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21/07/2006 | FRANCE | N°03VE02765

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 21 juillet 2006, 03VE02765


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n° 2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la S.A CEGELEC PARIS venant aux droits de la SOCIETE CEGELEC, dont le siège soci

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Vu la requête, enregistrée le 11...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n° 2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la S.A CEGELEC PARIS venant aux droits de la SOCIETE CEGELEC, dont le siège social est ..., par Me X... ;

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle la S.A CEGELEC PARIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9805022 en date du 25 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye soit condamné à lui verser la somme de 273 608, 19 F (41 711,30 euros) ;

2°) de condamner le centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye à lui verser la somme de 41 711, 30 euros, majorée des intérêts eux-mêmes capitalisés ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la société Hervé n'a pas opposé, dans le délai de quinze jours prévu par l'article 8 de la loi du 31 décembre 1975, de refus motivé concernant les situations de travaux n° 14 et 15 et les factures correspondantes ; que la contestation de la société Hervé des 2 et 5 mai 1997 est tardive au regard de ce délai de sorte qu'elle est sans effet sur son droit au paiement direct ; que le contrôle opéré par le maître d'ouvrage lorsqu'il est saisi d'une demande de paiement direct ne doit pas l'ériger en juge des différents opposant l'entrepreneur principal et son sous-traitant ; qu'une créance de pénalités qu'un entrepreneur principal détient éventuellement à l'encontre de son sous-traitant ne limite nullement le droit de ce dernier au paiement direct ; que le maître d'ouvrage, envers lequel le sous-traitant n'a souscrit aucune obligation, notamment de délais, ne peut appliquer de pénalités de retard au sous-traitant ; que le tribunal a commis une erreur de droit en considérant que la loi du 31 décembre 1975 ne fait pas obstacle à l'application au sous-traitant, par le maître de l'ouvrage, de pénalités contractuellement définies ; que l'appréciation de la responsabilité de la société Hervé et de sa propre responsabilité dans les retards constatés relève de la compétence du juge judiciaire ; que c'est à tort que le centre hospitalier de Saint-Germain-en-Laye a pris prétexte du litige qui l'oppose à la société Hervé pour ne pas donner suite à sa demande de paiement direct ; que les intérêts moratoires auxquels elle a droit ont commencé à courir à compter du 11 juin 1997 au taux de 5,87 % ;

…………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juillet 2006 :

- le rapport de M. Bonhomme, premier conseiller ;

- les observations orales de Me Y..., avocat, représentant la société Hervé ;

- et les conclusions de M. Bresse, commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de la société anonyme Hervé :

Considérant que la requête de la S.A CEGELEC PARIS est susceptible de préjudicier aux droits de la société Hervé ; que, dès lors, l'intervention de la société Hervé est recevable ;

Sur le droit au paiement direct :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi susvisée du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance : « Le sous-traitant qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage est payé directement par lui pour la part du marché dont il assure l'exécution (...) » ; qu'aux termes de l'article 8 de cette même loi : « L'entrepreneur principal dispose d'un délai de quinze jours, comptés à partir de la réception des pièces justificatives servant de base au paiement direct, pour les revêtir de son acceptation ou pour signaler au sous-traitant son refus motivé d'acceptation. Passé ce délai, l'entrepreneur principal est réputé avoir accepté celles des pièces justificatives ou des parties de pièces justificatives qu'il n'a pas expressément acceptées ou refusées (...) » ; qu'aux termes de l'article 186 ter du code des marchés publics : « Au vu des pièces justificatives fournies par le sous-traitant et revêtues de l'acceptation du titulaire du marché, l'ordonnateur mandate les sommes dues au sous-traitant (...). Dans le cas où le titulaire d'un marché n'a ni opposé un refus motivé à la demande de paiement du sous-traitant dans le délai de quinze jours suivant sa réception, ni transmis celle-ci à l'administration, le sous-traitant envoie directement sa demande de paiement à l'administration par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal ou la lui remet contre récépissé (...). L'administration met aussitôt en demeure le titulaire, par lettre recommandée avec avis de réception postal, de lui faire la preuve, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de cette lettre, qu'il a opposé un refus motivé à son sous-traitant (...). A l'expiration de ce délai, au cas où le titulaire ne serait pas en mesure d'apporter cette preuve, l'administration contractante dispose du délai prévu au I de l'article 178 pour mandater les sommes dues au sous-traitant (...) » ;

