Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2018 par lequel le préfet des Yvelines lui a refusé un titre de séjour au titre de l'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays dont il a la nationalité comme pays de renvoi, d'enjoindre au préfet des Yvelines de réexaminer sa situation sous autorisation provisoire de séjour et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1808611 du 14 janvier 2019, le tribunal administratif de Versailles a annulé, en toutes ses dispositions, cet arrêté, a enjoint au préfet des Yvelines de réexaminer la demande de titre de séjour de l'intéressé dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, de le munir immédiatement, dans cette attente, d'une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 février 2019, le préfet des Yvelines demande à la cour d'annuler ce jugement.
Il soutient que :
- la décision du 22 décembre 2015 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a octroyé à M. B... le bénéfice de la protection subsidiaire a été déclarée nulle et non avenue par une nouvelle décision de la Cour nationale du droit d'asile du 10 février 2017 ; dès lors, en raison du retrait de la protection subsidiaire, c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il avait commis une erreur de fait en refusant de délivrer une carte de séjour temporaire à l'intéressé ;
- la signataire, Mme Nancy Renaud, conseillère d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer et directrice des migrations, est compétente pour prendre l'arrêté litigieux en vertu d'un arrêté du 2 octobre 2018, régulièrement publié le 3 octobre 2018, par lequel le préfet des Yvelines lui a consenti une délégation de signature ;
- l'arrêté en cause est suffisamment motivé au regard de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le droit de l'intéressé d'être entendu a été satisfait lors du dépôt de sa demande puisqu'il a été conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour, ce droit n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français prise en conséquence du refus de titre de séjour ; en outre, il n'allègue pas sérieusement qu'il aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il aurait été empêché de présenter ses observations ;
- d'une part, l'arrêté litigieux a été pris conformément aux dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, il est en situation de compétence liée s'attachant aux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile et, par une décision du 10 février 2017, cette dernière a déclaré nulle et non avenue sa décision du 22 décembre 2015 lui accordant la protection subsidiaire, pour fraude ;
- il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation, ni de droit au regard de la situation personnelle de M. B....
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Albertini a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant soudanais né le 10 février 1985, a sollicité, le 22 septembre 2014, la délivrance d'un titre de séjour en application des articles L. 313-13 1° et L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à savoir au titre respectivement de l'octroi de la protection subsidiaire et de la reconnaissance du statut de réfugié. Le préfet des Yvelines, a, par un arrêté du 20 novembre 2018, rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du pays dont il a la nationalité. Le préfet des Yvelines relève appel du jugement du 14 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 20 novembre 2018, lui a enjoint de réexaminer la demande de titre de séjour de l'intéressé dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, de le munir immédiatement dans cette attente d'une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Aux termes de l'article L. 712-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " l'office peut (...) mettre fin à tout moment de sa propre initiative ou à la demande de l'autorité administratif, au bénéfice de la protection subsidiaire lorsque : (...) 2° La décision d'octroi de cette protection a résulté d'une fraude. ". Aux termes de l'article L. 712-4 dudit code : " Dans les cas prévus aux 1° et 2° de l'article L. 712-3, lorsque l'octroi de la protection subsidiaire résulte d'une décision de la Cour nationale du droit d'asile ou du Conseil d'Etat, la juridiction peut être saisie par l'office ou par le ministre chargé de l'asile en vue de mettre fin à la protection subsidiaire. Les modalités de cette procédure sont fixées par décret en Conseil d'Etat. ". Aux termes de l'article R. 562-2 du code précité : " La Cour nationale du droit d'asile peut être saisie d'un recours en révision dans les cas prévus aux articles L. 511-9 et L. 512-4. // Le recours est exercé dans le délai de deux mois après la constatation des faits de nature à justifier l'exclusion du statut de réfugié ou du bénéfice de la protection subsidiaire ou à caractériser une fraude. ".
3. Aux termes du 1° de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit : // 1° A l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 (...). ". Aux termes du 8° de l'article L. 314-11 dudit code : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) / (...) / 8° A l'étranger reconnu réfugié (...). ".
