Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SNC INEO INFRA, ayant son siège 278 rue de Rosny à Montreuil-sous-Bois (93100), par Me Deschamps, avocat à la Cour ; la SNC INEO INFRA demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0913398 en date du 7 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la réduction à hauteur de 499 512 euros de sa base imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de son exercice clos en 2006 ;
2°) de prononcer la réduction sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient, en premier lieu, que, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal administratif, elle était recevable, par application de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, à introduire une contestation des rectifications ayant pour effet de minorer ses déficits reportables et ce, nonobstant sa qualité de membre d'un groupe fiscalement intégré, dès lors que l'article 223 A du code général des impôts, en tant qu'il dispose que la société tête de groupe n'est redevable que de l'impôt dû, ne peut être regardé comme faisant obstacle à une telle contestation ; que, de surcroît, cette possibilité est prévue par l'instruction du 20 août 2003 (BOI 13 O-1-03) aux termes de laquelle, s'agissant du résultat déficitaire d'une société appartenant à un groupe soumis au régime de l'intégration fiscale prévu par l'article 223 A, le recours peut être exercé par la société intégrante aussi bien que par la société intégrée dont le résultat est rectifié ; qu'en outre, dans la mesure où elle est tenue solidairement au paiement de l'impôt sur les sociétés dont la société mère est redevable à hauteur des droits et pénalités qui seraient dus par elle si elle n'était pas membre du groupe, elle dispose du même droit que la société mère, débiteur principal, pour contester l'imposition de ce dernier ; qu'en second lieu, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat, l'indemnité qui lui a été versée par la société Fabricom France, à l'occasion de la sortie du périmètre d'intégration fiscale de celle-ci, en compensation de la perte de l'usage des déficits enregistrés durant son appartenance au groupe fiscal intégré, ne présente pas un caractère imposable ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 août 2012 :
- le rapport de M. Huon, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public,
- et les observations de Me Pasco substituant Me Deschamps, pour la SNC INEO INFRA ;
Considérant que la SNC INEO INFRA, qui exerce une activité de travaux d'installations électriques et qui, jusqu'en 2005, était membre du groupe fiscal intégré ayant à sa tête la société Fabricom France, a rejoint, à compter du 1er janvier 2006, le périmètre d'intégration fiscale du groupe Suez dont la SA Suez est la société mère ; que, conformément aux stipulations de l'article 8 de la convention d'intégration fiscale conclue avec la société Fabricom France, elle a bénéficié au cours de son exercice 2006 d'une indemnité de 499 512 euros, destinée à compenser la perte de son droit au report des déficits subis pendant la période d'intégration, qu'elle n'a pas soumise à l'impôt sur les sociétés ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité et aux termes d'une proposition de rectification du 13 décembre 2007, le service a notamment considéré que ladite indemnité devait être regardée comme une recette concourant au bénéfice imposable de la SNC INEO INFRA et l'a donc réintégrée au résultat de son exercice 2006 ; que, par application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts, ce rehaussement a entraîné la rectification, à due concurrence de la somme précitée, du résultat déficitaire du groupe Suez ; que la SNC INEO INFRA - devenue la SNC INEO INFRA UTS - relève appel du jugement du 7 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la réduction à hauteur de 499 512 euros de sa base imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de son exercice clos en 2006 ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales : " Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire (...) / Relèvent de la même juridiction les réclamations qui tendent à obtenir la réparation d'erreurs commises par l'administration dans la détermination d'un résultat déficitaire (...) " ; qu'aux termes de l'article 223 A du code général des impôts applicable à l'espèce : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 p. 100 au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe (...) / Les sociétés du groupe restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats qui peuvent être vérifiés dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales (...) / Chaque société du groupe est tenue solidairement au paiement de l'impôt sur les sociétés, de l'imposition forfaitaire annuelle et, le cas échéant, des intérêts de retard, majorations et amendes fiscales correspondantes, dont la société mère est redevable, à hauteur de l'impôt et des pénalités qui seraient dus par la société si celle-ci n'était pas membre du groupe (...) " ; qu'aux termes de l'article 223 B dudit code : " Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun ou selon les modalités prévues à l'article 217 bis (...) " ; qu'il résulte des termes mêmes de l'article 223 A du code général des impôts que la société mère qui opte pour le régime de groupe se constitue seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et ses filiales ; qu'ainsi, et quand bien même lesdites filiales restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats et peuvent être vérifiées dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales, seule la société intégrante a qualité pour introduire une requête tendant à la contestation des conséquences sur le résultat d'ensemble du groupe des redressements apportés aux résultats des sociétés intégrées, y compris dans l'hypothèse où, en l'absence d'imposition supplémentaire mise à la charge de la société mère, une telle contestation ne tendrait qu'à la réparation d'erreurs commises par le service dans la détermination du résultat déficitaire du groupe ;
Considérant qu'en vertu des principes ainsi rappelés, la SA Suez avait seule qualité pour introduire devant le Tribunal administratif une requête en rectification de son résultat déficitaire de l'exercice 2006 alors même qu'une telle rectification n'aurait été motivée que par la remise en cause du bien-fondé des redressements opérés au niveau de la SNC INEO INFRA, peu important à cet égard la double circonstance que la réclamation préalable du 9 juin 2009 ait été présentée par les deux sociétés et que seule la SNC INEO INFRA ait été rendue destinataire de la décision explicite de rejet du 15 septembre 2009 ; qu'en outre, si la SNC INEO INFRA fait valoir qu'en raison de la solidarité instaurée par le dernier alinéa de l'article 223 A du code général des impôts, elle disposait des mêmes droits que le débiteur principal pour contester l'imposition de ce dernier, il n'est pas allégué qu'à la date de l'introduction de sa demande ou même en cours d'instance, elle aurait été mise en demeure d'acquitter une quelconque somme au titre de cette solidarité ; que, dès lors, et ainsi que l'ont estimé les premiers juges, la SNC INEO INFRA n'était pas recevable à demander la réduction de sa base imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de son exercice clos en 2006 ; que, si la SA Suez a présenté devant la Cour, le 29 juin 2012, conjointement avec la SNC INEO INFRA UTS, un mémoire par lequel elle a entendu s'approprier les conclusions présentées à titre initial par sa filiale, ce mémoire ne saurait avoir pour effet de régulariser lesdites conclusions dès lors que le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande présentée par la SNC INEO INFRA a été soulevé par l'administration devant le Tribunal administratif ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales. " ;
Considérant que la société requérante invoque les termes de l'instruction administrative du 20 août 2003 (BOI 13 0-103) selon lesquels : " Par ailleurs, s'agissant de la rectification du résultat déficitaire d'une société appartenant à un groupe soumis au régime de l'intégration fiscale prévu par l'article 223 A du code général des impôts, le recours peut être exercé par la société intégrante aussi bien que par la société intégrée dont le résultat déficitaire est rectifié. " ; que, toutefois, cette instruction ne concerne ni le bien-fondé ou le recouvrement de l'impôt ni les pénalités fiscales mais est relative à la procédure contentieuse ; que, par suite, et alors, au surplus, que la SNC INEO INFRA, dont le résultat propre était bénéficiaire après contrôle, n'entre pas dans les prévisions de cette doctrine, elle ne peut s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC INEO INFRA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SNC INEO INFRA est rejetée.
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N° 11VE02177 2