Considérant qu'aux termes d'un acte spécial en date du 9 avril 1996, la SOCIETE CEGELEC aux droits de laquelle vient la S.A CEGELEC PARIS a été agréée par le centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye en qualité de sous-traitant de la société Hervé, laquelle était chargée, par contrat, des travaux de réhabilitation de l'hôpital de Saint-Germain-en-Laye ; qu'il n'est pas contesté que le centre hospitalier, maître de l'ouvrage, a également agréé les conditions de paiement de ce sous-traitant ; que conformément aux dispositions précitées de l'article 8 de la loi du 31 décembre 1975, la SOCIETE CEGELEC a adressé à l'entreprise Hervé les 29 novembre et 23 décembre 1996 les situations de travaux n° 14 et 15 cumulées à fin novembre et décembre 1996 pour un montant total de 43 545,20 euros (285 637,80 F), dont 41 711,30 euros au titre du droit au paiement direct ; qu'à ces documents étaient annexées les factures correspondantes ; qu'en l'absence d'acceptation et de refus motivé transmis par la société Hervé dans un délai de quinze jours courant au plus tard à compter du 26 décembre 1997, date d'accusé réception de la seconde situation, la SOCIETE CEGELEC a, le 18 avril 1997, directement transmis au centre hospitalier de Saint-Germain-en-Laye une demande de versement d'une somme de 41 711, 30 euros (273 608,19 F) au titre du paiement direct ; que, toutefois, le centre hospitalier a refusé de verser la somme réclamée au motif qu'eu égard aux défaillances du sous-traitant et à leurs conséquences sur les délais de livraison, le droit au paiement direct de la SOCIETE CEGELEC n'était pas établi avec certitude ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que dans le délai de quinze jours suivant la réception par la société Hervé des situations de travaux n° 14 et 15 de son sous-traitant, la société Hervé n'a ni revêtu de son acceptation les factures correspondant à ces documents, ni signalé à la SOCIETE CEGELEC son refus motivé de les accepter ; que si, par lettre du 2 mai 1997, la société Hervé a justifié les raisons pour lesquelles elle n'avait pas cru transmettre à l'époque les situations de son sous-traitant au maître d'ouvrage, cette lettre comme le décompte définitif qu'elle a établi le 12 janvier 1998 ne peuvent constituer la preuve d'un refus motivé autorisant le maître de l'ouvrage à refuser de faire droit à la demande de paiement direct dont il était régulièrement saisi ;

Considérant, d'autre part, que si les procédures instituées par les dispositions précitées de l'article 8 de la loi du 31 décembre 1975 et de l'article 186 ter du code des marchés publics alors en vigueur ne font pas obstacle au contrôle par le maître de l'ouvrage du montant de la créance du sous-traitant compte tenu des travaux qu'il a exécutés et des prix stipulés par le marché, il ne lui appartient pas, dans le cadre de ce contrôle, de faire application des stipulations contractuelles relatives aux pénalités de retard relevant du contrat conclu avec l'entrepreneur général ; que, dès lors, le centre hospitalier de Saint-Germain-en-Laye n'était pas en droit de rejeter la demande de paiement direct présentée par la SOCIETE CEGELEC ; qu'il ne pouvait pas davantage arguer du conflit opposant la SOCIETE CEGELEC à la société Hervé pour refuser le paiement de la somme de 41 711, 30 euros (273 608,19 F) ; que le maître d'ouvrage ne pouvait pas davantage se borner à consigner la somme réclamée par la requérante dans l'attente de la solution du litige opposant cette société et la société Hervé ; que la circonstance que la Cour d'appel de Paris aurait ultérieurement condamné la société Hervé à payer à la S.A CEGELEC PARIS à titre de provision une somme de 15 000 euros est sans influence sur la détermination du montant de la créance que la SOCIETE CEGELEC détient sur le centre hospitalier au titre du paiement direct ; que le centre hospitalier de Saint-Germain-en-Laye ne pouvait pas non plus refuser le paiement réclamé par la requérante « dans l'attente d'une décision au fond du tribunal de commerce » ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Saint-Germain-en-Laye devait, comme il s'y était engagé, en l'absence de motif pertinent susceptible d'y faire obstacle, procéder au paiement de la somme due à la SOCIETE CEGELEC ; qu'il y a lieu de condamner le centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye à payer à la S.A CEGELEC PARIS la somme de 41 711,30 euros (273 608,19 F) ;

