Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme I... G..., M. K... G..., agissant en son nom personnel et en qualité de représentant légal de ses fils C... et B... G..., Mme E... G..., agissant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de sa fille A... F... et Mme D... G..., chacun agissant en outre en qualité d'ayant droit de M. H... G..., ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond et le centre hospitalier de Bourges, en répartissant entre les deux établissements la part imputable à chacun dans la survenue du décès de M. H... G..., à leur verser, en leur qualité d'ayants droit de ce dernier, une somme de 15 000 euros, à verser à Mme I... G... une somme de 198 442,59 euros, à Mme D... G... une somme de 35 000 euros, à Mme E... G... une somme de 20 000 euros, à M. K... G... une somme de 20 000 euros et aux jeunes C... G..., B... G... et A... F... une somme de 8 000 euros chacun, en réparation des préjudices résultant du décès de leur époux, père et grand-père, sommes assorties des intérêts au taux légal à compter de la date d'introduction de leur demande.
Par un jugement n° 2000696 du 19 septembre 2022, le tribunal administratif d'Orléans a condamné le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond d'une part et le centre hospitalier de Bourges d'autre part, à verser respectivement à Mme I... G... une somme de 69 538,89 euros, à M. K... G..., Mme E... G... et Mme D... G... une somme de 3 250 euros chacun, à C... et B... G... et A... F... une somme de 2 250 euros chacun, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 17 février 2020.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 novembre 2022 et 6 mars 2024, le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond, représenté par Me Chauplannaz, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, de rejeter les demandes indemnitaires présentées à son encontre par les consorts G... ;
3°) à titre subsidiaire, de limiter la part d'indemnisation mise à sa charge aux sommes de 15 038,55 euros pour Mme G..., 1 040 euros pour chacun des enfants de M. G... et 900 euros pour chacun de ses petits-enfants ;
4°) en tout état de cause, de rejeter l'appel incident formé par les consorts G..., de fixer le point de départ des intérêts légaux à la date de la décision ayant apprécié les responsabilités, les préjudices et leur quantum et de mettre à la charge des consorts G... et du centre hospitalier de Bourges une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- à titre principal, sa responsabilité ne saurait être engagée, dès lors que la perte d'information portant sur l'allergie du patient à la pénicilline n'est due à aucune faute de sa part ; son médecin urgentiste a eu, avec le réanimateur de garde du centre hospitalier de Bourges, un entretien téléphonique au cours duquel cette information a nécessairement été répercutée, compte tenu de la standardisation de la communication entre professionnels de santé dénommée " SAED " applicable depuis le mois d'octobre 2014, qui impose la communication des antécédents du patient ; le double de la fiche récapitulative de prise en charge du patient, sur laquelle était notée son allergie à la pénicilline, a été remis aux agents du SMUR lors du transfert de M. G... ; l'urgence de ce transfert et la très courte prise en charge du patient au sein des urgences du centre hospitalier exposant, ainsi que la discussion téléphonique entre les médecins des deux établissements, expliquent que son médecin urgentiste n'ait pas rédigé de courrier à destination de l'équipe du centre hospitalier de Bourges ; en tout état de cause, un tel courrier n'était pas nécessaire compte tenu de la transmission du double de la fiche récapitulative de prise en charge précitée ;
- l'indemnisation de la CPAM par l'assureur du centre hospitalier de Bourges ainsi que l'offre qu'il a présentée aux consorts G..., démontrent qu'il a reconnu la responsabilité de son assuré dans la survenance du dommage ;
- il n'existe aucun lien de causalité direct et certain entre le décès de M. G... et sa prise en charge au sein de ses services, la perte d'information sur son allergie étant survenue postérieurement à celle-ci ;
- à titre subsidiaire, l'expert avait retenu que l'état antérieur du patient avait concouru à son décès à hauteur de 20% ; la commission de conciliation et d'indemnisation avait retenu une perte de chance de 80% et non une perte de chance totale ; il est demandé à la cour de retenir un taux de perte de chance de 80% et non de 100% ;
- la charge de la réparation imputable au centre hospitalier exposant n'avait été évaluée qu'à 20% par l'expert et la commission de conciliation et d'indemnisation et non à 50% comme l'a retenu le tribunal ; il est demandé à la cour de fixer à 20% la quote-part de réparation lui incombant ; en effet, le centre hospitalier de Bourges a pris en charge M. G... sans prendre les précautions minimales puisque le SMUR est arrivé en possession d'une fiche d'intervention très parcellaire, la feuille d'observations du centre hospitalier exposant aurait été difficile à lire et le médecin du centre hospitalier de Bourges n'a pas rappelé son homologue malgré l'absence de courrier d'adressage ;
