Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2009, présentée pour M. Simon A demeurant chez Mme Maud B, ..., par Me Behotas ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0906116 du 16 juin 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mai 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler cet arrêté et cette décision ;
Il soutient que le premier juge ne pouvait retenir dans son jugement qu'il n'avait pas produit de justificatifs à l'appui du moyen tiré des risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine dès lors qu'il avait remis à l'audience devant le juge de la reconduite à la frontière, d'une part, les actes de décès de sa compagne et de son fils à la suite de leur assassinat survenu le 21 décembre 2006, d'autre part, l'extrait des minutes de la justice de paix de Hatte Chevreau ; que, contrairement aux motifs retenus par le jugement attaqué, il n'a pas été répondu à sa demande de notification, le 7 janvier 2009, de l'obligation de quitter le territoire français qui avait été prononcée à son encontre ; qu'il a adressé des demandes de réexamen de sa situation au préfet de la Seine-Saint-Denis, le 16 mars 2007, et au préfet de la Seine-et-Marne, le 7 août 2007 ; qu'il est établi qu'il encourt des risques pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine ; que le préfet a commis une erreur manifeste de son appréciation des conséquences de la décision qu'il a prise sur sa situation personnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2010 :
- le rapport de M. Martin, magistrat désigné,
- les conclusions de M. Davesne, rapporteur public,
- et les observations de M. A ;
Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité haïtienne, ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français ; qu'il se trouvait, ainsi, dans le cas où, en application du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Sur la décision ordonnant la reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Lorsqu'un étranger, se trouvant à l'intérieur du territoire français, demande à bénéficier de l'asile, l'examen de sa demande d'admission au séjour relève de l'autorité administrative compétente. ; qu'aux termes de l'article L. 742-1 du même code : Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions du chapitre Ier du présent titre, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la cour statue. ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 723-3 dudit code : Lorsque, à la suite d'une décision de rejet devenue définitive, la personne intéressée entend soumettre à l'office des éléments nouveaux, sa demande de réexamen doit être précédée d'une nouvelle demande d'admission au séjour et être présentée selon la procédure prévue à l'article R. 723-1. (...) ; qu'en vertu de l'article R. 311-1 du même code : Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour en application de l'article L. 311-3, est tenu de se présenter, à Paris, à la préfecture de police et, dans les autres départements, à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient. (...) ; que ces dispositions n'ont pas pour effet de priver la personne qui, invoquant des éléments nouveaux, présente une nouvelle demande d'asile, de son droit au maintien sur le territoire jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, mais subordonnent seulement l'exercice de ce droit à la condition que l'intéressé se soit présenté en personne au service compétent pour enregistrer sa demande d'autorisation provisoire de séjour ;
Considérant, en premier lieu, que si M. A fait valoir qu'à la date de l'arrêté pris à son encontre, il avait sollicité le réexamen de sa demande d'asile au regard d'éléments nouveaux le concernant, et produit en ce sens des correspondances qu'il aurait adressées le 16 mars 2007 à la préfecture de la Seine-Saint-Denis et les 7 août 2007 et 7 janvier 2009 à la préfecture de Seine-et-Marne, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il ne s'est pas présenté en personne à ces préfectures comme l'impose l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que M. A aurait demandé en vain communication de la copie de l'invitation à quitter le territoire français notifiée à son encontre en 2006 est sans incidence sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué ;
Considérant, enfin, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre d'un arrêté de reconduite à la frontière ;
Sur la décision distincte fixant le pays de destination :
Considérant que si la demande de M. A tendant à ce que lui soit reconnue la qualité de réfugié politique a été rejetée le 17 mai 2004 par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, confirmée le 28 février 2006 par la Commission de recours des réfugiés, il ressort des pièces du dossier que M. A a produit les actes de décès de ses proches ainsi que l'extrait des minutes du greffe de la justice de paix de Hatte Chevreau qui n'ont été soumis ni à l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides ni à la Commission de recours des réfugiés desquels il résulte l'assassinat, le 21 décembre 2006, de sa compagne et celui de son fils demeurés en Haïti ; que ces documents, qui ont été produits en appel et n'ont pas été contestés par le préfet de la Seine-Saint-Denis, lequel n'a pas produit d'observations en défense, établissent les risques auxquels le requérant serait personnellement exposés et permettent de regarder comme établies des circonstances de nature à faire légalement obstacle à sa reconduite à destination de son pays d'origine ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision fixant Haïti comme pays à destination duquel il sera reconduit ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 16 juin 2009 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A tendant à l'annulation de la décision du 28 mai 2009 du préfet de la Seine-Saint-Denis fixant Haïti comme pays de destination.
Article 2 : La décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 16 juin 2009 fixant Haïti comme pays à destination duquel M. A sera éloigné est annulée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 09VE02537 2