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07/02/2017 | FRANCE | N°15VE03844

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 07 février 2017, 15VE03844


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL OAK SECURITE PRIVEE a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2012, outre majorations et intérêts de retard correspondants.

Par un jugement n° 1404532 du 5 octobre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés res

pectivement le 16 décembre 2015 et le 8 novembre 2016, la SARL OAK SECURITE PRIVEE demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL OAK SECURITE PRIVEE a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2012, outre majorations et intérêts de retard correspondants.

Par un jugement n° 1404532 du 5 octobre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 16 décembre 2015 et le 8 novembre 2016, la SARL OAK SECURITE PRIVEE demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge de ces impositions, majorations et intérêts de retard ;

3° de mettre à la charge de l'État les dépens de l'instance, ainsi qu'une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SARL OAK SECURITE PRIVEE soutient que :

- le jugement est irrégulier, en ce qu'il ne répond pas au moyen, tiré de ce qu'en ne répondant pas aux observations qu'elle avait présentées le 23 septembre 2013 en réponse à la proposition de rectification du 8 août 2013, qui n'a pas été purement et simplement remplacée par la seconde proposition de rectification datée du 2 octobre 2013, les impositions contestées ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière ;

- il est également irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé sur les conséquences à tirer, quant à la régularité de la procédure d'imposition, des nombreuses erreurs commises par le service ;

- il est également irrégulier en ce qu'il rejette, sans en expliquer suffisamment les motifs, le moyen tiré de l'absence d'existence d'un profit sur le Trésor ;

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité du fait de l'absence de réponse aux observations du contribuable, irrégularité qui est substantielle en ce qu'elle l'a privée d'un débat contradictoire et de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; la seconde proposition de rectification était seulement confirmative de la première, et ne s'y est pas substituée ; le service devait donc répondre aux observations présentées sur la première proposition de rectification ;

- globalement, les erreurs de fait répétées commises dans les deux propositions de rectification l'ont privée de garanties de procédure ;

- c'est par ailleurs à tort que le jugement relève qu'en l'absence de réponse à la proposition de rectification, la charge de la preuve pèse sur le contribuable, comme le soutenait le service, qui l'a ainsi privé d'une garantie de procédure de nature à entraîner la décharge des impositions ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le moyen tiré de la méconnaissance du 4 bis de l'article 283 du code général des impôts n'est pas inopérant ; à cet égard, l'administration n'a pas caractérisé, par des éléments objectifs, l'existence d'un schéma de fraude permettant l'application de la solidarité prévue par ce texte, en se bornant à estimer, à tort, que M. A... était gérant de fait de la SARL OAK SECURITE PRIVEE, et en relevant l'existence de " relations privilégiées " entre celle-ci et une autre société, alors qu'elles étaient seulement en relations d'affaires et avaient un associé commun ;

- en se bornant à indiquer que " le service constate que les mécanismes comptables n'engendrent aucune comptabilisation implicite du profit correspondant ", l'administration n'établit pas, comme il lui incombe, l'existence d'un profit sur le Trésor consécutif aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée ;

- l'administration n'a pas motivé, dans la proposition de rectification, et n'établit pas, comme il le lui incombe, l'existence de manoeuvres frauduleuses justifiant l'application de la pénalité de 80 % du c. de l'article 1729 du code général des impôts ; elle relève, à tort, l'existence de " pratiques organisées et préméditées ", alors qu'aucune intention d'éluder le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée en litige ne peut être relevée dès lors que la comptabilité retraçait explicitement, à due concurrence, les dettes de taxe à la clôture de chacun des deux exercices concernés.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bergeret,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.

