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18/06/2020 | FRANCE | N°18VE01961

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 18 juin 2020, 18VE01961


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SOCIETE CHARME HN a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période correspondant à l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1700590 du 5 avril 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 juin 2018, le 15 novembre 2019 et le 19 mars 20

20, la SOCIETE CHARME HN, représentée par Me B..., avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SOCIETE CHARME HN a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période correspondant à l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1700590 du 5 avril 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 juin 2018, le 15 novembre 2019 et le 19 mars 2020, la SOCIETE CHARME HN, représentée par Me B..., avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge, en droits et pénalités, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012 ;

3° de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

- la procédure a méconnu le principe communautaire de respect des droits de la défense, garanti par l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; cette obligation d'être entendu a été rappelée par l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ; l'article 12 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 codifié à l'article L 54 C du livre des procédures fiscales a prévu que les contribuables faisant l'objet d'un contrôle sur pièces pourraient bénéficier d'un recours hiérarchique après la notification d'une proposition de rectification ;

- le rappel est infondé en raison d'une part de l'absence de préjudice pour le Trésor, et d'autre part, de la disparition justifiée des marchandises en cause dans un incendie.

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., pour la SARL CHARME HN.

Une note en délibéré présentée pour la SARL CHARME HN a été enregistrée le 5 juin 2020.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL CHARME HN, qui exerce une activité de commerce de gros dans le secteur de l'habillement, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2012. A cette occasion, le service vérificateur a estimé que la société ne justifiant pas de la disparition, dans un incendie, d'un stock de marchandises inscrit dans ses charges exceptionnelles, elle devait reverser la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) déduite correspondante. La SARL CHARME HN a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de la décharger, en droits et pénalités, du rappel de TVA qui lui a été assigné en conséquence de ces opérations, au titre de cette période. Elle relève appel du jugement du 5 avril 2018 par lequel cette juridiction a rejeté sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.

3. La proposition de rectification du 14 décembre 2015, qui indique porter sur la TVA pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2012, relève l'inscription dans la déclaration de résultats de la société requérante, au sein de la rubrique " charges exceptionnelles " du formulaire n° 2052-SD, d'une somme de 1 266 389 euros pour laquelle est mentionnée la perte d'un stock d'un montant de 1 266 155 euros à la suite d'un incendie. Elle mentionne qu'aucun montant correspondant n'a été porté au titre de la TVA antérieurement déduite à reverser. En outre, la proposition de rectification cite les dispositions du code général des impôts, relatives à cette imposition ainsi que celles relatives à la régularisation de la TVA en cas de disparition des marchandises, lesquelles fondent la rectification. Elle tire de ce qui précède que la société n'apportant pas la preuve du vol ou de la destruction des marchandises en cause, il y a lieu de rappeler le montant de la taxe déduite lors de leur acquisition. Ainsi, cette motivation, qui n'avait pas à faire état de l'acquisition intracommunautaire des marchandises en cause, cette circonstance ne fondant pas la rectification en cause, mettait à même la SARL CHARME HN de présenter utilement ses observations. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté.