- les demandes d'indemnisation des préjudices subis par M. G... seront rejetées ; la demande présentée au titre des souffrances endurées est excessive, ce poste de préjudice n'a été retenu ni par l'expert, ni par la commission de conciliation et d'indemnisation et le patient était profondément sédaté de sorte qu'il n'a pas souffert ; le patient n'a subi aucun préjudice esthétique temporaire, dès lors que son apparence physique n'a pas été altérée et qu'il n'a été vu que par les équipes médicales ; les sommes demandées au titre du préjudice d'affection subi par les proches de la victime sont excessives au regard du référentiel de l'ONIAM ; le préjudice d'accompagnement n'est pas démontré, aucun changement dans le mode de vie des intéressés n'ayant eu lieu le 20 mai 2016 entre 5h55 et 6h28 ; la demande d'indemnisation des frais d'obsèques doit porter sur les frais funéraires au sens strict, doit tenir compte de l'allocation décès versée par la CPAM et ne peut comprendre les frais de construction d'un caveau et de cérémonie religieuse ; le calcul du préjudice économique de Mme G... est incohérent ; le revenu annuel qui doit être pris en compte est le revenu net avant impôt qui s'élève en l'espèce à 7 843 euros ; le barème applicable est celui de la Gazette du Palais paru en 2020 ; la part d'autoconsommation de M. G... devra être fixée à 40% ; il est demandé à la cour de réévaluer le préjudice économique subi par Mme G... aux sommes de 14 453,96 euros pour la période du 20 mai 2016 au 19 septembre 2022 et de 57 536,99 euros pour la période postérieure au jugement attaqué ;
- par suite, la part des indemnisations mises à la charge du centre hospitalier exposant seront évaluées aux sommes de 15 038,55 euros pour Mme G..., 1 040 euros pour chacun des enfants et 900 euros pour chacun des petits-enfants de M. G... ;
- en tout état de cause, ce n'est qu'à compter du 19 septembre 2022, date à laquelle les indemnités allouées aux consorts G... ont été fixées par le tribunal, que ces derniers sont fondés à demander les intérêts légaux.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 décembre 2022 et 15 mars 2024, Mme I... G..., M. K... G..., agissant en son nom personnel et en qualité de représentant légal de ses fils C... et B... G..., Mme E... G..., agissant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de sa fille A... F... et Mme D... G..., chacun agissant en outre en qualité d'ayant droit de M. H... G..., représentés par la SELARL Coubris, Courtois et associés, concluent, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) à titre principal, à la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a retenu la responsabilité des centres hospitaliers de Saint-Amand-Montrond et de Bourges à hauteur de 50% chacun et évalué le taux de perte de chance de survie de M. G... à 100% ;
2°) à titre subsidiaire, à la condamnation du seul centre hospitalier de Bourges à les indemniser des préjudices ayant résulté du décès de M. G... sur la base d'un taux de perte de chance de 100% ;
3°) en tout état de cause, à l'infirmation du jugement attaqué quant aux montants des préjudices retenus et à ce que les centres hospitaliers de Saint-Amand-Montrond et Bourges ou le seul centre hospitalier de Bourges soient condamnés à leur verser, en leur qualité d'ayants droit de M. H... G..., une somme de 15 000 euros, à verser à Mme I... G... une somme totale de 218 407,39 euros, à Mme D... G... une somme de 35 000 euros, à Mme E... G... une somme de 20 000 euros, à M. K... G... une somme de 20 000 euros et aux jeunes C... G..., B... G... et A... F... une somme de 8 000 euros chacun, en réparation des préjudices subis du fait du décès de leur époux, père et grand-père, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du jour de l'introduction de la demande de première instance ;
4°) à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que :
- la responsabilité du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond est engagée dès lors qu'il n'est pas démontré qu'il aurait transmis au centre hospitalier de Bourges l'information relative à l'allergie de M. G... ; si l'existence d'un échange téléphonique entre les équipes médicales des deux centres hospitaliers n'est pas contestée, rien ne prouve que l'allergie du patient a été mentionnée à cette occasion ; cette transmission d'information ne saurait être présumée, au regard notamment de l'outil " SAED ", et la charge de la preuve pèse à cet égard sur le centre hospitalier requérant ; il n'est pas démontré que la fiche récapitulative de prise en charge du patient a été transmise aux agents du SMUR lors du transfert de M. G... ; seule la fiche " observation médicale ", qui ne faisait pas état de son allergie à la pénicilline, l'a été ; le dossier médical du patient a été délivré à sa famille par le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond lui-même ; la rédaction d'un courrier, par le médecin urgentiste du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond à l'attention du centre hospitalier de Bourges, était indispensable compte tenu de son allergie ; la circonstance que le centre hospitalier de Bourges, dont le SMUR n'a pas correctement rempli la fiche d'intervention et dont le médecin de garde en réanimation n'a pas recontacté le médecin urgentiste de Saint-Amand-Montrond, ait reconnu sa propre responsabilité, est sans incidence sur celle du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond ;
- le lien de causalité entre le manquement commis par le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond et le décès de M. G... est certain ;
