Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... C... D... ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités associées auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012 à hauteur d'un montant global de 6 417 euros, et de la cotisation supplémentaire en matière de taxe d'habitation à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.
Par un jugement n° 1510457 du 6 mars 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 9 mai 2018, M. et Mme A... C... D..., représentés par Me B..., demandent à la Cour :
1° d'annuler le jugement attaqué ;
2° de prononcer la décharge des impositions susmentionnées ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- Mme C... D... a recherché un emploi au cours des années 2010, 2011 et 2012, à l'exception d'une période de travail qu'elle a connue à la fin de l'année 2011 et au début de l'année 2012 ; elle a engagé des frais de communication et de documentation pour sa recherche d'emploi et, au cours des années 2011 et 2012 pendant lesquelles elle a travaillé quelques mois, elle a également engagé des frais de communication et de documentation dans le cadre des astreintes qu'elle assurait à son domicile, la nuit et le week-end ; ces frais doivent être déduits des revenus déclarés, dès lors qu'ils ont été engagés dans le but soit d'acquérir un revenu soit d'en constituer un ;
- les frais de transport déclarés par Mme C... D... pour les trois années 2010, 2011 et 2012 sont liés à sa recherche d'emploi, et également, pour la période du 1er septembre 2011 au 15 février 2012 pendant laquelle elle a travaillé, à ses déplacements entre son domicile situé à Cergy et son lieu de travail situé à Clichy ; elle a effectué ses déplacements avec un véhicule de 8 chevaux, sur une distance globale de 64 km pour l'aller et le retour, dans le cadre de son travail quotidien et de ses astreintes ;
- les frais d'avocat déduits des revenus 2010 du couple sont liés à deux procédures prudhommales distinctes engagées par Mme C... D... contre d'anciens employeurs en vue du recouvrement de sommes dues au titre de salaires et du versement de dommages-intérêts, et sont donc déductibles des revenus selon les termes de " la documentation de base 5F 2543-n°18 " ; ces procédures ont été poursuivies en 2011 et une autre procédure, ayant le même objet, contre un autre employeur, a été initiée, donnant lieu à de nouveaux frais d'avocat sur cette année ; au cours de l'année 2011, Mme C... D... a également enregistré un pourvoi en cassation devant le Conseil d'État dans le cadre d'une procédure liée à une autorisation de licenciement prise par l'inspection du travail alors qu'elle était déléguée syndicale en 2005 ; ces derniers frais visaient donc la conservation de son revenu pour les années 2004 et 2005, ainsi que la défense de ses fonctions représentatives, et étaient déductibles au terme de " la documentation de base 5F 2543-n° 11 " ; de même, en 2012, les frais d'avocat que Mme C... D... a dû effectuer étaient relatifs aux procédures engagées contre d'anciens employeurs dans le but de percevoir des salaires dus et des dommages-intérêts, ces procédures l'ayant notamment amenée à saisir le Tribunal administratif, puis le Conseil d'État ;
- ils contestent être de mauvaise foi, dès lors qu'ils auraient pu engager d'autres procédures, et, par le passé, solliciter le bénéfice d'autres déductions, ce dont ils se sont abstenus ; en outre, tous les recours qu'ils ont engagés ne sont pas arrivés à leur terme ; les licenciements qu'ils ont subis ont eu pour conséquence de les placer dans une mauvaise situation financière ; le refus de l'administration de leur faire bénéficier de la documentation de base qu'ils invoquent, et la majoration mise à leur charge en application des dispositions du a de l'article 1729 du code général des impôts, constituent une atteinte au droit à un procès équitable prévu par les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu le jugement attaqué.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dibie, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... D... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces sur leurs revenus perçus en 2010, 2011 et 2012, à la suite duquel le service a remis en cause, par une proposition de rectification en date du 19 décembre 2013, le caractère déductible de différents frais en matière de communication et documentation, de transport, et de frais relatifs à des honoraires d'avocat. En réponse aux observations qu'ils ont formées par un courrier en date du 12 février 2014, le service a admis, par un courrier du 10 avril 2014, le caractère déductible d'une partie des honoraires d'avocat, à hauteur de 4 392 euros en 2010, 2 500 euros en 2011 et 4 256 euros en 2012 et a maintenu les autres rehaussements proposés par le service qui ont été mis en recouvrement par des avis d'imposition supplémentaires en matière d'impôt sur le revenu émis les 30 septembre et 31 octobre 2014. Un avis d'imposition supplémentaire en matière de taxe d'habitation au titre de l'année 2012 a également été émis. M. et Mme C... D... ont présenté une réclamation contentieuse au service, en date du 20 janvier 2015, qui a été implicitement rejetée. Par la présente requête, M. et Mme C... D... relèvent appel du jugement du 6 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires en matière d'impôt sur le revenu pour les années 2010, 2011 et 2012 et des pénalités associées, et de la cotisation supplémentaire en matière de taxe d'habitation pour l'année 2012.
