Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2018 par lequel le maire de la commune d'Aulnay-sur-Mauldre a refusé de lui délivrer un permis de construire pour la réalisation d'une maison individuelle sur son terrain cadastré section AB nos 72 et 77 situé rue du Val, à Aulnay-sur-Mauldre, d'enjoindre au maire de délivrer, au nom de l'Etat, le certificat de permis tacite prévu par les dispositions de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme ou, à titre subsidiaire, de délivrer le permis de construire sollicité ou, à titre infiniment subsidiaire, de statuer de nouveau sur la demande de permis de construire n° PC07803318A008, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de la commune la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1807869 du 4 novembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 janvier 2020, M. C..., représenté par Me Lalanne, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 20 septembre 2018 par lequel le maire de la commune d'Aulnay-sur-Mauldre a refusé de lui délivrer un permis de construire pour la réalisation d'une maison individuelle sur son terrain cadastré section AB nos 72 et 77 situé rue du Val ;
3°) d'enjoindre au maire de lui délivrer le certificat prévu par les dispositions de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au maire de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre infiniment subsidiaire, d'enjoindre au maire de statuer à nouveau sur sa demande dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en tant qu'il n'a pas répondu aux moyens tirés de l'incompétence négative du maire et de l'absence de réponse dans le délai prévu par le code de l'urbanisme, alors qu'ils ne sont pas inopérants ;
- l'arrêté attaqué emporte retrait du permis de construire tacite né le 13 septembre 2018 ou au plus tard, le 4 octobre 2018 dès lors que le délai d'instruction de son dossier était de deux mois, en l'absence de modification par le maire, et expirait le 12 septembre 2018 à minuit ; l'arrêté étant daté du 20 septembre et déposé dans la boîte aux lettres après le 3 octobre, une décision implicite d'acceptation est née le 13 septembre 2018 ou au plus tard le 4 octobre 2018, à zéro heure ; la décision défavorable reçue a posteriori a procédé à un retrait illégal dès lors qu'elle n'a pas fait l'objet d'une procédure contradictoire, la commune n'étant pas en situation de compétence liée s'agissant du retrait de l'acte ;
- l'arrêté n'a pas respecté le délai de notification d'une décision défavorable ;
- l'arrêté est entaché d'incompétence négative dès lors que le maire s'est cru lié par l'avis du préfet alors que cet avis ne dispense pas le maire de procéder à un examen de la demande et ne le prive pas de sa compétence ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation et se fonde sur un avis du préfet lui-même entaché d'erreur d'appréciation ; la zone est partiellement urbanisée ; le terrain n'est pas dans un compartiment boisé ni très éloigné du centre bourg, ni dans un vaste espace naturel ; il est situé à 450 mètres de la mairie et 350 mètres de l'église ; il s'agit d'une prairie enherbée qui n'a ni vocation forestière ni vocation agricole qui constitue une dent creuse dans une zone urbanisée ; il y a des constructions aux alentours immédiats et il n'a pas été tenu compte de projets récents ; la parcelle est desservie par l'ensemble des réseaux et il s'agit de la zone où la construction reste possible.
Par un mémoire enregistré le 5 août 2020, le maire de la commune d'Aulnay sur Mauldre intervient au soutien de la demande.
Il fait valoir que le secteur est urbanisable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2022, la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
M. C... et le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ont produit respectivement le 7 et le 9 février 2023 des observations en réponse à une mesure supplémentaire d'instruction adressée le 7 février 2023 en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... est propriétaire de deux parcelles cadastrées section AB nos 72 et 77, lot B, situées rue du Val sur la commune d'Aulnay-sur-Mauldre. Il a déposé une demande de permis de construire une maison d'habitation de 80,72 mètres carrés sur ces parcelles le 12 juillet 2018. Un récépissé de dépôt de sa demande faisant état d'un délai d'instruction de 3 mois lui a été remis. Le 12 juillet 2018, le maire a saisi le préfet d'une demande d'avis en vertu des dispositions de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme. Le préfet a émis un avis défavorable à la délivrance d'un permis de construire à M. C... le 4 septembre 2018, au visa des articles L. 111-3 et L. 111-4 du code de l'urbanisme. Par jugement du 4 novembre 2019, dont le requérant fait appel, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort du jugement attaqué qu'il écarte au point 6 le moyen tiré de l'incompétence du maire au regard de la situation de compétence liée dans laquelle il se trouvait eu égard à l'avis défavorable rendu par le préfet. Si M. C... soutient qu'il n'a pas été répondu au moyen tiré de " l'incompétence négative du maire " qui se serait estimé à tort lié par l'avis du préfet, le tribunal y a nécessairement répondu en faisant le constat de la situation de compétence liée de cette autorité. Par ailleurs, et alors au surplus que M. C... n'apporte aucune précision à l'appui de cette branche de son moyen, le tribunal n'était pas tenu de répondre au moyen tiré de l'absence de réponse par le maire dans le délai prévu par le code de l'urbanisme dès lors que cette circonstance ne pouvait qu'être sans incidence sur la légalité de la décision en litige.
Sur le bien- fondé du jugement :
3. Aux termes, d'une part, de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme : " Lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu (...) ". Aux termes de l'article L. 424-2 du code de l'urbanisme : " Le permis est tacitement accordé si aucune décision n'est notifiée au demandeur à l'issue du délai d'instruction. / Un décret en Conseil d'Etat précise les cas dans lesquels un permis tacite ne peut être acquis ". Aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : / (...) / b) Permis de construire (...) tacite (...) ". Aux termes de l'article R. 423-23 de ce code : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / (...) / b) Deux mois pour les demandes (...) de permis de construire portant sur une maison individuelle (...) ".
