Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 et 2007, soit la somme de 110 390 euros.
Par une ordonnance du 4 février 2016, le président de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a transmis la requête de M. B... au Tribunal administratif de Montreuil.
Par un jugement n°1600864 du 27 juin 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 août 2017, et trois mémoires en réplique, enregistrés le 2 décembre 2018, le 26 février 2019 et le 23 mars 2019, M. B..., représenté par
Me Elachi, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer la décharge des impositions litigieuses et de leurs pénalités ;
3° de mettre à la charge de l'Etat les dépens et le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'action en recouvrement est prescrite au regard des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales en l'absence de tout acte entre le 29 avril 2011 et le 14 décembre 2015 ;
- la procédure d'imposition supplémentaire est irrégulière au regard de l'article 56 du livre des procédures fiscales, l'administration ayant appliqué à la fois la procédure d'évaluation d'office prévue par l'article L. 74 du livre des procédures fiscales pour opposition à contrôle fiscal et la procédure de redressement contradictoire de l'article L. 56 du même livre ;
- la procédure de rectification contradictoire est viciée au regard des dispositions de l'article L. 221-1 du code de commerce ; d'une part, la transformation de la société en nom collectif en société à responsabilité limitée est intervenue en violation des dispositions du décret n° 2007-906 du 15 mai 2007 relatif à l'attribution de la gérance et au transfert des débits de tabac ; d'autre part, la continuité de la société est avérée ; par conséquent, ce n'est qu'à titre subsidiaire que la créance pouvait être recouvrée auprès de l'associé ; or, en l'espèce, aucune mise en demeure n'a été adressée à la société ;
- il n'est pas mis en mesure de discuter la méthode retenue pour déterminer les bases d'imposition ;
- la méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires suivie par l'administration est erronée et conduit à une imposition manifestement excessive ; ainsi, il n'a pas été tenu compte des spécificités comptables liées à son activité de débitant de tabac et commissionnaire de jeux, mais seulement des encaissements bancaires de la société ; les charges d'exploitation de son commerce ont été minorées ; ainsi, le résultat imposable de l'exercice clos en 2006 s'élève à la somme de 19 819 euros, ce dont il apporte une preuve suffisante par le biais d'une reconstitution de comptabilité.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de commerce ;
- le décret n° 2007-906 du 15 mai 2007 relatif à l'attribution de la gérance et au transfert des débits de tabac ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... ;
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Du 19 décembre 2006 au 31 août 2007, M. B... a été le gérant et l'unique associé de la SNC Planète qui exploitait un commerce de restauration, bar-tabac et antenne de la Française des jeux dans le 15ème arrondissement à Paris. A la suite de la cession de la société par M. B... le 31 août 2007, celle-ci a été transformée en société à responsabilité limitée, la SARL Lecourbe, laquelle fut mise en liquidation judiciaire par un jugement du Tribunal de commerce de Paris du 9 mars 2010. Le 22 juillet 2009, une vérification de comptabilité a été initiée portant sur les exercices clos en 2006 à 2008. En l'absence de réponse de la SARL Lecourbe, les services fiscaux ont, dans le cadre de la procédure d'évaluation d'office pour opposition à contrôle fiscal prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, procédé à la détermination du résultat imposable de cette société au titre de ces trois exercices, sur la base de laquelle deux propositions de rectification portant sur les bénéfices industriels et commerciaux des années 2006 et 2007 ont été adressées à la SARL Lecourbe ainsi qu'à M. B... pour les rehaussements de la période antérieure au 1er septembre 2007. Par deux réclamations, des 21 mai et 10 juin 2011, M. B... a contesté les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des périodes concernées. Le 28 janvier 2016, M. B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande de décharge de l'ensemble des cotisations supplémentaires qui avaient été mises à sa charge. M. B... fait appel du jugement n° 1600864 du 27 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil, auquel la saisine avait été transférée, a rejeté sa demande.
Sur le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement :
2. Le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement des suppléments d'imposition ne peut être invoqué utilement à l'occasion d'un litige d'assiette et doit donc être écarté pour ce motif.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. En premier lieu, l'article L. 56 du Livre des procédures fiscales dispose que " La procédure de rectification contradictoire n'est pas applicable : (...) 4° Dans les cas de taxation ou évaluation d'office des bases d'imposition (...) ". En l'espèce, il n'est pas contesté que la procédure d'évaluation d'office a été mise en oeuvre à l'égard de la SARL Lecourbe en application de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, en raison de l'opposition à contrôle fiscal que cette dernière a manifesté par son silence. Dès lors qu'il n'est pas contesté que M. B... n'a pas personnellement pris part à l'opposition à ce contrôle, n'étant plus dirigeant de la société à la date du contrôle, c'est à bon droit que l'administration lui a notifié les conséquences en matière d'impôt sur le revenu du rehaussement des bénéfices industriels et commerciaux de la SNC Planète selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 56 du livre des procédures fiscales sans qu'y fasse obstacle les disposition du 4° de cet article. En tout état de cause, l'administration conserve toujours la faculté de mettre en oeuvre la procédure contradictoire dès lors qu'elle constitue une garantie pour le contribuable.
