Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2012, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Gasquet, avocat ; Mme A...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0805835 en date du 15 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2000 et 2001 ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient, en premier lieu, que c'est en méconnaissance des dispositions des articles R. 196-1 et suivants du livre des procédures fiscales que le tribunal a considéré que sa requête était irrecevable, au motif que sa réclamation contentieuse reçue par l'administration le 17 octobre 2007 était tardive ; qu'en effet, elle n'a jamais reçu les avis d'imposition afférents aux rappels litigieux et les extraits de rôles qui lui ont été communiqués à sa demande ne mentionnaient pas les voies et délais de recours dont elle disposait ; qu'en deuxième lieu, au cours des années vérifiées, elle n'avait pas son domicile fiscal en France au sens des dispositions des articles 4 A et 4 B du code général des impôts ; qu'à cet égard, nonobstant la jouissance d'une habitation à Rueil-Malmaison (92), elle ne pouvait être regardée comme ayant son foyer en France, dès lors que sa famille n'y habite pas et qu'elle séjourne la plupart du temps à Haïti ; qu'en outre, le critère du lieu de séjour principal n'est pas rempli dès lors que l'estimation des jours de présence en France opérée par le service (183 jours en 2000 et 165 jours en 2001) repose en partie sur des extrapolations et comporte des inexactitudes ; qu'au demeurant, même en retenant le décompte du service, le nombre de jours de présence pour l'année 2001 est inférieur à 183 ; que, de plus, l'existence de comptes bancaires, la location d'un entrepôt à la SNCF et l'acquisition de parts indivises d'un bien immobilier ne suffisent pas à caractériser l'existence d'une activité économique sur le territoire français ; qu'en troisième lieu, c'est à tort que l'administration a taxé en tant que revenus d'origine indéterminée au titre des années 2000 et 2001 des sommes s'élevant respectivement au total à 33 216,70 F et 33 216, 54 F et correspondant à des remboursements par le propriétaire de loyers indûment perçus par virement automatique au titre d'un bail qui avait pris fin suite à son divorce ; qu'il en est de même de la somme de 271 707, 76 F qui, par erreur de la banque, a été crédité deux fois le 14 mai 2001 sur son compte BFCC, un débit du même jour ayant corrigé cette erreur ; qu'en quatrième lieu, l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe en vertu des articles 1658 et 1659 du code général des impôts, de la date d'homologation du rôle qui a pour but de le rendre exécutoire ; qu'en cinquième lieu, dès lors qu'elle n'avait pas souscrit de déclarations à l'impôt sur le revenu, le service n'était pas en droit de lui adresser une demande de justifications sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales puis de taxer d'office des crédits bancaires pour lesquels aucune réponse n'avait été apportée ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 1er mars 2013 :
- le rapport de M. Huon, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;
1. Considérant qu'à l'issue d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle et aux termes d'une notification de redressement du 3 octobre 2003, Mme A... a été taxée d'office à l'impôt sur le revenu au titre des années 2000 et 2001 en application des dispositions des articles L. 66-1° et L. 67 du livre des procédures fiscales ; que l'intéressé relève appel du jugement du 15 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions qui lui ont été ainsi assignées ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant qu'en cause d'appel, l'administration a accordé à Mme A...des dégrèvements en base s'établissant au total à 14 313,82 euros et 67 327,29 euros respectivement au titre des années 2000 et 2001 ; que, dans cette mesure, les conclusions à fin de décharge présentées par la requérante se trouvent donc désormais dépourvues d'objet ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur la régularité du jugement :
3. Considérant que le tribunal administratif a rejeté comme irrecevable la demande de Mme A...au motif que la réclamation contentieuse formée par la requérante le 10 octobre 2007 et reçue par l'administration le 17 octobre suivant était tardive au regard tant des dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales que de celles de l'article R. 196-3 du même livre ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du livre des procédures fiscales : " Un avis d'imposition est adressé sous pli fermé à tout contribuable inscrit au rôle des impôts directs dans les conditions prévues aux articles 1658 à 1659 A du code général des impôts ( ...) " ; qu'aux termes de l'article R. 196-1 du même livre : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement (...) " ; que toutefois, lorsqu'il est établi que le contribuable n'a pas reçu l'avis d'imposition du fait d'une erreur de l'administration, le point de départ du délai de réclamation ne court qu'à compter de la date où il a connaissance de l'impôt ;
