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16/07/2012 | FRANCE | N°10VE00388

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 16 juillet 2012, 10VE00388


Vu la requête, enregistrée le 8 février 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Elhabda A demeurant ..., par Me Bataille ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604899 du 8 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser les sommes de 2 475,12 euros à titre d'indemnité " compensatrice " de préavis, de 3 403,29 euros à titre d'indemnité de licenciement et de 60 000 euros en réparation des préjudice

s de toute nature liés à ses conditions de travail et à son licenciement ...

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Elhabda A demeurant ..., par Me Bataille ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604899 du 8 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser les sommes de 2 475,12 euros à titre d'indemnité " compensatrice " de préavis, de 3 403,29 euros à titre d'indemnité de licenciement et de 60 000 euros en réparation des préjudices de toute nature liés à ses conditions de travail et à son licenciement ;

2°) de faire droit à ses demandes indemnitaires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'ayant été recrutée par contrat verbal le 28 août 2012 en tant qu'agent non titulaire de la fonction publique territoriale par la commune de Brétigny-sur-Orge, elle doit être regardée comme ayant bénéficié d'un contrat à durée indéterminée ; qu'ainsi, la commune, qui ne pouvait mettre fin à son contrat que dans le cadre d'une procédure de licenciement, a méconnu les dispositions de l'article 42 du décret du 15 février 1988 ; qu'elle est, par suite, fondée à lui réclamer, sur le fondement respectivement des articles 39 et 40 et de l'article 46 dudit décret, une indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois de salaire de 2 475,12 euros, ainsi qu'une indemnité de licenciement de 3 403,29 euros ; qu'ayant fait l'objet, dans l'exercice de ses fonctions, de la part de sa hiérarchie et de ses collègues, d'un harcèlement moral qui a gravement altéré son état de santé, de nombreux changements d'affectation et d'un refus de titularisation injustifiés, elle est également fondée à solliciter la somme de 60 000 euros, tous chefs de préjudice moral confondus ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2012 :

- le rapport de Mme Garrec, premier conseiller,

- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Baut, pour Mme A ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Brétigny-sur-Orge ;

Considérant que Mme A, recrutée le 28 août 2000, par contrat verbal, par la commune de Brétigny-sur-Orge, en qualité d'agent non titulaire de la fonction publique territoriale pour occuper un emploi d'agent d'entretien ; qu'elle s'est vu proposer par le maire un premier contrat de travail à durée déterminée d'un an allant du 3 novembre 2003 au 2 novembre 2004 qu'elle a refusé de signer, puis un second contrat de même durée expirant le 3 novembre 2005 qu'elle a accepté de signer le 21 septembre 2004 ; que les relations conflictuelles avec sa hiérarchie et ses collègues ayant affecté son état de santé, elle a été placée en congé de maladie du 31 mars au 24 avril 2004, puis en congé de grave maladie du 28 mai 2004 au 28 septembre 2005 ; qu'elle n'a pas repris ses fonctions avant l'échéance de son second contrat ; qu'informée que celui-ci ne serait pas reconduit, elle a, par lettre du 8 février 2006, demandé sans succès à la commune de lui verser les sommes de 2 475,12 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 3 403,29 euros à titre d'indemnité de licenciement et de 60 000 euros pour préjudice moral, toutes causes confondues ; que Mme A relève appel du jugement du 8 décembre 2009 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Versailles n'a fait que partiellement droit à ses demandes indemnitaires en lui allouant la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'inobservation, par la commune, du préavis de deux mois prévu par les dispositions du 2° de l'article 38 du décret du 15 avril 1988 en cas de non renouvellement du contrat à durée déterminée d'un agent non titulaire ;

Sur les indemnités de licenciement :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi susvisée du 26 janvier 1984, dans ses dispositions alors applicables : " Les collectivités (...) ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé (...) ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. / Ces collectivités et établissements peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une seule fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel. / Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre 1er du statut général, des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. / (...) / Les agents recrutés conformément aux quatrième, cinquième et sixième alinéas sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. / Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée déterminée " ; qu'aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 15 avril 1988 pris sur le fondement de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 : " L'agent non titulaire est recruté soit par contrat, soit par décision administrative. L'acte d'engagement est écrit " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que les contrats passés par les collectivités territoriales en vue de recruter des agents non titulaires doivent, sauf disposition législative spéciale contraire, être conclus pour une durée déterminée et ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse ;

