Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler le titre exécutoire émis le 12 avril 2012 par le maire de la commune de Méry-sur-Oise en vue du recouvrement de la somme de 24 766, 38 euros, d'autre part, de la décharger du paiement de la somme correspondante, enfin, de mettre à la charge de la commune de Méry-sur-Oise les entiers dépens et le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1305745 du 21 mai 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement le 22 juillet 2015, 19 mai 2017 et 12 septembre 2017 la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE, représentée par Me de Chanaud, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler ce titre exécutoire ;
3° de la décharger du paiement de la somme correspondante ;
4° de mettre à la charge de la commune de Méry-sur-Oise les entiers dépens et le versement la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune de Méry-sur-Oise ayant spontanément restitué à la société Sogéba l'original de l'acte de cautionnement en date du 2 juillet 2009, ce qui vaut libération de la caution, le titre exécutoire attaqué doit être annulé en conséquence ;
- à titre subsidiaire, ce titre exécutoire ne comporte pas l'ensemble des mentions exigées par les articles 4 de la loi du 12 avril 2000 et L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ;
- ce titre exécutoire n'indique pas les bases de liquidation de la créance en litige ;
- la créance en litige n'est ni certaine, ni exigible ; d'une part, il n'est pas démontré que les malfaçons constatées le 19 mai 2011 seraient imputables à la société Sogéba ; d'autre part, les travaux de reprise ne pouvaient être réalisés dans le délai imparti par la commune ; enfin, alors que les seules réserves faites lors de la réception des travaux ne sauraient justifier l'existence d'une créance certaine et exigible, la société Sogéba n'a pas été informée de l'émission d'un titre exécutoire à l'encontre de l'exposante, ni ne s'est vu délivrer un tel titre.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Haëm,
- et les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public.
1. Considérant que la commune de Méry-sur-Oise a conclu, le 20 mai 2009, un marché public de travaux avec la société Sogéba en vue de la construction de vestiaires du centre sportif communal, comprenant notamment un lot n° 1 ayant pour objet des travaux de terrassement, fondations, gros oeuvres, cloisons, voirie et réseau divers ; que la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE a souscrit le 2 juillet 2009 un engagement par lequel elle se portait caution personnelle et solidaire de la société Sogéba, titulaire du marché, pour couvrir, dans la limite du montant garanti, les réserves à la réception des travaux ainsi que celles formulées pendant le délai de garantie du marché ; que, des fissures et des microfissures ayant été constatées sur les bâtiments construits, les travaux ont fait l'objet, le 19 mai 2011, d'un procès-verbal de réception assorti de réserves concernant le lot n° 1 et précisant que le titulaire du marché devait remédier, avant le 18 février 2012, aux malfaçons relevées ; qu'après avoir, par deux courriers du 7 septembre 2011 et du 10 janvier 2012, mis en demeure l'entreprise d'effectuer les travaux de reprise, le maire de la commune de Méry-sur-Oise, par un courrier du 29 mars 2012, a demandé à la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE le paiement de la somme de 24 766,38 euros correspondant au montant garanti pour le lot n°1 du marché en cause ; qu'à la suite du refus opposé par cet établissement de crédit, le maire de la commune a émis à son encontre, le 12 avril 2012, un titre exécutoire en vue du recouvrement de cette somme ; que la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE relève appel du jugement du 21 mai 2015 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de ce titre exécutoire, d'autre part, à être déchargée du paiement de la somme correspondante ;
Sur l'intervention de la société Sogéba :
2. Considérant qu'eu égard à l'objet du litige, qui porte sur la mise en jeu de la caution personnelle et solidaire apportée par la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE à la société Sogéba au titre du marché de travaux dont elle est titulaire, cette société justifie d'un intérêt de nature à la rendre recevable à intervenir dans la présente instance ; que son intervention doit, par suite, être admise ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
3. Considérant qu'aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite (...). " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " ; qu'il résulte de ces dernières dispositions, d'une part, que cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle et, d'autre part, qu'une mention portée sur un titre exécutoire indiquant au débiteur d'une créance qu'il peut la contester devant le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de cette créance, suivie d'une liste d'exemples ne comportant pas celui de la créance en litige, ne peut faire courir les délais de recours ;
4. Considérant, toutefois, que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance ; qu'en une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable ; que, s'agissant des titres exécutoires, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait son destinataire, le délai raisonnable ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle le titre, ou à défaut, le premier acte procédant de ce titre ou un acte de poursuite a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance ;
5. Considérant, enfin, que la règle énoncée ci-dessus, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs ; qu'il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance ;
6. Considérant qu'il est constant que la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE a reçu notification le 20 avril 2012 du titre exécutoire contesté, émis le 12 avril 2012 ; que cette notification indiquait : " Dans le délai de deux mois suivant la notification du présent acte (article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales), vous pouvez contester la somme mentionnée au verso en saisissant directement le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de la créance " et qu'étaient cités ensuite plusieurs exemples de créances pour lesquelles était précisée la juridiction compétente ; que si la créance en cause dans le présent litige ne figurait pas dans cette liste et si, par suite, le délai de deux mois fixé par le 2° de l'article L. 1617-5 précité du code général des collectivités territoriales ne lui était pas opposable, il résulte de ce qui précède que le recours dont la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE a saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 5 juillet 2013 a excédé le délai raisonnable d'un an durant lequel il pouvait être exercé ; que ni la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE, ni la société Sogéba ne se prévalent d'une circonstance particulière de nature à justifier que soit écarté en l'espèce l'application de ce délai raisonnable d'un an ; qu'en particulier, la seule circonstance que, par un courrier du 23 octobre 2012 qui, compte tenu des termes dans lesquels il est rédigé, ne peut s'analyser comme un recours gracieux, la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE a indiqué à la Trésorerie de l'Isle-Adam qu'elle refusait de payer la somme mise en recouvrement, ne constitue pas une telle circonstance ; que sa demande était donc tardive et, dès lors, irrecevable ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il y ait lieu d'examiner les moyens de la requête et les moyens de la société Sogéba, la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;
Sur la contribution pour l'aide juridique exposée en première instance :
8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Méry-sur-Oise la somme acquittée en première instance par la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE au titre de la contribution pour l'aide juridique ;
Sur les frais liés au litige :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Méry-sur-Oise, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE le versement de la somme que la commune de Méry-sur-Oise demande sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'intervention de la société Sogéba est admise.
Article 2 : La requête de la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Méry-sur-Oise sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 15VE02438