Sur les conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe d'habitation :
2. Aux termes de l'article L. 811-1 du code de justice administrative : " (...) le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) / 4° Sur les litiges relatifs aux impôts locaux (...) ". Et aux termes de l'article R. 351-2 du même code : " Lorsqu'une cour administrative d'appel (...) est saisie de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui poursuit l'instruction de l'affaire ".
3. Il résulte des dispositions de l'article L. 811-1 du code de justice administrative précité que la taxe d'habitation, qui constitue une imposition locale, relève de la compétence du Tribunal administratif en premier et dernier ressort. La Cour n'est ainsi pas compétente pour connaître des conclusions relatives à la décharge de cette taxe. En application des dispositions précitées de l'article R. 351-2 du même code, il y a lieu de transmettre au Conseil d'Etat les conclusions de la requête de M. et Mme C... D... relatives à la taxe d'habitation.
Sur les conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités afférentes :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par le ministre :
4. Il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 1, que le service, dans sa réponse aux observations du contribuable, en date du 10 avril 2014, a admis pour la détermination du revenu net imposable le caractère déductible d'une partie des honoraires d'avocat que M. et Mme C... D... ont indiqué avoir payée, à hauteur de 4 392 euros en 2010, de 2 500 euros en 2011 et de 4 256 euros en 2012. En conséquence, et ainsi que l'ont déjà jugé les premiers juges, les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités associées, en tant qu'elles sont liées à la réintégration en base des dépenses dont la déductibilité a été admise par le service, sont irrecevables. Il y a lieu, par suite, de les rejeter.
En ce qui concerne le bien-fondé du surplus des impositions :
5. Aux termes de l'article 13 du code général des impôts : " Le (...) revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu. ". Aux termes de l'article 83 du même code : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. (...) Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels, (...) Les frais de déplacement de moins de quarante kilomètres entre le domicile et le lieu de travail sont admis, sur justificatifs, au titre des frais professionnels réels (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir déduire ses frais réels, le contribuable doit fournir des justifications suffisamment précises pour permettre d'apprécier le montant des frais effectivement exposés par lui pour l'exercice de sa profession. Ainsi, il ne peut se borner à présenter un calcul théorique de ces frais, ni faire état de dépenses réelles sans établir qu'elles constituent des frais inhérents à sa fonction ou à son emploi.
6. En premier lieu, M. et Mme C... D... soutiennent que les dépenses en frais de communication et de documentation réintégrées par le service pour un montant de 2 855 euros ont été faites en vue d'acquérir ou de conserver un revenu. Toutefois, la seule production de factures de téléphonie établies au nom de Mme C... D... ainsi que de factures relatives à des affranchissements de courriers et à la réalisation de photocopies, l'achat de fournitures de bureau et de matériel informatique, non nominatives, ne permet pas d'établir le caractère professionnel des dépenses litigieuses.
