Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I. Par une demande enregistrée sous le numéro 1906183, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler la décision de l'inspectrice du travail de la 11ème section de l'unité de contrôle n° 5 des Hauts-de-Seine du 25 février 2019 accordant l'autorisation de le licencier pour motif économique, et, d'autre part, de refuser l'autorisation de procéder à son licenciement pour ce motif.
II. Par une demande enregistrée sous le numéro 1914828, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler la décision du 4 octobre 2019 par laquelle la ministre du travail a autorisé son licenciement pour motif économique, d'autre part, d'annuler la décision de l'inspectrice du travail de la 11ème section de l'unité de contrôle n° 5 des Hauts-de-Seine du 25 février 2019 par laquelle cette autorité a accordé l'autorisation de le licencier pour motif économique, et, enfin, de refuser l'autorisation de procéder à son licenciement pour motif économique.
Par un jugement nos 1906183-1914828 du 6 mai 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 juin 2021, M. A... B..., représenté par Me Sevenet, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision n° 2018-1229852 du 4 octobre 2019 par laquelle le ministre du travail a autorisé son licenciement pour motif économique ;
3°) d'annuler la décision n° 2018-1229852-5 du 25 février 2019 par laquelle l'inspection du travail des Hauts-de-France a accordé l'autorisation de procéder à son licenciement pour motif économique ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en raison d'une méconnaissance du principe du contradictoire, dès lors qu'il n'a pas eu connaissance des pièces accompagnant le mémoire en défense qui lui a été communiqué le 9 décembre 2019 ;
- le société GFK RTF ne démontre pas que la réorganisation mise en œuvre et la réduction de ses effectifs seraient nécessaires à la sauvegarde de sa compétitivité, dès lors qu'elle ne démontre pas l'émergence d'une nouvelle concurrence menaçant sa compétitivité sur le secteur français de son activité, qu'elle ne fournit aucun élément objectif concernant la situation de ses concurrents sur le marché français, que la seule baisse du chiffre d'affaires ou des parts de marché dans un secteur en mutation ne saurait caractériser à elle seule une menace pour la compétitivité de l'entreprise alors que la marge opérationnelle dégagée par GFK RTF est largement positive et que le résultat d'exploitation est en nette augmentation depuis 2017, enfin, que la baisse de la marge constatée entre 2015 et 2017 est imputable à des décisions du groupe tendant à augmenter les charges intragroupes ;
- la société GFK RTF ne démontre pas avoir respecté son obligation préalable de recherche de reclassement, laquelle doit être individuelle et personnelle et non consister en la diffusion d'une même liste de postes à tous les salariés concernés ; il n'a pas été recherché si l'ensemble des postes disponibles lui avaient été effectivement proposés ; en outre, il lui a été imposé de se prononcer dans un délai de quinze jours sur les postes de reclassement proposés, qui ont été ouverts à des recrutements extérieurs, alors que la procédure de licenciement a été engagée six mois plus tard et que la notification du licenciement a eu lieu le 5 mars 2019.
Par un mémoire, enregistré le 5 juillet 2021, la société GFK Retail and Technology France SAS, représentée par Me Guertault, avocate, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à la confirmation de la décision du 4 octobre 2019 de la ministre du travail et au rejet des autres demandes de M. B..., à titre plus subsidiaire, à la confirmation de la décision du 25 février 2019 de l'inspectrice du travail et au rejet des autres demandes de M. B..., et, en tout état de cause, à la condamnation de M. B... à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à la mise à la charge de M. B... des dépens.
Elle soutient que :
- à titre principal, les conclusions tendant à demander l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 25 février 2019 et de la décision ministérielle du 4 octobre 2019 sont irrecevables dès lors que l'ensemble des moyens de légalité externe et interne sont exclusivement dirigés contre le jugement ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2023, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, conclut au rejet de la requête.