4. Aux termes d'autre part de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions (...) ". L'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...). ". L'article L. 122-1 du même code dispose que : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 (...) sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Il résulte de ces dispositions que la décision portant retrait d'un permis de construire est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle doit, par suite, être précédée d'une procédure contradictoire, permettant au titulaire de cette décision d'être informé de la mesure qu'il est envisagé de prendre, ainsi que des motifs sur lesquels elle se fonde, et de bénéficier d'un délai suffisant pour présenter ses observations. Toutefois, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. Le respect, par l'autorité administrative compétente, de la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration constitue une garantie pour le titulaire d'une décision de non-opposition à la déclaration préalable que le maire envisage de retirer. La décision de retrait prise par le maire est ainsi illégale s'il ressort de l'ensemble des circonstances de l'espèce que le titulaire de cette décision a été effectivement privé de cette garantie.
5. S'il ressort des pièces du dossier que le récépissé de dépôt d'une demande de permis de construire délivré à M. C... mentionne un délai d'instruction de 3 mois, il n'est pas contesté que l'objet de sa demande était limité à la construction d'une maison individuelle et que, si M. C... a déposé des pièces complémentaires postérieurement au dépôt de sa demande, ce dépôt n'est pas intervenu à la demande de la commune, dans les conditions prévues à l'article R. 423-38 du code de l'urbanisme. En outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la demande de M. C... relevait d'un des cas prévus par le code de l'urbanisme justifiant une prorogation du délai de droit commun de deux mois mentionné à l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme. La circonstance que le préfet a émis un avis conforme défavorable le 4 septembre 2018 sur le fondement de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme, avant l'expiration du délai d'instruction mentionné ci-dessus, ne faisait pas obstacle à ce qu'une décision implicite d'acceptation naisse dans les conditions prévues par les articles R. 424-1 et R. 423-23 du même code. Il suit de là que M. C... est fondé à soutenir que le délai d'instruction de trois mois ne lui était pas opposable et qu'il bénéficiait d'un permis tacite deux mois après le dépôt de sa demande, soit le 12 septembre 2018. Il suit de là également que, par l'arrêté du 20 septembre 2018 refusant la délivrance d'un permis de construire à M. C..., le maire d'Aulnay-sur-Mauldre a nécessairement retiré le permis tacite dont il bénéficiait depuis le 12 septembre 2018, lequel était constitutif d'une décision créatrice de droit au sens des dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration. Ce retrait devait donc être précédé d'une procédure contradictoire en application de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration. La circonstance que le préfet a rendu un avis conforme défavorable au projet, que le maire était tenu de suivre en application de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme précité, est par ailleurs sans incidence sur les conditions dans lesquelles ce dernier devait procéder au retrait du permis tacite né le 12 septembre 2018, le maire n'étant en particulier pas tenu de retirer le permis de construire en litige dès lors qu'il n'a pas été saisi d'une demande en ce sens par un tiers. M. C... n'ayant pas été mis à même de présenter ses observations sur le retrait envisagé, l'arrêté du 20 septembre 2018 a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière et le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de la procédure contradictoire avant de procéder au retrait du permis tacite dont il pouvait se prévaloir. Il y a lieu, par suite, d'examiner, par l'effet dévolutif de l'appel, les moyens soulevés par M. C... en première instance et en appel.
6. Il résulte de ce qui précède que l'arrêté du 20 septembre 2018 par lequel le maire d'Aulnay sur Mauldre a retiré le permis tacite dont bénéficiait M. C... depuis le 12 septembre 2018 est entaché d'une illégalité externe à défaut d'avoir mis à même l'intéressé de présenter préalablement ses observations sur la mesure envisagée. Cette illégalité ayant privé l'intéressé d'une garantie, M. C... apparaît fondé à demander à demander l'annulation de l'arrêté du 20 septembre 2018 pour ce motif.
7. Enfin, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens soulevés par le requérant n'est, en l'état de l'instruction, de nature à fonder l'annulation de l'arrêté en litige.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Versailles du 4 novembre 2019 et celle de l'arrêté du 20 septembre 2018 par lequel le maire d'Aulnay-sur-Mauldre a retiré le permis tacite dont il bénéficiait depuis le 12 septembre 2018.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
9. Aux termes de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme : " en cas de permis tacite ou de non-opposition à un projet ayant fait l'objet d'une déclaration, l'autorité compétente en délivre certificat sur simple demande du demandeur, du déclarant ou de ses ayants droit. ". Il résulte de ce qui précède que M. C... était titulaire d'un permis de construire tacite né le 12 septembre 2018 que le présent arrêt de la cour a pour effet de faire revivre. Il y a lieu, par suite, en application des dispositions précitées et de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au maire de la commune de délivrer à M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt le certificat de permis de construire tacite prévu par les dispositions de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 4 novembre 2019 et l'arrêté du 20 septembre 2018 par lequel le maire d'Aulnay-sur-Mauldre a retiré le permis tacite dont bénéficiait M. C... depuis le 12 septembre 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune d'Aulnay-sur-Mauldre de délivrer à M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt le certificat de permis de construire tacite prévu par les dispositions de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. C... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à la commune d'Aulnay-sur-Mauldre et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience du 16 février 2023, à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président de chambre,
M. Mauny, président assesseur,
Mme Villette, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2023.
Le rapporteur,
O. B...Le président,
P.-L. ALBERTINILa greffière,
S. DIABOUGA
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 20VE00039002