Vu la requête, enregistrée le 17 mai 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SA GALERIES LAFAYETTE, dont le siège social est 40, boulevard Haussmann à Paris (75009), par Me Fasquel, avocat à la Cour ; la SA GALERIES LAFAYETTE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0901020 en date du 10 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles assises sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2004 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
Elle soutient que si la SA Monoprix entrait dans le champ des c) et d) du 3 de l'article 210 A du code général des impôts, en sa qualité de société bénéficiaire des apports partiels qu'elle a effectués, elle-même était contrainte, en vertu du b) de l'article 210 B du même code, de calculer la plus-value de cession des titres rémunérant cet apport, aboutissant ainsi à une double imposition au niveau de la société apporteuse et de la société bénéficiaire des apports, incompatible avec les stipulations de la directive 90/434/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 ; que les articles 4, 5 et 6 de cette directive posent le principe de la neutralité fiscale des apports partiels d'actifs par voie de transfert de la matière imposable de la société apporteuse à la société bénéficiaire des apports et que ces stipulations sont, en vertu de l'article 9 de ladite directive, applicables aux apports partiels d'actifs ; qu'aucune stipulation de la directive ne subordonne l'application des articles 4, 5 et 6 aux apports partiels d'actifs, à des conditions particulières, ni n'autorise un Etat membre à subordonner l'application de son dispositif à des conditions qu'elle ne prévoit pas ; qu'ainsi, les dispositions du b) du I de l'article 210 B du code général des impôts sont incompatibles avec les stipulations de l'article 9 de la directive susmentionnée ; qu'il résulte des termes mêmes de l'article 25 de la loi n° 91-1323 du 30 décembre 1991 portant adaptation de la législation interne à cette directive que le législateur n'a opéré aucune distinction entre les opérations de restructuration affectant des entreprises d'Etats membres différents et celles impliquant exclusivement des entreprises françaises ; que, sauf à introduire une discrimination entre les entreprises françaises et les entreprises des autres Etats membres, la conformité du régime fiscal interne avec la directive ne peut s'apprécier pour ces entreprises que dans des conditions identiques ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 90/435/CEE du Conseil, du 23 juillet 1990, concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'Etats membres différents ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2012 :
- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;
Considérant que la SA GALERIES LAFAYETTE, société mère du groupe fiscal intégré Galeries Lafayette, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle des rehaussements lui ont été notifiés en sa qualité de redevable de l'impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles assises sur cet impôt, au titre de l'année 2004, au motif qu'elle n'avait pas calculé de plus-values de cession des titres qu'elle détenait dans le capital de la SA Monoprix ; que la société requérante fait valoir que les plus-values constatées lors de l'apport partiel des actifs " Magasins populaires " qu'elle a consenti à la SA Monoprix, initialement détenus par les sociétés SA Société centrale d'achats, la SA Monoprix et la société Magasins Monoprix, qu'elle avait absorbées en 1994, ont été soumises au régime spécial de l'article 210 B du code général des impôts, aboutissant par l'effet des dispositions du b) du I de l'article 210 B à une double imposition de la société apporteuse et de la société bénéficiaire de l'apport, contraire à la directive 90/434 CEE du Conseil, du 23 juillet 1990 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la directive 90/434 du Conseil du 23 juillet 1990 susvisée : " Chaque Etat membre applique la présente directive aux opérations de fusion, de scission, d'apport d'actifs et d'échange d'actions qui concernent des sociétés de deux ou de plusieurs Etats membre " et qu'aux termes de l'article 2 de cette directive : "Aux fins de l'application de la présente directive, on entend par (...) c) apport d'actifs : l'opération par laquelle une société apporte, sans être dissoute, l'ensemble ou une ou plusieurs branches de son activité à une autre société, moyennant la remise de titres représentatifs du capital social de la société bénéficiaire de l'apport " ; qu'aux termes de l'article 210 A du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " 1. Les plus-values nettes et les profits dégagés sur l'ensemble des éléments d'actif apportés du fait d'une fusion ne sont pas soumises à l'impôt sur les sociétés (...) " et qu'aux termes de l'article 210 B du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " 1. Les dispositions de l'article 210 A s'appliquent à l'apport partiel d'actif d'une branche complète d'activité ou d'éléments assimilés lorsque la société apporteuse prend l'engagement dans l'acte d'apport : (...) b) De