Vu la requête, enregistrée le 5 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Sadok A, demeurant ..., par Me Samson ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0811774 du 18 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur lui a retiré seize points de son permis de conduire à la suite des infractions constatées les 14 novembre 2003, 18 novembre 2003, 22 août 2004, 27 septembre 2005 et 17 novembre 2005 ;
2°) d'annuler les décisions contestées ;
M. A soutient qu'il n'a pas été avisé de l'existence d'un pli recommandé ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de la route ;
Vu l'arrêté du 15 mai 1990 relatif à la procédure de l'encaissement immédiat par les agents verbalisateurs ;
Vu l'arrêté du 29 juin 1992 fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues à l'article L. 30 (4°, 5°, 6° et 7°) du code de la route ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2011 :
- le rapport de Mme Courault, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Davesne, rapporteur public ;
Considérant que M. A fait appel du jugement du 18 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté, pour tardiveté, sa demande tendant, à l'annulation de cinq décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a retiré seize points de son permis de conduire ;
Considérant que, pour rejeter comme tardive la demande de M. A, enregistrée le 18 novembre 2008, le magistrat désigné a fait droit à la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales tirée de la tardiveté de la demande, au motif que l'intéressé a été destinataire d'une lettre recommandée avec accusé de réception présentée à son adresse le 22 août 2006, soit plus de deux mois avant l'enregistrement de sa demande devant le Tribunal administratif de Versailles, d'une décision 48 S constatant la perte de validité de son permis de conduire et revenue à son expéditeur avec la mention non réclamé-retour à l'envoyeur ;
Considérant qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'action introduite devant un tribunal administratif, d'établir que l'intéressé a régulièrement reçu notification de la décision attaquée ; qu'en cas de retour à l'administration du pli contenant la décision, cette preuve peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal, conformément à la réglementation en vigueur, d'un avis d'instance prévenant le destinataire de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste ; que, si le pli recommandé produit en original par l'administration comporte la date de présentation du pli, l'adresse complète du bureau de poste de mise en instance du pli ainsi que le tampon de réexpédition du pli, la mention avisé ne figure pas sur le pli ; que la mention désignant le bureau de poste de mise en instance ne suffit pas à établir que M. A a été avisé de cette mise en instance ; qu'ainsi, la notification de la décision récapitulant les décisions de retraits de points opérées sur le permis de conduire de l'intéressé et constatant la perte de validité de celui-ci ne peut être regardée comme régulière ; que, par suite, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a rejeté comme irrecevables ses demandes tendant à l'annulation des différents retraits de points ;
Considérant qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Versailles ;
Sur la méconnaissance de l'article L. 223-1 du code de la route :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ;
Considérant que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ;
Considérant qu'eu égard aux mentions figurant sur le relevé intégral d'information relatif à la situation de M. A à la date du 18 novembre 2008, et en l'absence de tout élément de nature à remettre en doute leur exactitude, il doit être tenu pour établi que le requérant a acquitté les amendes forfaitaires consécutives aux infractions constatées les 14 novembre 2003, 18 novembre 2003, 22 août 2004, 27 septembre 2005 et 17 novembre 2005 ; que, dès lors que, pour ces cinq infractions, M. A n'établit ni même n'allègue avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction, ces mentions suffisent à établir la réalité des infractions en cause ;
Sur la méconnaissance de l'article L. 223-3 du code de la route :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-3 du code de la route : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. / Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 223-3 du même code, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007 : I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l 'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1 / II.- Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. (...) ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;
Considérant qu'il ressort des procès-verbaux produits par l'administration que les infractions des 18 novembre 2003, 22 août 2004 et 27 septembre 2005 ont été constatées au moyen d'un formulaire conforme aux dispositions des articles A 37 à A 37-4 du code de procédure pénale ; que le procès-verbal de l'infraction du 22 août 2004 est signé de l'intéressé ; que, si M. A n'a pas signé le procès-verbal afférent à l'infraction du 18 novembre 2003 et a refusé de signer celui afférent à l'infraction du 27 septembre 2005, il ressort des mentions non sérieusement contestées du relevé d'information intégral que M. A a réglé l'amende forfaitaire pour chacune de ces infractions ; qu'ainsi, le requérant a nécessairement reçu l'avis de contravention, qui constitue le deuxième volet du formulaire utilisé pour la constatation et le paiement des contraventions soumises à la procédure de l'amende forfaitaire, dès lors qu'il a postérieurement payé l'amende ;
Considérant, en revanche, que si M. A a payé l'amende forfaitaire afférente à l'infraction du 14 novembre 2003, le ministre de l'intérieur reconnaît ne pas être en mesure de produire le procès-verbal dressé à la suite de cette infraction ; qu'en l'absence de ce document il ne peut être tenu pour établi que l'infraction a été constatée au moyen d'un formulaire conforme aux dispositions précitées du code de procédure pénale ; que, par suite, s'agissant de cette infraction le ministre de l'intérieur n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les informations requises ont été délivrées au contrevenant ;
Considérant qu'en ce qui concerne l'infraction pour excès de vitesse relevée par radar automatique le 17 novembre 2005, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales produit la copie de l'avis de contravention au code de la route établi le 23 novembre 2005 au nom de M. A qui comporte les informations exigées par les article L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est seulement fondé à demander l'annulation de la décision de retrait de quatre points afférente à l'infraction constatée le 14 novembre 2003 ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0811774 du Tribunal administratif de Versailles en date du 18 décembre 2009 est annulé.
Article 2 : La décision du ministre de l'intérieur retirant quatre points du permis de conduire de M. A à la suite de l'infraction du 14 novembre 2003 est annulée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de M. A devant le Tribunal administratif de Versailles est rejeté.
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N° 10VE00181 2