Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...E...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation des arrêtés du 1er août 2017 du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ordonnant, d'une part, son transfert aux autorités espagnoles et, d'autre part, l'assignant à résidence.
Par un jugement n° 1707100 du 4 août 2017, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Montreuil a annulé ces arrêtés.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 10 octobre 2017 et 19 décembre 2017, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de rejeter la demande présentée par M. E...devant le Tribunal administratif de Montreuil.
Il soutient que :
Sur la décision portant transfert aux autorités espagnoles :
- le premier juge a annulé, à tort, la décision portant transfert de l'intimé aux autorités espagnoles et, par voie de conséquence, la décision portant assignation à résidence, en se fondant sur la méconnaissance de l'obligation d'information prévue par l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, alors qu'un tel manquement est sans incidence sur la légalité de la décision ordonnant la réadmission d'un demandeur d'asile vers l'État membre de l'Union européenne compétent pour instruire cette demande ;
- aucun des autres moyens invoqués par M. E...n'est de nature à conduire à l'annulation des décisions contestées.
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement CE n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, tel que modifié par le règlement UE n° 118/2014 du 30 janvier 2014 ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du
26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du
26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Livenais a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS relève appel du jugement du 4 août 2017 par lequel le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Montreuil a annulé ses arrêtés du 1er août 2017 portant transfert aux autorités espagnoles de M.E..., ressortissant ivoirien né le 18 mars 1982, et assignation à résidence de ce dernier ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Toute personne relevant de l'article 9, paragraphe 1, de l'article 14, paragraphe 1, ou de l'article 17, paragraphe 1, est informée par l'Etat membre d'origine par écrit et, si nécessaire, oralement, dans une langue qu'elle comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend : / a) de l'identité du responsable du traitement au sens de l'article 2, point d), de la directive 95/46/CE, et de son représentant, le cas échéant ; / b) de la raison pour laquelle ses données vont être traitées par Eurodac, y compris une description des objectifs du règlement (UE) n° 604/2013, conformément à l'article 4 dudit règlement, et des explications, sous une forme intelligible, dans un langage clair et simple, quant au fait que les Etats membres et Europol peuvent avoir accès à Eurodac à des fins répressives ; / c) des destinataires des données ; d) dans le cas des personnes relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées ; e) de son droit d'accéder aux données la concernant et de demander que des données inexactes la concernant soient rectifiées ou que des données la concernant qui ont fait l'objet d'un traitement illicite soient effacées, ainsi que du droit d'être informée des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris les coordonnées du responsable du traitement et des autorités nationales de contrôle visées à l'article 30, paragraphe 1. / " ;
3. Considérant qu'à la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui prévoit un document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, dont la remise doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article 18, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000, aujourd'hui reprises à l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des États membres relevant du régime européen d'asile commun ; que le droit d'information des demandeurs d'asile contribue, au même titre que le droit de communication, le droit de rectification et le droit d'effacement de ces données, à cette protection ; que, dès lors, la méconnaissance de cette obligation d'information ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles le préfet transfère un demandeur d'asile aux autorités compétentes de l'État qui s'est reconnu responsable de l'examen de sa demande ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil s'est fondé sur la violation des dispositions de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 pour annuler l'arrêté préfectoral attaqué du 1er août 2017, prononçant le transfert de M. E...aux autorités espagnoles ;
5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E...tant devant le Tribunal administratif de Montreuil que devant elle ;
Sur la caducité de l'arrêté du 1er août 2017 portant transfert aux autorités espagnoles de M.E... :
6. Considérant que le paragraphe 1 de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 prévoit que le transfert du demandeur d'asile vers l'Etat membre responsable doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 " ; que parmi les hypothèses visées au paragraphe 3 de cet article 27, figure au a) " le recours ou la révision [qui] confère à la personne concernée le droit de rester dans l'Etat membre concerné en attendant l'issue de son recours ou de sa demande de révision " ; que, lorsque le délai de six mois fixé pour l'exécution de la mesure de transfert a été interrompu par l'introduction d'un recours, au sens de ces dernières dispositions, il recommence à courir à compter de la décision juridictionnelle qui n'est plus susceptible de faire obstacle à la mise en oeuvre de la procédure de remise ; qu'en cas d'annulation de la mesure de transfert par le premier juge, le délai prévu à l'article 29 précité ne peut être déclenché, en cas d'appel introduit contre le jugement de première instance, qu'à compter, le cas échéant, de l'intervention de la décision juridictionnelle infirmant cette annulation et rejetant la demande de première instance ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces au dossier que les autorités espagnoles ont donné leur accord pour la reprise de M. E...le 25 avril 2017 ; que le délai de transfert de six mois ainsi ouvert a été interrompu par l'introduction, le 1er août 2017, de la demande de M. E...devant le Tribunal administratif de Montreuil ; que, dans la mesure où le tribunal administratif a annulé cette décision, ce délai n'a pu recommencer à courir à compter de l'intervention du jugement du 4 août 2017 ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient l'intimé, le délai d'exécution de l'arrêté de transfert le concernant n'a donc pas expiré à la date du 25 octobre 2017 ; que cette décision est, ainsi, toujours susceptible de recevoir exécution ;
