Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision en date du 21 septembre 2012 par laquelle le ministre chargé du travail a autorisé la société Veolia Transport à procéder à son licenciement.
Par un jugement n° 1207047 du 6 novembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a refusé de faire droit à cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 janvier 2015 et le 9 mars 2016, Mme B..., représentée par Me Dadi, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3° de mettre à la charge de la société Veolia Transport le versement de la somme de
2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme B...soutient que :
- le ministre ne pouvait ni retirer ni envoyer sa décision au-delà du délai de recours contentieux ;
- les pièces à l'appui de la demande de licenciement ne lui ont jamais été communiquées et le contradictoire n'a pas été respecté ; le ministre ne produit pas l'accusé de réception du recours hiérarchique ; il lui appartient de démontrer que les pièces ont été communiquées ou qu'il a mis la salariée en mesure de les examiner, mention qui ne figure pas dans le courrier du 10 mai 2012 ;
- le ministre du travail ne pouvait tenir compte de la succession d'évènements ayant déjà donné lieu à sanction pour justifier son licenciement ;
- le ministre aurait dû se préoccuper de savoir si les sanctions étaient justifiées au fond ;
- son manque de formation est la cause de son erreur ; le ministre a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- la non remise des disques ne constitue pas une faute d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement, il en est de même de l'erreur de positionnement des stylets ;
- cette demande de remise des disques démontre un harcèlement qui a justifié la saisine du conseil des prud'hommes ;
- les dépassements de vitesse sont d'usage dans l'entreprise et n'engagent pas la sécurité ; ces dépassements ne sauraient justifier un licenciement ;
- le fait qu'elle soit arrivée au dépôt avant l'heure prévue à plusieurs reprises ne démontre pas qu'elle n'a pas desservi l'intégralité de sa ligne ; le doute qui subsiste quant à la matérialité des faits doit lui profiter et le ministre a commis sur ce point une erreur manifeste d'appréciation ;
- il existe un lien non négligeable entre la demande et le mandat ;
- le ministre aurait dû examiner les griefs de harcèlement en raison du mandat syndical ;
- en n'invoquant pas dans sa décision si les manquements invoqués par elle et tirés de la discrimination syndicale avaient été pris en compte, le ministre a commis une illégalité.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Orio,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour société Transdev Ile de France venant aux droits de la société Véolia transport.
1. Considérant que MmeB..., recrutée en qualité de conducteur receveur par la société Veolia Transport, a été désignée représentante de section syndicale par lettre recommandée du 3 mars 2011 reçue le 7 mars suivant ; qu'elle a été convoquée, par lettre remise en mains propres du 4 novembre 2011, à un entretien préalable à une procédure de licenciement qui devait se tenir le 14 novembre suivant ; que l'inspecteur du travail territorialement compétent a été saisi, le 30 novembre 2011, d'une demande d'autorisation de licenciement pour faute qu'il a refusée par une décision du 3 février 2012 ; que saisi sur recours hiérarchique reçu le
21 mars suivant, le ministre qui n'a pas répondu dans les délais, a fait naître une décision implicite de refus le 21 juillet suivant, décision rapportée par une décision explicite du
21 septembre 2012 retirant la décision du 21 juillet, annulant la décision du 3 février 2012 et autorisant le licenciement de Mme B...; que l'intéressée interjette régulièrement appel du jugement du Tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande d'annulation de la décision du ministre dont elle demande également l'annulation ;
2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'à l'effet de concourir à la mise en oeuvre de la protection ainsi instituée, l'article R. 2421-11 du code du travail dispose que l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé " procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat " ;
3. Considérant que le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions mentionnées ci-dessus impose à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé fondée sur un motif disciplinaire, d'informer le salarié concerné des agissements qui lui sont reprochés et de l'identité des personnes qui en ont témoigné ; qu'il implique, en outre, que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, sans que la circonstance que le salarié est susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation ; qu'enfin, la communication de l'ensemble de ces pièces doit intervenir avant que l'inspecteur du travail ne statue sur la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur, dans des conditions et des délais permettant au salarié de présenter utilement sa défense ; que c'est seulement lorsque l'accès à certains de ces éléments serait de nature à porter gravement préjudice à leurs auteurs que l'inspecteur du travail doit se limiter à informer le salarié protégé, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur ; que ces mêmes principes trouvent à s'appliquer lorsque l'autorité ministérielle saisie d'un recours hiérarchique à l'encontre d'un refus d'autorisation de licenciement pour motif disciplinaire décide de procéder même sans texte, à une enquête contradictoire ;
4. Considérant qu'il ressort des termes du courrier du 10 mai 2012 que
Mme B...a été convoquée le 22 mai 2012 à une contre-enquête diligentée dans le cadre du recours hiérarchique ; que Mme B...fait valoir, dans le dernier état de ses écritures, que le ministre n'établit pas, par la production de l'accusé de réception, qu'elle aurait été destinataire du recours hiérarchique et qu'elle aurait ainsi été mise à même de demander communication des pièces jointes ; que malgré cette contestation, le ministre ne produit pas la preuve de la notification à Mme B...du recours hiérarchique mentionnée dans le courrier du 10 mai 2012 ; qu'ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, la méconnaissance du principe du contradictoire alléguée doit être regardée comme établie et Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de la décision du ministre du travail du 21 septembre 2012 ; qu' il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à verser à Mme B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Transdev Ile de France venant aux droits de la société Veolia Transport la somme que MmeB... demande sur le fondement de ces mêmes dispositions ; qu'enfin, les conclusions de la société présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1207047 du 6 novembre 2014 du Tribunal administratif de Versailles et la décision du 21 septembre 2012 du ministre du travail sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 500 euros à Mme B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
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N° 15VE00169