Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé 9 place Hoche a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 27 juillet 2017 par lequel le maire de la commune de Versailles a rejeté la demande de permis de construire présentée en son nom par la société SOCAGI en qualité de syndic, en vue de l'installation d'un ascenseur à structure métallique dans la cour de l'immeuble, et d'enjoindre au maire de la commune de Versailles de délivrer le permis de construire sollicité.
Par une ordonnance n° 1706761 du 30 avril 2018, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Par un arrêt n°18VE02167 du 4 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé l'ordonnance n° 1706761 du tribunal administratif de Versailles du 30 avril 2018 et a rejeté la demande présentée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé 9 place Hoche.
Par une décision n° 438247 du 22 juillet 2021, le Conseil d'État statuant au contentieux a, sur pourvoi du syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé 9 place Hoche, annulé l'arrêt n°18VE02167 du 4 décembre 2019 de la cour administrative d'appel de Versailles en ses articles 2 à 4 et renvoyé l'affaire devant cette juridiction.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire récapitulatif, enregistrés le 11 juin 2018 et le 14 mars 2019 sous le n°18VE02761 et, après cassation et renvoi, par un mémoire enregistré sous le n°21VE02183 le 27 septembre 2021, le syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche, représenté par Me Taron, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Versailles de délivrer le permis de construire demandé dans le délai d'un mois et sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Versailles le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté de refus du permis de construire n'a pas été notifié avec l'avis de l'architecte des bâtiments de France et ne précisait pas les voies et délais de recours applicables ;
- le président du conseil syndical avait saisi le préfet de région d'un recours dès le 11 août 2017 auquel il a été répondu le 12 octobre 2017, c'est donc à tort que le tribunal a jugé que ce recours n'avait pas été exercé ;
- l'article 3 du plan de sauvegarde et de mise en valeur ajoute, illégalement, des conditions plus strictes que celles prévues à l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme en rendant impossible toute évolution même minime du bâti ;
- l'article SA 9 du plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) méconnait les obligations posées en matière d'accessibilité aux personnes handicapées et est obsolète au regard des impératifs d'accessibilité ;
- en interdisant les constructions nouvelles pour les immeubles sis place Hoche, l'article SA 9 est en contradiction avec les objectifs du plan de sauvegarde et de mise en valeur, qui vise le maintien de la population et l'amélioration de sa qualité de vie, et édicte une interdiction générale et absolue au regard de la surdensité des immeubles autour de la place Hoche ;
- il méconnaît les articles L. 313-1 et R. 313-3 du code de l'urbanisme en l'absence d'inventaire des éléments du patrimoine concernant la place Hoche, l'immeuble sis 9 place Hoche n'étant pas énuméré ;
- il crée une rupture d'égalité en ce que la zone sous-SA, concernant les carrés Saint-Louis, n'est pas concernée par les obligations qu'il fixe ;
- il est fait une inexacte application de l'article SA 9 du PSMV dès lors que l'ascenseur n'est pas adossé à l'immeuble et ne constitue pas une emprise au sol au sens de l'article R. 420-1 du code de l'urbanisme ;
- le refus en litige méconnaît les articles R. 111-5 et R. 111-19-7 à 11 du code de la construction et de l'habitation.
Par trois mémoires en défense, enregistrés le 1er mars et le 3 avril 2019, puis le 1er juillet 2022, la commune de Versailles, représentée par Me Alonso-Garcia, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du syndicat requérant la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code du patrimoine ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... ;
- les conclusions de Mme Bobko, rapporteur public ;
- les observations de Me Taron, pour le SDC 9 place Hoche et de Me Guarino pour la commune de Versailles.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté en date du 27 juillet 2017, le maire de Versailles a refusé de délivrer au syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche à Versailles, dans le périmètre du plan de sauvegarde et de mise en valeur de la commune un permis de construire en vue de l'installation d'un ascenseur dans la cour de l'immeuble. Par une ordonnance en date du 30 avril 2018, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté au motif que, faute d'avoir été précédée d'un recours effectué auprès du préfet de région à l'encontre de l'avis de l'architecte des bâtiments de France, elle était entachée d'une irrecevabilité manifeste. Par un arrêt du 4 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé cette ordonnance et rejeté la demande du syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche à Versailles dirigée contre l'arrêté du 27 juillet 2017. Par une décision du 22 juillet 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé les articles 2 à 4 de cet arrêt, sans remettre en cause son article 1er procédant à l'annulation de l'ordonnance du 30 avril 2018. Il y a donc lieu, pour la cour, de statuer immédiatement sur la demande du syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche.
2. Aux termes de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme : " Le plan de sauvegarde et de mise en valeur peut en outre comporter l'indication des immeubles ou parties intérieures ou extérieures d'immeubles : a) dont la démolition, l'enlèvement ou l'altération sont interdits et dont la modification est soumise à des conditions spéciales ; (...). ". Aux termes de l'article 3 du plan de sauvegarde et de mise en valeur de Versailles : " 3) Immeubles ou parties d'immeubles à conserver dont la démolition, l'enlèvement, la modification ou l'altération sont interdits : La conservation de ces immeubles est impérative ; par suite, tous travaux effectués sur un immeuble ne peuvent avoir pour but que la restitution de l'immeuble dans son état primitif. ".
