Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.
Par un jugement no 1604010, 1604014 du 24 avril 2017 le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 juin et 22 décembre 2017, M. A...B..., représenté par Me Sportes, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de le décharger des cotisations supplémentaires contestées.
M. B...soutient que :
- en sa qualité de gérant de la société R2D2, il devait être informé des suites données aux recours hiérarchiques, et devait être mis en mesure de saisir l'interlocuteur départemental ; il n'a ainsi pu bénéficier du caractère contradictoire de la procédure ;
- le service a méconnu les dispositions de l'article 117 du code général des impôts ;
- le service n'apporte pas la preuve de l'existence de revenus distribués, de leur montant et de leur appréhension effective, et de ce qu'il avait la maîtrise des fonds sociaux ; il n'apporte pas la preuve du désinvestissement intrinsèque de la caisse sociale de l'entreprise ; le service a méconnu les dispositions de l'article 12 de code général des impôts ; son enrichissement n'est pas établi ;
- les rehaussements proposés doivent être revus pour prendre en compte le montant des revenus qu'il a porté sur ses déclarations d'impôt sur le revenu pour les deux années, au titre des traitements et salaires, ces montants devant venir en déduction des revenus regardés comme distribués ; les revenus regardés comme distribués devaient être imposés dans la catégorie des traitements et salaires et non dans celle des revenus de capitaux mobiliers ;
- à titre subsidiaire, le service ne pouvait appliquer un coefficient multiplicateur de 1,25 pour établir les contributions sociales assises sur les revenus distribués, l'application de ce coefficient n'étant plus permise depuis la décision du Conseil constitutionnel en date du 10 février 2017, n° 2016-610.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Méry ;
- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...était le gérant de la société à responsabilité limitée (SARL) R2D2, enregistrée comme ayant une activité comptable. Cette société, qui a été l'objet d'une dissolution amiable le 17 novembre 2011 et d'une radiation le 2 décembre suivant, a été soumise à une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 2 décembre 2011. Par une ordonnance du Tribunal de commerce de Bobigny du 20 février 2012, M. B... a été désigné en qualité de mandataire ad hoc de la SARL. Des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ont été notifiés à ce mandataire par une proposition de rectification en date du 31 juillet 2012. Parallèlement, la situation fiscale de M. B...a fait l'objet d'un contrôle sur pièces, à l'issue duquel le service lui a adressé une proposition de rectification en date du 2 août 2012 tirant les conséquences, en matière d'impôt sur le revenu au titre des années 2010 et 2011, des rehaussements des bénéfices notifiés à la SARL au motif qu'il avait bénéficié, en tant que maître de l'affaire, de revenus réputés distribués par la SARL. M. B...demande l'annulation du jugement du 24 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.
Sur l'étendue du litige :
2. Par une décision du 16 août 2018, postérieure à l'introduction de la requête, le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé, au bénéfice de M. B..., des dégrèvements à concurrence de 4 697 euros et de 6 633 euros, en droits et pénalités, sur les montants dus au titre des contributions sociales auxquelles le requérant a été assujetti au titre des années 2010 et 2011, correspondant aux montants des contributions sociales résultant de l'application du coefficient multiplicateur de 1,25 prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts. Les conclusions de M. B...sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " (...) Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. ". Les articles L. 12 et L. 13 du même livre sont respectivement les dispositions relatives à l'examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle et à la vérification de comptabilité.
4. La garantie de procédure tenant à la faculté pour le contribuable de saisir l'interlocuteur départemental, instituée par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié mentionnée au quatrième alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, cité au point précédent, ne peut être invoquée que dans le cadre d'un litige consécutif aux procédures de vérification de comptabilité et d'examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle, prévues aux articles L. 12 et L. 13 du même code Il résulte de l'instruction que les impositions supplémentaires contestées par le requérant ont été mises à sa charge à la suite d'un contrôle sur pièce de son dossier fiscal, dans le cadre duquel l'administration a tiré les conséquences des rehaussements notifiés à la société R2D2 Par suite, la société R2D2 ayant seule fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à la suite de laquelle son représentant a d'ailleurs rencontré le supérieur hiérarchique et l'interlocuteur départemental, M. B..., en vertu du principe de l'indépendance des procédures, n'avait pas à être reçu à titre personnel par l'interlocuteur départemental compte tenu de la nature de la procédure d'imposition suivie à son encontre. En conséquence, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le service aurait entaché la procédure d'imposition d'un vice au motif qu'il n'a pu saisir l'interlocuteur départemental . Il n'est pas non plus fondé à soutenir que le service aurait, ainsi, méconnu le caractère contradictoire de la procédure d'imposition, alors même que M. B... a produit des observations le 28 août 2012 puis le 2 octobre 2012 en réponse à la proposition de rectification en date du 2 août 2012 dont il a été destinataire.