4. Pour annuler l'arrêté du préfet des Yvelines du 20 novembre 2018, les premiers juges ont estimé que le préfet avait méconnu les dispositions de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'intéressé avait produit une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 décembre 2015 lui octroyant le bénéfice de la protection subsidiaire et qu'en lui refusant la délivrance d'une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " au motif que sa demande de protection subsidiaire a été rejetée, il avait commis une erreur de droit. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'en dépit de l'octroi par la décision du 22 décembre 2015 par la Cour nationale du droit d'asile du bénéfice de la protection subsidiaire, la Cour nationale du droit d'asile a, par une décision du 10 février 2017, admis le recours en révision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, a déclaré nulle et non avenue sa décision du 22 décembre 2015 précitée et a rejeté le recours de M. B... enregistré le 3 avril 2015, dirigé contre la décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides en date du 23 février 2015 rejetant sa demande d'asile. Dans ces conditions, l'arrêté du préfet des Yvelines du 20 novembre 2018 n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 313-13 ni celles de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté en litige.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Versailles.
Sur la légalité de l'arrêté du 20 novembre 2018 :
6. En premier lieu, l'arrêté du 20 novembre 2018 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de départ volontaire de 30 jours et désignation du pays dont il a la nationalité comme pays de renvoi a été pris par Mme Nancy Renaud, conseillère d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer et directrice des migrations, qui bénéficiait d'une délégation de signature du préfet des Yvelines en vertu de l'arrêté n° 78-2018-10-02-005 du 2 octobre 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture des Yvelines le 3 octobre 2018, à l'effet de signer, toutes matières ressortissant à leurs attributions respectives, tous arrêtés, décisions, documents et correspondances relevant des attributions du ministère de l'intérieur, de l'administration du département. Le moyen ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.
7. En deuxième lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions administratives individuelles défavorables qui constituent une mesure de police, doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". L'arrêté en litige comporte les considérations de droit applicables, en visant, en particulier, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les considérations de fait qui en constituent le fondement. En effet, la décision mentionne la décision du 10 février 2017 de la Cour nationale du droit d'asile ayant rejeté la demande d'asile de l'intéressé. Le préfet considère, après examen, que M. B... ne remplit pas les conditions. L'arrêté fait ensuite état, contrairement aux allégations du requérant, d'une prise en compte des éléments de la vie familiale de l'intéressé, notamment relatifs au fait qu'il n'a pas d'enfant et qu'il est veuf, en relevant que celui-ci ne fait valoir aucune atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. Enfin, l'arrêté litigieux précise que M. B... n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit, par suite, être écarté. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré du défaut d'examen particulier.
8. En troisième lieu, M. B... soutient que la décision attaquée méconnaît le principe du contradictoire en se prévalant des dispositions des articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration et des stipulations du paragraphe 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Ce dernier énonce dans son paragraphe 2, que : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ". Il ressort des pièces du dossier que M. B... se borne à avancer que le principe du contradictoire a été méconnu en ne faisant état d'aucun élément d'information ou d'argument et en n'assortissant pas ce moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Ce moyen ne peut donc qu'être écarté.
9. En quatrième lieu, M. B... soutient que l'arrêté du 20 novembre 2018 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il porte une atteinte grave à sa situation personnelle ou familiale, d'une erreur de droit et qu'il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ressort des pièces du dossier que le préfet a fait état de la situation personnelle et familiale de M. B... en mentionnant qu'il est sans enfant et veuf. Dans ces conditions et puisque M. B... se borne à soutenir un tel moyen, sans produire aucune pièce de nature à démontrer son insertion sur le territoire français ou l'intensité des liens qu'il y aurait noués, le préfet des Yvelines n'a pas, en prenant l'arrêté du 20 novembre 2018, porté une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. Ces moyens ne peuvent donc, dès lors, qu'être écartés.
10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Yvelines est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 20 novembre 2018.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1808611 du 14 janvier 2019 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
N° 19VE00460 5