Considérant, d'une part, que lorsque la commune de Brétigny-sur-Orge a proposé à Mme A, sur le fondement de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 tel que modifié par la loi du 26 juillet 2005, deux contrats écrits successifs d'une durée d'un an, dont le dernier, signé le 21 septembre 2004, arrivait à échéance le 3 novembre 2005, elle a entendu mettre un terme, à compter du 3 novembre 2003, date d'effet du premier de ces contrats, au contrat verbal qu'elle avait conclu en août 2000 avec Mme A ; qu'ainsi, alors même que ce contrat initial n'aurait comporté aucun terme, cette circonstance ne permet pas de requalifier les contrats subséquents en un contrat à durée indéterminée ;

Considérant, d'autre part, que la loi du 26 juillet 2005, qui a modifié l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, ayant prévu des raisons objectives justifiant le renouvellement des contrats à durée déterminée, cet article sur le fondement duquel ont été conclus les deux contrat à durée déterminée de la requérante n'est pas incompatible avec les objectifs de la directive n° 1999/70/CE du 28 juin 1999 ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de regarder la décision par laquelle la commune de Brétigny-sur-Orge a mis fin à ses fonctions d'agent d'entretien comme une mesure de licenciement d'un agent bénéficiant d'une contrat à durée indéterminée, les premiers juges auraient méconnu cette directive ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'a pas été licenciée ; qu'elle ne saurait, dans ces conditions, prétendre au versement d'indemnités de licenciement et de préavis sur le fondement des articles 39, 40 et 46 du décret du 15 février 1988 susvisé ;

Sur les indemnités demandées au titre du préjudice moral :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...) " ;

Considérant que Mme A, à l'appui de ses conclusions indemnitaires, soutient qu'elle a été victime, dès son recrutement, de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie et de ses collègues, et que ce harcèlement est à l'origine de son actuel état dépressif ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que les services de la mairie, conscients de difficultés rencontrées par l'intéressée dans son premier poste, l'ont mutée, dès le 2 octobre 2000, au Centre de loisirs de la ville, puis l'ont affectée, à sa demande, sur un poste fixe à temps plein à l'école Joliot-Curie à compter du 7 janvier 2002 ; que, s'agissant de sa mutation à compter du 1er juin 2004 aux ateliers municipaux, où elle n'a du reste pas exercé ses fonctions en raison de son état de santé, il est constant que ces mêmes services ont, à sa demande, modifié ses horaires de travail journalier afin d'en réduire l'amplitude ; que, contrairement à ce que soutient Mme A, ces changements d'affectation et de conditions de travail sont intervenus dans l'intérêt du service ainsi que pour tenir compte, dans toute la mesure du possible, des demandes de la requérante elle-même ; qu'il ne résulte, par ailleurs, ni des attestations produites, ni des différents rapports de ses supérieurs versés au dossier, que les reproches faits à Mme A sur sa manière de servir et ses relations conflictuelles avec ses collègues reposeraient sur des faits matériellement inexacts, ou s'inscriraient dans un contexte de harcèlement moral caractérisé à son encontre ; qu'enfin, l'obtention en 2003 de la nationalité française ne conférait pas à Mme A un droit à être titularisée dans la fonction publique territoriale dont elle aurait été abusivement privée ; que, par suite, les faits de harcèlement incriminés n'étant pas établis, la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral de Mme A ne peut qu'être rejetée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles n'a fait droit que partiellement à ses conclusions indemnitaires ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions incidentes de la commune de Brétigny-sur-Orge tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A la somme de 2 500 euros que la commune de Bretigny-sur-Orge demande en application de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes de la commune de Brétigny-sur-Orge tendant au paiement par Mme A d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 10VE00388 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00388
Date de la décision : 16/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat.


Composition du Tribunal
Président : Mme de BOISDEFFRE
Rapporteur ?: Mme Sylvie GARREC
Rapporteur public ?: M. SOYEZ
Avocat(s) : LE BAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-07-16;10ve00388 ?
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