas compétente pour en connaître ;

Considérant, d'autre part, que le vérificateur a réintégré dans les résultats de l'exercice clos en 1996 les frais financiers engagés par la SARL CIFI lors de l'acquisition de divers biens immobiliers ainsi que ceux afférents aux immeubles qu'elle a fait construire au motif que les intérêts d'emprunts ne pouvaient être déduits que des résultats des exercices au cours desquels ils avaient couru et étaient devenus une dette certaine ; que le désaccord, qui portait sur l'exercice de rattachement d'une charge, ne soulevait aucune question de fait de nature à être soumise à la commission départementale ;

Considérant, enfin, que, lors de l'entretien du 12 mai 2000 entre le représentant de la SARL CIFI et le supérieur hiérarchique du vérificateur, ce dernier a accepté de réduire le montant des redressements procédant de la réintégration, dans les résultats de la société, des dépenses de réception et de restaurant énumérées dans la notification du 31 janvier 2000 relative aux exercices clos en 1997, 1998 et 1999 ; que, par lettre du 16 mai 2000, la société a fait connaître à l'administration que, dans ces conditions, elle acceptait le redressement à concurrence des montants ainsi modifiés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, dès lors que la SARL CIFI avait accepté une partie des redressements et que les autres redressements restant en litige soulevaient une question de droit sur laquelle la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'était pas habilitée à se prononcer, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en ne saisissant pas cette commission, l'administration aurait entaché d'irrégularité la procédure d'imposition ; qu'elle ne saurait utilement invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice de la documentation administrative de base référencée 13 M-341 qui est relative à la procédure d'imposition ;

Considérant, en second lieu, que, contrairement à ce que soutient la SARL CIFI, l'administration lui a indiqué, par lettre du 4 juillet 2000, les conséquences définitives de la vérification de comptabilité, en ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés afférentes à l'exercice clos en 1999 ; que cette lettre d'information prenait en compte, comme le prescrit l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, les modifications apportées aux rehaussements à la suite de l'entrevue du 12 mai 2000 entre le représentant de la société et le supérieur hiérarchique du vérificateur ; que les indications chiffrées mentionnées sur cette correspondance sont reprises sur l'avis d'imposition, lequel ne comporte pas d'erreur mais distingue, d'une part, le montant total des droits dus sur la période et, d'autre part, le montant du supplément d'imposition ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la prescription de l'impôt sur les sociétés établi au titre de l'exercice clos en 1996 :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.169 du livre des procédures fiscales : « Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce, sauf application de l'article L. 168 A, jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. (…)» ; qu'aux termes de l'article L.189 du même livre dans sa rédaction en vigueur à la date de notification des redressements litigieux : « La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement (...) » ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 651 du nouveau code de procédure civile issu du décret n° 89-511 du 20 juillet 1989 : « Les actes sont portés à la connaissance des intéressés par la notification qui leur en est faite. La notification faite par acte d'huissier de justice est une signification. La notification peut toujours être faite par voie de signification alors même que la loi l'aurait prévue sous une autre forme. » ; qu'aux termes de l'article 653 du même code : « La date de la signification d'un acte d'huissier de justice est celle du jour où elle est faite à personne, à domicile, à résidence, au parquet ou, dans le cas mentionné à l'article 659, celle de l'établissement du procès verbal. » ;

Considérant que la notification de redressement du 21 décembre 1999 portant sur les résultats de l'exercice clos le 30 juin 1996 a fait l'objet d'une signification par huissier le 29 décembre 1999 au siège de la SARL CIFI, situé ... ; qu'en l'absence de toute personne habilitée à recevoir cette notification, l'huissier de justice a laissé un avis de passage à l'adresse susmentionnée et a remis copie de l'acte à la mairie de Coignières ; que la SARL CIFI invoque l'irrégularité des conditions dans lesquelles il a été procédé à la signification de la notification de redressement, en faisant valoir que l'administration n'a pas tenu compte des indications dont son gérant l'avait informée au préalable, relatives à son changement d'adresse pour la période du 20 décembre 1999 au 3 janvier 2000 ;

Considérant toutefois que, si la SARL CIFI produit deux lettres datées du 16 décembre 1999 et adressées aux trésoreries de Maurepas et de Montigny-le-Bretonneux, mentionnant une adresse provisoire à Gavray (50450), elle n'établit par aucun commencement de justification que ces deux correspondances auraient été reçues par l'administration avant le 29 décembre 1999, date à laquelle l'huissier de justice s'est présenté à son siège situé à l'adresse susmentionnée de Coignières, en vue de lui remettre la notification de redressement du 21 décembre 1999 ; que par suite, en tout état de cause, cette notification a été régulièrement signifiée le 29 décembre 1999 à la seule adresse du siège de la société connue du service, où le vérificateur s'était rendu peu de temps auparavant pour procéder à la vérification de comptabilité de l'entreprise ; que la prescription a donc été valablement interrompue ;