- l'état antérieur de ce dernier n'a eu aucune incidence ; dès lors, le jugement devra être confirmé en ce qu'il a condamné les deux centres hospitaliers en retenant une part de responsabilité de 50% chacun et un taux de perte de chance de survie de 100% ; si la cour venait à écarter la responsabilité du centre hospitalier appelant, elle devra condamner le centre hospitalier de Bourges à réparer intégralement leurs préjudices ;
- le juge administratif n'est pas tenu par le référentiel d'indemnisation élaboré par l'ONIAM, qui n'est qu'indicatif ;
- par la voie de l'appel incident et provoqué, la cour fera droit à la demande d'indemnisation des préjudices subis par M. G... lui-même et majorera les sommes allouées au titre des préjudices subis par ses ayants droit qui ne permettent pas, en l'état, d'en assurer une réparation intégrale ; M. G... a enduré des souffrances évaluées à 10 000 euros et a subi un préjudice esthétique temporaire évalué à 5 000 euros ; le préjudice d'affection subi par Mme I... G... et par Mme D... G..., laquelle vivait encore au foyer familial, s'élève à 30 000 euros chacune ; le préjudice d'affection subi par les deux autres enfants de la victime et par ses trois petits-enfants doivent être évalués aux sommes respectives de 15 000 et 8 000 euros chacun ; l'épouse et les enfants de M. G... ont subi un préjudice d'accompagnement devant être indemnisé à hauteur de 5 000 euros chacun ; les frais d'obsèques devront être intégralement remboursés, le capital décès versé par la CPAM n'ayant pas à être déduit et la circonstance que le caveau construit contienne deux places n'étant pas de nature à faire obstacle à sa prise en charge intégrale ; le préjudice économique subi par Mme I... G... devra être recalculé sur la base d'une part d'autoconsommation de M. G... de 15% et en faisant application du barème de la Gazette du palais publié le 31 octobre 2022 avec un taux d'actualisation de - 1%, soit une somme totale de 168 607,39 euros ;
- le point de départ des intérêts légaux devra être fixé au 17 février 2020, date d'enregistrement de la demande devant le tribunal administratif.
Par des mémoires, enregistrés les 3 avril 2023 et 5 décembre 2024, le centre hospitalier Jacques Cœur de Bourges, représenté par le cabinet Le Prado-Gilbert, conclut :
1°) au rejet de la requête et des conclusions d'appels incident et provoqué formées par les consorts G... ;
2°) à la réduction de la somme allouée à Mme G... au titre de son préjudice économique.
Il soutient que :
- l'échange téléphonique qui a bien eu lieu entre les praticiens des deux centres hospitaliers a porté uniquement sur la stratégie thérapeutique à adopter pour traiter les problèmes respiratoires du patient ; la question de son allergie à la pénicilline n'a pas été abordée ;
- la fiche récapitulative mentionnant l'allergie du patient n'a pas été remise aux agents du SMUR, seul le document intitulé " observations médicales " l'a été, ainsi que cela ressort du compte-rendu d'hospitalisation établi par le centre hospitalier exposant et ainsi que l'ont considéré l'expert et la CCI ; le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond avait communiqué le dossier médical de M. G... à sa famille dès son décès, et non lors des opérations d'expertise le 17 novembre 2017, de sorte que la communication, dès le 22 septembre 2017, par les consorts G... de ladite fiche récapitulative ne saurait démontrer qu'elle figurait au dossier médical du centre hospitalier exposant ;
- la critique tirée du défaut de courrier du médecin urgentiste du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond est inopérante, le tribunal ne s'étant pas fondé sur ce grief ; en tout état de cause en l'absence de transmission, par téléphone ou par le biais de la fiche récapitulative, de l'information relative à l'allergie du patient, ce courrier aurait dû être rédigé ;
- l'allégation selon laquelle le SMUR aurait nécessairement perdu la fiche récapitulative n'est étayée par aucune pièce du dossier ;
- en raison de sa profonde sédation, il n'est pas établi que M. G... aurait souffert du fait de la dégradation de son état et des soins réalisés ; à titre subsidiaire, eu égard à la brièveté des éventuelles souffrances endurées, l'indemnité sollicitée devra être ramenée à de plus justes proportions ;
- le préjudice esthétique n'est pas justifié dans son principe ; de plus, M. G... avait été intubé en raison de son état initial et indépendamment de l'injection du produit allergique ;
- le préjudice d'affection subi par chacun des proches de la victime a été évalué conformément à la jurisprudence ;
- le préjudice d'accompagnement évoqué n'est pas justifié et n'est, en tout état de cause, pas établi compte tenu de la rapidité du décès de M. G... ;
- c'est à bon droit que le tribunal a limité l'indemnisation des frais d'obsèques à la somme de 7 883,15 euros ;
- la part d'autoconsommation de M. G... aurait dû être évaluée à 40% et non 30% de sorte que le préjudice économique subi par Mme G... devra être réévalué à la baisse par la cour sur la base du barème de la Gazette du Palais 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bahaj,
- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,
- les observations de Me Boughanmi pour le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond et celles de Me Ohlbaum pour les consorts G....