4. En second lieu, à la date où le contrôle sur pièces a été diligenté à l'encontre de la société requérante, la garantie de procédure tenant à la faculté pour le contribuable de saisir le supérieur hiérarchique, instituée par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié mentionnée au quatrième alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, ne pouvait être invoquée que dans le cadre d'un litige consécutif aux procédures de vérification de comptabilité et d'examen d'ensemble de la situation fiscale personnelle prévues aux articles L. 12 et L. 13 du même code. A cet égard, la société ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 54 C du livre des procédures fiscales issues de la loi du 10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance, postérieures à la procédure d'imposition en cause, et pas davantage les dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration. Par ailleurs, ayant eu, au cours du contrôle, la possibilité de présenter tout document utile à sa défense, et n'alléguant pas que l'agent contrôleur se serait refusé à tout dialogue, la seule circonstance qu'elle n'a pas pu s'entretenir avec le supérieur hiérarchique de cet agent sur, notamment, les modalités de preuve de l'incendie ayant ravagé son stock de marchandises et la valeur de celui-ci, ne caractérise pas, en tout état de cause, une violation du principe du contradictoire au sens des dispositions de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Il résulte de ce qui précède qu'en ne réservant pas de suite favorable à sa demande d'entretien avec le supérieur hiérarchique de l'agent vérificateur, l'administration n'a pas entaché d'irrégularité la procédure d'imposition.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; / (...) III. A cet effet, les assujettis, qui sont autorisés à opérer globalement l'imputation de la taxe sur la valeur ajoutée, sont tenus de procéder à une régularisation : / a) Si les marchandises ont disparu (...) ". Aux termes du VI de l'article 207 de l'annexe II au même code : " Le montant de la taxe dont la déduction a déjà été opérée doit être reversé dans les cas suivants : / 1° Lorsque les marchandises ont disparu ; / (...) Toutefois, ces reversements ne sont pas exigés lorsque les biens ont été détruits avant toute utilisation ou cession, ou volés, et qu'il est justifié de cette destruction ou de ce vol ".

6. Il résulte de ces dispositions, prises pour l'adaptation de la législation nationale à la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977, dont l'article 20 a été repris aux articles 184 et 185 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, que la " disparition " d'une marchandise, au sens du a) du III de l'article 271 du code général des impôts, s'entend d'une disparition non justifiée, laissant présumer que cette marchandise a été utilisée pour les besoins d'une opération non effectivement soumise à l'impôt, telle qu'une consommation finale, et que n'entrent pas, en revanche, dans les prévisions du texte les déperditions justifiées de marchandises qu'une entreprise établit avoir subies à l'occasion de l'accomplissement de ses opérations imposables et du fait des modalités de son activité, le coût de ces déperditions constituant ainsi l'un des éléments du prix de ces opérations.

7. La SARL CHARME HN soutient, d'une part, que les marchandises pour lesquelles l'administration a rappelé la TVA déduite ont été détruites dans un incendie, survenu le 16 février 2012, qui a ravagé le local qu'elle louait à La Courneuve (Seine-Saint-Denis). Toutefois, elle n'a produit, ni devant les premiers juges, ni en appel, aucun élément au soutien de ces allégations. Elle ne conteste pas davantage n'avoir apporté, tant devant le juge judiciaire, qu'au cours du contrôle de son dossier fiscal, aucun élément de nature à prouver que ces marchandises auraient été détruites, ainsi que le relève l'ordonnance de référé du 9 novembre 2012 du tribunal de grande instance de Bobigny, qui constate également que la valeur du stock est seulement justifiée par " des attestations unilatérales d'experts comptables ". Elle ne conteste pas non plus s'être bornée, lors des mêmes opérations, à produire des factures des marchandises prétendument détruites, sans communiquer d'inventaire de son stock, ou tout autre document comptable qui aurait permis d'établir que la charge exceptionnelle passée correspondait à la destruction de ces biens, circonstance soulignée par l'expert désigné par l'ordonnance susmentionnée. D'autre part, la SARL CHARME HN soutient qu'en raison de l'acquisition intracommunautaire des marchandises en cause, il n'existe aucun préjudice sur le Trésor justifiant le rappel de TVA litigieux. Toutefois, elle ne conteste pas avoir déclaré la TVA afférente à ces acquisitions, de même qu'elle ne conteste pas l'avoir déduite, dans les mêmes proportions. Dans ces conditions, faute pour la société d'établir la disparition de ces marchandises, l'administration était fondée à remettre en cause la TVA déduite sur les acquisitions de ces marchandises et à procéder à sa régularisation.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL CHARME HN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL CHARME HN est rejetée.

2

N° 18VE01961


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01961
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-07-03 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Procédure de taxation. Procédure de rectification (ou redressement).


Composition du Tribunal
Président : Mme BESSON-LEDEY
Rapporteur ?: M. Fabrice MET
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : CABINET NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-18;18ve01961 ?
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