7. En deuxième lieu, M. et Mme C... D... soutiennent que les frais de transport réintégrés par le service ont été engagés par Madame C... D... dans le cadre de sa recherche d'emploi puis de son emploi de directrice de foyer d'accueil médicalisé situé à Clichy. Toutefois, la production de copies de titres de transport et de preuves d'achat par carte bancaire de ces titres, ainsi qu'un calcul, réalisé pour chaque année, du nombre de kilomètres parcourus, à partir d'une carte géographique assortis de plannings de travail faisant état du nombre de jours travaillés, lesquels ne sont ni signés ni corroborés par des attestations, de deux procès-verbaux de contrôle technique de leur véhicule établis en août 2010 puis septembre 2012, et de deux factures relatives à des frais d'entretien de celui-ci, datées du 14 septembre 2010 et du 27 septembre 2012, sont insuffisants, à eux-seuls, pour justifier, que les frais ainsi engagés sont liés à la recherche d'un emploi, ni de l'utilisation effective par Mme C... D... du véhicule personnel des requérants à titre professionnel ni de la réalité des frais qu'elle aurait été engagés pour se rendre de son domicile à son lieu de travail.
8. En dernier lieu, les frais d'avocat non réintégrés par le service à la suite dans sa réponse aux observations du contribuable en date du 10 avril 2014, sont relatifs à un litige contestant l'autorisation administrative de licenciement délivrée à l'encontre de Mme C... D... en 2005 en qualité de déléguée syndicale et à un autre litige engagé contre le préfet du Val de Marne et l'agence régionale de santé d'Ile-de-France contestant un refus de communication d'un projet de restructuration de l'APAJH 94. Il résulte de l'instruction que le litige engagé contre le préfet du Val de Marne et l'agence régionale de santé d'Ile-de-France n'a pas pour objet le versement ou la conservation des salaires de l'un ou l'autre des requérants. Il s'ensuit que les frais d'honoraires relatifs à ce litige n'ont par suite pas le caractère de frais professionnels. En revanche, le litige engagé contre le ministre du travail et l'Association des paralysés de France qui a pour objet la contestation de l'autorisation administrative de licenciement délivrée à l'encontre de Mme C... D..., laquelle constitue une formalité préalable obligatoire au licenciement de l'intéressée, a nécessairement pour objet la conservation de ses salaires. En conséquence, les frais d'honoraires relatifs à ce dernier litige ont le caractère de frais professionnels. Il s'ensuit que les requérants qui produisent une facture d'honoraires d'avocat de 2 990 euros en date du 20 juillet 2011 afférente à ce litige, établissent le caractère professionnel de cette dépense et sont fondés à soutenir que celle-ci doit être déduite de leurs revenus déclarés au titre de l'année 2011.
Sur les pénalités :
9. Aux termes des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : /a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".
10. En premier lieu, en relevant le caractère répété des déductions opérées et le montant des sommes en cause par rapport aux revenus salariaux déclarés, l'administration établit l'intention des contribuables, par leur comportement, d'éluder l'impôt, et, par suite, le bien-fondé de l'application de la majoration de 40 % pour manquements délibérés. La circonstance, invoquée par les requérants, selon laquelle ils seraient, en raison de licenciements, dans une situation financière difficile, est sans incidence sur le bien-fondé des pénalités susmentionnées.
11. En second lieu, en se bornant à soutenir que l'application des dispositions de l'article 1729 précité constitue une atteinte à leur droit à un procès équitable, M. et Mme C... D... n'assortissent pas plus que devant les premiers juges leur moyen tiré de la violation des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales des précisions suffisantes permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... D... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ne leur a pas accordé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités afférentes au titre de l'année 2011 à raison des frais professionnels d'un montant de 2 990 euros.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
14. L'Etat n'étant pas la partie principalement perdante, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la M. et Mme C... D... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assignée à M. et Mme C... D... au titre de l'année 2011 est réduite d'une somme de 2 990 euros.
Article 2 : M. et Mme C... D... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités afférentes correspondant à cette réduction des bases d'imposition.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Les conclusions de la requête de M. et Mme C... D... portant sur la taxe d'habitation sont transmises au Conseil d'Etat pour qu'il y soit statué.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme C... D... est rejeté.
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N° 18VE01603