Considérant ce qui suit :
1. M. H... G..., alors âgé de cinquante-six ans, s'est présenté aux urgences du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond le 19 mai 2016 à 19h33 alors qu'il souffrait d'une dyspnée évoluant depuis quinze jours et présentait des signes de bronchite spastique avec décompensation cardiaque. A son arrivée dans l'établissement, il a indiqué être allergique à la pénicilline. En l'absence d'amélioration clinique malgré la mise en place d'un traitement associant aérosols, diurétiques et vasodilatateurs, il a été décidé une intubation orotrachéale, une mise sous ventilation mécanique et une sédation ainsi que le transfert du patient au centre hospitalier de Bourges, qui a été réalisé par une équipe du service mobile d'urgence et de réanimation (SMUR) de Bourges le 20 mai 2016 à 2h30. M. H... G... a été admis à 3h22 au sein du service de réanimation du centre hospitalier de Bourges, où il lui a été prescrit 2g d'amoxicilline/acide-clavulanique toutes les huit heures. A 5h55, M. H... G... a présenté une hypotension artérielle brutale et une bradycardie extrême. N'ayant pu être réanimé, son décès a été constaté le jour même à 6h28. Estimant que la responsabilité des centres hospitaliers de Saint-Amand-Montrond et de Bourges était engagée dans le décès de M. H... G..., Mme I... G..., son épouse, M. K... G..., son fils et Mmes D... et E... G..., ses filles, ont saisi la commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) le 10 juillet 2017 d'une demande d'indemnisation. Après réalisation d'une expertise confiée au professeur J..., anesthésiste-réanimateur, qui a remis son rapport le 16 janvier 2018, la commission a, par un avis du 13 février 2018, retenu une perte de chance d'éviter le décès de M. H... G... de 80% et estimé que la réparation des préjudices en ayant résulté incombait à l'assureur du centre hospitalier de Bourges à hauteur de 60% et à celui du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond à hauteur de 20%. La société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), pour le centre hospitalier de Bourges, a proposé aux consorts G... une indemnité de 22 560 euros et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), substitué à l'assureur du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond, une indemnité de 13 644,58 euros, que les consorts G... ont refusées, les estimant insuffisantes. Après avoir adressé à chacun des centres hospitaliers concernés une demande préalable tendant à l'indemnisation du préjudice d'affection subi par les trois petits-enfants de M. H... G..., les consorts G... ont, par une demande du 17 février 2020, demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond et le centre hospitalier de Bourges à les indemniser des préjudices résultant pour eux du décès de M. H... G....
2. Par un jugement du 19 septembre 2022, le tribunal administratif d'Orléans, évaluant la perte de chance d'éviter le décès de M. H... G... à 100% et estimant que la charge de la réparation incombait aux deux établissements à part égale, a condamné le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond et le centre hospitalier de Bourges, à verser, chacun, respectivement à Mme I... G... une somme de 69 538,89 euros, à M. K... G..., Mme E... G... et Mme D... G... une somme de 3 250 euros chacun, à C... G..., B... G... et A... F... une somme de 2 250 euros chacun, en assortissant ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 17 février 2020. Le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond relève appel de ce jugement en demandant, à titre principal, à être mis hors de cause et, à titre subsidiaire, à ce que le montant des condamnations mises à sa charge soit ramené à de plus justes proportions. Les consorts G... concluent, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, à la condamnation du seul centre hospitalier de Bourges et demandent également, par la voie de l'appel incident et provoqué, à ce que le montant des indemnités accordées par le tribunal administratif soit réévalué. Le centre hospitalier de Bourges conclut au rejet de la requête et de l'appel provoqué formé par les consorts G... à son encontre et demande, par la voie de l'appel incident sur l'appel provoqué des consorts G..., que la somme allouée à Mme I... G... au titre de son préjudice économique soit réduite.
