Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SOCIETE EN COMMANDITE PAR ACTIONS PRODUITS CULTURELS (SCA PC), dont le siège est 4 et 8 quai de Seine à Saint-Ouen (93584), par Me Guichard, avocat ; la SCA PC demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0808683 en date du 5 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision en date du 6 juin 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité lui a refusé l'autorisation de licencier Mme A, ainsi que les décisions implicite et expresse du 7 février 2008 de l'inspecteur du travail de la Seine-Saint-Denis ayant le même objet ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées ;
Elle soutient que l'inspecteur du travail a été saisi de la demande d'autorisation de licenciement de Mme A par courrier reçu le 10 octobre 2007 ; qu'une décision implicite de rejet de la demande d'autorisation est née, le 10 décembre suivant, du silence gardé par l'administration ; que le 14 décembre, elle a formulé une demande de motivation ; que le délai pour communiquer la motivation expirait le 16 janvier 2008 ; que l'inspecteur du travail s'est contenté de donner une réponse le 13 février 2008 alors que le recours hiérarchique avait déjà été initié ; que la décision est donc illégale ; que la décision implicite de rejet n'a pas été automatiquement remplacée par la décision du 7 février 2008 qui ne pouvait couvrir les irrégularités antérieures ; que l'absence de mention dans les décisions litigieuses quant au statut de titulaire ou suppléant entache les décisions d'illégalité ; que la décision du ministre ne comporte pas la référence aux actes de procédure alors que l'administration doit s'assurer du respect de la procédure suivie et répondre aux différents moyens soulevés dans le recours hiérarchique ; que le ministre ne l'a pas informée des voies et délais de recours dont elle disposait pour contester sa décision ; que la décision de l'inspecteur se borne à faire référence à la suppression de tous les postes de la société sans indication du poste précisément occupé par Mme A ; que le ministre n'a pas répondu à l'ensemble des points évoqués dans le recours gracieux : absence de réponse dans le délai requis à la demande de motivation, procédure régulièrement suivie pour ce qui concerne l'information et la consultation du comité ; qu'ainsi la décision est insuffisamment motivée ; que le tribunal ne s'est pas prononcé précisément sur ce moyen ; que s'agissant de l'obligation de reclassement, la cour de cassation fixe une limite territoriale au champ de recherche des possibilités de reclassement ; que la société est la seule du groupe à développer une activité tant de commandes que de préparation de commandes de produits culturels mais surtout, elle est la seule à être située dans le département de la Seine-Saint-Denis ; que l'organisation même de la société est différente des autres sociétés ; qu'aucune permutabilité du personnel n'est possible à l'exception des fonctions supports ; que compte tenu de la spécificité de la société, elle n'était pas tenue d'étendre ses recherches au sein de structures pour lesquelles l'activité, l'organisation et le lieu d'implantation ne permettaient pas d'effectuer la permutation de personnel ; que les points de vente sont des sociétés juridiquement autonomes appartenant à un chef d'entreprise indépendant ; que dès la fin février, il a été proposé aux salariés d'exposer leurs éventuels souhaits ; qu'au lancement de la procédure, 41 emplois étaient recensés pouvant a priori correspondre aux compétences et qualifications des salariés de la société ; que toutes les offres d'emplois disponibles dans le groupe ont été portées à la connaissance des élus et des salariés du groupe par affichage ; que toutes les sociétés du groupe ont été sollicitées ; qu'il n'y a, s'agissant des salariés protégés, aucune obligation renforcée ou spécifique de reclassement ; que Mme A n'a pas transmis son CV complet à la responsable des ressources humaines de la STIME, filiale informatique du groupe qui disposait de postes disponibles ; que deux postes lui ont été présentés le 27 juillet 2007 ; qu'il est apparu que les postes présentés requéraient des compétences techniques dont Mme A était dépourvue et qu'elle n'aurait pu acquérir par une formation de courte durée ; qu'elle a reconnu ne pas avoir le profil pour occuper un poste à la STIME ; qu'il n'y avait pas de poste à pourvoir dans les sociétés travaillant sur AS 400 ; que l'intéressée a été pressentie pour deux postes ; que la société a opéré une sélection des postes la plus large possible en lui proposant de rencontrer la DRH d'une autre entité alors même que les postes disponibles n'étaient pas scrupuleusement identiques ; que la décision de refus d'autorisation de licenciement porte une atteinte excessive aux intérêts de la société qui a cessé son activité depuis le 31 octobre 2007 ; que ladite décision est à l'origine d'une mesure discriminatoire vis-à-vis de l'ensemble des salariés ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 2011 :
- le rapport de Mme Rollet-Perraud, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public,
- les observations de de Me Guichard pour la SCA PC,
- et les observations de Me Hanjani pour Mme A ;
Considérant que Mme A a été engagée en qualité de responsable informatique le 1er juillet 1985 par la SCA PC qui fait partie du groupe Intermarché entreprises ; qu'en raison de difficultés économiques, la société a souhaité, dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, procéder au licenciement de l'ensemble des salariés et sollicité auprès de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier les salariés protégés dont Mme A, membre titulaire du comité d'entreprise, par lettre du 9 octobre 2007 ; que le 1er février 2008, la société prenant acte de la décision implicite de rejet a saisi le ministre du travail d'un recours hiérarchique ; que par une décision du 7 février 2008, l'inspecteur du travail de la Seine-Saint-Denis a confirmé sa décision implicite de rejet et refusé expressément l'autorisation de procéder au licenciement de Mme A au motif tiré de l'insuffisance des recherches de reclassement ; que par une décision du 6 juin 2008, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a confirmé les décisions de l'inspecteur du travail et refusé l'autorisation de licenciement de Mme A ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que la société requérante soutient que le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que le ministre n'a pas répondu à l'ensemble des points évoqués dans le recours gracieux ; que, toutefois, il s'agit d'un argument dont a fait état l'intéressée à l'appui du moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du ministre ; que les premiers juges, qui ont répondu audit moyen et qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments exposés à l'appui dudit moyen, n'ont, dès lors, pas entaché leur jugement d'une omission à statuer ;
