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07/11/2024 | FRANCE | N°22VE02806

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 5ème chambre, 07 novembre 2024, 22VE02806


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2021 par lequel le préfet des Yvelines a procédé au retrait, pour fraude, du certificat de résidence qui lui avait été délivré pour la période comprise entre le 16 juillet 2020 et le 15 juillet 2030 et d'enjoindre au préfet des Yvelines, à titre principal, de lui restituer le certificat de résidence de dix ans qui lui avait été délivré dans un délai de quinze jours à com

pter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2021 par lequel le préfet des Yvelines a procédé au retrait, pour fraude, du certificat de résidence qui lui avait été délivré pour la période comprise entre le 16 juillet 2020 et le 15 juillet 2030 et d'enjoindre au préfet des Yvelines, à titre principal, de lui restituer le certificat de résidence de dix ans qui lui avait été délivré dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer un certificat de résidence d'une durée d'un an portant la mention " salarié " dans les mêmes conditions de délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans cette attente, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre infiniment subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte.

Par un jugement n° 2110626 du 25 novembre 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 décembre 2022, et un mémoire enregistré le 2 avril 2024, non communiqué, M. B... A..., représenté par Me Meurou, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet des Yvelines, de lui restituer le certificat de résidence de dix ans qui lui avait été délivré dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer un certificat de résidence d'une durée d'un an portant la mention " salarié " dans les mêmes conditions de délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans cette attente, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre infiniment subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a entaché sa décision d'une erreur de droit en s'estimant lié par la décision du tribunal judiciaire et en écartant ses moyens comme inopérants ;

- il a insuffisamment motivé son jugement en s'abstenant d'établir qu'une fraude aurait été commise par l'exposant ;

- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il n'a pas été invité à présenter ses observations préalablement à l'adoption de cette décision de retrait ;

- cet arrêté est insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux ;

- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que la fraude qui lui est imputée n'est pas établie et qu'il ne saurait se voir reprocher la fraude commise par un tiers ;

- il méconnaît l'article 6-5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire, enregistré le 12 mars 2024, le préfet des Yvelines conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Florent a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 25 juillet 1993 à Boufarik (Algérie) et entré en France en 2016, a bénéficié d'un certificat de résidence portant la mention " salarié " valable du 15 avril 2019 jusqu'au 14 avril 2020. Il a demandé le renouvellement de ce titre et a reçu un certificat de résidence valable du 16 juillet 2020 au 15 juillet 2030. Estimant que ce certificat avait été acquis au bénéfice d'une fraude, le préfet des Yvelines a, par un arrêté du 15 octobre 2021, procédé à son retrait. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 25 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent.

A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) " Aux termes de l'article L. 122-2 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. ". Une décision accordant un titre de séjour est par nature une décision créatrice de droits. Par suite, quand bien même cette décision aurait été obtenue par fraude et pourrait ainsi être retirée à tout moment, cette circonstance ne dispense pas l'administration de respecter la procédure contradictoire imposée par les dispositions précitées.

3. Par un courrier du 5 mai 2021, le préfet des Yvelines a fait savoir à M. A... qu'il envisageait de retirer son titre de séjour valable du 16 juillet 2020 au 15 juillet 2030 dès lors qu'au regard " des informations en sa possession, ce titre [lui avait] été délivré indûment ". Toutefois, il résulte de l'instruction que ce courrier a été retourné à la préfecture revêtu de la mention " défaut d'accès ou d'adressage ", alors même qu'il est constant que l'adresse de M. A... n'avait pas changé et que ce dernier s'est vu notifier à la même adresse l'arrêté de retrait contesté. Par suite, le requérant ne peut être regardé comme s'étant vu régulièrement notifier ledit courrier, qui, au demeurant, n'explicite pas pour quel motif plus précisément le titre de séjour en cause ne pouvait être délivré à M. A... et fait état du possible retrait du seul certificat de résidence algérien d'une durée de dix ans alors même que l'arrêté attaqué du 15 octobre 2021 retire également le titre de séjour d'un an délivré au requérant le 15 avril 2019. Il s'ensuit que M. A... est fondé à soutenir que la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration a été méconnue et qu'il a été ainsi privé d'une garantie.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens tirés de l'irrégularité du jugement, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

5. Eu égard au motif d'annulation retenu, il n'y a pas lieu d'enjoindre au préfet des Yvelines de délivrer à M. A... un titre de séjour, ni de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour, l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 2021 ayant pour effet de faire revivre le certificat de résidence d'une durée de dix ans qui lui avait été délivré, mais uniquement de procéder au réexamen de la situation du requérant, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte.

6. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme que le requérant sollicite sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2110626 du 25 novembre 2022 du tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 15 octobre 2021 du préfet des Yvelines est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet des Yvelines.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente,

M. Camenen, président assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.

La rapporteure,

J. FLORENTLa présidente,

C. SIGNERIN-ICRE

La greffière,

V. MALAGOLI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 22VE02806


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE02806
Date de la décision : 07/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Julie FLORENT
Rapporteur public ?: Mme JANICOT
Avocat(s) : MEUROU

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-07;22ve02806 ?
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