Il se réfère à ses écritures de première instance ainsi qu'au rapport établi par la contre-enquêtrice de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France dans le cadre de l'instruction du recours hiérarchique de M. B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bonfils,
- et les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B... a été recruté au sein de la société GFK Retail and Technology France (GFK RTF) le 15 février 2005 en qualité de codificateur. M. B... occupait en dernier lieu les fonctions de gestionnaire de panel et bénéficiait d'une protection en qualité de salarié protégé au titre de ses fonctions de membre titulaire du comité d'entreprise et de délégué du personnel suppléant. Un projet de réorganisation de la société GFK RTF, impliquant soixante-quatre suppressions de postes pour motif économique, dont celui de M. B..., a été engagé en 2018. Le 26 avril 2018, la société GFK RTF a conclu avec l'organisation syndicale SICSTI-CFTC un accord collectif majoritaire portant plan de sauvegarde de l'emploi, lequel a été validé par une décision du 30 mai 2018 de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France. Par un courrier du 27 novembre 2018, M. B... a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique, fixé à la date du 10 décembre 2018 et auquel il ne s'est pas présenté. Le 20 décembre 2018, le comité d'entreprise a émis un avis défavorable au licenciement pour motif économique de M. B.... Par une décision du 25 février 2019, en réponse à un courrier de la société GFK RTF du 21 décembre 2018, l'inspectrice du travail de la 11ème section de l'unité de contrôle n° 5 des Hauts-de-Seine a accordé l'autorisation de licencier M. B... pour motif économique. Par un courrier du 23 avril 2019, reçu le 25 avril 2019, M. B... a formé un recours hiérarchique contre cette décision, qui a dans un premier temps été implicitement rejeté avant que, par une décision du 4 octobre 2019, la ministre du travail retire cette décision implicite, annule la décision de l'inspectrice du travail et autorise la société GFK RTF à licencier M. B... pour motif économique. M. B... relève appel du jugement du 6 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux décisions autorisant son licenciement.
Sur la régularité du jugement :
2. Si M. B... soutient ne pas avoir reçu communication des pièces accompagnant le mémoire en défense qui lui a été communiqué le 9 décembre 2019, il ne ressort pas du relevé de l'application Télérecours que le requérant produit à l'appui de son moyen, lequel concerne l'instance n° 1914828, qu'un mémoire lui aurait été transmis le 9 décembre 2019. S'il ressort par ailleurs des autres pièces du dossier que dans le cadre de l'instance n° 1906183, un mémoire en défense a été enregistré pour la société GFK RTS le 20 novembre 2019, lequel a été communiqué le 9 décembre 2019, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que les pièces qui étaient jointes à ce mémoire en défense n'auraient pas été communiquées aux autres parties, en même temps que le mémoire. Ainsi, à la suite de cette communication, le demandeur a produit de nouvelles écritures le 11 décembre suivant, sans faire mention d'une quelconque absence de transmission des pièces jointes. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le jugement aurait été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire ne peut qu'être écarté en tant qu'il manque en fait.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision de la ministre du travail du 4 octobre 2019 :
Quant à la réalité du motif économique :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment : (...) / 3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ; (...) / Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude. / Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce. / Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise peut constituer un motif de licenciement économique à la seule condition que soit établie une menace pour la compétitivité de l'entreprise, laquelle s'apprécie, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, au niveau du secteur d'activité dont relève l'entreprise au sein du groupe.
4. Pour apprécier la réalité des motifs économiques allégués à l'appui d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé présentée par une société qui fait partie d'un groupe, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de contrôler le bien-fondé de ce motif économique en examinant la situation de l'ensemble des entreprises du groupe établies sur le territoire national intervenant dans le même secteur d'activité dans les conditions mentionnées au point précédent et de rechercher si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière. S'il n'appartient pas à l'administration, saisie d'une telle demande, de vérifier le bien-fondé des options de gestion décidées par l'entreprise dans le cadre de sa réorganisation, elle est toutefois tenue de s'assurer du bien-fondé du motif économique invoqué pour justifier le licenciement du salarié protégé par l'examen de la situation de l'ensemble des entreprises du groupe intervenant dans le même secteur d'activité.
5. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 21 décembre 2018, la société GFK RTF a demandé à l'inspecteur du travail des Hauts-de-Seine l'autorisation de licencier M. B... pour motif économique, en raison de l'évolution du secteur des études de marché causée par la digitalisation et l'automatisation du recueil et de l'analyse de données, laquelle a rendu nécessaire une restructuration de son offre dès lors qu'elle était susceptible de menacer sa compétitivité à travers une perte de ses parts de marché, une baisse de son chiffre d'affaires et de ses résultats opérationnels. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de la note d'information destinée au comité d'entreprise qui s'est tenu le 1er février 2018, laquelle repose notamment sur des données objectives extérieures à l'entreprise tel que le rapport Esomar de 2016, établi par l'association internationale des professionnels des études de marché, que le phénomène de digitalisation a rendu nécessaire pour la société GFK RTF l'adoption d'un tournant stratégique consistant en une mutation profonde de l'activité d'études de marché menée sur un mode traditionnel en face à face ou par téléphone, lesquelles sont trop restrictives et nécessitent des délais de réponse trop longs au regard de techniques modernes de recueil de données automatisées et bénéficiant d'investissements en matière d'intelligence artificielle. Ces études ne représentaient plus que moins de 10 % du marché, contre 48 % des dépenses consacrées à des études en ligne et digitales.
