Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le décret n°91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2016 :
- le rapport de Mme Margerit, rapporteur,
- les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,
- et les observations de Me D...pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE.
1. Considérant que les affaires n°16VE01017 et 16VE02381 sont relatives au même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il a lieu de procéder à leur jonction et de statuer par un seul et même jugement ;
2. Considérant que M. E...C...a été employé en contrat à durée indéterminée en tant que technicien supérieur hospitalier par le
CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE à compter du 2 janvier 2002 ; qu'il a été déclaré inapte à son emploi par un avis du médecin du travail en date 9 janvier 2013, puis " inapte à tous emplois " par avis du 1er mars 2013,
confirmé par courrier en date du 15 mars 2013 ; que, par une décision en date du 24 mai 2013,
le directeur du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE a licencié M. C...pour inaptitude définitive ; que, par un jugement en date du 2 février 2016, le Tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision, a condamné le centre hospitalier au versement d'une somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral, et a renvoyé M. C...devant le centre hospitalier à fin de liquidation et paiement, sur les bases indiquées dans le jugement, de l'indemnité relative à son préjudice économique, assortie des intérêts de retard à compter du 9 juillet 2013 et de leur capitalisation à chaque échéance annuelle depuis le 9 juillet 2014 ; que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE relève régulièrement appel de ce jugement ; que M. C...demande à la Cour d'assurer l'exécution de ce jugement ;
Sur la requête 16VE01017 :
Sur le bien fondé du jugement attaqué, sans qu'il besoin de statuer sur sa régularité :
3. Considérant qu'il résulte du principe général du droit dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que des règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement ; que ce principe est applicable en particulier aux agents contractuels de droit public, catégorie à laquelle appartient M.C... ; que, toutefois, l'administration n'est pas tenue de rechercher un poste de reclassement lorsque, en raison de l'altération de son état de santé, l'agent ne peut plus exercer d'activité et ne peut ainsi faire l'objet d'aucune mesure de reclassement ;
4. Considérant que par un avis du 1er mars 2013 du médecin du service de santé au travail, auquel il incombe de se prononcer sur l'aptitude du salarié à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment ou à exercer d'autres tâches existantes, M.C..., a été reconnu
" inapte à tous postes de travail ", avis confirmé par un courrier du 15 mars 2013 déclarant l'inaptitude définitive de l'intéressé à tout emploi ; qu'ainsi, le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE était dans l'impossibilité d'accomplir la formalité de reclassement à laquelle il était en principe tenu avant de prononcer le licenciement pour inaptitude définitive de M. C...; qu'en estimant que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE aurait dû rechercher toute possibilité de reclassement en son sein, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations des postes de travail ou aménagement du temps de travail, les premiers juges ont commis une erreur de droit ; que, par suite, le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles s'est fondé, pour annuler la décision de licenciement pour inaptitude physique de M.C..., sur le motif que cette décision serait intervenue en méconnaissance de l'obligation de reclassement lui incombant ;
5. Considérant qu'il appartient à la Cour administrative d'appel de Versailles, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant le Tribunal administratif de Versailles ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait qui ont conduit à son adoption ; que le moyen tiré de l'insuffisance de la décision en litige doit donc être écarté comme manquant en fait ;
7. Considérant, en second lieu, que M. C...a été mis à même de pouvoir consulter son dossier par son employeur, et a pris copie intégrale de ce dossier ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pu consulter son dossier doit être écarté comme manquant en fait ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu' il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (...) " ;
9. Considérant qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements d'harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé;
10. Considérant que M. C...soutient, notamment dans une lettre rédigée par son avocat le 25 février 2013, qu'à la suite d'un entretien avec le directeur du centre hospitalier
le 29 novembre 2012, il a été décidé qu'il quitterait le site de Saint-Germain-en-Laye pour celui de Poissy, qu'il ne validerait plus les demandes de travaux ni n'aurait de contact avec les entreprises extérieures ; que le bureau dans lequel il a été affecté était géographiquement éloigné de ses collègues, et que sa ligne téléphonique a été restreinte, l'empêchant d'émettre ou de recevoir des appels à l'extérieur ; que le changement d'affectation et les mesures susdécrites étaient fondées sur le risque de conflit d'intérêt résultant de l'activité complémentaire exercée par M. C...jusqu'en novembre 2012 ; que les faits décrits par M. C...ne sont attestés que par son compte-rendu d'évaluation pour 2012, dont il n'a produit qu'un extrait, lequel, malgré une évaluation de son travail très satisfaisante, se termine par une appréciation littérale et manuscrite mentionnant qu'il " s'est mis dans une situation difficile qui oblige à la redéfinition de son poste, c'est dommage ", ainsi qu'une attestation de M.B..., ancien agent
de M.C... ; que de tels éléments de fait n'apparaissent pas susceptibles de faire présumer l'existence d'agissements constitutifs de harcèlement moral de la part de son employeur ;
11. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, les faits décrits par M. C...n'apparaissant pas susceptibles de faire présumer l'existence d'agissements constitutifs de harcèlement moral de la part de son employeur, il n'est pas fondé à soutenir que le licenciement pour inaptitude querellé aurait été causé par des tels agissements ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE est fondé à soutenir que c'est à tort que par son jugement du 2 février 2016, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision en date du 24 mai 2013 portant licenciement pour inaptitude définitive
de M.C..., a condamné le centre hospitalier au versement d'une somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral, et a renvoyé M. C...devant le centre hospitalier à fin de liquidation et paiement, sur les bases indiquées dans le jugement, de l'indemnité relative à son préjudice économique ;
Sur la requête 16VE02381 :
13. Considérant que M. C...demande à la Cour d'assurer l'exécution du jugement du 2 février 2016 ; que, toutefois, ce jugement est annulé par le présent arrêt ; que, par suite, sa requête doit être rejetée ;
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M.C... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre à la charge de M. C...la somme demandée par le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1304298 en date du 2 février 2016 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande tendant à l'annulation de la décision du 24 mai 2013 prononçant le licenciement pour inaptitude définitive de M.C..., présentée par lui devant le Tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : La requête n°16VE02381 de M. C...est rejetée.
Article 4 : Les conclusions de M. C...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : M. C...versera au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE POISSY-SAINT-GERMAIN-EN-LAYE une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
N° 16VE01017, 16VE02381 2