3. Il résulte des termes mêmes des dispositions de cet article 3 qu'elles interdisent la modification des immeubles ou parties d'immeubles identifiés comme étant à conserver. En autorisant la seule réalisation, sur ces immeubles, de travaux en vue de la restitution dans leur état primitif ou dans un état antérieur connu compatible avec leur état primitif, elles ne sauraient être regardées comme permettant la modification de ces immeubles en se bornant à la soumettre à des conditions spéciales. Par suite, le syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche est fondé à soutenir, d'une part, que les dispositions de l'article 3 du règlement du plan de sauvegarde et de mise en valeur de la commune de Versailles méconnaissent l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme et que le maire de Versailles a entaché l'arrêté en cause d'une illégalité en se fondant sur la méconnaissance de l'article 3 du plan de sauvegarde et de mise en valeur de la commune.
4. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le maire de la commune de Versailles s'est également fondé sur le motif tiré de la méconnaissance de l'article 9 SA de ce même plan.
5. Aux termes de l'article R. 420 du code de l'urbanisme : " L'emprise au sol au sens du présent livre est la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus. (...) ". Aux termes de l'article SA 9 du plan de sauvegarde et de mise en valeur : " L'emprise au sol, lorsqu'elle n'est pas imposée, ne doit pas excéder 75 % de la superficie de l'îlot de propriété. L'emprise au sol des bâtiments sur les parcelles, de très petites dimensions, et presque complètement bâties, pourra être totale, à des fins de salubrité ou de développement d'activité. Le couvrement de ces espaces libres sera réalisé en rez-de-chaussée seulement ; il devra restituer, pour le 1er étage, une terrasse-jardin et respecter l'Article 11 "Constructions Existantes ; Percements". En sous-zone SA : sans objet. "
6. En premier lieu, en l'absence de prescriptions particulières dans le document d'urbanisme précisant la portée de cette notion sauf pour les surplombs, l'emprise au sol s'entend, en principe, comme la projection verticale du volume de la construction, tous débords inclus et sans se limiter aux bâtiments ou plus généralement aux édifices clos et couverts. En sont toutefois exclus les terrasses et voies d'accès ne présentant aucune élévation par rapport au niveau du sol.
7. Il résulte de l'instruction que pour refuser la délivrance du permis de construire, le maire de Versailles s'est également fondé sur le motif tiré de la méconnaissance de l'article SA 9 du plan de sauvegarde et de mise en valeur, en ce qu'il limite l'emprise au sol à 75% de la superficie de l'îlot de propriété, soit 370,5 mètres carrés sur l'îlot en cause, et que l'emprise au sol existante est d'environ 430 mètres carrés au 9 place Hoche, alors que le projet en cause a pour effet de créer 7 mètres carrés d'emprise au sol supplémentaire.
8. Si le syndicat des copropriétaires soutient que le projet d'ascenseur ne constitue pas une construction au sens de l'article R. 420 du code de l'urbanisme et qu'il n'est pas adossé à l'immeuble au sens littéral du terme, il ressort des pièces du dossier, et de ses propres écritures, que le projet d'ascenseur dans la cour intérieure de l'immeuble se présente comme une construction maçonnée, s'appuyant sur l'immeuble, d'une largeur d'un mètre et nécessitant un agrandissement des paliers existants. Il constitue donc bien une construction, avec une emprise au sol de 7 mètres carrés qui n'est pas contestée. Le moyen tiré de l'erreur de droit commise sur ce point par le maire de la commune de Versailles doit, par suite, être écarté.
9. En deuxième lieu, la circonstance que l'autorité administrative n'a pas mentionné l'immeuble sis 9 place Hoche au nombre des éléments du patrimoine devant être protégés au titre de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme, est sans incidence sur la légalité de l'article SA 9 du plan de sauvegarde et de mise en valeur, dès lors que cette énumération n'est que facultative. Par ailleurs, l'article SA 9 prévoit que le seuil de 75% ne concerne pas les cas dans lesquels l'emprise au sol est imposée. Ainsi, l'emprise au sol des bâtiments sur les parcelles de très petites dimensions et presque complètement bâties pourra être totale à des fins de salubrité ou de développement d'activité. Dans ces conditions, le syndicat des copropriétaires n'est pas fondé à soutenir que l'article SA 9 édicterait une règle générale et absolue au regard du dépassement des coefficients d'emprise en sol des immeubles sis place Hoche, en méconnaissance de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme rendant impossible toute construction. Le moyen doit dès lors être écarté.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme : " I.- Un plan de sauvegarde et de mise en valeur peut être établi sur tout ou partie du site patrimonial remarquable créé en application du titre III du livre VI du code du patrimoine. Sur le périmètre qu'il recouvre, il tient lieu de plan local d'urbanisme ". Le plan de sauvegarde et de mise en valeur de Versailles vise à " Protéger et favoriser la réhabilitation de groupements de constructions formant des ensembles qui possèdent en eux-mêmes, soit un attrait particulier, soit un intérêt historique incontestable et qui constituent enfin un accompagnement des monuments de haute qualité dont le château constitue le pôle le plus important, et d'un intérêt exceptionnel ". Il peut, à ce titre, réglementer l'emprise au sol pour plusieurs immeubles afin de protéger les éléments d'architecture et de décoration, les immeubles par nature ou les effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure, situés à l'extérieur ou à l'intérieur d'un immeuble. Par suite, l'article SA 9 du plan de sauvegarde et de mise en valeur de Versailles ne méconnait pas les objectifs ainsi fixés par le même plan.