5. Considérant qu'alors que Mme A...soutient qu'elle n'a jamais reçu les avis relatifs aux impositions en litige mises en recouvrement le 31 mars 2004, l'administration se borne à faire valoir qu'ils ont été envoyés à l'intéressée au 7 avenue du Premier Consul à
Rueil-Malmaison (92), seule adresse connue du service, sans apporter de précision sur la date d'expédition et surtout même produire les avis en cause ; que, dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que Mme A...aurait reçu lesdits avis, de sorte que le délai de réclamation n'a pu commencer à courir à compter du 31 mars 2004 ; que, si des extraits de rôle ont été délivrés à la requérante en application des dispositions du l'article L. 104 du livre des procédures fiscales, il n'est pas établi ni même allégué que ces documents lui auraient été communiqués avant le 1er janvier 2005 ni même qu'elle aurait, de quelque manière que ce soit, eu connaissance de l'impôt avant cette date ; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la réclamation présentée par l'intéressée le 10 octobre 2007 était tardive et a, pour ce motif rejeté comme irrecevable la demande de M.A... ; que, par suite, le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé ;
6. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A...devant le Tribunal administratif de Versailles ;
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : /1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus (...) sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 67 (...) " qu'aux termes de l'article du même livre: " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure (...) " ; qu'il n'est pas contesté qu'en dépit d'une mise en demeure qui lui a été régulièrement adressée le 23 juin 2003, Mme A...n'a pas déposé ses déclarations de revenus des années 2000 et 2001 ; qu'elle s'est ainsi placée dans le cas où, par application des dispositions précitées, le service était en droit de la taxer d'office à l'impôt sur le revenu au titre de ces deux années ;
8. Considérant, d'une part, que Mme A...n'ayant pas fait l'objet d'une demande de justifications en vertu de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, le moyen tiré de ce qu'en l'absence de déclaration, le vérificateur ne pouvait recourir à une telle procédure est inopérant ;
9. Considérant, d'autre part, que, par courrier du 29 juillet 2003, le vérificateur a, sur le fondement de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, adressé à Mme A...une demande d'éclaircissement quant à la nature et l'origine de sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires pour déterminer avec le plus d'exactitude possible le revenu imposable de l'intéressée au titre des deux années concernées ; que si, comme le fait valoir la requérante, l'article L. 10 du livre des procédures fiscales n'était pas applicable faute de déclaration pouvant être contrôlée, la contribuable n'a pas été taxée d'office à raison de l'absence de réponse à la demande précitée mais, ainsi qu'il a été dit, pour défaut de souscription de ses déclarations de revenus en dépit d'une mise en demeure ; que, par suite, et dès lors que la situation de taxation d'office dans laquelle se trouvait Mme A...n'a pas été révélée par la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, la circonstance que le service n'aurait pas été en droit de faire usage desdites dispositions est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
10. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1658 du code général des impôts, applicable à l'espèce : " Les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet. / Pour l'application du premier alinéa, le représentant de l'Etat dans le département peut déléguer ses pouvoirs au directeur des services fiscaux et aux collaborateurs de celui-ci ayant au moins le grade de directeur divisionnaire. La publicité de ces délégations est assurée par la publication des arrêtés de délégation au recueil des actes administratifs de la préfecture. " ; qu'aux termes de l'article 1659 du même code : " La date de mise en recouvrement des rôles est fixée par l'autorité compétente pour les homologuer en application de l'article 1658 d'accord avec le trésorier-payeur général. Cette date est indiquée sur le rôle ainsi que sur les avis d'imposition délivrés aux contribuables (...) " ; qu'en cas de contestation, il appartient à l'administration de fournir des extraits, qu'ils soient ou non certifiés conformes, des décisions portant homologation du rôle et fixant la date de mise en recouvrement ;