Sur le fond :
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de l'inspecteur du travail :
Considérant que la demande d'autorisation de licenciement présentée par la SCA PC a été reçu par l'inspecteur du travail le 10 octobre 2007 ; que cette date fixe le point de départ du délai de deux mois à l'issue duquel le silence gardé par l'administration doit être regardé comme une décision implicite de refus de la demande ; que si aucune décision n'a été prise avant le 10 décembre 2007 et si, à cette dernière date, s'était formée une décision implicite de rejet de sa demande d'autorisation de licenciement, cette décision doit être regardée comme retirée par la décision expresse de l'inspecteur du travail du 7 février 2008 ; que par suite, les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née le 10 décembre 2007 sont irrecevables et doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 7 février 2008 de l'inspecteur du travail et de la décision du 6 juin 2008 du ministre du travail :
Considérant que les décisions litigieuses mentionnent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent et notamment la qualité de salarié protégé de Mme A ; que, par ailleurs, la décision de l'inspecteur précise que Mme A est responsable informatique et son ancienneté dans la société ; qu'enfin, d'une part le ministre n'avait pas à motiver particulièrement sa décision en ce qui concerne la procédure de licenciement dès lors que le refus d'autorisation de l'inspecteur n'était pas fondé sur un motif lié à la procédure et que lui-même n'a pas retenu un tel motif, d'autre part, aucune disposition législative comme réglementaire ne prévoit qu'une décision de rejet d'un recours gracieux doit répondre à chacun des points soulevés par le recours ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions litigieuses doit être rejeté ;
Considérant que la société requérante fait valoir que les décisions litigieuses ne précisent pas que l'intéressée était titulaire d'un mandat représentatif en qualité de titulaire ; que toutefois, la société requérante a bien indiqué tant dans sa demande de licenciement et que dans son recours hiérarchique la qualité de membre titulaire du comité d'entreprise de la salariée concernée ; que, par suite, l'autorité administrative a été mise à même de procéder aux contrôles qu'elle était tenue d'exercer ; que, dès lors, le moyen susmentionné ne peut qu'être rejeté ;
Considérant que l'absence de mention dans une décision administrative des voies et délais de recours est sans influence sur sa légalité ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-1 du code du travail en vigueur à la date des décisions attaquées : Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent êtres écrites et précises. ; qu'en vertu des dispositions du code du travail le licenciement des représentants du personnel, qui bénéficient dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Considérant que la société soutient que, dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi qu'elle a mis en oeuvre, elle a recensé et diffusé auprès de l'ensemble des membres du personnel qui faisaient l'objet de mesures de licenciement économique, les informations sur les emplois offerts tant par elle-même que par les autres sociétés de son groupe ; que, toutefois, l'employeur est tenu de procéder à l'examen particulier de la situation de chacun des salariés dont le licenciement est envisagé ;
Considérant qu'il est constant que les postes de chef de projet encaissement et chef de projet répartition au sein de la STIME, filiale informatique du groupe, ont été proposés à Mme A ; que toutefois, la société requérante fait valoir que si ces postes relevaient de la même catégorie que celui qu'occupait jusqu'alors l'intéressée, ils requéraient des compétences techniques dont elle était dépourvue et qu'elle n'aurait pu acquérir dans le cadre d'une formation de courte durée ; que la société précise également que Mme A ne connaît que les gros systèmes notamment AS 400 et que dans les unités de production utilisant ce système, aucun poste n'était vacant ; qu'ainsi, il résulte des écritures mêmes de la société que les deux postes proposés à Mme A ne peuvent être considérés comme équivalents au poste qu'elle occupait jusqu'alors ; que, par ailleurs, la SCA PC n'apporte pas la preuve qu'elle a poursuivi des recherches de reclassement individualisées étendues à l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités ou l'organisation pouvaient offrir à l'intéressée la possibilité d'exercer des fonctions équivalentes, la circonstance que Mme A ne connaîtrait que le système AS 400 ne suffisant pas à l'établir ; qu'enfin, la requérante n'établit ni même n'allègue avoir recherché un reclassement dans un emploi d'une catégorie inférieure ou que Mme A se serait opposée à un tel reclassement ; que, par suite, l'administration était tenue de rejeter la demande d'autorisation de licenciement de Mme A ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions litigieuses porteraient une atteinte excessive aux intérêts de la société qui a cessé son activité depuis le 31 octobre 2007 est inopérant et doit être rejeté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCA PC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 7 février 2008 et 6 juin 2008 par lesquelles l'inspecteur du travail et le ministre du travail ont refusé l'autorisation de licencier Mme A ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE EN COMMANDITE PAR ACTIONS PRODUITS CULTURELS est rejetée.
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N° 10VE04022 2