1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, la SARL OAK SECURITE PRIVEE s'est vu notifier des rappels de taxe sur la valeur ajoutée portant sur la période courant du 1er avril 2010 au 31 mars 2012, assortis des intérêts de retard et de pénalités de 80 % pour manoeuvres frauduleuses ; qu'elle relève régulièrement appel du jugement du 5 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande aux fins de décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas du dossier de première instance que la SARL OAK SECURITE PRIVEE avait présenté au tribunal un moyen tiré de ce que la procédure d'imposition était entachée d'une irrégularité tenant à ce que l'administration n'avait pas répondu aux observations qu'elle avait présentées le 23 septembre 2013 à la suite de la réception d'une première proposition de rectification ; que, dès lors, elle n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier faute d'avoir statué sur un tel moyen ; que, par ailleurs, à l'examen de ses termes, le jugement attaqué répond suffisamment au moyen tiré de ce que la procédure d'imposition aurait été entachée par les " nombreuses " erreurs commises par le service à cette occasion, et n'est donc pas davantage entaché d'irrégularité à cet égard ;

3. Considérant, en second lieu, qu'en ses points 5 et 6, le jugement expose les raisons pour lesquelles l'administration avait pu à bon droit relever, dans la proposition de rectification, que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, justifiés, étaient de nature à constituer un profit sur le Trésor à prendre en compte dans les bases de son impôt sur les sociétés ; qu'il répond ainsi suffisamment au moyen, au demeurant inopérant dès lors que le litige soumis au tribunal ne portait pas sur l'impôt sur les sociétés, tiré de ce qu'un tel profit sur le Trésor n'aurait pu être constaté en l'espèce ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant, en premier lieu, que la lettre de notification de la seconde proposition de rectification, adressée à la contribuable le 2 octobre 2013, lui indiquait qu'elle annulait et remplaçait la première proposition de rectification en date du 8 août 2013, en lui précisant qu'elle ne devait pas tenir compte de celle-ci, et en l'invitant à reformuler ses observations dans le délai de réponse, les mêmes droits lui étant ainsi garantis ; qu'il en résulte que la SARL OAK SECURITE PRIVEE, qui n'a pas présenté d'observations après réception de cette seconde proposition de rectification qui reprenait la procédure d'imposition à ce stade, n'est pas fondée à soutenir que cette procédure était irrégulière du fait de l'absence de réponse de l'administration à ses observations présentées le 23 septembre 2013, ou encore qu'elle aurait, de ce fait, été irrégulièrement privée de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'elle n'est pas davantage fondée à soutenir que la procédure d'imposition était irrégulière du fait des erreurs, d'ailleurs purement matérielles, contenues dans la première proposition de rectification, dès lors que celles-ci ne figuraient plus dans la seconde, à l'exception d'une simple imprécision de rédaction en page 12, sans aucune influence sur la régularité de la procédure ; qu'enfin, la proposition de rectification du 2 octobre 2013 étant, par ailleurs, correctement motivée au regard des dispositions des articles L. 57, R. 57-1 et L. 80 D du livre des procédures fiscales, aucune des irrégularités de procédure invoquées par la SARL OAK SECURITE PRIVEE ne peut être retenue ;

5. Considérant, en second lieu, que si la SARL OAK SECURITE PRIVEE soutient qu'elle aurait été privée d'une garantie de procédure, du fait que le service aurait à tort estimé que la charge de la preuve lui incombait en l'absence de réponse à la proposition de rectification, il résulte de ce qui vient d'être dit au point 4 qu'un tel moyen ne peut qu'être écarté, en tout état de cause, eu égard aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'il est constant que l'intéressée n'a adressé aucune observation à l'administration après réception de la proposition de rectification du 2 octobre 2013 qui a annulé et remplacé la précédente et repris le déroulement de la procédure à ce stade ;

Sur le profit sur le Trésor :

6. Considérant que si la SARL OAK SECURITE PRIVEE soutient qu'en se bornant à indiquer que " le service constate que les mécanismes comptables n'engendrent aucune comptabilisation implicite du profit correspondant ", l'administration n'établit pas, comme il lui incombe, l'existence d'un profit sur le Trésor consécutif aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée, cette contestation ne porte pas sur la taxe sur la valeur ajoutée, seul objet du présent litige, ce qui rend le moyen inopérant ;

Sur la solidarité de paiement du 4 bis de l'article 283 du code général des impôts :