Sur la compétence de l'auteur des arrêtés attaqués du 1er août 2017 :
8. Considérant que Mme G...D..., adjointe au chef du bureau de l'éloignement et du contentieux et signataire des arrêtés attaqués, a reçu délégation de signature, par arrêté n° 17-0298 du 2 février 2017 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, à l'effet de signer, notamment, les décisions de transfert d'un demandeur d'asile relevant de la compétence d'un autre État membre de l'Union européenne et les décisions portant assignation à résidence lorsqu'est absente ou empêchée Mme F...I..., chef du bureau de l'éloignement et du contentieux de la préfecture de la Seine-Saint-Denis ; que cette dernière a, elle-même, reçu délégation de signature par le même arrêté, aux fins de signer ces mêmes décisions, en cas d'absence ou d'empêchement de Mme H...C..., directrice des migrations et de l'intégration, qui a reçu délégation de signature par un arrêté n° 17-0297 du 2 février 2017 à l'effet de signer, pour le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, les décisions relatives au droit au séjour des étrangers, y compris les décisions de placement en rétention et d'assignation à résidence ; qu'il s'ensuit, alors qu'il n'est pas contesté que Mmes C...et I...n'auraient pas été absentes ou empêchées, que MmeD..., signataire des arrêtés litigieux, était compétente pour prendre la décision ordonnant le transfert de M. E...aux autorités espagnoles ainsi que celle l'assignant à résidence ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions contestées ne peut donc qu'être écarté ;
Sur la légalité de l'arrêté portant transfert de M. E...aux autorités espagnoles :
9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : / a) des objectifs du présent règlement (...) / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) " ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des copies des documents d'information communiqués à M. E...et signés par lui, que ce dernier s'est vu remettre, lors de l'entretien individuel qui s'est tenu en préfecture le 1er mars 2017 en application des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " ainsi que la brochure B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " ; que ces documents, rédigés en français, langue que l'intimé a lui-même déclaré comprendre, et qui ont été établis conformément aux modèles figurant à 1'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, comprennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées ; que la communication de ces documents, cinq mois avant l'intervention de l'arrêté contesté, a ainsi eu pour effet de permettre à M. E...de disposer, en temps utile, de l'ensemble des informations lui permettant de justifier, le cas échéant au moyen d'observations complémentaires auprès de l'administration préfectorale, du bien-fondé de sa demande d'asile en France ou de faire valoir, devant les juridictions compétentes, la responsabilité de la France en ce qui concerne l'examen de sa demande d'asile au regard des dispositions du règlement dit " Dublin III " ou les circonstances qui feraient échec à sa remise aux autorités espagnoles ; que, dans ces conditions, et bien que les documents susmentionnés n'ont pas été remis à l'intéressé au moment du dépôt de sa demande d'asile, les conditions dans lesquelles il a reçu les informations prévues à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ne sont pas de nature à établir qu'il aurait été, en l'espèce, empêché de bénéficier utilement du droit à l'information institué au profit des demandeurs d'asile par ces dispositions ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 4 du règlement susvisé doit être écarté ;
11. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national / 6. État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type (...) " ;
12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. E...a été convoqué le 31 janvier 2017 en vue d'un entretien prévu le 1er mars 2017 afin de déterminer l'État membre responsable de sa demande d'asile ; que la tenue effective de cet entretien est démontrée par le formulaire d'entretien individuel rempli au cours de cette audition et signé par l'intimé ; qu'alors que le préfet fait valoir, sans être contredit, que cet entretien s'est déroulé dans un box individuel, M. E...ne fait état d'aucun élément circonstancié de nature à établir une méconnaissance du principe de confidentialité ; qu'aucune disposition légale n'imposant que soit portée à la connaissance du demandeur d'asile l'identité de la personne chargée de mener l'entretien individuel ainsi que la preuve de la qualification de celle-ci, l'absence d'information délivrée à M. E...sur l'identité de l'agent des services préfectoraux l'ayant reçu en entretien est sans incidence sur la régularité de ce dernier ; qu'enfin, la circonstance selon laquelle le formulaire précité ne fait pas état des raisons pour lesquelles M. E...ne souhaite pas être remis aux autorités espagnoles n'est pas, à elle seule, de nature à démontrer que cet entretien n'aurait pas permis à l'intéressé de faire état des informations de nature à justifier du dépôt de sa demande d'asile en France ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit donc être écarté ;
13. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des mentions du compte-rendu de l'entretien individuel mené avec M. E...relatives aux circonstances de son entrée en France et de son passage par l'Espagne, que la situation personnelle de l'intéressé a fait l'objet, à cette occasion, d'un examen suffisant ; que la circonstance selon laquelle ce compte-rendu ne fait pas état des motifs qui conduisaient M. E...à refuser de rejoindre l'Espagne est sans incidence sur ce point ;
14. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales " ;
15. Considérant qu'ainsi qu'il est dit précédemment, M.E... a été entendu le 1er mars 2017 dans le cadre d'un entretien individuel, au cours duquel il lui a été loisible de former toute observation qu'il jugeait pertinente relative à la procédure de demande d'asile ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté ;
16. Considérant, en cinquième lieu, que, contrairement à ce que soutient l'intimé, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS justifie de l'accord explicite émis le 25 avril 2017 par les autorités espagnoles pour procéder à son transfert vers cet État ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait, en l'absence d'un tel accord, dépourvu de base légale, doit donc être écarté, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le formulaire d'accord de transfert rempli par les autorités espagnoles soit rédigé en langue anglaise ;
17. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 susvisé : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ; 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit " ;
18. Considérant qu'en se bornant à faire état de son concubinage avec MmeB..., ressortissante française, qui n'est d'ailleurs suffisamment établi par les pièces du dossier qu'à compter du 1er septembre 2017, soit postérieurement à l'intervention de l'arrêté attaqué, M. E...n'établit pas l'existence de circonstances particulières qui auraient dû conduire le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS à mettre en oeuvre la procédure dérogatoire prévue par les dispositions précitées de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit donc être écarté ;
19. Considérant, en septième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
20. Considérant que si M. E...soutient avoir noué, ainsi qu'il est dit au point 18., une relation de concubinage avec MmeB..., ressortissante française, la vie commune entre les intéressés ne peut être regardée comme établie qu'à compter du 1er septembre 2017, date à laquelle M. E...et Mme B...ont signalé leur union libre à la caisse d'allocations familiales de la Haute-Savoie ; que, dans ces conditions, l'intimé, qui ne se prévaut d'aucune autre attache sur le territoire national, n'est pas fondé à soutenir que, pour ce seul motif, la décision attaquée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées ou serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision d'assignation à résidence :
21. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'établit pas que l'arrêté de remise aux autorités italiennes serait illégal ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que, pour ce motif, l'arrêté ordonnant son assignation à résidence serait lui-même entaché d'illégalité ;
22. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 561-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les étrangers assignés à résidence sur le fondement des articles L. 552-4 et L. 561-2 se voient remettre une information sur les modalités d'exercice de leurs droits, sur les obligations qui leur incombent et, le cas échéant, sur la possibilité de bénéficier d'une aide au retour " ; qu'aux termes de l'article R. 561-5 du même code : " L'étranger auquel est notifiée une assignation à résidence en application de l'article L. 552-4 ou de l'article L. 561-2 est informé de ses droits et obligations par la remise d'un formulaire à l'occasion de la notification de la décision par l'autorité administrative ou, au plus tard, lors de sa première présentation aux services de police ou de gendarmerie. / (...) Ce formulaire est traduit dans les langues les plus couramment utilisées désignées par un arrêté du ministre chargé de l'immigration " ;
23. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que la remise du formulaire doit s'effectuer au moment de la notification de la décision d'assignation à résidence ou, au plus tard, lors de la première présentation de l'étranger aux services de police ou de gendarmerie ; que, dès lors, il s'agit d'une formalité postérieure à l'édiction de la décision à résidence ; que dans ces conditions, et alors que la légalité d'un acte s'apprécie à la date de son édiction, les éventuelles irrégularités relatives à l'information qui doit être délivrée aux assignés à résidence, en application des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté ;
24. Considérant, en troisième et dernier lieu que, dans la mesure où M.E..., ainsi qu'il a été dit, ne se prévaut que d'un concubinage récent avec MmeB..., le moyen tiré de ce que l'assignation à résidence de M. E...porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;
25. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé ses arrêtés du 1er août 2017 ordonnant la remise de M. E...aux autorités espagnoles en vue du traitement de sa demande d'asile et prononçant son assignation à résidence et lui a enjoint de réexaminer la situation de l'intéressé dans un délai de quinze jours ;
26. Considérant que le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. E...doivent être rejetées ; que, par ailleurs, l'État n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent également qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1707100 du magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Montreuil du 4 août 2017 est annulé.
Article 2 : La demande de M. E...devant le Tribunal administratif de Montreuil et ses conclusions d'appel sont rejetées.
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N° 17VE03028