11. La circonstance que l'article SA 9 du plan de sauvegarde et de mise en valeur prévoit une sous-zone SA' au sein de laquelle la limitation d'emprise au sol rappelée au point 5 ne s'applique pas ne constitue pas non plus une rupture d'égalité, dès lors que cette zone correspond à une zone géographique qui est celle des Carrés Saint-Louis, présentant des caractéristiques architecturales distinctes de celles de la zone SA, et répond à des objectifs et caractéristiques propres déterminés par le plan de sauvegarde. Par suite, le moyen tiré de ce que l'article SA 9 constituerait une rupture d'égalité devant les charges publiques doit être écarté.
12. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 632-1 du code de l'urbanisme : " Dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable, sont soumis à une autorisation préalable
les travaux susceptibles de modifier l'état des parties extérieures des immeubles bâtis, y compris
du second œuvre, ou des immeubles non bâtis. Sont également soumis à une autorisation préalable les travaux susceptibles de modifier l'état des éléments d'architecture et de décoration, immeubles par nature ou effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure, au sens des articles 524 et 525 du code civil, lorsque ces éléments, situés à l'extérieur ou à l'intérieur d'un immeuble, sont protégés par le plan de sauvegarde et de mise en valeur [...]. / L'autorisation peut être refusée ou assortie de prescriptions lorsque les travaux sont susceptibles de porter atteinte à la conservation ou à la mise en valeur du site patrimonial remarquable. ", l'article L. 632-2 du code de l'urbanisme subordonnant également la délivrance d'un permis de construire à l'accord de l'architecte des Bâtiments de France, dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable.
13. Il ressort des pièces du dossier que l'architecte des Bâtiments de France s'est fondé sur l'article SA 9 du plan de sauvegarde et de mise en valeur pour motiver son
avis du 13 juillet 2017 défavorable à la délivrance du permis de construire demandé pour le projet en litige, visant à la construction d'un ascenseur. Le maire de Versailles, qui se trouvait en situation de compétence liée, n'avait dès lors pas d'autre choix que de s'opposer à cette délivrance, le moyen tiré de l'application illégale de l'article SA 9 du plan de sauvegarde et de mise en valeur de Versailles devant en tout état de cause être écarté comme inopérant.
14. En cinquième lieu, l'évolution socio-économique du quartier Notre-Dame, marquée par une activité commerciale moindre et une importance accrue de l'habitat résidentiel, ne revêt pas le caractère d'un bouleversement retirant aux dispositions relatives à la zone SA du plan de sauvegarde et de mise en valeur de Versailles son fondement légal. Le moyen tiré de l'abrogation implicite de ces dispositions, qui ne seraient plus adaptées aux circonstances de fait doit donc être écarté.
15. En dernier lieu, si le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé 9 place Hoche soutient que le maire aurait méconnu la législation relative à l'accessibilité, prévue, d'une part, à l'article R. 111-5 du code de la construction et de l'habitat, en tant que l'immeuble comporte plus de trois étages et prévu, d'autre part, au III de l'article R. 111-19-8 du même code, en tant qu'il accueille un cabinet d'avocats c'est-à-dire un établissement recevant du public, classé en 5ème catégorie, ce moyen n'est pas utilement invoqué dès lors que les dispositions invoquées sont applicables à la construction des bâtiments d'habitation nouveaux ainsi qu'aux surélévations de bâtiments d'habitation anciens et aux additions à de tels bâtiments.
16. Il résulte de tout ce qui précède que le maire de la commune de Versailles aurait pris la même décision s'il s'était fondé seulement sur le motif énoncé au point 8. Par suite, la demande du syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche doit être rejetée.
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Versailles, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, le versement de la somme que le syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche la somme demandée par la commune de Versailles sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La demande présentée par le syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche devant le tribunal administratif de Versailles ainsi que ses conclusions présentées en appel devant la cour et sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Versailles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des copropriétaires du 9 place Hoche et à la commune de Versailles.
Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022, à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président de chambre,
Mme Moulin-Zys, première conseillère,
M. Fremont, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 juillet 2022.
L'assesseur le plus ancien,
M.-C. MOULIN-ZYSLe président-rapporteur,
P.-L. A...La greffière,
F. PETIT-GALLAND
La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 21VE02183