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03/11/2016 | FRANCE | N°15VE02323

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 03 novembre 2016, 15VE02323


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 22 octobre 2013 par laquelle le président du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France l'a affecté sur le poste de chargé de mission " activités transverses " au sein de la direction des systèmes d'information, d'autre part, d'enjoindre au président du centre interdépartemental de gestion de le maintenir dans son affectation précédente et de lui verser les somme

s dont il a été privé du fait de l'entrée en vigueur de la décision attaquée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 22 octobre 2013 par laquelle le président du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France l'a affecté sur le poste de chargé de mission " activités transverses " au sein de la direction des systèmes d'information, d'autre part, d'enjoindre au président du centre interdépartemental de gestion de le maintenir dans son affectation précédente et de lui verser les sommes dont il a été privé du fait de l'entrée en vigueur de la décision attaquée.

Par un jugement n° 1311931 du 21 mai 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 20 juillet 2015 et le 1er février 2016, M.B..., représenté par Me Amson, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3° d'enjoindre au président du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France de le réaffecter sur son poste précédent dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge du centre interdépartemental de gestion le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision attaquée n'est pas justifiée par l'intérêt du service ; en effet, il a, au cours des années 2011 et 2012, alerté en vain, à plusieurs reprises, ses supérieurs hiérarchiques, notamment par des courriels, un rapport daté du 8 décembre 2011, une étude technique en date du 27 février 2012 et un rapport daté du 10 septembre 2012, sur les dysfonctionnements de la direction des systèmes d'information du centre de gestion et, en particulier, sur le surdimensionnement de son système informatique, sur les conditions de passation de certains marchés avec trois fournisseurs, sur la détérioration des relations de travail au sein de la direction et sur le rôle déterminant joué dans ces dysfonctionnements par l'un des deux pôles de la direction, le pôle de l'exploitation, ainsi que sur les agissements du responsable de ce pôle et de l'un de ses subordonnés, le chef du service " exploitation Windows et réseaux " ; en outre, la décision en litige s'inscrit dans un contexte de réorganisation des services de la direction des systèmes d'information entamée par le centre de gestion à compter du mois de mars 2013, sur la base d'une étude réalisée en interne, qui n'a été qu'un prétexte pour se séparer de ces deux agents, sans engager à leur encontre une procédure disciplinaire ; enfin, cette réorganisation, qui ne correspond pas à ses propres préconisations, n'est pas justifiée par l'intérêt du service comme le démontrent notamment les données budgétaires pour l'année 2015 ;

- cette décision est constitutive d'une sanction disciplinaire déguisée ; en effet, les appréciations sur sa manière de servir ont toujours été excellentes ; en outre, sa mutation, qui correspond à une diminution de ses responsabilités, le prive d'alerter sa hiérarchie sur les erreurs de gestion commises au sein de la direction des systèmes d'information.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-1099 du 30 décembre 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Haëm,

- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,

- et les observations de Me Amson pour M.B....

1. Considérant que M. A...B..., recruté en qualité d'attaché territorial à compter du 1er février 1997 par le centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France et nommé au grade de directeur territorial à compter du 1er mai 2005, a occupé, à compter du 1er juin 2008, les fonctions de responsable du pôle des études de la direction des systèmes d'information ; que, par une décision du 22 octobre 2013, le président du centre interdépartemental de gestion a procédé à un changement d'affectation de l'intéressé en le nommant sur un poste de chargé de mission " activités transverses " au sein de cette direction ; que M. B...relève appel du jugement du 21 mai 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la légalité de la décision attaquée du 22 octobre 2013 :

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que la décision en litige ne serait pas justifiée par l'intérêt du service :

