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12/06/2008 | FRANCE | N°07VE00678

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 12 juin 2008, 07VE00678


Vu, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 22 mars 2007, présentée pour la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE, dont le siège social est sis 72, rue Aristide Briand, BP n°1, au Petit-Couronne (76650) représentée par son président en exercice, par Me Courchinoux ; la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405413-0506526 du 16 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'état exécutoire émis le 8 décembre 2003 par l'age

nce de l'eau Seine-Normandie en ce qu'il met à sa charge, à hauteur de ...

Vu, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 22 mars 2007, présentée pour la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE, dont le siège social est sis 72, rue Aristide Briand, BP n°1, au Petit-Couronne (76650) représentée par son président en exercice, par Me Courchinoux ; la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405413-0506526 du 16 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'état exécutoire émis le 8 décembre 2003 par l'agence de l'eau Seine-Normandie en ce qu'il met à sa charge, à hauteur de 174 294 euros, une redevance pour action renforcée au titre de l'année 2003, ensemble la décision du 7 juin 2004 portant rejet de son recours préalable, et l'état exécutoire émis le 27 mai 2004 par l'agence de l'eau Seine-Normandie en ce qu'il met à sa charge, à hauteur de 377 959 euros, une redevance pour action renforcée au titre de l'année 2004, ensemble la décision du 31 mai 2005 portant rejet de son recours préalable ;

2°) d'annuler les décisions des 7 juin 2004 et 31 mai 2005, ensemble les états exécutoires des 8 décembre 2003 et 27 mai 2004, en ce qu'ils mettent à sa charge une redevance pour action renforcée au titre de son activité exercée au Petit-Couronne lors des exercices 2003 et 2004 ;

3°) de condamner l'agence de l'eau Seine-Normandie à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, en premier lieu, que le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé en ce qu'il ne répond pas au moyen tiré de ce que l'activité de l'exposante ne justifiait pas son assujettissement à une redevance majorée, alors qu'elle avait fait valoir que le taux de majoration qui lui a été appliqué méconnaît les dispositions du 5ème alinéa de l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964 ; en deuxième lieu, que si elle peut admettre que la région Haute-Normandie fait partie des zones sensibles, cette circonstance ne justifie pas en droit la décision de l'agence de retenir, pour les redevances pour prélèvements et consommations d'eau, un barème exclusivement établi sur des bases géographiques et non en fonction des quantité et qualité d'eau prélevée comme le prévoit l'article 18 § III 2° du décret du 14 septembre 1966 ; que ce texte pose pour principe que les barèmes des redevances sont établis à titre principal sur les quantité ou qualité des eaux prélevées et n'autorise pas la fixation des redevances selon une division géographique du bassin, même si les circonstances de lieu sont susceptibles d'être prises en compte ; qu'en conséquence, les délibérations du conseil d'administration de l'agence de l'eau Seine-Normandie sont illégales ; que les ordres de recettes, émis sur leur fondement, doivent, par suite, être annulés ; en troisième lieu, que le montant des redevances litigieuses n'est pas justifié au regard de l'activité exercée par l'exposante ; que le 5ème alinéa de l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964 dispose en effet que les redevances sont perçues sur les personnes publiques ou privées dans la mesure où celles-ci rendent nécessaire ou utile l'intervention de l'agence ; qu'il s'en déduit que la légalité de l'assujettissement d'une entreprise à une redevance n'est justifiée qu'en considération des conséquences qu'entraine son activité sur la ressource en eau ; qu'en l'espèce, si les prélèvements effectués par l'exposante rendent nécessaire l'action de l'agence, ils ne justifient pas une action renforcée de la part de cet établissement, les prélèvements, effectués à des fins industrielles, n'étant pas opérés sur une eau potable ; que si l'agence a fait valoir que la redevance litigieuse n'est pas une redevance pour service rendu et que la solidarité voulue par le législateur entre les opérateurs justifie que ne soit pas respectée une exacte proportionnalité entre l'utilité retirée par les entreprises de l'activité de l'agence et les contributions qui leur sont réclamées, il reste que les barèmes ne peuvent être établis sans prendre aucunement en compte l'utilité de l'action de l'agence pour l'entreprise ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 ;

Vu le décret n° 66-700 du 14 septembre 1966 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2008 :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président assesseur,

- les observations de Me Aurisset, substituant Me Fourgoux, pour la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE,

- les observations de Me Leron, substituant Me Lyon-Caen, pour l'agence de l'eau Seine-Normandie,

