Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2011, présentée pour M. et Mme B...A..., demeurant, ...par Me Glorieux-Kergall, avocat ; M. et Mme A...demandent à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1003394 du 11 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2002 à 2004, et des pénalités y afférentes ;
2° de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes au titre des années 2002 à 2004 ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- l'administration ne leur a pas communiqué les pièces qu'elle avait obtenues dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, malgré leur demande en ce sens, et a violé les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; si l'administration a affirmé leur avoir adressé des relevés bancaires le 3 octobre 2006 en recommandé avec accusé de réception, ils n'en ont pas été avisés à la suite de mouvements sociaux au sein des services de La Poste ;
- ils ont été privés de la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avant l'envoi des propositions de rectification, dès lors qu'ils ne disposaient pas des pièces que l'administration avait obtenues dans le cadre de son droit de communication ; ils n'ont eu aucun dialogue sur les crédits bancaires que l'administration envisageait de qualifier de revenus distribués ;
- les propositions de rectification sont insuffisamment motivées dès lors que, contrairement à leurs indications, elles ne comportaient pas en pièce jointe la proposition de rectification adressée à la société Pratic Auto ;
- l'administration aurait dû saisir la commission départementale des impôts dès lors qu'ils avaient refusé la qualification de revenus de capitaux mobiliers ;
- l'administration n'établit pas l'origine des sommes qu'elle a taxées en revenus distribués ; la qualification de revenus distribués est d'ailleurs infondée ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2013 :
- le rapport de Mlle Rudeaux, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;
1. Considérant que M. et Mme A...ont fait l'objet d'examens de situation fiscale personnelle au titre des années 2002 à 2004, à l'issue desquels l'administration les a assujettis à des suppléments d'impôt sur le revenu et des cotisations supplémentaires de contributions sociales, assortis de pénalités ; que les requérants relèvent appel du jugement n°1003394 en date du 11 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à obtenir la décharge de ces impositions supplémentaires ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la proposition de rectification qui, selon l'article L. 48 de ce livre, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ;
3. Considérant, d'une part, qu'au titre de l'année 2002, M. et Mme A...ont été invités à un premier entretien le 11 août 2005, mais ont sollicité un report de rendez-vous ; que Mme A...a rencontré le vérificateur dans les locaux de l'administration le 14 septembre 2005 ; que les requérants ne se sont pas rendus à l'entretien prévu le 14 décembre 2005, et n'ont pas sollicité de report d'intervention ; qu'au titre des années 2003 et 2004, M. et Mme A...ont rencontré le vérificateur à plusieurs reprises ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'absence de débat contradictoire, lequel n'a pas à porter sur l'ensemble des rehaussements envisagés par l'administration, manque en fait et ne peut qu'être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 81 du livre précité : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées " et qu'aux termes de l'article L. 82 C du même livre : " A l'occasion de toute instance devant les juridictions civiles ou criminelles, le ministère public peut communiquer les dossiers à l'administration des finances " ; qu'il incombe à l'administration d'informer le contribuable dont elle envisage de rectifier les bases d'imposition de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante, afin que l'intéressé soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur, dans les propositions de rectification en date du 22 décembre 2005 au titre de l'année 2002 et 29 juin 2006 au titre des années 2003 et 2004, a fait notamment état de l'existence d'un procès-verbal d'audition de M. A... obtenu auprès des autorités judiciaires, et a précisé l'objet de la procédure et la référence exacte audit procès-verbal ; qu'il a indiqué qu'au cours de cette audition, M. A... avait reconnu avoir détourné à son profit des fonds provenant de la société Pratic Autos dont il était le dirigeant, en encaissant sur son compte personnel des chèques émis par les clients de la société ; qu'il a enfin dressé la liste desdits chèques et indiqué leur numéro, date et montant ; que M. et Mme A...ont dès lors été suffisamment informés de la teneur et de la source des renseignements recueillis par le vérificateur pour être à même de demander à prendre connaissance, eux-mêmes, des documents qui les contenaient avant la mise en recouvrement des impositions, s'ils l'estimaient utile ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans la lettre adressée en réponse aux propositions de rectification, les 6 février 2006 et 4 août 2006, M. et Mme A... ont indiqué : " aucun document saisi par la police judiciaire ne m'a été restitué. Je ne suis donc pas en possession de ces documents