Sur l'appel principal du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond et l'appel incident des consorts G... :
En ce qui concerne la responsabilité du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond :
S'agissant de la faute :
3. Aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. ".
4. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise réalisée le 16 janvier 2018 par le professeur J..., que le décès de M. H... G... est directement lié au choc anaphylactique survenu à la suite de l'injection par voie intraveineuse de deux grammes d'Augmentin, antibiotique composé notamment d'amoxicilline, substance dérivée de la pénicilline à laquelle le patient était allergique. Il résulte également de l'instruction que cette injection a été réalisée au sein du service de réanimation du centre hospitalier de Bourges où M. G..., alors sédaté, venait d'être transféré, alors qu'il avait signalé son allergie au service des urgences du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond où il avait été initialement pris en charge. L'injection litigieuse a ainsi résulté d'une perte d'information engendrée par les échanges tripartites opérés entre le service des urgences du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond, le SMUR de Bourges chargé du transfert et le service de réanimation du centre hospitalier de Bourges.
5. Pour solliciter sa mise hors de cause, le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond soutient que la perte d'information relative à l'allergie de M. G... à la pénicilline n'est due à aucune faute de sa part, dès lors que cette donnée avait été transmise au centre hospitalier de Bourges lors d'un échange téléphonique entre des praticiens des deux établissements ainsi que par l'intermédiaire de la fiche récapitulative de prise en charge remise aux agents du SMUR. L'établissement soutient encore que l'absence de rédaction, par son médecin urgentiste, d'un courrier à destination de son correspondant du centre hospitalier de Bourges ne peut être considérée comme fautive, en raison de la très courte durée de prise en charge du patient au sein de son service et de l'urgence de son transfert vers le second établissement.
6. S'il est tout d'abord constant que, devant l'évolution non favorable de l'état de santé de M. G..., le médecin urgentiste du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond a pris l'attache, par téléphone, du réanimateur de garde du centre hospitalier de Bourges, aucun document produit à l'instance ne permet en revanche d'établir que l'information relative à l'allergie du patient aurait été communiquée à cette occasion. A cet égard, si le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond se prévaut de l'outil de standardisation de la communication orale entre professionnels de santé, élaboré par la Haute autorité de santé et dénommé SAED (Situation Antécédents Evaluation Demande), pour soutenir qu'en application de ces principes, son praticien aurait nécessairement informé son homologue de l'allergie de M. G..., rien ne permet cependant d'établir que ce mode de communication aurait été effectivement respecté en l'espèce.
7. Il résulte ensuite de l'instruction que la prise en charge de M. G... au service des urgences du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond a donné lieu à l'élaboration, d'une part, d'une fiche intitulée " Observation médicale " ne mentionnant pas l'allergie du patient à la pénicilline et, d'autre part, d'une fiche récapitulative de prise en charge faisant état de cette allergie. Si le centre hospitalier requérant soutient avoir transmis ces deux documents au SMUR lors du transfert de M. G..., cette affirmation est cependant contredite par le compte-rendu d'hospitalisation au centre hospitalier de Bourges, lequel indique : " Antécédents / Non connus / Histoire de la maladie / Pas de courrier du CH ST AMAND, double difficile à lire de l'observation médicale du CH ST AMAND. En essayant de reconstituer l'histoire, il semble que (...) ". Les termes mêmes de ce compte-rendu, indiquent que seule la fiche intitulée " Observation médicale " est parvenue au centre hospitalier de Bourges. Ceci est corroboré par l'avis rendu par la CCI le 13 février 2018, qui considère que si " une discussion relative à la transmission d'un document du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond, indiquant l'allergie à la pénicilline " de M. G... a eu lieu en séance, " aucun élément de preuve ne permet d'affirmer qu'il y a eu transmission ". Cet avis doit également être interprété comme considérant que la fiche sur laquelle figurait cette information, à savoir la fiche récapitulative de prise en charge, n'est pas un document ayant vocation à être communiqué. Enfin, il résulte du courrier du directeur de l'hôpital de Saint-Amand-Montrond du 30 août 2016 ainsi que de l'attestation sur l'honneur établie par Mme E... G... le 5 septembre 2022, que les consorts G... ont sollicité, dès le 24 août 2016, la communication du dossier médical de M. G... et que Mme E... G... s'est rendue sur place entre le 1er et le 14 septembre 2016 afin qu'on lui remette le dossier sollicité. Le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'il n'aurait communiqué à la famille le dossier de M. G... que le 17 novembre 2017 et que la production par les consorts G... devant la CCI, dès le 22 septembre 2017, de la fiche récapitulative de prise en charge litigieuse, démontrerait que ce document figurait parmi les pièces constituant le dossier médical du centre hospitalier de Bourges. Il n'est ainsi pas établi que l'établissement requérant aurait averti le centre hospitalier de Bourges de l'allergie de M. G... à la pénicilline au moyen de la fiche précitée.