6. Si M. B... soutient que la preuve de l'émergence d'une nouvelle concurrence rendant nécessaire la sauvegarde de la compétitivité de la société GFK RTF n'est pas rapportée, il ressort des documents précités ainsi que du rapport du cabinet d'expertise Sextant d'avril 2018, que quatre des cinq acteurs principaux du secteur, dont fait partie le groupe GFK, n'ont pas vu leurs parts de marché croître entre 2014 et 2016, les nouveaux acteurs parvenant à capter l'essentiel de la légère croissance existant dans le secteur sur cette période. Ainsi, les pièces produites confirment que le développement de la digitalisation a favorisé l'émergence de nouveaux opérateurs dont le taux de croissance entre 2016 et 2021 a été estimé à deux chiffres alors que celui des opérateurs traditionnels était estimé négatif, pour une croissance du secteur globalement en déclin depuis les années 2000. L'accord collectif d'entreprise conclu le 26 avril 2018 fait état d'un chiffre d'affaires au niveau du groupe en baisse de 6 % entre 2016 et 2017 en raison de la désaffection de certains clients eu égard à la proposition de recueil de données de la société, pour des pertes de parts de marché de la société GFK RTF depuis plusieurs années en contradiction avec la tendance du marché français du panel.
7. Les conséquences de ces mutations sur les indicateurs économiques et financiers ont été constatées tant au niveau de la société GFK RTF que des deux autres sociétés du groupe auquel elle appartient et qui sont situées sur le territoire français, les sociétés GFK IFR et GFK ISL CRF, lesquelles évoluent sur le même secteur d'activité et dont les résultats doivent par conséquent être pris en compte pour apprécier la menace pour la compétitivité. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des pièces du dossier notamment un résultat opérationnel ajusté en baisse de 9 % en 2017 pour les sociétés du groupe opérant en France, la consultation sur la situation économique et financière de la société GFK RTF pour l'année 2018, produite par le requérant, confirmant en outre une dégradation généralisée au niveau de la société. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que les comptes analytiques combinés des trois entités du groupe GFK opérant en France dans le secteur des études de marché mettent en évidence, entre les exercices 2015 et 2018, des baisses de 33 % des ventes externes, de 13 % des ventes locales, pour un AOP de - 34 %, et une baisse de chiffre d'affaires de 11 % en cumulé entre 2015 et 2017. Si M. B... soutient que la société GFK RTF n'apporte pas de preuves suffisamment complètes et objectives de la menace pesant sur la compétitivité de son activité, il ne contredit pas sérieusement les données comptables établies par un cabinet d'audit et produites au dossier, ni les différents constats d'institutions indépendantes dont il est fait état aux points 5 et 6.
8. Enfin, le requérant ne peut utilement soutenir que la baisse de la marge opérationnelle entre 2015 et 2017 serait imputable à des décisions du groupe ayant conduit à augmenter les charges intragroupes dès lors qu'il n'appartient pas à l'administration de contrôler les choix de gestion fait par l'employeur. Au surplus, si comme le soutient M. B..., il ressort des conclusions du rapport Sextant que les performances économiques s'expliquent par l'alourdissement des charges intragroupes, d'une part, cette explication ne vaut que pour partie, la baisse du chiffre d'affaires expliquant pour moitié le recul de la marge opérationnelle, d'autre part, cette analyse ne porte que sur les résultats de la société GFK RTF, et non sur la situation des trois entités du groupe opérant en France, l'expertise concluant que la dynamique commerciale constitue le principal enjeu pour la société GFK RTF. Dans ces conditions, en considérant que la société GFK RTF démontrait l'existence d'une menace pour sa compétitivité pesant sur le secteur des études de marché, la ministre du travail n'a pas commis d'erreur d'appréciation.