et notamment de tous mes relevés bancaires qui ont été saisis. N'ayant pas ces documents, il ne m'est pas possible de répondre en vous apportant mes observations avisées. En conséquence, je vous remercie de bien vouloir noter que je conteste chacun des redressements ainsi que les majorations que vous appliquez " ; que, par ces mentions, ils ne sauraient être regardés comme ayant formulé une demande de communication des documents obtenus par l'administration dans le cadre du droit de communication ; qu'en tout état de cause, l'administration a adressé aux requérants lesdits documents par lettre en recommandé avec accusé de réception dans la réponse aux observations du contribuable du 11 août 2006 ; que ces derniers ont adressé une lettre à l'administration le 15 septembre 2006, par laquelle ils l'informaient de ce que, contrairement aux mentions de la réponse aux observations du contribuable, cette dernière ne comportait pas ces documents en pièce jointe ; que l'administration fait valoir sans être contredite qu'elle a alors adressé de nouveau les documents aux requérants par lettre du 7 novembre 2006, dont ils ont accusé réception le 23 novembre 2006, avant la mise en recouvrement des impositions ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. " ;
8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les propositions de rectification en date des 22 décembre 2005 et 29 juin 2006 comportent, outre les mentions citées au point 12 du présent arrêt, la référence aux articles 109 et 111 du code général des impôts, ainsi que l'indication des bases rectifiées, année par année ; que si M. et Mme A...soutiennent que, contrairement à ce qu'elles indiquaient, les propositions de rectification ne comportaient pas, en pièce jointe, copie de la proposition de rectification adressée à la SARL Pratic Auto-école, il leur appartenait d'accomplir toute diligence auprès de l'administration fiscale pour lui signaler cette omission et obtenir ledit document ; que les propositions de rectification étaient par suite suffisamment motivées pour permettre à M. et Mme A...de formuler leurs observations, ce que ces derniers ont d'ailleurs fait ;
9. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales : " I. - La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; / 2° Sur les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, à l'exception de la qualification des dépenses de recherche mentionnées au II de l'article 244 quater B du code général des impôts ; / 3° Sur l'application du 1° du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du même code relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du résultat des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du même code ; / 4° Sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du même code. " ;
10. Considérant que M. et Mme A...soutiennent qu'ils ont contesté la qualification par l'administration de revenus distribués des sommes en litige, et que cette dernière aurait refusé à tort de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, toutefois, les requérants n'alléguaient pas que les revenus litigieux auraient relevé de l'une des catégories de revenus visée par les dispositions précitées pour lesquels la commission départementale est compétente ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration aurait refusé à tort de saisir ladite commission ne peut qu'être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions :
11. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. " et qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes " ;
12. Considérant qu'en cas d'appréhension, sur son compte personnel, par le gérant d'une société anonyme à responsabilité limitée, de recettes non déclarées par cette dernière, l'avantage ainsi octroyé au dirigeant constitue une libéralité imposable entre les mains de l'intéressé sur le fondement des dispositions précitées ; qu'en l'espèce, l'administration démontre, à partir des informations obtenues auprès de l'autorité judiciaire, tirées des déclarations de M. A...lui-même et corroborées par ses relevés bancaires, que le requérant a encaissé sur son compte personnel, au cours de chacune des années en litige, des chèques émis par des clients de la société Pratic Auto-école, et que cette dernière n'avait pas déclaré à l'impôt sur les sociétés les recettes correspondantes ; que M. et Mme A... ne remettent pas en cause l'exactitude de ces faits et les conséquences qui devaient en être tirées par l'administration fiscale en se bornant à se plaindre de ce qu'ils n'auraient pu se défendre, à rappeler que si M. A... a été condamné en première instance pour abus de biens sociaux dans le cadre des faits susdécrits, il a interjeté appel, sans d'ailleurs informer la Cour de céans des suites de cette procédure, et, enfin, à affirmer qu'effectuant régulièrement des prélèvements sur leurs comptes respectifs ou sur celui de leurs enfants, ils pouvaient, selon leurs propres termes, " se passer mutuellement de l'argent liquide " ; que, dans ces circonstances, l'administration établit l'existence de détournements de recettes de la société Pratic Auto-école et leur appréhension par M.A... ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.
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N° 11VE04172