2. Considérant, en premier lieu, que M. B...ne saurait sérieusement soutenir que la réorganisation des services de la direction des systèmes d'information engagée par le centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France au mois de mars 2013 serait dépourvue de toute justification tenant à l'intérêt du service ; que, sur ce point, il ressort des pièces du dossier et, notamment, de l'étude menée en interne par le centre de gestion sur l'organisation et le fonctionnement de cette direction, en particulier à partir d'informations recueillies auprès de ses agents sous couvert de l'anonymat, que cette réorganisation a été justifiée par le constat de dysfonctionnements croissants propres à cette direction, en particulier à raison d'une mauvaise lisibilité des rôles et des responsabilités des différents pôles et services, de lourdeurs tenant à l'existence d'un niveau hiérarchique intermédiaire, à savoir deux pôles, un pôle des études et un pôle de l'exploitation, chaque pôle regroupant deux services, et d'une dégradation des relations de travail au sein du pôle de l'exploitation ainsi qu'entre les deux pôles de la direction ; que cette étude a également relevé que ces dysfonctionnements se traduisaient par des conditions de travail dégradées pour les agents de la direction et par une qualité insuffisante du service rendu aux utilisateurs ; qu'en outre et contrairement à ce que soutient le requérant, la réorganisation des services de la direction des systèmes d'information effectuée à la suite de cette étude ne s'est pas limitée à la simple suppression de trois postes d'encadrement, mais s'est traduite notamment, pour répondre à ces dysfonctionnements, par une rationalisation de l'organisation de la direction par fonction, une simplification de son organigramme par la suppression de la strate hiérarchique des pôles et la réduction du nombre des services à trois avec la mise en place d'un service unique " support utilisateurs et exploitation " ainsi qu'un redéploiement des effectifs par la création de deux emplois, un poste d'ingénieur et un emploi d'administrateur systèmes et réseaux ; que, s'agissant de cette réorganisation d'ensemble, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier et, notamment, de celles versées par le requérant que les mesures ainsi prises par le centre de gestion n'auraient pas permis de répondre aux dysfonctionnements, en particulier le cloisonnement des pôles et services, qui ont d'ailleurs été constatés ou signalés par M. B... lui-même ainsi que d'autres cadres ou agents de la direction ; que, par ailleurs, si M. B...fait valoir que cette réorganisation n'a été effectuée que dans le seul but, pour le centre de gestion, de se séparer de deux agents, à savoir le responsable du pôle de l'exploitation, qui a été licencié pour suppression de poste à compter du 1er décembre 2013, et son subordonné, le chef du service " exploitation Windows et réseaux ", qui a été mis en congé sans rémunération pour convenances personnelles à compter du 1er avril 2013, sans avoir à engager à leur égard de procédure disciplinaire, le requérant n'apporte pas, à l'appui de cette allégation, les précisions et les éléments de nature à en établir le bien-fondé ; qu'en tout état de cause, à supposer même que le centre de gestion ait été en mesure, comme le prétend le requérant, d'engager à l'encontre de ces deux agents une procédure disciplinaire, cette seule circonstance ne faisait pas obstacle, à compter du mois de mars 2013, à une réorganisation d'ensemble des services de la direction des systèmes d'information, ni ne permet de regarder cette réorganisation ainsi effectuée, compte tenu de l'ensemble des dysfonctionnements constatés, comme dépourvue de toute justification tenant à l'intérêt du service ; qu'enfin, il en est de même de la circonstance selon laquelle le centre de gestion a engagé, en 2015, une somme importante pour des prestations extérieures au titre de l'assistance à maîtrise d'ouvrage ou celle selon laquelle le poste de chef du nouveau service " support utilisateurs et exploitation " serait aujourd'hui vacant, allégation au demeurant contredite en défense par le centre de gestion, ces seules circonstances ne permettant pas, en tout état de cause, de démontrer que la réorganisation, en 2013, des services de la direction des systèmes d'information n'aurait pas été justifiée par l'intérêt du service ;

3. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que, par la décision en litige du 22 octobre 2013, M. B...a été nommé, dans le cadre de la réorganisation des services de la direction des systèmes d'information, sur le poste de chargé de mission " activités transverses " et a ainsi été chargé, sous l'autorité directe du directeur des systèmes d'information, d'assurer l'élaboration ou la gestion et le suivi du budget, des marchés publics et des contrats de maintenance de la direction ainsi que la mise en place d'une politique de sécurité de ses systèmes d'information ; que s'il est vrai que cette mutation a entrainé pour M. B... une diminution de ses responsabilités, l'intéressé n'assurant plus, du fait de la suppression de son poste précédent de responsable du pôle des études de la direction, de fonctions d'encadrement, les nouvelles fonctions qui lui ont été confiées sont de celles qu'il a vocation à exercer, en qualité de directeur territorial, en vertu du décret du 30 décembre 1987 susvisé portant statut particulier du cadre d'emplois des attachés territoriaux ; qu'en outre, il n'est pas sérieusement contesté que de telles missions relatives à la gestion du budget et des marchés de la direction des systèmes d'information ainsi qu'en matière de politique de sécurité de ses systèmes d'information correspondent à un besoin du service et, au surplus, aux centres d'intérêt de l'intéressé ; qu'enfin, la circonstance que le centre de gestion a, en 2014, décidé de faire appel à un prestataire extérieur en vue de la mise en oeuvre d'une politique de sécurité des systèmes d'information, M. B...ayant été désigné chef de projet et chargé de la rédaction du marché et de son suivi, ne saurait permettre, en tout état de cause, de considérer que l'intéressé serait privé des moyens de remplir les missions qui lui ont été confiées, en particulier celles relatives à la sécurité des systèmes d'information ;