7. Considérant que, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, la SARL OAK SECURITE PRIVEE fait valoir de façon inopérante que les conditions de mise en oeuvre de la solidarité de paiement prévue au 4 bis de l'article 283 du code général des impôts à l'encontre de la société CSPI ne sont pas satisfaites, dès lors que cette circonstance n'a, en toute hypothèse, pas d'incidence sur le bien-fondé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été notifié en propre, objet du présent litige ;

Sur la majoration pour manoeuvres frauduleuses :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d'application de l'article 792 bis " ; qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 (...) " ;

9. Considérant, d'une part, que la proposition de rectification du 2 octobre 2013, après avoir rappelé que les pénalités pour manoeuvres frauduleuses sont encourues en cas de mise en oeuvre de procédés ayant pour objet soit de faire disparaître ou de réduire la matière imposable, soit d'obtenir des remboursements injustifiés, lorsque ces procédés ne sont ni des erreurs excusables ou des omissions involontaires, mais sont le résultat d'actes conscients et volontaires destinés à donner l'apparence de la sincérité à des déclarations en réalité inexactes et impliquant l'intention manifeste d'éluder tout ou partie de l'impôt, indique que la SARL OAK SECURITE PRIVEE a minoré systématiquement, chaque mois pendant deux ans, ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée collectée et a majoré de même les montants déclarés de taxe sur la valeur ajoutée déductible, par des actes conscients et volontaires, répétés, qu'elle qualifie de " pratiques organisées et préméditées ", ayant bénéficié aux associés de cette société qui, au moyen de la distribution de dividendes, s'enrichissaient ainsi au détriment de l'Etat en éludant, sur chaque période concernée, le paiement de la taxe ; que l'application de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses prévue au c. de l'article 1729 du code général des impôts est ainsi suffisamment motivée ;

10. Considérant toutefois, d'autre part, que, s'il est constant que la SARL OAK SECURITE PRIVEE, sur l'ensemble de la période concernée, a volontairement et systématiquement minoré ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée collectée et majoré ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée déductible, aux fins de minorer ses paiements de taxe nette, il n'en résulte pas qu'en procédant ainsi, alors qu'elle a comptabilisé à due concurrence, à la clôture de chacun de deux exercices concernés, la dette de taxe résultant de cette pratique, la société aurait eu recours à des procédés, artifices ou manoeuvres destinés à égarer ou restreindre le pouvoir de contrôle de l'administration, et, dès lors, à des manoeuvres frauduleuses au sens et pour l'application du c. de l'article 1729 du code général des impôts ; que, par suite, c'est à tort que la majoration de 80 % prévue par ce texte lui a été infligée ; qu'il y a cependant lieu, le manquement délibéré étant en revanche établi et reconnu, de substituer à cette majoration de 80 % celle de 40 % prévue par les dispositions précitées du a. du même article ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL OAK SECURITE PRIVEE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil n'a pas procédé à la substitution de la majoration pour manquement délibéré à la majoration pour manoeuvres frauduleuses qui a été appliquée aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge sur la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2012 ;

Sur les dépens de l'instance et l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative du code de justice administrative :

12. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions par lesquelles la SARL OAK SECURITE PRIVEE demande l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en l'absence de dépens dans la présente instance, ses conclusions tendant à ce qu'ils soient mis à la charge de l'Etat ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La majoration pour manquement délibéré de 40 % est substituée à la majoration pour manoeuvres frauduleuses de 80 % qui a été infligée à la SARL OAK SECURITE PRIVEE sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2012.

Article 2 : La SARL OAK SECURITE PRIVEE est déchargée de la différence entre le montant résultant de l'application de la majoration pour manoeuvres frauduleuses et celui correspondant à l'application de la majoration pour manquement délibéré, résultant de la substitution prévue à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement n° 1404532 du 5 octobre 2015 du Tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL OAK SECURITE PRIVEE est rejeté.

6

N° 15VE03844


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE03844
Date de la décision : 07/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Rectification (ou redressement).

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : GUEUNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-02-07;15ve03844 ?
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