Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 17 avril 2018 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de délivrance d'une carte de séjour temporaire, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être renvoyé.
Par un jugement n° 1905965 du 20 décembre 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 décembre 2020, M. B..., représenté par Me D..., avocat, demande à la cour :
1° d'annuler le jugement attaqué ;
2° d'annuler l'arrêté attaqué ;
3° d'enjoindre au préfet des Hauts-de Seine de lui délivrer une carte de résident algérien sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, également sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'Etat l la somme de 2 000 euros, à verser à Me D..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. B... soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- le jugement n'est pas suffisamment motivé ;
- il est entaché de défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- il est entaché de dénaturation des pièces du dossier ;
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- elle méconnaît les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle doit être annulée par la voie de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de cette convention ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle doit être annulée par la voie de l'exception d'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
- elle doit être annulée par la voie de l'exception d'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les observations de Me D..., pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien, a sollicité un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Il relève appel du jugement du 20 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 avril 2018 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il résulte des termes mêmes du jugement attaqué, notamment de son point 6 que le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments invoqués par l'intéressé, a suffisamment précisé les motifs pour lesquels il a estimé que le préfet des Hauts-de-Seine n'a ni méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ni commis une erreur manifeste d'appréciation, en indiquant notamment que " si M. B... fait état de l'insuffisance des soins en Algérie au regard de son état de santé, il ne produit pas d'éléments permettant le cas échéant de remettre en cause l'avis du collège des médecins ". Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement entrepris serait irrégulier, faute d'une motivation suffisante, doit être écarté.
3. En deuxième lieu, si le requérant soutient que le jugement attaqué est entaché de défaut d'examen réel et sérieux de sa situation et de dénaturation des pièces du dossier, ces moyens, qui concernent le bien-fondé du jugement attaqué, ne sont pas de nature à mettre en cause sa régularité. Ils doivent, dès lors, être écartés.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre de ces stipulations, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'intégration et de l'immigration (OFII), que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait pour celui-ci un défaut de prise en charge médicale en Algérie. Lorsque le défaut de prise en charge médicale risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'intéressé, l'autorité administrative ne peut refuser le certificat de résidence algérien sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause en Algérie. Si de telles possibilités existent mais que l'intéressé fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment au coût du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie.
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de titre de séjour que lui avait présentée M. B..., le préfet des Hauts-de-Seine a considéré que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, l'Algérie, il pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. M. B... fait valoir, d'une part, qu'un seul des trois médicaments par lesquels est traitée sa pathologie est disponible en Algérie. Par cette affirmation ni développée ni étayée, M. B... ne conteste toutefois pas valablement que son traitement est disponible dans ce pays, comme l'ont estimé successivement l'Office français de l'immigration et de l'intégration dans son avis du 17 avril 2018 et le préfet dans son arrêté du même jour. M. B... fait également valoir, d'autre part, que s'il retournait en Algérie, il ne pourrait pas effectivement accéder à ce traitement compte-tenu de son indigence et de ce qu'il ne dispose d'aucun soutien familial sur place pour pallier sa perte d'autonomie due à l'hémiplégie et à l'aphasie dont il est atteint, alors qu'il bénéficie en France du soutien matériel de sa tante aide-soignante, qui l'héberge à son domicile. Il indique à cet effet que sa mère est décédée et que, si son père et son frère résident en Algérie, le premier est atteint d'une pathologie invalidante qui l'empêche de prendre en charge une tierce personne tandis et le second est atteint d'une " hémopathie chronique sérieuse ". Il ressort toutefois des pièces du dossier que, si M. B... produit de très nombreuses pièces relatives à son état de santé, lequel n'est pas contesté par le préfet, il ne se prévaut, s'agissant de la disponibilité des soins en Algérie, que d'un seul certificat médical très peu circonstancié, qui se borne à énoncer que son état de santé est " incompatible, en l'état, avec le retour dans son pays d'origine ". Les pièces du dossier n'établissent pas plus que l'état de santé de son frère résidant en Algérie ne lui permettrait pas de le prendre en charge, ni que sa tante résidant en France lui apporterait un soutien déterminant, au-delà du simple hébergement. Il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que les stipulations précitées ont été méconnues ou que le préfet aurait commis une erreur d'appréciation en en faisant application.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; (...) ".
7. M. B... se prévaut d'être entré en France en 2015 où son accident est survenu l'année suivante. Il indique vivre dans ce pays avec sa tante qui l'héberge, lui apporte des soins quotidiens, et avec laquelle il a ainsi noué des liens intenses à travers l'épreuve du handicap, alors que son père et son frère résident en Algérie. Il précise encore avoir construit une relation de confiance précieuse avec le personnel soignant qui le suit. Ce faisant, M B..., célibataire, ne conteste pas ne pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans, attaches dont il n'établit pas, d'ailleurs, qu'elles se limiteraient à son père et son frère. Par suite, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision attaquée et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas illégale, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français qui assortit ce refus serait dépourvue de base légale.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ". Le moyen titré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt.
10. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs exposés au point 7 du présent arrêt.
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations n'étant pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, il est irrecevable.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
12. Il résulte de ce qui précède que M. B... ne soutient pas valablement que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, n'est pas fondée et doit être écartée.
13. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Si M. B... soutient que son éloignement impliquerait qu'il soit exposé à un traitement inhumain ou dégradant, il ne démontre pas que cet éloignement serait susceptible d'avoir, par lui-même, de telles conséquences, alors que, comme il a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ne pourrait pas bénéficier d'un traitement médical approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
14. L'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le délai de départ de trente jours, doit être écartée pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 12 du présent arrêt.
15. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. _ L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ". Les dispositions de l'article L. 511-1 laissent, de façon générale, un délai de trente jours pour le départ volontaire de l'étranger qui fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le délai de départ volontaire soit prolongé, le cas échéant, d'une durée appropriée pour les étrangers dont la situation particulière le nécessiterait.
16. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ait fait état devant le préfet des Hauts-de-Seine, à l'occasion du dépôt ou de l'instruction de sa demande de renouvellement de titre de séjour, de circonstances particulières propres à justifier une prolongation du délai de départ volontaire. S'il se prévaut de ce qu'il est nécessaire de récupérer son dossier médical auprès de tous les praticiens qui le suivent et de ce qu'un départ dans le délai fixé ne lui permettrait pas de quitter le territoire français dignement, il ne justifie pas, par ces seules circonstances, qu'un délai supérieur à trente jours aurait dû lui être accordé.
17. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 du présent arrêt, la décision fixant le délai de départ volontaire n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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20VE03344