8. Enfin, il résulte du compte-rendu d'hospitalisation de l'hôpital de Bourges, et est d'ailleurs constant entre les parties, que le médecin urgentiste de l'hôpital de Saint-Amand-Montrond n'a pas rédigé de courrier personnel à l'attention du réanimateur de garde du centre hospitalier de Bourges. Si l'établissement requérant soutient que cette carence ne peut être considérée comme fautive en raison de la très courte durée de prise en charge du patient et de l'urgence de son transfert, il résulte cependant de l'instruction que M. G... a été pris en charge aux urgences de l'hôpital de Saint-Amand-Montrond entre 19h33 le 19 mai 2016 et 2h30 le lendemain, soit durant presque sept heures et que l'urgence de son transfert ne saurait être considérée comme ayant fait obstacle à la rédaction, même très brève, d'un courrier médical communiquant les éléments essentiels de son dossier et, en particulier, son allergie à la pénicilline, médicament pouvant potentiellement lui être administré à son arrivée à l'hôpital de Bourges. Par suite, en s'abstenant de rédiger un tel courrier afin de communiquer cette information capitale au service de réanimation de Bourges, alors que cette donnée n'avait par ailleurs été transmise par aucun autre moyen, le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond a commis une faute de nature à engager sa responsabilité sans qu'importe, à cet égard, la circonstance que l'assureur de l'hôpital de Bourges ait indemnisé la CPAM et ait présenté une offre d'indemnisation aux consorts G....
S'agissant du lien de causalité et de la perte de chance :
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'injection à M. G... d'un antibiotique auquel il était allergique et qui a conduit à son décès est due à la perte d'information relative à cette allergie, à laquelle l'absence de courrier médical précité, a contribué. Le centre hospitalier requérant n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'il n'existerait aucun lien direct et certain entre la faute exposée au point 8 et le décès de M. G....
10. En second lieu, dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.
11. En l'espèce, l'administration d'Augmentin à M. G..., antibiotique auquel il était allergique, a provoqué, ainsi qu'il a été dit précédemment, un choc anaphylactique ayant conduit à son décès. Pour soutenir que cette injection n'est pas à l'origine d'une perte de chance d'éviter le décès de 100%, le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond se prévaut de l'avis de la CCI ayant retenu un taux de perte de chance de 80% et du rapport d'expertise du professeur J... ayant évalué à 20% l'incidence de l'état antérieur de M. G... dans la survenue du dommage. S'il résulte en effet de l'instruction que M. G..., qui était âgé de cinquante-six ans au moment des faits, avait subi une pneumectomie en 2005 en raison d'un cancer du poumon, était en surcharge pondérale et présentait un syndrome métabolique, le professeur J... indique toutefois dans son rapport qu'il " ne présentait pas de maladie pouvant laisser craindre son décès dans l'année ". S'il indique également que " Les comorbidités présentées par le patient ont probablement rendu difficile la réanimation de cet état de choc ", une telle supposition ne saurait suffire pour considérer que l'état antérieur de M. G... a eu une incidence dans la réalisation du dommage alors, au surplus, qu'il n'aurait pas été en état de choc sans l'injection litigieuse. Dans ces conditions, la perte de chance d'éviter le décès de l'intéressé doit être évaluée à 100%.
S'agissant de la part de la réparation incombant au centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond :
12. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du professeur J..., d'une part, que le SMUR de Bourges, qui relève du centre hospitalier de Bourges, n'a pas pris le soin, lors de l'opération de transfert de M. G..., de noter sur sa feuille d'intervention l'ensemble des antécédents principaux du patient, notamment l'allergie litigieuse et, d'autre part, que l'absence de courrier médical aurait dû conduire le réanimateur de l'hôpital de Bourges à recontacter son confrère de Saint-Amand-Montrond pour évoquer le cas de M. G.... Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que les fautes ainsi commises par l'équipe médicale du centre hospitalier de Bourges auraient conduit, dans une proportion plus importante que la faute commise par le centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond, à la réalisation du dommage. Par suite, il n'y a pas lieu de modifier le partage de responsabilité fixé par le tribunal administratif d'Orléans, la part de 50% mise à la charge du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond dans la survenance du décès de M. G... n'étant nullement excessive.
En ce qui concerne les préjudices :
S'agissant des préjudices de M. H... G... :
13. Les consorts G... reprennent en appel, sans les assortir d'aucun élément nouveau, leurs conclusions formulées en première instance au titre des souffrances endurées et du préjudice esthétique subi par M. H... G.... Il y a lieu, dès lors, de rejeter ces conclusions par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif d'Orléans aux points 10 et 11 du jugement attaqué.