calculer ultérieurement les plus-values de cession afférentes à ces mêmes titres par référence à la valeur que les biens apportés avaient, du point de vue fiscal, dans ses propres écritures (...) " ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre de l'apport partiel d'actif, par la SA GALERIES LAFAYETTE à la société Monoprix, des actifs des " Magasins populaires ", la société requérante s'est engagée, le 30 septembre 1994, à calculer les plus-values de cession des actions de la société Monoprix reçues en rémunération de l'apport d'après la valeur des biens apportés inscrite dans ses propres écritures, conformément aux dispositions précitées du b) du I de l'article 210 B du code général des impôts ; que, dans ces conditions, la société requérante devait calculer la plus-value de cession de ces titres selon la valeur fiscale des biens qui avaient fait l'objet du premier apport et non pas selon la valeur comptables des titres reçus de la société Monoprix en rémunération de l'apport ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'article 1er précité de la directive du 23 juillet 1990 susvisée, concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'Etats membres différents, qu'elle ne crée d'obligation à l'égard des Etats membres qu'au regard des opérations qui concernent des sociétés de deux ou plusieurs Etats membres ; qu'il est constant que l'opération en litige ne concerne que des sociétés françaises et n'entre dès lors pas dans le champ d'application de la directive susvisée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du b) du I de l'article 210 B du code général des impôts seraient incompatibles avec les stipulations combinées des articles 4, 5, 6 et 9 de la directive susmentionnée est inopérant ;
Considérant, en troisième lieu, que la société requérante fait valoir, d'une part, que la Cour de justice de l'Union européenne est néanmoins compétente pour interpréter le droit communautaire lorsque celui-ci ne régit pas directement la situation en cause mais que le législateur a décidé, lors de la transposition en droit national des dispositions d'une directive, d'appliquer le même traitement aux situations purement internes et à celles régies par la directive, en sorte qu'il a aligné sa législation interne sur le droit communautaire ; que, d'autre part, à l'occasion d'un litige purement interne, le juge national doit retenir la même interprétation des dispositions prises pour la transposition d'une directive ;
Considérant qu'il ressort des travaux préparatoires de l'article 25 de la loi du 30 décembre 1991 portant loi de finances rectificative pour 1991, dont sont issues les dispositions de l'article 210 A précité du code général des impôts, que celles-ci avaient pour objet de transposer la directive 90/434/CEE du 23 juillet 1990 ; que si l'article 210 B du code général des impôts relatif aux scissions et aux apports partiels d'actif est, pour l'essentiel, comme le fait valoir le ministre, issu des dispositions de l'article 62-II de la loi n° 75-1278 du 30 décembre 1975, il prévoit néanmoins que les dispositions de l'article 210 A modifié sont applicables aux opérations d'apport partiel d'actif et qu'il a lui-même été complété par l'article 25 de la loi du 30 décembre 1991 afin de préciser la notion de branche complète d'activité au regard de l'article 2 de la directive ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires ; que, dans ces conditions, les dispositions de l'article 210 B doivent être regardées comme ayant eu pour objet, au moins pour partie, de transposer la directive du 23 juillet 1990 ; que, toutefois, le législateur a, à cette occasion, maintenu en vigueur les dispositions en litige du b) du I de l'article 210 B lesquelles sont clairement contraires aux articles 4, 5, 6 et 9 de cette directive et entendu ainsi déroger à celle-ci pour les opérations purement internes d'apports partiels d'actifs ; que, dans ces conditions, l'article 210 B et plus particulièrement le b) du I de celui-ci n'a ainsi pas à être interprété à la lumière de la directive, s'agissant d'opérations concernant des sociétés ayant leur siège dans un même pays ;
Considérant, qu'en conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé, en l'espèce, que le juge national n'avait pas à se prononcer sur la conformité du b) du I de l'article 210 B du code général des impôts avec les dispositions de la directive, dès lors que la situation en cause n'entrait pas dans son champ d'application, et n'avait pas davantage à interpréter ces dispositions au regard de la directive ;
Considérant que, dès lors, la société GALERIES LAFAYETTE ne peut faire valoir utilement que le redressement qui lui a été notifié aboutit à une double taxation entre ses mains et entre les mains de la société apporteuse ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA GALERIES LAFAYETTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles assises sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2004 ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SA GALERIES LAFAYETTE est rejetée.
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N° 11VE01783 2