Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une ordonnance n° 1906029 du 1er avril 2019, le président de la 1ère section du tribunal administratif de Paris a, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, transmis au tribunal administratif de Versailles, la requête, enregistrée le 28 mars 2019, de M. B....
Par cette requête M. B... a demandé au tribunal de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.
Par un jugement n° 1902541 du 8 juin 2021, le tribunal administratif Versailles a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à concurrence du dégrèvement prononcé, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 août 2021, M. B..., représenté par Me Loue, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il lui est défavorable ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.
Il soutient que :
- la proposition de rectification qui lui a été adressée à titre personnel, qu'il n'a jamais reçue, ne lui a pas été régulièrement notifiée ; le service ne justifie par ailleurs pas que la société aurait effectivement reçu une proposition de rectification ;
- les sommes réintégrées dans le résultat de l'EURL Versailles EBG, à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet pour les exercices clos en 2012 et 2013, sont restées investies dans l'entreprise et ne relèvent pas du champ d'application du 1° de l'article du 109-1 du code général des impôts ;
- l'administration a méconnu sa propre doctrine, exprimée notamment par la réponse Denais du 7 janvier 1954 et la réponse Billiémaz du 28 octobre 1955 qui précisent que les bénéfices correspondant aux redressements opérés par l'administration ne constituent des revenus mobiliers imposables que s'ils ont été distribués, c'est-à-dire dans la mesure où ils ne sont pas demeurés investis dans la société ;
- l'administration n'apporte pas la preuve de l'appréhension effective éventuelle par des associés ;
- les pénalités doivent être déchargées par voie de conséquence ;
Par un mémoire en défense enregistré le 28 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Danielian,
- et les conclusions de M. Illouz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue d'une vérification de sa comptabilité l'EURL Versailles EGB, exerçant une activité de prestations de rénovation d'entreprises du bâtiment, et dont M. B... est gérant et associé unique, s'est vue notifier, après reconstitution de son chiffre d'affaires et selon la procédure d'évaluation d'office du fait d'une opposition à contrôle fiscal, des rehaussements d'impôt sur les sociétés, pour lequel elle avait opté lors de sa constitution, au titre des exercices clos 2012 et 2013 à raison de recettes non déclarées. Tirant les conséquences de ce contrôle, le service a notifié à M. B..., en sa qualité de seul maître de l'affaire, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012 et 2013 à raison de revenus réputés distribués, résultant des bénéfices reconstitués, sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. M. B... fait appel du jugement du 8 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. / (...) ".
3. En cas de contestation sur ce point, il incombe à l'administration fiscale d'établir qu'une telle notification a été régulièrement adressée au contribuable et, lorsque le pli contenant cette notification a été renvoyé par le service postal au service expéditeur, de justifier de la régularité des opérations de présentation à l'adresse du destinataire. La preuve qui lui incombe ainsi peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes figurant sur les documents, le cas échéant électroniques, remis à l'expéditeur conformément à la règlementation postale soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal d'un avis de passage prévenant le destinataire de ce que le pli est à sa disposition au bureau de poste. Compte tenu des modalités de présentation des plis recommandés prévues par la réglementation postale, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée la date de vaine présentation du courrier et qui porte, sur l'enveloppe ou l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis.
4. Il n'est pas contesté que le pli recommandé contenant la proposition de rectification du 28 juillet 2015, a été expédié à M. B... au " 10 rue Bernard de Jussieu à Versailles (78000) ". Ni l'administration ni M. B... ne contestent que cette adresse était bien la seule adresse personnelle connue du contribuable lors de l'envoi de ce courrier. Toutefois, le pli est revenu avec la mention " Destinataire inconnu à l'adresse " sans être parvenu à son destinataire, lequel se prévaut d'une erreur des services postaux. Si l'administration fiscale fait valoir que M. B... aurait, à cette date, déménagé sans l'avertir de sa nouvelle adresse, elle se borne à faire valoir qu'il n'a pas souscrit de déclaration pour 2014 et 2015, sans apporter aucun élément tendant à établir l'existence d'un tel changement d'adresse, à cette date, ou que cette absence de distribution serait imputable au requérant. Dans les circonstances particulières de l'espèce, l'administration ne saurait être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que la proposition de rectification aurait été régulièrement notifiée à M. B... qui ne l'a jamais reçue et n'en a par ailleurs pas eu connaissance avant d'en recevoir une copie annexée au rejet de sa réclamation préalable du 23 janvier 2019. Par suite, ce dernier ayant ainsi été privé d'une garantie, est fondé à soutenir que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité et à demander, pour ce motif, la décharge des impositions contestées.
5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles, a rejeté la demande de M. B... tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, restant à sa charge.
Sur les frais d'instance :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1902541 du 8 juin 2021 est annulé.
Article 2 : M. B... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.
Article 3 : L'État versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 23 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Besson-Ledey, présidente de chambre,
Mme Danielian, présidente assesseure,
Mme Liogier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024.
La rapporteure,
I. DanielianLa présidente,
L. Besson-LedeyLa greffière,
A. Audrain-Foulon
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 21VE02357