S'agissant des préjudices de l'épouse de M. H... G... :
Quant aux préjudices patrimoniaux :
14. En premier lieu, il résulte de l'instruction, notamment des factures de l'entreprise de pompes funèbres des 27 mai 2016 et 28 avril 2017, que Mme G... a réglé la somme de 4 526 euros au titre des " prestations courantes ", la somme de 3 656,08 euros au titre des " prestations complémentaires optionnelles ", la somme de 249,52 euros au titre de la publication dans la presse locale de l'avis de décès de son époux et la somme de 68,40 euros au titre du forfait municipal. Les prestations optionnelles n'étant pas directement liées aux fautes commises par les établissements hospitaliers, il y a lieu d'accorder à Mme G... la seule somme de 4 843,92 euros au titre des frais d'obsèques de son époux. Par ailleurs, sous réserve qu'ils ne soient pas excessifs, les frais de construction d'un monument funéraire, qui contribuent à donner au défunt une sépulture décente, font partie des préjudices susceptibles de donner lieu à réparation. Il résulte de la facture du 28 avril 2017 que les frais de construction d'un monument funéraire se sont élevés, en l'espèce, à 6 022,50 euros, auxquels il convient d'ajouter les frais de gravure pour un montant de 277,50 euros. Toutefois, dès lors que le caveau construit pour M. G... comporte deux places, il y a lieu d'accorder à Mme G..., comme l'a jugé le tribunal, la somme de 3 288,75 euros au titre des frais de construction de monument funéraire. Il en résulte, dès lors que le capital décès versé par la CPAM n'a pas à être déduit de ce poste de préjudice, que l'indemnité de 7 883,15 euros accordée à Mme G... par le tribunal administratif au titre des frais d'obsèques de son époux doit être portée à la somme de 8 132,67 euros.
15. En second lieu, le préjudice économique subi, du fait du décès d'un patient, par les ayants droit appartenant au foyer de celui-ci, est constitué par la perte des revenus de la victime qui étaient consacrés à l'entretien de chacun d'eux, en tenant compte, d'une part et si la demande en est faite, de l'évolution générale des salaires et de leurs augmentations liées à l'ancienneté et aux chances de promotion de la victime jusqu'à l'âge auquel elle aurait été admise à la retraite, d'autre part, du montant, évalué à la date du décès, de leurs propres revenus éventuels, à moins que l'exercice de l'activité professionnelle dont ils proviennent ne soit la conséquence de cet événement, et, enfin, des prestations à caractère indemnitaire susceptibles d'avoir été perçues par les membres survivants du foyer en compensation du préjudice économique qu'ils subissent.
16. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'avis d'impôt sur les revenus de M. et Mme G... pour l'année 2015, que les revenus annuels du foyer étaient issus de la seule perception par M. G... d'une pension d'invalidité et s'élevaient à la somme de 8 714 euros. Pour apprécier le préjudice économique subi par Mme G..., il convient de partir de cette somme, et non du revenu fiscal de référence comme le soutient l'hôpital requérant, et d'en déduire la part de dépenses personnelles de M. G... qui, compte tenu de la présence au foyer d'un seul enfant majeur, doit être estimée à 30%, soit 2 614,20 euros. Du solde ainsi obtenu de 6 099,80 euros, il convient de déduire le montant annuel de la pension de réversion perçue par Mme G... depuis le décès de son époux soit, selon le courrier du groupe Klesia du 30 mai 2018, la somme de 1 859,17 euros. La perte annuelle patrimoniale de Mme G... s'élève donc à la somme de 4 240,63 euros, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal.
17. Pour la période allant du 20 mai 2016, date du décès de M. G..., au 16 janvier 2022, veille de la date à laquelle il aurait atteint l'âge légal de départ à la retraite, soit 2 070 jours, la perte de revenus de Mme G... s'est élevée à la somme de 20 646,38 euros, obtenue après prise en compte des arrérages échus sur cette période, soit 24 050 euros, et déduction du capital décès de 3 403,62 euros perçu par l'intéressée.
18. Pour la période comprise entre le 17 janvier 2022, date à laquelle M. G... aurait atteint l'âge légal de départ à la retraite et le 17 avril 2025, date de mise à disposition du présent arrêt, ainsi que pour la période postérieure au 17 avril 2025, le préjudice économique subi par Mme G... doit être évalué en tenant compte de la pension de retraite à laquelle son mari aurait pu prétendre. Toutefois, en l'état de l'instruction, la cour ne dispose d'aucun élément de nature à lui permettre de calculer ladite pension et, ainsi, d'évaluer le préjudice économique subi par Mme G... sur les périodes postérieures au 17 janvier 2022.
19. Il y a lieu, par suite, d'ordonner avant-dire droit un supplément d'instruction, en demandant à Mme G... d'adresser à la cour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, tout document permettant d'évaluer le montant de la pension à laquelle M. G... aurait pu prétendre, s'il avait fait valoir ses droits à la retraite à compter du 17 janvier 2022. Ces éléments pourront notamment prendre la forme d'une simulation établie par la caisse nationale d'assurance vieillesse.