En ce qui concerne la réintégration des frais de réception :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (…) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (…) » ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant que le vérificateur a réintégré dans les résultats de la SARL CIFI afférents aux exercices clos en 1997, 1998 et 1999 diverses dépenses de restaurant et de réception sur le fondement des dispositions précitées du 1 de l'article 39 du code général des impôts, au motif qu'il ne s'agissait pas d'une charge exposée dans l'intérêt de l'entreprise, qui exerce une activité de marchand de biens ; que si la société soutient qu'elle a présenté au vérificateur les factures correspondantes et lui a indiqué le nom des personnes concernées par ces dépenses, cette précision, qui n'est pas suffisante, ne permet pas de regarder la société requérante comme apportant la preuve que les dépenses en cause ont été engagées dans l'intérêt de l'entreprise ; que, dans ces conditions, la SARL CIFI n'est pas fondée à contester la réintégration des sommes restant en litige dans ses résultats des exercice clos en 1997, 1998 et 1999 ;

En ce qui concerne la provision pour impôts :

Considérant que le 1 de l'article 39 du code général des impôts dispose que les charges déductibles comprennent notamment « (…) 4° ... les impôts à la charge de l'entreprise mis en recouvrement au cours de l'exercice (...) 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables (…) » ; qu'aux termes du 2 de ce même article : « (…) Les (…) pénalités de toute nature mises à la charge des contrevenants aux dispositions légales régissant (…) l'assiette des impôts, contributions et taxes ne sont pas admises en déduction des bénéfices soumis à l'impôt. » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les entreprises ne peuvent pas, en vertu du 4°, comprendre dans les charges déductibles du bénéfice de l'exercice, à titre de frais payés ou à payer, d'autres impôts que ceux qui ont été mis en recouvrement ou sont devenus exigibles avant la clôture de l'exercice ; qu'elles peuvent seulement, en vertu du 5°, porter en provision au passif du bilan de clôture de l'exercice, notamment dans le cas où est survenu en cours d'exercice le fait générateur d'un impôt dont l'entreprise deviendra ultérieurement redevable, le montant de cet impôt, en le calculant selon les règles tracées par la législation alors en vigueur ;

Considérant que, pour bénéficier du régime d'exonération des droits d'enregistrement par application des dispositions combinées des articles 1115 et 1840 G quinquies du code général des impôts, la SARL CIFI disposait d'un délai expirant le 30 juin 1999 pour revendre deux immeubles professionnels dénommés « Illivi » et « Bonnet » ; qu'ainsi, jusqu'au 30 juin 1999, date de clôture de l'exercice ouvert le 1er juillet 1998, la société requérante n'encourait aucune déchéance du régime de faveur ; que, dès lors que le fait générateur de l'impôt n'était pas encore apparu au 30 juin 1999, la SARL CIFI ne pouvait constituer, au titre de l'exercice clos à cette date, une provision pour couvrir le paiement des droits d'enregistrement ; que, par suite, c'est à bon droit que cette provision a été réintégrée, tant en principal qu'en pénalités, au résultat de la société ;

En ce qui concerne les frais financiers :

Considérant qu'à compter de l'exercice clos le 30 juin 1996, la SARL CIFI a diminué le montant de ses stocks du montant des intérêts d'emprunts souscrits lors d'exercices antérieurs en vue d'acquérir des immeubles ; qu'elle a également exclu du montant de ses immobilisations, à compter du même exercice, les frais financiers qu'elle a supportés, au titre d'exercices antérieurs, pour financer elle-même la construction d'immeubles ; qu'en vertu du principe, qui résulte des dispositions du 2 de l'article 38 du code général des impôts, du rattachement des dettes certaines aux exercices au cours desquels elles ont couru, la société ne pouvait pas, comme elle l'a fait, déduire ces divers frais financiers des résultats de l'exercice clos en 1996 ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré au résultat de cet exercice les frais financiers susmentionnés, engagés au cours d'exercices antérieurs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL CIFI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL CIFI est rejetée.

N° 04VE01136 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 04VE01136
Date de la décision : 25/04/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. EVRARD
Rapporteur ?: Mme Françoise BARNABA
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : NGO, MIGUÉRÈS et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-04-25;04ve01136 ?
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