11. Considérant qu'il résulte de la copie certifiée conforme, produite par l'administration, de la décision d'homologation du rôle dans lequel, ainsi qu'en attestent les extraits correspondants, sont comprises les cotisations d'impôt sur le revenu litigieuses, que cette décision a été prise le 8 mars 2004 et que la date de mise en recouvrement a été fixée au 31 mars 2004 ; que, par suite, le moyen tiré d'une prétendue irrégularité de la décision portant homologation du rôle ne peut qu'être écarté ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française. " ; qu'aux termes de l'article 4 B de ce code : " " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour qu'un contribuable soit regardé comme fiscalement domicilié..., il suffit qu'il réponde à l'un des trois critères définis par l'article 4 B du code général des impôts ; qu'en outre, pour l'application des dispositions du a du 1 de l'article 4 B précité, telles qu'éclairées par les travaux préparatoires de la loi n° 76-1234 du 29 décembre 1976 d'où elles sont issues, le foyer d'un contribuable célibataire, veuf ou divorcé et sans charge de famille, s'entend du lieu où il habite normalement et a le centre de sa vie personnelle, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles ; que le lieu du séjour principal de ce contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où il ne dispose pas de foyer en France ;
13. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années vérifiées, Mme A... était propriétaire d'un immeuble sis 7 avenue du Premier Consul à
Rueil-Malmaison (92), acquis en 1987, pour lequel elle acquittait la taxe d'habitation et était titulaire d'abonnements souscrits auprès de France Télécom et d'Electricité de France - et au titre desquels étaient relevés des consommations correspondant à une occupation normale et habituelle - et également des sociétés Canal Plus et Canal Satellite ; que, de plus, l'intéressée disposait de quatre comptes bancaires, trois ouverts à la Banque Française de Crédit Coopératif et le dernier à la société American Express, mentionnant comme résidence l'adresse de Rueil-Malmaison et enregistrant, de manière régulière tout au long des années en cause, des mouvements débiteurs correspondant à des dépenses de train de vie courant exposées en France (supermarché, épicerie, restaurant, parfumerie, frais d'essence et de parking, frais médicaux, loisirs divers) ; que de surcroît, la requérante avait acquis deux véhicules en France en 1995 et 1997 et, depuis le 6 décembre 1996, louait à la SNCF un entrepôt situé dans la gare de Paris Bercy Rapée ; qu'en outre, la contribuable disposait d'un abonnement " Fréquence Plus " auprès de la compagnie Air France également établi à l'adresse de Rueil-Malmaison, pour laquelle aucun ordre de réexpédition du courrier n'avait été enregistré par les services postaux ; qu'enfin, elle avait engagé le 30 octobre 2000 des négociations en vue d'acquérir les droits indivis d'une propriété sise à Aubervilliers ; que MmeA..., qui ne conteste pas sérieusement l'ensemble de ces éléments, se borne à soutenir que " sa famille n'est pas en France et qu'elle réside la plupart du temps à Haïti ", sans toutefois apporter la moindre précision sur les conditions dans lesquelles elle aurait séjourné dans ce pays ni même sur la composition de sa famille ; que Mme A...doit, dès lors, être regardée comme ayant habité normalement et ayant eu le centre de sa vie personnelle en France au cours des années en litige ; que la circonstance que le vérificateur n'aurait pas établi qu'elle aurait séjourné sur le territoire national plus de 183 jours par an est sans incidence à cet égard, étant, au surplus relevé, que la requérante elle-même ne justifie ni de la durée ni même de la réalité des séjours qu'elle prétend avoir effectué à l'étranger ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration a estimé que la requérante disposait en France de son foyer, au sens des dispositions précitées du a) du 1 de l'article 4 B du code général des impôts et qu'elle y avait par suite son domicile fiscal au cours des années 2000 et 2001 ;
14. Considérant, en second lieu, qu'au vu des justificatifs produits par Mme A..., le service a admis le caractère non imposable des sommes s'élevant à
14 313,82 euros et 67 327,29 euros taxées respectivement au titre des années 2000 et 2001 et, ainsi qu'il a été dit, a prononcé les dégrèvements correspondants ; que, pour le surplus, l'intéressée qui supporte la charge la preuve en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, ne conteste pas les bases retenues par l'administration ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander la décharge des impositions restant en litige ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
17. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande Mme A...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge présentées par Mme A... à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance par l'administration, soit, en base, 14 313,82 euros et 67 327,29 euros respectivement au titre des années 2000 et 2001.
Article 2 : Le jugement n° 0805835 du 15 novembre 2011 du Tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il statue sur les impositions restant en litige.
Article 3 : Le surplus de la demande présentée par Mme A...devant le Tribunal administratif de Versailles ainsi que des conclusions de sa requête devant la Cour est rejeté.
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N°12VE00205 2