Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 7 février 2006 par télécopie et le 8 février 2006 en original, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n ° 0504103 du 28 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 2 mai 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Kodjo X ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Le préfet soutient que le magistrat délégué a commis une erreur dans l'appréciation de la situation de M. X ; que l'intéressé vit avec une compatriote en situation irrégulière et que la naissance en France d'un enfant ne lui confère pas un droit au séjour ; qu'aucune circonstance ne faisant obstacle à la poursuite de la vie privée et familiale de l'intéressé au Togo, accompagné de sa concubine et de sa fille, la mesure d'éloignement ne porte pas une atteinte disproportionnée à sa vie familiale ; que M. X ne remplissant pas les conditions d'obtention de plein droit d'un titre de séjour, la commission du titre de séjour n'avait pas à être consultée préalablement à la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 2006 :
- le rapport de M. Evrard, magistrat délégué ;
- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Kodjo X, né le 31 décembre 1964 à Zolo, Togo, de nationalité togolaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 16 décembre 2004, de la décision du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que pour prononcer l'annulation, par le jugement du 28 décembre 2005 dont le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS relève appel, de cet arrêté, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé que cette décision d'éloignement portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie familiale de M. X ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, entré en France en juillet 2000 à l'âge de 36 ans, vit maritalement depuis 2002 avec une compatriote séjournant irrégulièrement en France, avec laquelle il a eu un enfant né en juillet 2003 ; que s'il est soutenu que l'intéressé exerce une activité rémunérée, qu'un de ses neveux, âgé de huit ans, réside en France et que ses parents sont aujourd'hui décédés, aucune circonstance ne s'oppose à ce que la cellule familiale se recompose au Togo, pays d'origine de M. X et de sa compagne ; que, dès lors, la mesure de reconduite à la frontière ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie familiale de l'intéressé et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé pour ce motif son arrêté du 2 mai 2005 ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. X devant le tribunal administratif ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (…) » et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code susvisé : « La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (…) » ; qu'il résulte de ces dispositions, que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'ainsi, M. X, séjournant irrégulièrement en France depuis 2000 et vivant avec une compatriote en situation irrégulière, le préfet n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à demander l'annulation du jugement du 28 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 2 mai 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;
Sur les conclusions présentées par M. X :
Considérant que le présent arrêt qui annule le jugement du tribunal administratif et rejette la demande présentée devant le tribunal administratif n'implique aucune mesure d'exécution ; que par suite et en tout état de cause les conclusions de M. X tendant à ce que la cour enjoigne au préfet de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour doivent être rejetées ;
Considérant, enfin, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
Article 1er : Le jugement du 28 décembre 2005 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise par M. X est rejetée.
N° 06VE00262
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