- et les conclusions de Mme Grand d'Esnon, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE, qui exploite une raffinerie au Petit-Couronne (Seine-Maritime) a été assujettie au titre des exercices 2003 et 2004 aux redevances prévues par l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution ; qu'elle fait appel du jugement du 16 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des sommes de 174 294 euros et de 377 959 euros correspondant à la part de redevance due au titre de la « zone d'action renforcée » ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort du dossier de première instance que, pour demander la décharge des impositions litigieuses, la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE a excipé de l'illégalité de la délibération du 31 octobre 2002, par laquelle le conseil d'administration de l'agence de l'eau Seine-Normandie a retenu le principe d'une modulation géographique du taux de la redevance pour prélèvement et consommation d'eau, au motif que, faute de tenir compte de l'activité exercée par la personne assujettie, cette délibération méconnaissait les dispositions de l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964 ; qu'il ressort du jugement attaqué que pour écarter cette exception, le tribunal, après avoir cité l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964 ainsi que l'article 18 du décret du 14 septembre 1966 relatif aux agences financières de bassin, en vertu duquel le conseil d'administration des agences établit les barèmes « suivant les quantités et la qualité de l'eau prélevée, ainsi que les circonstances de temps et de lieu de nature à influer sur la valeur de la ressource », a indiqué que la délibération litigieuse ne méconnaît pas les dispositions précitées en ce qu'elle institue une zone à redevance majorée « en raison de circonstances liées à la qualité de la ressource en eau » ; que, dans ces conditions, il a suffisamment motivé sa décision alors même qu'il n'a pas expressément écarté l'argumentation relative à l'incidence de l'activité exercée par le redevable sur les ressources en eau ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la loi susvisée du 16 décembre 1964, applicable aux impositions litigieuses : « L'agence établit et perçoit sur les personnes publiques ou privées des redevances, dans la mesure où ces personnes publiques ou privées rendent nécessaire ou utile l'intervention de l'agence ou dans la mesure où elles y trouvent leur intérêt (...) » ; qu'aux termes de l'article 18 du décret susvisé du 14 septembre 1966 : « I. Des redevances peuvent être réclamées aux personnes publiques ou privées qui rendent l'intervention de l'agence nécessaire ou utile : Soit qu'elles contribuent à la détérioration de la qualité de l'eau ; Soit qu'elles effectuent des prélèvements sur la ressource en eau ; Soit qu'elles modifient le régime des eaux dans tout ou partie du bassin. (...) III - (...) 2° Pour la détermination de l'assiette des redevances établies au titre des prélèvements, le conseil d'administration établit des barèmes répartissant les prélèvements par classes suivant les quantités et la qualité de l'eau prélevée, ainsi que les circonstances de temps et de lieu de nature à influer sur la valeur de la ressource. Le conseil d'administration peut établir des barèmes particuliers à certaines catégories de redevables, comportant des règles simplifiées pour l'assiette des redevances (...) » ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que par délibérations du 31 octobre 2002, le conseil d'administration de l'agence de l'eau Seine-Normandie a, d'une part, décidé que le bassin Seine-Normandie serait, pour l'application de la redevance de prélèvement et consommation nette d'eau, divisé en quatre zones géographiques dans lesquelles s'appliquent des taux différents, d'autre part, décidé que la région Haute-Normandie serait, compte tenu de la dégradation particulière de la ressource en eau, tant en surface qu'en sous-sol, liée au ruissellement et à l'érosion des sols, intégrée en « zone 3 » où sont appliquées à l'ensemble des utilisateurs la redevance de base et la redevance pour action renforcée, enfin, fixé pour le VIIIème programme (2003-2006) les taux de ces redevances, lesquels s'appliquent aux quantités d'eau prélevées et consommées par les redevables et varient selon qu'il s'agit d'eaux souterraines ou d'eaux de surface ; que, dans ces conditions, ces délibérations, alors même qu'elles décident de procéder à une division géographique du bassin, prévoient une imposition selon les quantités et la qualité de l'eau prélevée et la valeur de la ressource en eau ; qu'elles ne sont, dès lors, pas intervenues en méconnaissance des dispositions législatives et réglementaires précitées ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE effectue, pour les besoins de son activité de raffinage située en Haute-Normandie, des prélèvements sur les eaux souterraines et les eaux de surface ; qu'elle rend, en conséquence, nécessaire ou utile l'intervention de l'agence de l'eau Seine-Normandie ; que les redevances perçues par les agences financières de bassin, en application de la loi du 16 décembre 1964, qui sont destinées à assurer le financement des dépenses de toutes natures qui incombent aux agences en vue d'assurer un régime des eaux conforme à l'intérêt général, ne sont pas perçues en contrepartie d'un service rendu directement à l'assujetti et doivent être rangées au nombre des impositions, dont le montant ne dépend pas de l'incidence exacte de l'activité du redevable sur la ressource en eau, ni de l'importance des avantages qu'il retire de l'intervention de l'agence de l'eau ; que, dans ces conditions, compte tenu de la localisation de son activité dans une zone où la ressource en eau est particulièrement dégradée, et alors que la disproportion manifeste alléguée par la requérante n'est pas établie, la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE n'est pas fondée à contester la part de redevance qui lui a été réclamée au titre de la « zone d'action renforcée » au motif que la nature de son activité n'appellerait aucune action renforcée en matière de gestion de l'eau ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE le versement à l'agence de l'eau Seine-Normandie d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE COURONNAISE DE RAFFINAGE versera à l'agence de l'eau Seine-Normandie la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de l'agence de l'eau Seine-Normandie tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

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N° 07VE00678


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE00678
Date de la décision : 12/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: Mme GRAND d'ESNON
Avocat(s) : COURCHINOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-06-12;07ve00678 ?
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