5. En second lieu, aux termes des dispositions de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ".
6. Il résulte de ces dispositions que si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir ladite personne morale à la pénalité prévue à l'article 1759 du code général des impôts à raison des sommes correspondantes mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques qui ont bénéficié de la distribution et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est en mesure d'identifier. Ainsi, contrairement à ce que soutient M.B..., la circonstance que le service n'a pas demandé à la société R2D2 de désigner le bénéficiaire des distributions résultant de la rectification de son résultat est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition.
Sur le bien-fondé des impositions contestées :
7. En premier lieu, aux termes des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ; qu'aux termes du
1er alinéa de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. " ; et que l'article 12 du code général des impôts dispose que : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. ". En cas de refus des rehaussements par les contribuables qu'elle entend imposer comme bénéficiaires des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que ceux-ci en ont effectivement disposé . Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.
8. D'une part, il résulte de l'instruction que le service, à la suite de la vérification de la comptabilité de la société R2D2, qui n'a présenté aucune comptabilité, a reconstitué le bénéfice imposable de ladite société et a établi son montant à la somme de 104 938 euros pour l'année 2010 et à la somme de 139 567 euros pour l'année 2011 ; que ces bénéfices reconstitués ont été considérés comme revenus distribués entre les mains de M.B... ; que le requérant, qui a été destinataire de la proposition de rectification en date du 2 août 2012, à laquelle était annexée la proposition de rectification adressée à la société en date du 31 juillet 2012, n'apporte aucun élément factuel ou justificatif pour contester les montants des revenus distribués pour les deux années litigieuses.
9. D'autre part, l'administration indique, sans être contredite, que M.B..., gérant, puis nommé mandataire liquidateur de la société, et détenteur des deux tiers de son capital, était le seul détenteur de la signature bancaire de cette société, dont il avait également signé les statuts et dont il signait les déclarations fiscales effectuées en matière de taxe sur la valeur ajoutée. L'administration établit ainsi que M. B...était le maître de l'affaire, alors même que l'intéressé n'avait pas la disposition exclusive du capital social ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe, en l'absence de mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article 117 du code général des impôts, à laquelle elle n'est jamais tenue, que M.B..., en sa qualité de seul maître de l'affaire au cours des années considérées, a appréhendé les revenus distribués litigieux, le requérant n'apportant aucun élément en sens contraire pour combattre la présomption d'appréhension découlant de la maîtrise de l'affaire par M.B.... En outre, le requérant ne conteste pas valablement cette présomption en invoquant l'absence de preuves de désinvestissement intrinsèque dans les comptes de la SARL R2D2, s'agissant d'une minoration de recettes de la société. L'administration a pu, dès lors, imposer les revenus distribués litigieux entre les mains de M. B...sans rechercher l'existence d'un enrichissement personnel. L'administration n'a, en conséquence, pas méconnu les dispositions de l'article 12 du code général des impôts ;
10. En second lieu, que M. B...soutient que le montant des distributions pour les années 2010 et 2011, doit être corrigé du montant des revenus qu'il a lui-même déclaré pour ces deux années dans la catégorie des traitements et salaires. Toutefois, il résulte de l'instruction que le requérant, qui a déclaré 41 954 euros en 2010 et 53 073 euros en 2011 dans la catégorie des traitements et salaires, ne verse pas plus en appel qu'en première instance, d'éléments justificatifs à l'appui de sa demande. C'est à bon droit que l'administration a imposé la totalité des revenus distribués et appréhendés par M. B...dans la catégorie de revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2010 et 2011.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées aux fins de décharge ne peuvent qu'être également rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions en décharge de M. B...à concurrence de 4 697 euros et de 6 633 euros, en droits et pénalités, en ce qui concerne les contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...B...est rejeté.
A...B...
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N° 17VE01887