4. En second lieu, M. B... ne peut utilement invoquer à l'occasion du présent litige de nature fiscale, la méconnaissance du décret du 15 mai 2007 susvisé qui concerne la gérance et le transfert des débits de tabac. En tout état de cause, les faits qu'il invoque pour contester la modification de la forme juridique de la société exploitant le fonds de commerce sont postérieurs à la période au titre de laquelle l'imposition en litige a été mise à sa charge. De même, est inopérant, dans le cadre d'un litige d'assiette, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 221-1 du code de commerce, lesquelles portent sur le recouvrement des dettes sociales.
Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
5. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ".
6. Il résulte de l'instruction, d'une part que si le contrôle de la SARL Lecourbe a été mené dans le cadre d'une procédure d'opposition à contrôle fiscal, la proposition de rectification consécutive à ce contrôle a été adressée à M. B... dans le cadre d'une procédure contradictoire. Toutefois, l'intéressé n'a présenté d'observations dans le délai de trente jours prévu à l'article L. 11 du livre des procédures fiscales, ni sur la proposition de rectification du
15 décembre 2009 concernant l'année 2006, ni sur celle du 8 avril 2010 concernant l'année 2007. Ainsi, en vertu des dispositions de l'article R.* 194-1 du livre des procédures fiscales précitées, la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions litigieuses incombe à l'appelant.
En ce qui concerne le bien-fondé du redressement notifié au titre des bénéfices industriels et commerciaux des années 2006 et 2007 :
7. En premier lieu, si M. B... soutient que l'administration n'a pas respecté son obligation de faire connaitre la méthode d'évaluation mise en oeuvre, le moyen manque en fait dès lors que les propositions de rectification établies dans le cadre de la procédure contradictoire comportent les éléments permettant au requérant de contester utilement les montants mis à sa charge.
8. En deuxième lieu, M. B... soutient que le montant de l'imposition mise à sa charge est exagéré dès lors que la méthode mise en oeuvre par l'administration dans le cadre de l'évaluation d'office du chiffre d'affaires de la SNC Planète n'a pas tenu compte des spécificités de l'activité de débitant de tabac et commissionnaire de jeux de son fonds de commerce et que le montant des charges est sous-évalué. A ce titre, il soutient que seules les commissions perçues sur les produits des ventes liées au tabac et aux jeux doivent être comptabilisées dans le chiffre d'affaires alors que l'administration a retenu l'ensemble des encaissements bancaires constatés au titre des exercices contrôlés. Cependant, en admettant même que cette affirmation soit fondée, le requérant n'indique pas la part de son chiffre d'affaires représentée par les seules activités de débitant de tabac et commissionnaire de jeux et le montant réel des activités générées par cette activité et ne met donc pas le juge, en mesure de statuer utilement sur ce moyen. Pour le surplus des activités exercées, le requérant ne formule aucune critique précise de la méthode de détermination des recettes retenues par l'administration. Par ailleurs, l'appelant se borne à alléguer que les charges d'exploitation ont été sous-évaluées et qu'elles ne peuvent se limiter à la somme de 3 479 euros, alors que l'administration a, en réalité, retenu un montant de charges nettement supérieur, sans d'ailleurs préciser celles qui n'auraient pas été prises en compte et dont l'identification n'est pas rendue possible par la seule production d'une série de documents. S'il est exact enfin que le requérant fourni en appel diverses pièces comptables et une attestation sommaire établie a posteriori par un expert-comptable indiquant que le résultat d'exploitation ne saurait dépasser 32 579 euros, avant déduction des charges financières et des amortissements, ces documents sans corrélation démontrée entre eux ne sauraient suffire à établir l'exagération des bases d'imposition retenues.
9. Dans ces conditions, comme l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif de Montreuil, M. B... ne peut être regardé comme rapportant la preuve qui lui incombe de l'exagération des bénéfices industriels et commerciaux sur lesquels s'est fondée l'administration pour établir les impositions litigieuses. Par conséquent, il y a lieu d'écarter ce moyen.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que celles relatives aux dépens, ne peuvent également qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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N° 17VE02795