Considérant que le paiement de cette somme doit être subordonné à la condition que la S.A CEGELEC PARIS subroge le centre hospitalier dans les droits qu'elle pourrait faire valoir à l'encontre de la société Hervé du fait du non paiement par celle-ci des travaux exécutés pour son compte dans le cadre des travaux admis au paiement direct ;

Sur les intérêts :

Considérant que la SOCIETE CEGELEC a adressé sa demande de paiement direct au centre hospitalier de Saint-Germain-en-Laye le 18 avril 1997 ; que, par une lettre en date du 21 avril 1997, le maître de l'ouvrage a, conformément aux dispositions de l'article 186 ter du code des marchés publics, mis en demeure la société Hervé de lui apporter la preuve, dans un délai de quinze jours, de son refus d'accepter les pièces justificatives que lui avait adressées la SOCIETE CEGELEC ; qu'à l'expiration de ce délai, le 6 mai 1997 à minuit, et dans la mesure où cette preuve n'avait pas été apportée, le centre hospitalier de Saint-Germain-en-Laye disposait du délai de trente cinq jours prévu au I de l'article 178 du code des marchés publics pour mandater la somme due au sous-traitant ; qu'il est constant que ce mandatement n'a pas eu lieu ; qu'aux termes du II de l'article 178 du code des marchés publics, ce défaut de mandatement dans le délai de trente cinq jours a fait courir de plein droit, au bénéfice de la requérante, des intérêts moratoires à partir du jour suivant l'expiration de ce délai, soit le 11 juin 1997 ; qu'ainsi, la S.A. CEGELEC PARIS a droit aux intérêts de la somme de 41 711,30 euros à compter de cette date ;

Sur les intérêts des intérêts :

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée par la S.A. CEGELEC PARIS le 12 août 1998 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande et de capitaliser les intérêts afférents à la somme due au 12 août 1998 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant que les dispositions précitées de cet article font obstacle à ce que la S.A. CEGELEC PARIS, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée sur ce fondement au remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par le centre hospitalier de Saint-Germain-en-Laye et la société Hervé ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre respectivement à la charge du centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain et de la société Hervé le paiement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la société Hervé est admise.

Article 2 : Le jugement n° 9805022 en date du 25 avril 2003 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 3 : Le centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye est condamné à payer à la SA CEGELEC PARIS la somme de 41 711,30 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 11 juin 1997. Les intérêts échus à la date du 11 juin 1998 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 4 : Le paiement de la somme prévue à l'article 3 est subordonné à la condition que la société subroge le centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye dans les droits qu'elle pourrait faire valoir à l'encontre de la société Hervé.

Article 5 : Le centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye et la société Hervé verseront chacun à la SA CEGELEC PARIS une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de la SA CEGELEC PARIS, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le centre hospitalier intercommunal de Saint-Germain-en-Laye et les conclusions du mémoire en intervention de la société Hervé sont rejetés.

03VE02765 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 03VE02765
Date de la décision : 21/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: M. Bernard BONHOMME
Rapporteur public ?: M. BRESSE
Avocat(s) : DUPICHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-07-21;03ve02765 ?
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