4. Considérant, enfin, que M. B...ne saurait davantage sérieusement soutenir que ses supérieurs hiérarchiques, notamment son supérieur hiérarchique direct, le directeur des systèmes d'information, ou le directeur général du centre de gestion, n'auraient jamais tenu compte de ses remarques ou " alertes " sur le fonctionnement de la direction, qu'il s'agisse du surdimensionnement de son système informatique, de ses choix en matière d'investissement ou de passation de marchés ou encore des dysfonctionnements imputables au responsable du pôle de l'exploitation de la direction ; que, sur ce point, il ressort notamment des pièces du dossier et, en particulier, des propres écritures de M. B... et des pièces qu'il a lui-même produites que le centre de gestion a non seulement, dès l'année 2012, réalisé des économies en termes d'investissement en matériel informatique, mais encore a fait réalisé par la société BrainLogic un audit, en date du 14 juin 2013, sur le surdimensionnement de son système informatique, l'audit préconisant une réduction du parc des serveurs ; qu'en outre et comme le relève d'ailleurs le requérant, la réorganisation des services de la direction des systèmes d'information engagée par le centre de gestion au mois de mars 2013 a entrainé le départ de deux agents, le responsable du pôle de l'exploitation et l'un de ses subordonnés, dont le requérant, lui-même, avait dénoncé les agissements ou les carences professionnelles ; qu'enfin et en tout état de cause, dans l'exercice de son pouvoir général d'organisation des services, le centre de gestion n'avait aucune obligation de tenir compte ou de suivre les seules " préconisations " faites par M. B...quant à une réorganisation de la direction des systèmes d'information ;

5. Considérant qu'il suit de là que le président du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France a pu, par la décision en litige du 22 octobre 2013 et sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation des faits de l'espèce, estimer que l'intérêt du service commandait de modifier les attributions de M.B... ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que la décision en litige serait constitutive d'une sanction disciplinaire déguisée :

6. Considérant qu'il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier que la mutation en litige, s'il est vrai qu'elle a entraîné pour M.B..., ainsi qu'il a été dit au point 3, une diminution de ses responsabilités, puisse être regardée, comme il le prétend, comme ayant été prise, par son auteur, dans l'intention de le sanctionner, pour des motifs d'ailleurs que le requérant ne précise pas ; qu'en revanche, il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre de la réorganisation d'ensemble des services de la direction des systèmes d'information effectuée en 2013, le président du centre de gestion a, par la décision en litige nommant M. B...sur le poste de chargé de mission " activités transverses ", pris une décision dans l'intérêt du service, en lui confiant des missions portant sur l'élaboration ou la gestion et le suivi du budget, des marchés publics et des contrats de maintenance de la direction ainsi que la mise en place d'une politique de sécurité de ses systèmes d'information, soit des domaines essentiels pour cette direction et qui correspondent aux compétences, à l'appétence ainsi qu'aux différentes remarques ou " alertes " faites par l'intéressé, en 2011 et 2012, auprès de sa hiérarchie ; qu'en outre et ainsi qu'il a été dit au point 3, ces nouvelles fonctions sont au nombre de celles que son grade de directeur territorial lui donne vocation à assurer ; qu'enfin, M.B..., dont la nouvelle affectation n'a eu aucune incidence sur sa rémunération ou son régime indemnitaire, n'établit ni n'allègue sérieusement qu'il ne serait pas en mesure d'assurer ses nouvelles missions, en particulier celles concernant la mise en place d'une politique de sécurité des systèmes d'information, ni qu'il serait, dans le cadre de ses nouvelles fonctions, dans l'impossibilité d'alerter ses supérieurs hiérarchiques, sur d'éventuelles erreurs de gestion commises au sein de la direction des systèmes d'information ; qu'il suit de là que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée présenterait le caractère d'une sanction déguisée ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 000 euros à verser au centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : M. B...versera au centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par le centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

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N° 15VE02323


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE02323
Date de la décision : 03/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-01-02 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Affectation et mutation. Mutation.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Rudolph D'HAËM
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : AMSON

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-11-03;15ve02323 ?
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