Quant aux préjudices extra-patrimoniaux :
20. En premier lieu, Mme G... reprend en appel, sans apporter de précisions supplémentaires et pertinentes par rapport à celles qu'elle a déjà fait valoir devant le tribunal administratif, ses conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice d'accompagnement qu'elle aurait subi. Il y a lieu de rejeter ces conclusions par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif d'Orléans au point 17 de son jugement.
21. En second lieu, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'affection subi par Mme G... en le fixant à la somme de 25 000 euros.
S'agissant des préjudices des enfants de M. H... G... :
22. En premier lieu, les enfants de M. G... reprennent en appel, sans apporter de précisions supplémentaires et pertinentes par rapport à celles qu'ils ont déjà fait valoir devant le tribunal administratif, leurs conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice d'accompagnement qu'ils auraient subi. Il y a lieu de rejeter ces conclusions par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif d'Orléans au point 20 de son jugement.
23. En deuxième lieu, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'affection subi par Mme D... G..., qui était âgée de vingt et un ans à la date du décès de M. G..., poursuivait des études de Master 1 et vivait encore au foyer familial, en lui allouant la somme de 15 000 euros, dont la moitié, soit 7 500 euros, sera mise à la charge du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond.
24. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'affection subi par M. K... G... et Mme E... G..., qui étaient respectivement âgés de trente-quatre et trente ans à la date du décès de leur père et avaient constitué leurs propres foyers, en leur allouant à chacun la somme de 11 000 euros, dont la moitié, soit 5 500 euros, sera mise à la charge du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond.
S'agissant des préjudices des petits-enfants de M. H... G... :
25. Dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'affection subi par les petits-enfants de M. G..., les jeunes C... G..., B... G... et A... F..., en portant l'indemnité allouée à chacun d'entre eux par le tribunal administratif à la somme de 6 000 euros, dont la moitié, soit 3 000 euros, sera mise à la charge du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond.
26. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et notamment de ce qui a été dit aux points 18 et 19, que le montant définitif de la condamnation mise à la charge du centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond au profit de Mme I... G... doit être réservé jusqu'en fin d'instance.
S'agissant des intérêts :
27. Les enfants et petits-enfants de M. G... ont droit à ce que les indemnités qui leur sont allouées par le présent arrêt soient assorties des intérêts au taux légal. Mme G... a droit, quant à elle, à ce que les indemnités qui lui seront définitivement allouées en fin d'instance soient également assorties des intérêts au taux légal. Pour les mêmes motifs que ceux retenus par le tribunal administratif d'Orléans aux points 25 et 26 de son jugement, ces intérêts courront, ainsi que les consorts G... le demandent, à compter du 17 février 2020, date d'enregistrement de leur demande de première instance.
Sur les conclusions des consorts G... dirigées contre le centre hospitalier de Bourges et les conclusions du centre hospitalier de Bourges dirigées contre les consorts G... :
28. Dans l'attente de la réception d'une simulation des droits à retraite de M. G... ou de tout autre document équivalent, il y a lieu de réserver jusqu'en fin d'instance lesdites conclusions.
Sur les frais d'instance :
29. Il y a également lieu de réserver les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative jusqu'en fin d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le montant alloué à l'article 3 du jugement n° 2000696 du tribunal administratif d'Orléans du 19 septembre 2022 est porté, concernant D... G..., de la somme de 3 250 euros à la somme de 7 500 euros et concernant K... et E... G... de la somme de 3 250 euros à la somme de 5 500 euros chacun, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 17 février 2020.
Article 2 : Le montant alloué à C... G..., B... G... et A... F... par l'article 5 du jugement n° 2000696 du tribunal administratif d'Orléans du 19 septembre 2022 est porté de la somme de 2 250 euros à la somme de 3 000 euros chacun, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 17 février 2020.
Article 3 : Le jugement n° 2000696 du tribunal administratif d'Orléans du 19 septembre 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Il sera, avant de statuer sur le surplus des conclusions des parties, procédé à un supplément d'instruction tendant à la production, par Mme G..., des éléments mentionnés au point 19 du présent arrêt.
Article 5 : Mme G... devra faire parvenir ces documents au greffe de la cour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 6 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Saint-Amand-Montrond, à Mme I... G..., à M. K... G..., à Mme E... G..., à Mme D... G..., au centre hospitalier de Bourges, à la caisse primaire d'assurance maladie de Loir-et-Cher.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président assesseur,
Mme Bahaj, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.
La rapporteure,
C. Bahaj
La présidente,
C. Signerin-Icre
La greffière,
C. Richard
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 22VE02608