Quant à l'obligation de reclassement :
9. Aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. / Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. / L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises. ". Aux termes de l'article D. 1233-2-1 du même code : " I. - Pour l'application de l'article L. 1233-4, l'employeur adresse des offres de reclassement de manière personnalisée ou communique la liste des offres disponibles aux salariés, et le cas échéant l'actualisation de celle-ci, par tout moyen permettant de conférer date certaine. / II. - Ces offres écrites précisent : / a) L'intitulé du poste et son descriptif ; / b) Le nom de l'employeur ; / c) La nature du contrat de travail ; / d) La localisation du poste ; / e) Le niveau de rémunération ; / f) La classification du poste. / III. - En cas de diffusion d'une liste des offres de reclassement interne, celle-ci comprend les postes disponibles situés sur le territoire national dans l'entreprise et les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie. / La liste précise les critères de départage entre salariés en cas de candidatures multiples sur un même poste, ainsi que le délai dont dispose le salarié pour présenter sa candidature écrite. / Ce délai ne peut être inférieur à quinze jours francs à compter de la publication de la liste, sauf lorsque l'entreprise fait l'objet d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire. / Dans les entreprises en redressement ou liquidation judiciaire, ce délai ne peut être inférieur à quatre jours francs à compter de la publication de la liste. / L'absence de candidature écrite du salarié à l'issue du délai mentionné au deuxième alinéa vaut refus des offres ".
10. Pour apprécier si l'employeur a satisfait à son obligation de recherche de reclassement, l'autorité administrative doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié sur le territoire national, d'une part, au sein de l'entreprise, d'autre part, dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.
11. Il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 12 mars 2018, la responsable juridique et sociale du groupe GFK a adressé à l'ensemble des salariés de la société GFK RTF une première liste des postes disponibles pour un reclassement, dans laquelle figuraient cinq postes de non cadre au sein de la société GFK RTF, dont quatre postes de chargé de clientèle et un poste de chargé de clientèle sénior. Par deux courriers électroniques ultérieurs, diffusés les 17 et 29 mai 2018, les salariés de la société ont été informés de la mise à jour de cette liste, notamment par la création de deux postes supplémentaires de non cadre au sein de la société GFK RTF, soit sept postes de non cadre au total, dont quatre postes de chargés de clientèle et trois postes de chargé de clientèle sénior. Si M. B... produit un courrier du 4 juin 2018 par lequel la directrice des ressources humaines de la société GFK RTF a adressé à l'un de ses collègues une liste des postes à pourvoir, il n'établit pas ainsi qu'il n'aurait pas eu accès aux postes disponibles qui ont été diffusés par les trois courriers précités, ni qu'il n'aurait pas été informé de l'ensemble des postes disponibles au moment de la mise en œuvre à son endroit de la procédure de reclassement. A cet égard, il ressort du courrier du 11 décembre 2018 de la directrice des ressources humaines de la société que la liste des postes alors disponibles pour le reclassement de M. B... lui a de nouveau été communiquée à cette date, avec un délai de réponse de quinze jours, lequel est conforme aux dispositions de l'article D. 1233-2-1 du code du travail précité, nonobstant le fait que le licenciement de M. B... a été effectivement prononcé ultérieurement. Il est constant que l'intéressé n'a pas répondu à cette proposition de reclassement. Dans ces conditions, dès lors que la procédure de reclassement a été respectée à son égard, M. B... ne peut utilement invoquer le fait que certains de ces postes ouverts au reclassement interne auraient été pourvus par le biais de recrutements extérieurs, à supposer même que cette circonstance soit établie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par la société GFK RTF de son obligation de reclasser M. B... doit être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 4 octobre 2019 par laquelle la ministre du travail a autorisé son licenciement pour motif économique.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 25 février 2019 :
13. Il est constant que la décision de la ministre du travail du 4 octobre 2019 a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 25 février 2019. Dès lors que le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation de la décision du 4 octobre 2019, celles tendant à l'annulation de la décision du 25 février 2019 sont privées d'objet. Dès lors, il n'y a plus lieu d'y statuer.
14. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la société GFK RTF, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande à ce titre. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement à la société GFK RTF d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, en l'absence de dépens exposés dans la présente instance, les conclusions présentées à ce titre par la société GFK RTF ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 25 février 2019.
Article 2 : M. B... versera à la société GFK RTF la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et à la société GFK Retail and Technology France.
Copie en sera adressée au directeur régional interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Le Gars, présidente,
Mme Pham, première conseillère,
Mme Bonfils, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2023.
La rapporteure,
M-G. BONFILS
La présidente,
A-C. LE GARS
La greffière,
V. MALAGOLI
La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 21VE01695